{ "version": "https://jsonfeed.org/version/1.1", "title": "Le dibbouk", "home_page_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/", "feed_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/spip.php?page=feed_json", "language": "fr-FR", "items": [ { "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/la-realite-truquee.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/la-realite-truquee.html", "title": "La r\u00e9alit\u00e9 truqu\u00e9e ", "date_published": "2025-06-25T21:16:05Z", "date_modified": "2025-06-25T21:16:45Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "
 <\/a>\n
<\/a>\nEn 2016, Elon Musk affirmait qu\u2019« \u202fil y a une chance sur des milliards que nous ne vivions pas dans une simulation\u202f » Philip\u202fK.\u202fDick, d\u00e8s 1977, \u00e9voquait une r\u00e9alit\u00e9 manipul\u00e9e par des alt\u00e9rations perceptibles dans nos souvenirs.<\/p>\n Ces id\u00e9es, longtemps confin\u00e9es \u00e0 la philo et \u00e0 la SF, suscitent d\u00e9sormais des r\u00e9flexions s\u00e9rieuses : et si notre monde \u00e9tait un programme, modifiable, repositionnable, voire r\u00e9initialisable\u202f ?<\/strong><\/p>\n C\u2019est ce que soutient un courant actuel, liant la th\u00e9orie de la simulation<\/strong>, la manipulation du temps<\/strong>, et l\u2019effacement myst\u00e9rieux de la Grande Tartarie<\/strong>.<\/p>\n En 2003, Nick\u202fBostrom propose un argument c\u00e9l\u00e8bre : Trois hypoth\u00e8ses :<\/p>\n Bostrom consid\u00e8re cette troisi\u00e8me option comme la plus vraisemblable statistiquement.<\/p>\n Elon Musk ajoute qu’avec l’\u00e9volution rapide des jeux (de Pong<\/em> \u00e0 la VR), nous nous rapprochons d’une simulation indiscernable de la r\u00e9alit\u00e9.<\/p>\n Ce th\u00e8me r\u00e9sonne aussi en litt\u00e9rature\u202f :  <\/p>\n « Nous pourrions \u00eatre dans le r\u00eave d\u2019un r\u00eaveur »<\/em> Philip\u202fK.\u202fDick \u00e9voque un programmeur invisible<\/strong> dans son discours de Metz (1977) :  <\/p>\n Le Mandela Effect<\/strong> d\u00e9signe des souvenirs collectifs erron\u00e9s :<\/p>\n Certains y voient des bugs de simulation<\/strong> ou une mise \u00e0 jour temporelle<\/strong>. Notre m\u00e9moire collective pourrait donc \u00eatre la trace d\u2019une r\u00e9\u00e9criture historique<\/strong>, un patch cosmique<\/strong>.<\/p>\n Des traditions spirituelles v\u00e9hiculent aussi ce th\u00e8me : yugas hindous, changements d\u2019\u00e8res, reset apocalyptique.<\/p>\n La « Tartarie » d\u00e9signait historiquement l\u2019Asie centrale sur les cartes anciennes. 👉 Wikipedia \u2013 Tartarian Empire (conspiracy)<\/a> :contentReference[oaicite:2]{index=2} Le canal Jon\u202fLevi<\/strong> est une r\u00e9f\u00e9rence visuelle pour les passionn\u00e9s : Selon les partisans de Tartaria :<\/p>\n Des b\u00e2timents embl\u00e9matiques (tour Eiffel, cath\u00e9drales) seraient r\u00e9employ\u00e9s en masques technologiques.<\/p>\n Les \u00e9lites auraient dissimul\u00e9 ces savoirs<\/strong>, impos\u00e9 l\u2019\u00e8re des \u00e9nergies fossiles pour affaiblir les populations. La simulation<\/strong> et Tartaria<\/strong> offrent un m\u00eame r\u00e9cit\u202f : la r\u00e9alit\u00e9 peut \u00eatre programm\u00e9e, modifi\u00e9e, effac\u00e9e<\/strong>.<\/p>\n Ces mythes alimentent notre intuition que quelque chose cloche<\/strong> dans notre histoire et nos soci\u00e9t\u00e9s.<\/p>\n « Nous nous racontons des histoires pour vivre. »<\/em> Ils r\u00e9v\u00e8lent notre attrait pour le merveilleux<\/strong>, notre besoin de sens<\/strong> et de contr\u00f4le<\/strong>, m\u00eame s\u2019il est construit sur des hypoth\u00e8ses fragiles.<\/p>\n Et si derri\u00e8re ces mythes, quelqu\u2019un modifiait ou mod\u00e9lisait<\/strong> notre perception du monde ?<\/p>\n Le \"black goo\" oscille entre r\u00e9alit\u00e9 arch\u00e9ologique document\u00e9e et th\u00e9ories conspirationnistes contemporaines, r\u00e9v\u00e9lant une fascinante migration de la fiction vers des syst\u00e8mes de croyance sinc\u00e8res dans le monde anglophone.<\/strong><\/p>\n Cette substance noire myst\u00e9rieuse hante l’imaginaire occidental depuis des mill\u00e9naires, mais sa transformation moderne illustre comment nos soci\u00e9t\u00e9s post-industrielles g\u00e9n\u00e8rent de nouveaux mythes technologiques. Des sarcophages \u00e9gyptiens aux forums conspirationnistes, l’histoire du \"black goo\" dessine une cartographie de nos peurs les plus profondes.<\/p>\n L’analyse la plus rigoureuse du ph\u00e9nom\u00e8ne provient paradoxalement de l’arch\u00e9ologie. En 2020, le British Museum publie une \u00e9tude r\u00e9volutionnaire men\u00e9e par le Dr Kate Fulcher : l’analyse par chromatographie gazeuse-spectrom\u00e9trie de masse de 91 \u00e9chantillons de \"black goo\" \u00e9gyptien<\/strong> pr\u00e9lev\u00e9s sur des sarcophages de la 22\u00e8me dynastie (900-750 av. J.-C.). <\/p>\n Les r\u00e9sultats dissolvent le myst\u00e8re : bitume de la Mer Morte, cire d’abeille (20-40%), r\u00e9sines de Pistacia (10-30%), huiles v\u00e9g\u00e9tales. Aucune propri\u00e9t\u00e9 myst\u00e9rieuse. Cette substance servait \u00e0 \"sceller herm\u00e9tiquement\"<\/strong> les sarcophages, li\u00e9e au culte d’Osiris \"le noir\", dieu de la mort et de la renaissance. Le lien symbolique avec le limon noir fertilisant du Nil ancrait cette mati\u00e8re dans une cosmologie coh\u00e9rente.<\/p>\n Cette d\u00e9couverte scientifique \u00e9claire d’un jour nouveau les r\u00e9f\u00e9rences historiques aux substances noires. Dans la cosmogonie Navajo, le Nuage Noir<\/strong> (Black Cloud) repr\u00e9sente l’\u00catre F\u00e9minin qui rencontre le Nuage Blanc pour cr\u00e9er le Premier Homme dans le Nihodilhil<\/em> - le \"Monde Noir\". Cette tradition orale mill\u00e9naire, document\u00e9e acad\u00e9miquement depuis le 19\u00e8me si\u00e8cle, r\u00e9v\u00e8le une constante anthropologique : les substances noires fonctionnent comme \"m\u00e9diateurs\" r\u00e9solvant les oppositions fondamentales - vie\/mort, cr\u00e9ation\/destruction, lumi\u00e8re\/obscurit\u00e9.<\/p>\n L’hindouisme ancien d\u00e9veloppe une complexit\u00e9 similaire avec le concept de K\u0101la<\/strong>, signifiant \u00e0 la fois \"noir\" et \"temps\/destin\/mort\". La d\u00e9esse Kali incarne cette dualit\u00e9, tandis que les pratiques Aghori utilisent des substances noires dans des rituels tantriques. Le folklore arabe int\u00e8gre les ghouls<\/em> - cr\u00e9atures des d\u00e9serts associ\u00e9es \u00e0 la \"mati\u00e8re noire\" - dans les traditions pr\u00e9-islamiques qui survivront dans les \"Mille et Une Nuits\".<\/p>\n La transformation moderne du concept d\u00e9bute dans les ann\u00e9es 1990 avec deux \u0153uvres de science-fiction majeures. X-Files<\/strong> (1993-2018) introduit le \"black oil\" - virus extraterrestre poss\u00e9dant les humains. La franchise Alien<\/strong> d\u00e9veloppe le Chemical A0-3959X.91-15, pathog\u00e8ne mutag\u00e8ne des myst\u00e9rieux \"Engineers\". Ces repr\u00e9sentations fictionnelles vont progressivement migrer vers des syst\u00e8mes de croyance pr\u00e9sent\u00e9s comme factuels.<\/p>\n Cette migration s’op\u00e8re selon un processus que j’appelle le \"fiction-to-reality pipeline\"<\/strong> : les \u00e9l\u00e9ments narratifs sont r\u00e9interpr\u00e9t\u00e9s comme \"r\u00e9v\u00e9lation d\u00e9guis\u00e9e\", Hollywood \u00e9tant accus\u00e9 de conditionner le public aux \"vraies\" conspirations. Cette dynamique s’acc\u00e9l\u00e8re apr\u00e8s le 11 septembre 2001, dans un contexte de remise en question g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9e des narratifs officiels.<\/p>\n La figure centrale de cette transformation est Harald Kautz-Vella<\/strong>, chimiste allemand autoproclam\u00e9 devenu th\u00e9oricien conspirationniste. Ses conf\u00e9rences internationales d\u00e9veloppent une cosmologie complexe : le black goo \"invasif\" serait arriv\u00e9 sur Terre via des m\u00e9t\u00e9orites il y a 80 000 ans. Cette \"intelligence artificielle extraterrestre\" manipulerait les \u00e9lites mondiales pour pr\u00e9parer une colonisation progressive de l’humanit\u00e9, cr\u00e9ant des \"\u00eatres araign\u00e9es\" hybrides et infiltrant les r\u00e9seaux de pouvoir.<\/p>\n Kautz-Vella distingue soigneusement le black goo \"terrestre\" (b\u00e9n\u00e9fique, li\u00e9 \u00e0 Ga\u00efa) du black goo \"extraterrestre\" (malveillant, instrument de contr\u00f4le). Cette distinction r\u00e9v\u00e8le la sophistication th\u00e9orique de ces syst\u00e8mes de croyance, loin des caricatures habituelles.<\/p>\n L’affaire Max Spiers<\/strong> catalyse la cr\u00e9dibilit\u00e9 du mouvement. Ce th\u00e9oricien conspirationniste britannique, ancien camarade de classe d’Orlando Bloom, meurt myst\u00e9rieusement \u00e0 Varsovie en 2016 apr\u00e8s avoir vomi \"deux litres de liquide noir\"<\/strong>. Son message pr\u00e9monitoire - \"If anything happens to me, investigate\" - transforme sa mort en \u00e9v\u00e9nement fondateur.<\/p>\n L’autopsie r\u00e9v\u00e8le des niveaux \u00e9lev\u00e9s de m\u00e9dicaments, mais les circonstances alimentent les th\u00e9ories. Max Spiers devient le premier \"martyr\" du mouvement black goo, sa mort \"prouvant\" suppos\u00e9ment la dangerosit\u00e9 de ces recherches. Cette dynamique martyrologique structure d\u00e9sormais une partie significative de la communaut\u00e9.<\/p>\n Parall\u00e8lement \u00e9mergent les liens avec la maladie de Morgellons<\/strong> - syndrome controvers\u00e9 caract\u00e9ris\u00e9 par des fibres \u00e9mergent de la peau. Les patients rapportent des \"taches noires\" et huiles dans leurs l\u00e9sions. Dr Ginger Savely et Cara St. Louis d\u00e9veloppent l’hypoth\u00e8se d’une connexion : le black goo serait un vecteur de nanotechnologie auto-assemblante dispers\u00e9e via les \"chemtrails\".<\/p>\n La diffusion contemporaine s’articule autour de plateformes sp\u00e9cialis\u00e9es. Above Top Secret<\/strong> h\u00e9berge les discussions les plus sophistiqu\u00e9es, Reddit assure la diffusion mainstream, TikTok viralise via l’algorithme avec des hashtags comme #blackgoo g\u00e9n\u00e9rant des millions de vues. Cette stratification refl\u00e8te diff\u00e9rents niveaux d’engagement et de sophistication th\u00e9orique.<\/p>\n Les podcasts comme The Higher Side Chats<\/strong> professionnalisent la diffusion, cr\u00e9ant un \u00e9cosyst\u00e8me m\u00e9diatique alternatif avec ses codes et ses vedettes. Les conf\u00e9rences Bases Project<\/strong> institutionnalisent le mouvement dans l’ufologie britannique, tandis que les \u00e9v\u00e9nements spirituels d\u00e9veloppent une dimension \"healing\/deliverance\".<\/p>\n Cette infrastructure num\u00e9rique g\u00e9n\u00e8re une \u00e9conomie de l’attention<\/strong> sp\u00e9cifique : livres, conf\u00e9rences payantes, produits \"d\u00e9tox\", formations. La mon\u00e9tisation influence directement l’\u00e9volution th\u00e9orique, favorisant les narratifs les plus engageants plut\u00f4t que les plus coh\u00e9rents.<\/p>\n L’examen rigoureux des affirmations r\u00e9v\u00e8le un spectre de plausibilit\u00e9. Les substances noires aux propri\u00e9t\u00e9s particuli\u00e8res<\/strong> s’av\u00e8rent scientifiquement document\u00e9es : le graph\u00e8ne oxyde concentr\u00e9 ressemble effectivement \u00e0 une substance visqueuse noire aux propri\u00e9t\u00e9s \u00e9lectriques remarquables. Les biofilms de microorganismes extr\u00eamophiles<\/strong> des sources hydrothermales pr\u00e9sentent des aspects g\u00e9latineux sombres et des capacit\u00e9s de r\u00e9sistance extraordinaires.<\/p>\n Les mat\u00e9riaux programmables<\/strong> constituent une r\u00e9alit\u00e9 technologique : mat\u00e9riaux \u00e0 m\u00e9moire de forme, hydrogels thermoresponsifs, surfaces auto-nettoyantes. Leurs limites sont cependant cruciales : r\u00e9ponses simples \u00e0 des stimuli sp\u00e9cifiques, pas d’intelligence autonome, n\u00e9cessit\u00e9 d’\u00e9nergie externe.<\/p>\n L’auto-r\u00e9plication incontr\u00f4lable<\/strong> reste scientifiquement tr\u00e8s improbable. K. Eric Drexler, pionnier du concept de \"grey goo\", a officiellement r\u00e9tract\u00e9 l’hypoth\u00e8se en 2004. La Royal Society conclut en 2004 que ces machines restent \"trop \u00e9loign\u00e9es dans le futur pour pr\u00e9occuper les r\u00e9gulateurs\". Le consensus scientifique s’oppose fermement aux scenarios catastrophistes.<\/p>\n Les affirmations sur la \"conscience mat\u00e9rielle\"<\/strong> violent les principes physiques \u00e9tablis. Aucun m\u00e9canisme connu ne permet l’\u00e9mergence de conscience dans la mati\u00e8re inerte. La cr\u00e9ation d’hybrides inter-esp\u00e8ces complexes<\/strong> se heurte aux barri\u00e8res g\u00e9n\u00e9tiques fondamentales, tandis que la manipulation g\u00e9n\u00e9tique \u00e0 distance<\/strong> contredit les principes de la biochimie mol\u00e9culaire.<\/p>\n Phase 1 (2000s-2010s)<\/strong> : \u00c9mergence des th\u00e9ories \"r\u00e9elles\" distinctes de la fiction. Les premiers forums sp\u00e9cialis\u00e9s d\u00e9veloppent des interpr\u00e9tations alternatives de la culture populaire.<\/p>\n Phase 2 (2010s-2020s)<\/strong> : Professionnalisation autour de figures comme Harald Kautz-Vella. D\u00e9veloppement d’une infrastructure m\u00e9diatique alternative : podcasts, conf\u00e9rences, publications.<\/p>\n Phase 3 (2020s-pr\u00e9sent)<\/strong> : Int\u00e9gration dans les th\u00e9ories COVID et transhumanistes. Le black goo devient un \u00e9l\u00e9ment des th\u00e9ories sur les vaccins ARNm, la nanotechnologie injectable, les connexions 5G et le contr\u00f4le mental.<\/p>\n Cette \u00e9volution r\u00e9v\u00e8le une adaptation constante aux anxi\u00e9t\u00e9s contemporaines : peur de l’intelligence artificielle, crise environnementale, m\u00e9fiance institutionnelle, qu\u00eate spirituelle hors religions traditionnelles.<\/p>\n Le ph\u00e9nom\u00e8ne black goo fonctionne comme communaut\u00e9 alternative<\/strong> offrant un r\u00e9seau social de soutien pour personnes marginalis\u00e9es. Il propose une qu\u00eate de sens<\/strong> via une explication totalisante dans un monde per\u00e7u comme chaotique. Il constitue une r\u00e9sistance symbolique<\/strong> - opposition aux autorit\u00e9s \u00e9tablies via un narratif contre-h\u00e9g\u00e9monique.<\/p>\n L’analyse sociologique r\u00e9v\u00e8le des facteurs de propagation<\/strong> sp\u00e9cifiques : anxi\u00e9t\u00e9 technologique, crise \u00e9cologique, m\u00e9fiance g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9e. Les \u00e9v\u00e9nements catalyseurs - 11 septembre, crise financi\u00e8re 2008, pand\u00e9mie COVID-19 - cr\u00e9ent des fen\u00eatres d’opportunit\u00e9 pour l’expansion de ces th\u00e9ories.<\/p>\n La circulation virale<\/strong> suit des patterns identifiables : TikTok pour la viralit\u00e9 algorithmique, Telegram pour le partage de \"preuves\", Substack pour la mon\u00e9tisation de contenus longs. Cette infrastructure technique fa\u00e7onne directement l’\u00e9volution th\u00e9orique.<\/p>\n Le mouvement d\u00e9veloppe ses propres \"centres de recherche\"<\/strong>, ses traitements commerciaux<\/strong>, ses r\u00e9seaux de patients<\/strong>. Cette institutionnalisation mime les structures scientifiques l\u00e9gitimes tout en s’en distinguant par l’absence de peer-review et de m\u00e9thodologie rigoureuse.<\/p>\n L’\u00e9mergence de \"sp\u00e9cialistes\"<\/strong> - m\u00e9decins alternatifs, chercheurs autoproclam\u00e9s, th\u00e9rapeutes holistiques - cr\u00e9e une \u00e9conomie parall\u00e8le avec ses dipl\u00f4mes, ses certifications, ses protocoles th\u00e9rapeutiques. Cette professionnalisation augmente la cr\u00e9dibilit\u00e9 per\u00e7ue tout en maintenant l’absence de validation scientifique.<\/p>\n L’\u00e9valuation rigoureuse exige de distinguer les niveaux de cr\u00e9dibilit\u00e9<\/strong>. Les sources acad\u00e9miques (British Museum, publications peer-reviewed) offrent une base factuelle solide. Les recherches techniques (ing\u00e9nierie environnementale, science des mat\u00e9riaux) fournissent un contexte scientifique l\u00e9gitime. Les analyses culturelles acad\u00e9miques \u00e9clairent les dimensions symboliques sans avaliser les affirmations factuelles.<\/p>\n Les sources conspirationnistes<\/strong> doivent \u00eatre document\u00e9es comme ph\u00e9nom\u00e8ne sociologique sans recevoir de validation scientifique. Cette distinction critique \u00e9vite \u00e0 la fois la moquerie simpliste et la l\u00e9gitimation non critique.<\/p>\n La recherche future<\/strong> devrait privil\u00e9gier les analyses sociologiques des facteurs de propagation, l’\u00e9ducation m\u00e9diatique pour d\u00e9velopper l’esprit critique, le dialogue constructif \u00e9vitant la polarisation, et le monitoring de l’\u00e9volution vers d’\u00e9ventuels extr\u00e9mismes.<\/p>\n Le \"black goo\" constitue finalement un r\u00e9v\u00e9lateur sociologique<\/strong> remarquable. Ni simple canular ni v\u00e9rit\u00e9 cach\u00e9e, il illustre comment les soci\u00e9t\u00e9s contemporaines g\u00e9n\u00e8rent des mythologies technologiques face aux transformations acc\u00e9l\u00e9r\u00e9es. Les r\u00e9f\u00e9rences historiques l\u00e9gitimes se m\u00e9langent aux sp\u00e9culations contemporaines, cr\u00e9ant un bricolage conceptuel o\u00f9 coexistent rigueur scientifique et pens\u00e9e magique.<\/p>\n Cette coexistence n’est pas accidentelle. Elle r\u00e9v\u00e8le les zones d’incertitude<\/strong> de nos connaissances actuelles : syst\u00e8mes complexes \u00e9mergents, mat\u00e9riaux bio-hybrides, interfaces biologiques-synth\u00e9tiques. Le black goo prosp\u00e8re dans ces interstices \u00e9pist\u00e9mologiques, proposant des explications simples \u00e0 des ph\u00e9nom\u00e8nes complexes.<\/p>\n Son succ\u00e8s t\u00e9moigne de besoins sociaux non satisfaits<\/strong> : compr\u00e9hension des transformations technologiques, ma\u00eetrise des risques environnementaux, participation aux d\u00e9cisions collectives. Plut\u00f4t que de rejeter ces pr\u00e9occupations, une approche constructive devrait reconna\u00eetre leurs l\u00e9gitimit\u00e9 tout en d\u00e9veloppant des r\u00e9ponses scientifiquement fond\u00e9es.<\/p>\n Le ph\u00e9nom\u00e8ne black goo nous rappelle que la fronti\u00e8re entre science et fiction reste poreuse, que la v\u00e9rit\u00e9 se construit socialement, et que nos anxi\u00e9t\u00e9s contemporaines cherchent constamment de nouvelles formes d’expression. Dans cette perspective, il m\u00e9rite notre attention critique non comme v\u00e9rit\u00e9 alternative, mais comme sympt\u00f4me de notre \u00e9poque.<\/p>\n Sources scientifiques principales :<\/p>\n British Museum - Ancient Egyptian coffins and mystery of ’black goo’\nhttps:\/\/www.britishmuseum.org\/blog\/ancient-egyptian-coffins-and-mystery-black-goo<\/a>\nPMC - Molecular analysis of black coatings from ancient Egyptian coffins\nhttps:\/\/pmc.ncbi.nlm.nih.gov\/articles\/PMC8106298\/<\/a>\nPubMed - Molecular analysis of anointing fluids\nhttps:\/\/pubmed.ncbi.nlm.nih.gov\/33903252\/<\/a><\/p>\n Sources anthropologiques :<\/p>\n Harvard Library - Folklore and Mythology Research Guide\nhttps:\/\/guides.library.harvard.edu\/folk_and_myth<\/a>\nWikipedia - Din\u00e9 Bahane\u02bc (Navajo creation)\nhttps:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Din%C3%A9_Bahane%CA%BC<\/a>\nWikipedia - Comparative mythology\nhttps:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Comparative_mythology<\/a><\/p>\n Analyse sociologique des ph\u00e9nom\u00e8nes conspirationnistes :<\/p>\n Wikipedia - Death of Max Spiers\nhttps:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Death_of_Max_Spiers<\/a>\nNCBI - Morgellons disease research\nhttps:\/\/www.ncbi.nlm.nih.gov\/pmc\/articles\/PMC3257881\/<\/a><\/p>",
        "content_text": " # Le ph\u00e9nom\u00e8ne du \"black goo\" : entre science et fiction **Le \"black goo\" oscille entre r\u00e9alit\u00e9 arch\u00e9ologique document\u00e9e et th\u00e9ories conspirationnistes contemporaines, r\u00e9v\u00e9lant une fascinante migration de la fiction vers des syst\u00e8mes de croyance sinc\u00e8res dans le monde anglophone.** Cette substance noire myst\u00e9rieuse hante l'imaginaire occidental depuis des mill\u00e9naires, mais sa transformation moderne illustre comment nos soci\u00e9t\u00e9s post-industrielles g\u00e9n\u00e8rent de nouveaux mythes technologiques. Des sarcophages \u00e9gyptiens aux forums conspirationnistes, l'histoire du \"black goo\" dessine une cartographie de nos peurs les plus profondes. ## Les racines historiques : quand la science \u00e9claire le mythe L'analyse la plus rigoureuse du ph\u00e9nom\u00e8ne provient paradoxalement de l'arch\u00e9ologie. En 2020, le British Museum publie une \u00e9tude r\u00e9volutionnaire men\u00e9e par le Dr Kate Fulcher : l'analyse par chromatographie gazeuse-spectrom\u00e9trie de masse de 91 \u00e9chantillons de **\"black goo\" \u00e9gyptien** pr\u00e9lev\u00e9s sur des sarcophages de la 22\u00e8me dynastie (900-750 av. J.-C.). Les r\u00e9sultats dissolvent le myst\u00e8re : bitume de la Mer Morte, cire d'abeille (20-40%), r\u00e9sines de Pistacia (10-30%), huiles v\u00e9g\u00e9tales. Aucune propri\u00e9t\u00e9 myst\u00e9rieuse. Cette substance servait \u00e0 **\"sceller herm\u00e9tiquement\"** les sarcophages, li\u00e9e au culte d'Osiris \"le noir\", dieu de la mort et de la renaissance. Le lien symbolique avec le limon noir fertilisant du Nil ancrait cette mati\u00e8re dans une cosmologie coh\u00e9rente. Cette d\u00e9couverte scientifique \u00e9claire d'un jour nouveau les r\u00e9f\u00e9rences historiques aux substances noires. Dans la cosmogonie Navajo, le **Nuage Noir** (Black Cloud) repr\u00e9sente l'\u00catre F\u00e9minin qui rencontre le Nuage Blanc pour cr\u00e9er le Premier Homme dans le *Nihodilhil* - le \"Monde Noir\". Cette tradition orale mill\u00e9naire, document\u00e9e acad\u00e9miquement depuis le 19\u00e8me si\u00e8cle, r\u00e9v\u00e8le une constante anthropologique : les substances noires fonctionnent comme \"m\u00e9diateurs\" r\u00e9solvant les oppositions fondamentales - vie\/mort, cr\u00e9ation\/destruction, lumi\u00e8re\/obscurit\u00e9. L'hindouisme ancien d\u00e9veloppe une complexit\u00e9 similaire avec le concept de **K\u0101la**, signifiant \u00e0 la fois \"noir\" et \"temps\/destin\/mort\". La d\u00e9esse Kali incarne cette dualit\u00e9, tandis que les pratiques Aghori utilisent des substances noires dans des rituels tantriques. Le folklore arabe int\u00e8gre les *ghouls* - cr\u00e9atures des d\u00e9serts associ\u00e9es \u00e0 la \"mati\u00e8re noire\" - dans les traditions pr\u00e9-islamiques qui survivront dans les \"Mille et Une Nuits\". ## L'\u00e9mergence contemporaine : de la fiction \u00e0 la \"r\u00e9alit\u00e9\" La transformation moderne du concept d\u00e9bute dans les ann\u00e9es 1990 avec deux \u0153uvres de science-fiction majeures. **X-Files** (1993-2018) introduit le \"black oil\" - virus extraterrestre poss\u00e9dant les humains. La franchise **Alien** d\u00e9veloppe le Chemical A0-3959X.91-15, pathog\u00e8ne mutag\u00e8ne des myst\u00e9rieux \"Engineers\". Ces repr\u00e9sentations fictionnelles vont progressivement migrer vers des syst\u00e8mes de croyance pr\u00e9sent\u00e9s comme factuels. Cette migration s'op\u00e8re selon un processus que j'appelle le **\"fiction-to-reality pipeline\"** : les \u00e9l\u00e9ments narratifs sont r\u00e9interpr\u00e9t\u00e9s comme \"r\u00e9v\u00e9lation d\u00e9guis\u00e9e\", Hollywood \u00e9tant accus\u00e9 de conditionner le public aux \"vraies\" conspirations. Cette dynamique s'acc\u00e9l\u00e8re apr\u00e8s le 11 septembre 2001, dans un contexte de remise en question g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9e des narratifs officiels. La figure centrale de cette transformation est **Harald Kautz-Vella**, chimiste allemand autoproclam\u00e9 devenu th\u00e9oricien conspirationniste. Ses conf\u00e9rences internationales d\u00e9veloppent une cosmologie complexe : le black goo \"invasif\" serait arriv\u00e9 sur Terre via des m\u00e9t\u00e9orites il y a 80 000 ans. Cette \"intelligence artificielle extraterrestre\" manipulerait les \u00e9lites mondiales pour pr\u00e9parer une colonisation progressive de l'humanit\u00e9, cr\u00e9ant des \"\u00eatres araign\u00e9es\" hybrides et infiltrant les r\u00e9seaux de pouvoir. Kautz-Vella distingue soigneusement le black goo \"terrestre\" (b\u00e9n\u00e9fique, li\u00e9 \u00e0 Ga\u00efa) du black goo \"extraterrestre\" (malveillant, instrument de contr\u00f4le). Cette distinction r\u00e9v\u00e8le la sophistication th\u00e9orique de ces syst\u00e8mes de croyance, loin des caricatures habituelles. ## Le martyr du mouvement et la dynamique testimoniale L'affaire **Max Spiers** catalyse la cr\u00e9dibilit\u00e9 du mouvement. Ce th\u00e9oricien conspirationniste britannique, ancien camarade de classe d'Orlando Bloom, meurt myst\u00e9rieusement \u00e0 Varsovie en 2016 apr\u00e8s avoir vomi **\"deux litres de liquide noir\"**. Son message pr\u00e9monitoire - \"If anything happens to me, investigate\" - transforme sa mort en \u00e9v\u00e9nement fondateur. L'autopsie r\u00e9v\u00e8le des niveaux \u00e9lev\u00e9s de m\u00e9dicaments, mais les circonstances alimentent les th\u00e9ories. Max Spiers devient le premier \"martyr\" du mouvement black goo, sa mort \"prouvant\" suppos\u00e9ment la dangerosit\u00e9 de ces recherches. Cette dynamique martyrologique structure d\u00e9sormais une partie significative de la communaut\u00e9. Parall\u00e8lement \u00e9mergent les liens avec la **maladie de Morgellons** - syndrome controvers\u00e9 caract\u00e9ris\u00e9 par des fibres \u00e9mergent de la peau. Les patients rapportent des \"taches noires\" et huiles dans leurs l\u00e9sions. Dr Ginger Savely et Cara St. Louis d\u00e9veloppent l'hypoth\u00e8se d'une connexion : le black goo serait un vecteur de nanotechnologie auto-assemblante dispers\u00e9e via les \"chemtrails\". ## L'\u00e9cosyst\u00e8me num\u00e9rique et ses dynamiques La diffusion contemporaine s'articule autour de plateformes sp\u00e9cialis\u00e9es. **Above Top Secret** h\u00e9berge les discussions les plus sophistiqu\u00e9es, Reddit assure la diffusion mainstream, TikTok viralise via l'algorithme avec des hashtags comme #blackgoo g\u00e9n\u00e9rant des millions de vues. Cette stratification refl\u00e8te diff\u00e9rents niveaux d'engagement et de sophistication th\u00e9orique. Les podcasts comme **The Higher Side Chats** professionnalisent la diffusion, cr\u00e9ant un \u00e9cosyst\u00e8me m\u00e9diatique alternatif avec ses codes et ses vedettes. Les conf\u00e9rences **Bases Project** institutionnalisent le mouvement dans l'ufologie britannique, tandis que les \u00e9v\u00e9nements spirituels d\u00e9veloppent une dimension \"healing\/deliverance\". Cette infrastructure num\u00e9rique g\u00e9n\u00e8re une **\u00e9conomie de l'attention** sp\u00e9cifique : livres, conf\u00e9rences payantes, produits \"d\u00e9tox\", formations. La mon\u00e9tisation influence directement l'\u00e9volution th\u00e9orique, favorisant les narratifs les plus engageants plut\u00f4t que les plus coh\u00e9rents. ## L'analyse scientifique : distinguer le possible de l'impossible L'examen rigoureux des affirmations r\u00e9v\u00e8le un spectre de plausibilit\u00e9. Les **substances noires aux propri\u00e9t\u00e9s particuli\u00e8res** s'av\u00e8rent scientifiquement document\u00e9es : le graph\u00e8ne oxyde concentr\u00e9 ressemble effectivement \u00e0 une substance visqueuse noire aux propri\u00e9t\u00e9s \u00e9lectriques remarquables. Les **biofilms de microorganismes extr\u00eamophiles** des sources hydrothermales pr\u00e9sentent des aspects g\u00e9latineux sombres et des capacit\u00e9s de r\u00e9sistance extraordinaires. Les **mat\u00e9riaux programmables** constituent une r\u00e9alit\u00e9 technologique : mat\u00e9riaux \u00e0 m\u00e9moire de forme, hydrogels thermoresponsifs, surfaces auto-nettoyantes. Leurs limites sont cependant cruciales : r\u00e9ponses simples \u00e0 des stimuli sp\u00e9cifiques, pas d'intelligence autonome, n\u00e9cessit\u00e9 d'\u00e9nergie externe. L'**auto-r\u00e9plication incontr\u00f4lable** reste scientifiquement tr\u00e8s improbable. K. Eric Drexler, pionnier du concept de \"grey goo\", a officiellement r\u00e9tract\u00e9 l'hypoth\u00e8se en 2004. La Royal Society conclut en 2004 que ces machines restent \"trop \u00e9loign\u00e9es dans le futur pour pr\u00e9occuper les r\u00e9gulateurs\". Le consensus scientifique s'oppose fermement aux scenarios catastrophistes. Les affirmations sur la **\"conscience mat\u00e9rielle\"** violent les principes physiques \u00e9tablis. Aucun m\u00e9canisme connu ne permet l'\u00e9mergence de conscience dans la mati\u00e8re inerte. La **cr\u00e9ation d'hybrides inter-esp\u00e8ces complexes** se heurte aux barri\u00e8res g\u00e9n\u00e9tiques fondamentales, tandis que la **manipulation g\u00e9n\u00e9tique \u00e0 distance** contredit les principes de la biochimie mol\u00e9culaire. ## Chronologie d'une transformation **Phase 1 (2000s-2010s)** : \u00c9mergence des th\u00e9ories \"r\u00e9elles\" distinctes de la fiction. Les premiers forums sp\u00e9cialis\u00e9s d\u00e9veloppent des interpr\u00e9tations alternatives de la culture populaire. **Phase 2 (2010s-2020s)** : Professionnalisation autour de figures comme Harald Kautz-Vella. D\u00e9veloppement d'une infrastructure m\u00e9diatique alternative : podcasts, conf\u00e9rences, publications. **Phase 3 (2020s-pr\u00e9sent)** : Int\u00e9gration dans les th\u00e9ories COVID et transhumanistes. Le black goo devient un \u00e9l\u00e9ment des th\u00e9ories sur les vaccins ARNm, la nanotechnologie injectable, les connexions 5G et le contr\u00f4le mental. Cette \u00e9volution r\u00e9v\u00e8le une adaptation constante aux anxi\u00e9t\u00e9s contemporaines : peur de l'intelligence artificielle, crise environnementale, m\u00e9fiance institutionnelle, qu\u00eate spirituelle hors religions traditionnelles. ## Les dynamiques sociales sous-jacentes Le ph\u00e9nom\u00e8ne black goo fonctionne comme **communaut\u00e9 alternative** offrant un r\u00e9seau social de soutien pour personnes marginalis\u00e9es. Il propose une **qu\u00eate de sens** via une explication totalisante dans un monde per\u00e7u comme chaotique. Il constitue une **r\u00e9sistance symbolique** - opposition aux autorit\u00e9s \u00e9tablies via un narratif contre-h\u00e9g\u00e9monique. L'analyse sociologique r\u00e9v\u00e8le des **facteurs de propagation** sp\u00e9cifiques : anxi\u00e9t\u00e9 technologique, crise \u00e9cologique, m\u00e9fiance g\u00e9n\u00e9ralis\u00e9e. Les \u00e9v\u00e9nements catalyseurs - 11 septembre, crise financi\u00e8re 2008, pand\u00e9mie COVID-19 - cr\u00e9ent des fen\u00eatres d'opportunit\u00e9 pour l'expansion de ces th\u00e9ories. La **circulation virale** suit des patterns identifiables : TikTok pour la viralit\u00e9 algorithmique, Telegram pour le partage de \"preuves\", Substack pour la mon\u00e9tisation de contenus longs. Cette infrastructure technique fa\u00e7onne directement l'\u00e9volution th\u00e9orique. ## L'institutionnalisation progressive Le mouvement d\u00e9veloppe ses propres **\"centres de recherche\"**, ses **traitements commerciaux**, ses **r\u00e9seaux de patients**. Cette institutionnalisation mime les structures scientifiques l\u00e9gitimes tout en s'en distinguant par l'absence de peer-review et de m\u00e9thodologie rigoureuse. L'\u00e9mergence de **\"sp\u00e9cialistes\"** - m\u00e9decins alternatifs, chercheurs autoproclam\u00e9s, th\u00e9rapeutes holistiques - cr\u00e9e une \u00e9conomie parall\u00e8le avec ses dipl\u00f4mes, ses certifications, ses protocoles th\u00e9rapeutiques. Cette professionnalisation augmente la cr\u00e9dibilit\u00e9 per\u00e7ue tout en maintenant l'absence de validation scientifique. ## Recommandations pour une approche critique L'\u00e9valuation rigoureuse exige de **distinguer les niveaux de cr\u00e9dibilit\u00e9**. Les sources acad\u00e9miques (British Museum, publications peer-reviewed) offrent une base factuelle solide. Les recherches techniques (ing\u00e9nierie environnementale, science des mat\u00e9riaux) fournissent un contexte scientifique l\u00e9gitime. Les analyses culturelles acad\u00e9miques \u00e9clairent les dimensions symboliques sans avaliser les affirmations factuelles. Les **sources conspirationnistes** doivent \u00eatre document\u00e9es comme ph\u00e9nom\u00e8ne sociologique sans recevoir de validation scientifique. Cette distinction critique \u00e9vite \u00e0 la fois la moquerie simpliste et la l\u00e9gitimation non critique. La **recherche future** devrait privil\u00e9gier les analyses sociologiques des facteurs de propagation, l'\u00e9ducation m\u00e9diatique pour d\u00e9velopper l'esprit critique, le dialogue constructif \u00e9vitant la polarisation, et le monitoring de l'\u00e9volution vers d'\u00e9ventuels extr\u00e9mismes. ## Conclusion : miroir de nos anxi\u00e9t\u00e9s Le \"black goo\" constitue finalement un **r\u00e9v\u00e9lateur sociologique** remarquable. Ni simple canular ni v\u00e9rit\u00e9 cach\u00e9e, il illustre comment les soci\u00e9t\u00e9s contemporaines g\u00e9n\u00e8rent des mythologies technologiques face aux transformations acc\u00e9l\u00e9r\u00e9es. Les r\u00e9f\u00e9rences historiques l\u00e9gitimes se m\u00e9langent aux sp\u00e9culations contemporaines, cr\u00e9ant un bricolage conceptuel o\u00f9 coexistent rigueur scientifique et pens\u00e9e magique. Cette coexistence n'est pas accidentelle. Elle r\u00e9v\u00e8le les **zones d'incertitude** de nos connaissances actuelles : syst\u00e8mes complexes \u00e9mergents, mat\u00e9riaux bio-hybrides, interfaces biologiques-synth\u00e9tiques. Le black goo prosp\u00e8re dans ces interstices \u00e9pist\u00e9mologiques, proposant des explications simples \u00e0 des ph\u00e9nom\u00e8nes complexes. Son succ\u00e8s t\u00e9moigne de **besoins sociaux non satisfaits** : compr\u00e9hension des transformations technologiques, ma\u00eetrise des risques environnementaux, participation aux d\u00e9cisions collectives. Plut\u00f4t que de rejeter ces pr\u00e9occupations, une approche constructive devrait reconna\u00eetre leurs l\u00e9gitimit\u00e9 tout en d\u00e9veloppant des r\u00e9ponses scientifiquement fond\u00e9es. Le ph\u00e9nom\u00e8ne black goo nous rappelle que la fronti\u00e8re entre science et fiction reste poreuse, que la v\u00e9rit\u00e9 se construit socialement, et que nos anxi\u00e9t\u00e9s contemporaines cherchent constamment de nouvelles formes d'expression. Dans cette perspective, il m\u00e9rite notre attention critique non comme v\u00e9rit\u00e9 alternative, mais comme sympt\u00f4me de notre \u00e9poque. Sources scientifiques principales : British Museum - Ancient Egyptian coffins and mystery of 'black goo' https:\/\/www.britishmuseum.org\/blog\/ancient-egyptian-coffins-and-mystery-black-goo PMC - Molecular analysis of black coatings from ancient Egyptian coffins https:\/\/pmc.ncbi.nlm.nih.gov\/articles\/PMC8106298\/ PubMed - Molecular analysis of anointing fluids https:\/\/pubmed.ncbi.nlm.nih.gov\/33903252\/ Sources anthropologiques : Harvard Library - Folklore and Mythology Research Guide https:\/\/guides.library.harvard.edu\/folk_and_myth Wikipedia - Din\u00e9 Bahane\u02bc (Navajo creation) https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Din%C3%A9_Bahane%CA%BC Wikipedia - Comparative mythology https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Comparative_mythology Analyse sociologique des ph\u00e9nom\u00e8nes conspirationnistes : Wikipedia - Death of Max Spiers https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Death_of_Max_Spiers NCBI - Morgellons disease research https:\/\/www.ncbi.nlm.nih.gov\/pmc\/articles\/PMC3257881\/ ",
        "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/black-goo.webp?1750753217",
        "tags": ["Technologies et Postmodernit\u00e9", "essai", "Black-Goo"]
      }
    
      ,{
        "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/observer-les-mythes-du-quotidien.html",
        "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/observer-les-mythes-du-quotidien.html",
        "title": "Observer les mythes du quotidien ",
        "date_published": "2025-06-21T07:21:44Z",
        "date_modified": "2025-06-21T14:18:46Z",
        "author": {"name": "Patrick Blanchon"},
        "content_html": " Ce  sont les signes, les figures, les gestes qui, sans qu\u2019on les interroge, semblent charg\u00e9s d\u2019un sens plus ancien, plus vaste. Des mythes en mouvement, qui traversent les corps, les images, les voix, sans costume ni \u00e9p\u00e9e.<\/p>\n C\u2019est cela que je cherche \u00e0 capter.<\/p>\n J\u2019ai d\u2019abord pens\u00e9 \u00e0 Carlos Castaneda. \u00c0 ses entretiens initiatiques avec Don Juan, \u00e0 cette id\u00e9e \u00e9trange et lumineuse : nous ne voyons pas le monde tel qu\u2019il est, nous l\u2019assemblons depuis un point pr\u00e9cis de notre perception. Ce point peut bouger. Il suffit de suspendre la parole int\u00e9rieure. D\u2019observer sans chercher. De fr\u00f4ler l\u2019invisible.<\/p>\n « Le monde est l\u00e0 pour \u00eatre saisi, mais non par les mots. »\n-- Don Juan<\/p>\n En pratiquant certains exercices de rupture — marcher dans l\u2019obscurit\u00e9, fixer un d\u00e9tail jusqu\u2019\u00e0 ce qu\u2019il devienne paysage, \u00e9couter ce que dit le silence —, Castaneda nous pousse \u00e0 ressentir les lignes de force cach\u00e9es du r\u00e9el, l\u00e0 o\u00f9 s\u2019impriment les r\u00e9cits anciens. C\u2019est une attention sans interpr\u00e9tation, une lecture \u00e9nerg\u00e9tique du monde, dans laquelle le mythe n\u2019est pas un symbole, mais une force active.<\/p>\n Autre mani\u00e8re de faire surgir les mythes : par le minuscule. Georges Perec, dans ses Tentatives d\u2019\u00e9puisement d\u2019un lieu parisien, observe la place Saint-Sulpice, non pas pour la comprendre, mais pour la vider de son sens trop visible. Il \u00e9num\u00e8re, il attend, il laisse affleurer.<\/p>\n « Ce qui se passe quand il ne se passe rien. »\nLe mythe, ici, n\u2019est pas grandiose. Il se cache dans les bus, les trottoirs, les panneaux d’affichage.<\/p>\n Sophie Calle, elle, prend une valise oubli\u00e9e, une lettre de rupture, un lit d\u2019h\u00f4tel, et elle leur rend leur puissance c\u00e9r\u00e9monielle. Elle transforme le banal en \u00e9nigme. Elle traque l\u2019\u00e9motion comme un chasseur traque la proie, mais sans l\u2019abattre. Elle archive. Elle ritualise. Elle regarde l\u2019ordinaire comme un mythe intime.<\/p>\n Dans Mythologies, Roland Barthes s\u2019amuse des fausses \u00e9vidences. Le bifteck, la DS, le Tour de France : tout devient signe, tout fonctionne comme une croyance. Il d\u00e9crypte les fictions collectives que la soci\u00e9t\u00e9 produit sans le savoir.<\/p>\n C\u2019est une autre mani\u00e8re d\u2019observer : non plus depuis la rue, mais depuis les codes.\nUne lecture savante, mais toujours po\u00e9tique, des micro-l\u00e9gendes modernes.<\/p>\n Annie Ernaux transforme sa vie en miroir du monde social. Joe Brainard dit \"Je me souviens\" pour faire affleurer une m\u00e9moire collective par fragments. Tim Ingold parle de marche, de vent, de chemins pour percevoir le vivant comme un tissu relationnel.<\/p>\n Ces pratiques ont un point commun : elles d\u00e9placent l\u2019acte de voir. Elles rendent lisible ce qui normalement reste en sourdine.<\/p>\n C\u2019est dans cet h\u00e9ritage que s\u2019inscrit le travail de Nicolas Nova, et notamment ses Exercices d\u2019observation. Il y propose une m\u00e9thode souple et ouverte pour entra\u00eener son regard \u00e0 d\u00e9tecter ce qui r\u00e9siste \u00e0 l\u2019habitude :<\/p>\n un objet mal plac\u00e9<\/p>\n un comportement curieux<\/p>\n une phrase \u00e9trange entendue dans la rue<\/p>\n Il ne s\u2019agit pas de comprendre, mais d\u2019accumuler sans jugement. De faire confiance \u00e0 ce qui frappe, m\u00eame l\u00e9g\u00e8rement. De se constituer un carnet de traces, comme un chasseur-cueilleur de mythes contemporains.<\/p>\n Mon ambition est modeste : regarder le monde autrement, chaque jour un peu.\nJe prends des notes. Je photographie. Je ne tire pas de conclusion.\nJe me contente d’accumuler. D\u2019observer ce qui me regarde.<\/p>\n C\u2019est peut-\u00eatre \u00e7a, aujourd\u2019hui, croire encore aux mythes :\nnon pas les r\u00e9p\u00e9ter, mais les rep\u00e9rer dans leurs nouvelles formes, dans leurs nouvelles mati\u00e8res.<\/p>",
        "content_text": " Ce sont les signes, les figures, les gestes qui, sans qu\u2019on les interroge, semblent charg\u00e9s d\u2019un sens plus ancien, plus vaste. Des mythes en mouvement, qui traversent les corps, les images, les voix, sans costume ni \u00e9p\u00e9e. C\u2019est cela que je cherche \u00e0 capter. ### 📍 Castaneda : d\u00e9placer le point d\u2019assemblage J\u2019ai d\u2019abord pens\u00e9 \u00e0 Carlos Castaneda. \u00c0 ses entretiens initiatiques avec Don Juan, \u00e0 cette id\u00e9e \u00e9trange et lumineuse : nous ne voyons pas le monde tel qu\u2019il est, nous l\u2019assemblons depuis un point pr\u00e9cis de notre perception. Ce point peut bouger. Il suffit de suspendre la parole int\u00e9rieure. D\u2019observer sans chercher. De fr\u00f4ler l\u2019invisible. \u00ab Le monde est l\u00e0 pour \u00eatre saisi, mais non par les mots. \u00bb \u2014 Don Juan En pratiquant certains exercices de rupture \u2014 marcher dans l\u2019obscurit\u00e9, fixer un d\u00e9tail jusqu\u2019\u00e0 ce qu\u2019il devienne paysage, \u00e9couter ce que dit le silence \u2014, Castaneda nous pousse \u00e0 ressentir les lignes de force cach\u00e9es du r\u00e9el, l\u00e0 o\u00f9 s\u2019impriment les r\u00e9cits anciens. C\u2019est une attention sans interpr\u00e9tation, une lecture \u00e9nerg\u00e9tique du monde, dans laquelle le mythe n\u2019est pas un symbole, mais une force active. ### 🕳\ufe0f Perec : d\u00e9nombrer l\u2019invisible Autre mani\u00e8re de faire surgir les mythes : par le minuscule. Georges Perec, dans ses Tentatives d\u2019\u00e9puisement d\u2019un lieu parisien, observe la place Saint-Sulpice, non pas pour la comprendre, mais pour la vider de son sens trop visible. Il \u00e9num\u00e8re, il attend, il laisse affleurer. \u00ab Ce qui se passe quand il ne se passe rien. \u00bb Le mythe, ici, n\u2019est pas grandiose. Il se cache dans les bus, les trottoirs, les panneaux d'affichage. ### 🎴 Sophie Calle : l\u2019objet comme trace d\u2019un rituel Sophie Calle, elle, prend une valise oubli\u00e9e, une lettre de rupture, un lit d\u2019h\u00f4tel, et elle leur rend leur puissance c\u00e9r\u00e9monielle. Elle transforme le banal en \u00e9nigme. Elle traque l\u2019\u00e9motion comme un chasseur traque la proie, mais sans l\u2019abattre. Elle archive. Elle ritualise. Elle regarde l\u2019ordinaire comme un mythe intime. ### 🕊\ufe0f Barthes : reconna\u00eetre les nouveaux dieux Dans Mythologies, Roland Barthes s\u2019amuse des fausses \u00e9vidences. Le bifteck, la DS, le Tour de France : tout devient signe, tout fonctionne comme une croyance. Il d\u00e9crypte les fictions collectives que la soci\u00e9t\u00e9 produit sans le savoir. C\u2019est une autre mani\u00e8re d\u2019observer : non plus depuis la rue, mais depuis les codes. Une lecture savante, mais toujours po\u00e9tique, des micro-l\u00e9gendes modernes. ### 📓 Ernaux, Brainard, Ingold\u2026 autres formes d'attention Annie Ernaux transforme sa vie en miroir du monde social. Joe Brainard dit \"Je me souviens\" pour faire affleurer une m\u00e9moire collective par fragments. Tim Ingold parle de marche, de vent, de chemins pour percevoir le vivant comme un tissu relationnel. Ces pratiques ont un point commun : elles d\u00e9placent l\u2019acte de voir. Elles rendent lisible ce qui normalement reste en sourdine. ### 🌍 Nicolas Nova : cartographier les signes faibles C\u2019est dans cet h\u00e9ritage que s\u2019inscrit le travail de Nicolas Nova, et notamment ses Exercices d\u2019observation. Il y propose une m\u00e9thode souple et ouverte pour entra\u00eener son regard \u00e0 d\u00e9tecter ce qui r\u00e9siste \u00e0 l\u2019habitude : un objet mal plac\u00e9 un comportement curieux une phrase \u00e9trange entendue dans la rue Il ne s\u2019agit pas de comprendre, mais d\u2019accumuler sans jugement. De faire confiance \u00e0 ce qui frappe, m\u00eame l\u00e9g\u00e8rement. De se constituer un carnet de traces, comme un chasseur-cueilleur de mythes contemporains. ### 🔎 Conclusion : une d\u00e9rive dans le r\u00e9el Mon ambition est modeste : regarder le monde autrement, chaque jour un peu. Je prends des notes. Je photographie. Je ne tire pas de conclusion. Je me contente d'accumuler. D\u2019observer ce qui me regarde. C\u2019est peut-\u00eatre \u00e7a, aujourd\u2019hui, croire encore aux mythes : non pas les r\u00e9p\u00e9ter, mais les rep\u00e9rer dans leurs nouvelles formes, dans leurs nouvelles mati\u00e8res. ",
        "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/gaudi_19.jpg?1750490500",
        "tags": ["source", "signe"]
      }
    
      ,{
        "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/21-juin-2025.html",
        "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/21-juin-2025.html",
        "title": "Atlantide",
        "date_published": "2025-06-20T22:10:58Z",
        "date_modified": "2025-06-24T09:11:24Z",
        "author": {"name": "Patrick Blanchon"},
        "content_html": " Je crois que la premi\u00e8re fois que j\u2019ai entendu le mot, j\u2019\u00e9tais gamin. Atlantide. C\u2019\u00e9tait \u00e0 l\u2019\u00e9cole, ou peut-\u00eatre \u00e0 la t\u00e9l\u00e9, je ne sais plus. Une \u00eele perdue. Aval\u00e9e par la mer. Une civilisation disparue comme on efface un mot sur une ardoise. Je n\u2019y ai pas pens\u00e9 pendant des ann\u00e9es. Et puis un soir, tard, sur mon t\u00e9l\u00e9phone, dans ce genre d\u2019insomnie o\u00f9 le r\u00e9el devient mou, j\u2019ai vu passer une vid\u00e9o. \u00c7a parlait d\u2019une route sous-marine. Des blocs de calcaire align\u00e9s, pas tr\u00e8s profonds, \u00e0 Bimini. On voyait tr\u00e8s bien les formes. Trop bien peut-\u00eatre. Et la voix, douce, un peu trop calme pour \u00eatre honn\u00eate, murmurait : on ne vous dit pas tout. J\u2019ai regard\u00e9. Puis j\u2019ai regard\u00e9 encore. Et sans m\u2019en rendre compte, je cherchais. Pas des preuves. Autre chose. Je crois que je cherchais \u00e0 croire. Un peu. Pas compl\u00e8tement. Mais juste assez pour que \u00e7a tienne. Comme un fil invisible entre ce monde-ci et un autre, qu\u2019on aurait perdu.<\/p>\n C\u2019est \u00e9trange, la mani\u00e8re dont les r\u00e9cits nous attrapent. On croit qu\u2019on les regarde. Qu\u2019on les choisit. Mais c\u2019est eux qui nous choisissent. Je vis dans un village en Is\u00e8re, tranquille, avec des collines, des nuages bas, et cette lumi\u00e8re de fin d\u2019apr\u00e8s-midi qui a parfois quelque chose d\u2019ind\u00e9cidable. Ici, les maisons sont vieilles, pas toujours belles, mais elles tiennent. Elles racontent. Je marche souvent, surtout quand le monde me p\u00e8se. Et parfois, je regarde les pierres comme si elles avaient des secrets. Comme si elles venaient d\u2019ailleurs. De plus loin que l\u2019histoire. C\u2019est idiot, je sais. Mais il y a des jours o\u00f9 l\u2019on a besoin que les choses racontent plus que ce qu\u2019elles montrent. Des jours o\u00f9 on aimerait qu\u2019un mur soit aussi un vestige.<\/p>\n Atlantide, c\u2019est ce mot qu\u2019on glisse entre deux silences. Ce mot qui revient quand tout le reste s\u2019effondre. On pourrait dire que c\u2019est une fable, une invention de philosophe. Un avertissement. Mais personne ne veut entendre l\u2019avertissement. Ce qu\u2019on retient, c\u2019est l\u2019image. Une cit\u00e9 engloutie. Belle. Sereine. Peut-\u00eatre un peu trop parfaite. Et on la cherche. Encore aujourd\u2019hui. Sur TikTok, sur Google Earth, dans les cartes anciennes, dans les r\u00eaves. Ce n\u2019est plus de la recherche. C\u2019est de la hantise. Une m\u00e9moire qu\u2019on aurait sans l\u2019avoir v\u00e9cue. Une blessure avant la blessure.<\/p>\n Je vois passer des vid\u00e9os : ruines immerg\u00e9es, voix doucereuses, zooms lents sur des anomalies g\u00e9ologiques. Je ne suis pas dupe. Je sais que tout \u00e7a flotte, que c\u2019est instable. Mais j\u2019y retourne. Comme on retourne dans une maison vide, juste pour sentir ce qu\u2019il en reste. L\u2019Atlantide est devenue une interface. Une surface sur laquelle chacun projette ses manques. Ceux qui y voient des technologies perdues, une \u00e9nergie propre, une sagesse oubli\u00e9e. Ceux qui y cherchent des r\u00e9ponses au monde d\u2019aujourd\u2019hui, \u00e0 sa vitesse, \u00e0 son indiff\u00e9rence. On pourrait en rire. Mais c\u2019est trop s\u00e9rieux pour \u00eatre moqu\u00e9. Parce que ce qu\u2019on nomme Atlantide, aujourd\u2019hui, ce n\u2019est pas un lieu. C\u2019est un refus.<\/p>\n Un refus de l\u2019architecture muette, des villes qui ne disent rien, des machines qui \u00e9puisent. Un refus de cette modernit\u00e9 s\u00e8che, sans promesse. Et dans ce refus, il y a de la beaut\u00e9. M\u00eame dans l\u2019exc\u00e8s. M\u00eame dans le flou. Quand je tombe sur ces images g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA, avec leurs arches translucides, leurs d\u00f4mes lumineux, leurs places silencieuses, je ne peux pas m\u2019emp\u00eacher d\u2019y croire. Pas au sens litt\u00e9ral. Mais au sens du manque. Ce sont des cartes d\u2019un monde qu\u2019on voudrait m\u00e9riter.<\/p>\n Je pourrais parler de Tesla, de l\u2019\u00e9ther, de tous ces r\u00e9cits secondaires qui s\u2019agr\u00e8gent. Je pourrais analyser. D\u00e9monter. Mais je crois que ce n\u2019est pas \u00e7a qui compte. Ce qui compte, c\u2019est la fa\u00e7on dont tout \u00e7a r\u00e9sonne. Dont \u00e7a nous fait marcher. Chercher. Imaginer. Peut-\u00eatre que la v\u00e9rit\u00e9, l\u00e0-dedans, n\u2019a jamais \u00e9t\u00e9 la question. Peut-\u00eatre qu\u2019il s\u2019agit juste d\u2019avoir encore un espace pour esp\u00e9rer autrement.<\/p>\n Parfois je me dis que l\u2019Atlantide n\u2019a pas disparu. Qu\u2019elle est en nous. Fragment\u00e9e. Diffuse. Une sorte de n\u00e9gatif du r\u00e9el. Quelque chose qu\u2019on per\u00e7oit dans les marges, dans les plis, dans les silences. Je pense \u00e0 ces vieux escaliers qui ne m\u00e8nent nulle part. \u00c0 ces portes mur\u00e9es qu\u2019on croise dans certaines villes. \u00c0 ces ruines qu\u2019on ne regarde plus. Ce sont peut-\u00eatre \u00e7a, les vraies preuves. Pas des vestiges. Des appels.<\/p>\n Alors non, je ne crois pas \u00e0 l\u2019Atlantide comme on croit \u00e0 un continent. Mais je crois \u00e0 ce que ce mot d\u00e9place. Je crois \u00e0 ce qu\u2019il rend possible. Un espace mental. Une \u00e9chapp\u00e9e. Une mani\u00e8re de continuer \u00e0 d\u00e9sirer. Et dans un monde qui se r\u00e9tr\u00e9cit, c\u2019est d\u00e9j\u00e0 beaucoup.<\/p>\n Je crois que la premi\u00e8re fois que j\u2019ai entendu le mot, j\u2019\u00e9tais gamin. Atlantide. C\u2019\u00e9tait \u00e0 l\u2019\u00e9cole, ou peut-\u00eatre \u00e0 la t\u00e9l\u00e9, je ne sais plus. Une \u00eele perdue. Aval\u00e9e par la mer. Une civilisation disparue comme on efface un mot sur une ardoise. Je n\u2019y ai pas pens\u00e9 pendant des ann\u00e9es. Et puis un soir, tard, sur mon t\u00e9l\u00e9phone, dans ce genre d\u2019insomnie o\u00f9 le r\u00e9el devient mou, j\u2019ai vu passer une vid\u00e9o. \u00c7a parlait d\u2019une route sous-marine. Des blocs de calcaire align\u00e9s, pas tr\u00e8s profonds, \u00e0 Bimini. On voyait tr\u00e8s bien les formes. Trop bien peut-\u00eatre. Et la voix, douce, un peu trop calme pour \u00eatre honn\u00eate, murmurait : on ne vous dit pas tout. J\u2019ai regard\u00e9. Puis j\u2019ai regard\u00e9 encore. Et sans m\u2019en rendre compte, je cherchais. Pas des preuves. Autre chose. Je crois que je cherchais \u00e0 croire. Un peu. Pas compl\u00e8tement. Mais juste assez pour que \u00e7a tienne. Comme un fil invisible entre ce monde-ci et un autre, qu\u2019on aurait perdu.<\/p>\n C\u2019est \u00e9trange, la mani\u00e8re dont les r\u00e9cits nous attrapent. On croit qu\u2019on les regarde. Qu\u2019on les choisit. Mais c\u2019est eux qui nous choisissent. Je vis dans un village en Is\u00e8re, tranquille, avec des collines, des nuages bas, et cette lumi\u00e8re de fin d\u2019apr\u00e8s-midi qui a parfois quelque chose d\u2019ind\u00e9cidable. Ici, les maisons sont vieilles, pas toujours belles, mais elles tiennent. Elles racontent. Je marche souvent, surtout quand le monde me p\u00e8se. Et parfois, je regarde les pierres comme si elles avaient des secrets. Comme si elles venaient d\u2019ailleurs. De plus loin que l\u2019histoire. C\u2019est idiot, je sais. Mais il y a des jours o\u00f9 l\u2019on a besoin que les choses racontent plus que ce qu\u2019elles montrent. Des jours o\u00f9 on aimerait qu\u2019un mur soit aussi un vestige.<\/p>\n Atlantide, c\u2019est ce mot qu\u2019on glisse entre deux silences. Ce mot qui revient quand tout le reste s\u2019effondre. On pourrait dire que c\u2019est une fable, une invention de philosophe. Un avertissement. Mais personne ne veut entendre l\u2019avertissement. Ce qu\u2019on retient, c\u2019est l\u2019image. Une cit\u00e9 engloutie. Belle. Sereine. Peut-\u00eatre un peu trop parfaite. Et on la cherche. Encore aujourd\u2019hui. Sur TikTok, sur Google Earth, dans les cartes anciennes, dans les r\u00eaves. Ce n\u2019est plus de la recherche. C\u2019est de la hantise. Une m\u00e9moire qu\u2019on aurait sans l\u2019avoir v\u00e9cue. Une blessure avant la blessure.<\/p>\n Je vois passer des vid\u00e9os : ruines immerg\u00e9es, voix doucereuses, zooms lents sur des anomalies g\u00e9ologiques. Je ne suis pas dupe. Je sais que tout \u00e7a flotte, que c\u2019est instable. Mais j\u2019y retourne. Comme on retourne dans une maison vide, juste pour sentir ce qu\u2019il en reste. L\u2019Atlantide est devenue une interface. Une surface sur laquelle chacun projette ses manques. Ceux qui y voient des technologies perdues, une \u00e9nergie propre, une sagesse oubli\u00e9e. Ceux qui y cherchent des r\u00e9ponses au monde d\u2019aujourd\u2019hui, \u00e0 sa vitesse, \u00e0 son indiff\u00e9rence. On pourrait en rire. Mais c\u2019est trop s\u00e9rieux pour \u00eatre moqu\u00e9. Parce que ce qu\u2019on nomme Atlantide, aujourd\u2019hui, ce n\u2019est pas un lieu. C\u2019est un refus.<\/p>\n Un refus de l\u2019architecture muette, des villes qui ne disent rien, des machines qui \u00e9puisent. Un refus de cette modernit\u00e9 s\u00e8che, sans promesse. Et dans ce refus, il y a de la beaut\u00e9. M\u00eame dans l\u2019exc\u00e8s. M\u00eame dans le flou. Quand je tombe sur ces images g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA, avec leurs arches translucides, leurs d\u00f4mes lumineux, leurs places silencieuses, je ne peux pas m\u2019emp\u00eacher d\u2019y croire. Pas au sens litt\u00e9ral. Mais au sens du manque. Ce sont des cartes d\u2019un monde qu\u2019on voudrait m\u00e9riter.<\/p>\n Je pourrais parler de Tesla, de l\u2019\u00e9ther, de tous ces r\u00e9cits secondaires qui s\u2019agr\u00e8gent. Je pourrais analyser. D\u00e9monter. Mais je crois que ce n\u2019est pas \u00e7a qui compte. Ce qui compte, c\u2019est la fa\u00e7on dont tout \u00e7a r\u00e9sonne. Dont \u00e7a nous fait marcher. Chercher. Imaginer. Peut-\u00eatre que la v\u00e9rit\u00e9, l\u00e0-dedans, n\u2019a jamais \u00e9t\u00e9 la question. Peut-\u00eatre qu\u2019il s\u2019agit juste d\u2019avoir encore un espace pour esp\u00e9rer autrement.<\/p>\n Parfois je me dis que l\u2019Atlantide n\u2019a pas disparu. Qu\u2019elle est en nous. Fragment\u00e9e. Diffuse. Une sorte de n\u00e9gatif du r\u00e9el. Quelque chose qu\u2019on per\u00e7oit dans les marges, dans les plis, dans les silences. Je pense \u00e0 ces vieux escaliers qui ne m\u00e8nent nulle part. \u00c0 ces portes mur\u00e9es qu\u2019on croise dans certaines villes. \u00c0 ces ruines qu\u2019on ne regarde plus. Ce sont peut-\u00eatre \u00e7a, les vraies preuves. Pas des vestiges. Des appels.<\/p>\n Alors non, je ne crois pas \u00e0 l\u2019Atlantide comme on croit \u00e0 un continent. Mais je crois \u00e0 ce que ce mot d\u00e9place. Je crois \u00e0 ce qu\u2019il rend possible. Un espace mental. Une \u00e9chapp\u00e9e. Une mani\u00e8re de continuer \u00e0 d\u00e9sirer. Et dans un monde qui se r\u00e9tr\u00e9cit, c\u2019est d\u00e9j\u00e0 beaucoup.<\/p>\n nda : j’ai cherch\u00e9 des images de l’Atlantide et j’ai \u00e9t\u00e9 stup\u00e9fi\u00e9 de voir que 90% des images sont d\u00e9sormais g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA.   I think the first time I heard the word, I was a child. Atlantis. It was at school, or perhaps on television, I no longer remember. A lost island. Swallowed by the sea. A civilization erased the way one erases a word from a slate. I didn’t think about it for years. And then one evening, late, on my phone, in that kind of insomnia where reality becomes soft, I saw a video scroll by. It spoke of an underwater road. Limestone blocks aligned, not very deep, at Bimini. You could see the forms very clearly. Too clearly, perhaps. And the voice, gentle, a little too calm to be honest, murmured : \"They don’t tell you everything.\" I watched. Then I watched again. And without realizing it, I was searching. Not for proof. Something else. I think I was searching for belief. A little. Not completely. But just enough for it to hold. Like an invisible thread between this world and another we had lost.<\/p>\n It’s strange, the way narratives catch us. We think we’re watching them. That we choose them. But they choose us. I live in a village in Is\u00e8re, quiet, with hills, low clouds, and that light of late afternoon that sometimes has something undecidable about it. Here, the houses are old, not always beautiful, but they hold. They tell stories. I walk often, especially when the world weighs on me. And sometimes, I look at the stones as if they held secrets. As if they came from elsewhere. From further back than history. It’s foolish, I know. But there are days when one needs things to tell more than what they show. Days when one would like a wall to also be a vestige.<\/p>\n Atlantis is that word you slip between two silences. That word that returns when everything else collapses. You could say it’s a fable, a philosopher’s invention. A warning. But no one wants to hear the warning. What we retain is the image. A sunken city. Beautiful. Serene. Perhaps a little too perfect. And we search for it. Still today. On TikTok, on Google Earth, in ancient maps, in dreams. It’s no longer research. It’s haunting. A nostalgia without memory.<\/p>\n I see videos pass by : submerged ruins, honeyed voices, slow zooms on geological anomalies. I’m not fooled. I know all this is floating, unstable. But I return to it. The way one returns to an empty house, just to feel what remains of it. Atlantis has become an interface. A surface onto which each person projects their lacks. Those who see in it lost technologies, clean energy, forgotten wisdom. Those who seek in it answers to today’s world, to its speed, to its indifference. One could laugh at it. But it’s too serious to be mocked. Because what we call Atlantis, today, is not a place. It’s a refusal.<\/p>\n A refusal of mute architecture, of cities that say nothing, of machines that exhaust. A refusal of this dry modernity, without promise. And in this refusal, there is beauty. Even in excess. Even in blur. When I come across these AI-generated images, with their translucent arches, their luminous domes, their silent squares, I can’t help but believe in them. Not in the literal sense. But in the sense of lack. They are maps of a world we would want to deserve.<\/p>\n I could speak of Tesla, of ether, of all these secondary narratives that aggregate. I could analyze. Dismantle. But I think that’s not what matters. What matters is the way all this resonates. How it makes us walk. Search. Imagine. Truth, in all this, was never the question. It’s just about still having a space where hoping functions.<\/p>\n Sometimes I tell myself that Atlantis hasn’t disappeared. That it’s in us. Fragmented. Diffuse. A kind of negative of the real. Something we perceive in the margins, in the folds, in the silences. I think of those old staircases that lead nowhere. Of those walled-up doors we encounter in certain cities. Of those ruins we no longer look at. These are perhaps the real proofs. Not vestiges. Calls.<\/p>\n So no, I don’t believe in Atlantis the way one believes in a continent. But I believe in what this word displaces. I believe in what it makes possible. A mental space. An escape. A way to continue desiring. And in a world that shrinks, that’s already a great deal.<\/p>\n
\n👉 The Guardian \u2013 Elon Musk sur la simulation<\/a><\/p>\n
\nI. La th\u00e9orie de la simulation : et si le monde n\u2019\u00e9tait qu\u2019un code ?<\/h2>\n
\n👉 Simulation Argument \u2013 Bostrom<\/a><\/p>\n\n
\n
\n— Jorge\u202fLuis\u202fBorges, Les ruines circulaires<\/em><\/p>\n<\/blockquote>\n
\nII. Glitches, temps flexibles et Mandela Effect<\/h2>\n
\n
\nchercher des sources sur l’effet Mandela <\/p>\n
\nIII. Tartaria : l\u2019empire effac\u00e9 par le programme ?<\/h2>\n
\nDepuis 2016, une communaut\u00e9 en ligne<\/strong> la pr\u00e9sente comme un empire technologique occult\u00e9<\/strong> apr\u00e8s un myst\u00e9rieux mud flood<\/em>.
\n👉 Reddit \u2013 r\/Tartaria<\/a>
\n👉 ExplorersWeb \u2013 Tartarian Empire<\/a> :contentReference[oaicite:1]{index=1}<\/p>\nLes \u00e9l\u00e9ments de preuve avanc\u00e9s :<\/h3>\n
\n
\n👉 Bloomberg \u2013 “QAnon de l\u2019architecture” par Zach Mortice<\/a> :contentReference[oaicite:3]{index=3}<\/p>\nVid\u00e9aste populaire :<\/h3>\n
\nchaine Youtube<\/a><\/p>\n
\nIV. Technologies disparues : que nous a-t-on vol\u00e9 ?<\/h2>\n
\n
\n👉 ExplorersWeb \u2013 Tartaria exploration mysteries<\/a> :contentReference[oaicite:5]{index=5}<\/p>\n
\nConclusion : Des mythes pour survivre \u00e0 la modernit\u00e9<\/h2>\n
\n
\n— Joan Didion<\/p>\n<\/blockquote>\n
",
        "content_text": " # La r\u00e9alit\u00e9 truqu\u00e9e : Simulation, manipulations du temps et mythe de la Grande Tartarie ## Introduction : Le soup\u00e7on d\u2019une r\u00e9alit\u00e9 simul\u00e9e En 2016, Elon Musk affirmait qu\u2019\u00ab il y a une chance sur des milliards que nous ne vivions pas dans une simulation \u00bb 👉 [The Guardian \u2013 Elon Musk sur la simulation](https:\/\/www.theguardian.com\/technology\/2016\/oct\/11\/simulated-world-elon-musk-the-matrix) Philip K. Dick, d\u00e8s 1977, \u00e9voquait une r\u00e9alit\u00e9 manipul\u00e9e par des alt\u00e9rations perceptibles dans nos souvenirs. Ces id\u00e9es, longtemps confin\u00e9es \u00e0 la philo et \u00e0 la SF, suscitent d\u00e9sormais des r\u00e9flexions s\u00e9rieuses : **et si notre monde \u00e9tait un programme, modifiable, repositionnable, voire r\u00e9initialisable ?** C\u2019est ce que soutient un courant actuel, liant la **th\u00e9orie de la simulation**, la **manipulation du temps**, et l\u2019effacement myst\u00e9rieux de la **Grande Tartarie**. --- ## I. La th\u00e9orie de la simulation : et si le monde n\u2019\u00e9tait qu\u2019un code ? En 2003, Nick Bostrom propose un argument c\u00e9l\u00e8bre : 👉 [Simulation Argument \u2013 Bostrom](https:\/\/www.simulation-argument.com\/simulation.html) Trois hypoth\u00e8ses : 1. Les civilisations s\u2019\u00e9teignent avant de simuler des consciences. 2. Elles d\u00e9cident de ne pas le faire. 3. **Nous sommes d\u00e9j\u00e0 dans une simulation.** Bostrom consid\u00e8re cette troisi\u00e8me option comme la plus vraisemblable statistiquement. Elon Musk ajoute qu'avec l'\u00e9volution rapide des jeux (de *Pong* \u00e0 la VR), nous nous rapprochons d'une simulation indiscernable de la r\u00e9alit\u00e9. Ce th\u00e8me r\u00e9sonne aussi en litt\u00e9rature : > *\u00ab Nous pourrions \u00eatre dans le r\u00eave d\u2019un r\u00eaveur \u00bb* > \u2014 Jorge Luis Borges, *Les ruines circulaires* Philip K. Dick \u00e9voque un **programmeur invisible** dans son discours de Metz (1977) : --- ## II. Glitches, temps flexibles et Mandela Effect Le **Mandela Effect** d\u00e9signe des souvenirs collectifs erron\u00e9s : - La mort de Mandela dans les ann\u00e9es 80 - Les *Berenstain* vs *Berenstein Bears* - Des r\u00e9pliques cin\u00e9matographiques modifi\u00e9es Certains y voient des **bugs de simulation** ou une **mise \u00e0 jour temporelle**. chercher des sources sur l'effet Mandela Notre m\u00e9moire collective pourrait donc \u00eatre la trace d\u2019une **r\u00e9\u00e9criture historique**, un **patch cosmique**. Des traditions spirituelles v\u00e9hiculent aussi ce th\u00e8me : yugas hindous, changements d\u2019\u00e8res, reset apocalyptique. --- ## III. Tartaria : l\u2019empire effac\u00e9 par le programme ? La \u00ab Tartarie \u00bb d\u00e9signait historiquement l\u2019Asie centrale sur les cartes anciennes. Depuis 2016, une **communaut\u00e9 en ligne** la pr\u00e9sente comme un **empire technologique occult\u00e9** apr\u00e8s un myst\u00e9rieux *mud flood*. 👉 [Reddit \u2013 r\/Tartaria](https:\/\/www.reddit.com\/r\/Tartaria\/) 👉 [ExplorersWeb \u2013 Tartarian Empire](https:\/\/explorersweb.com\/exploration-mysteries-tartarian-empire\/) :contentReference[oaicite:1]{index=1} ### Les \u00e9l\u00e9ments de preuve avanc\u00e9s : - **Architecture sophistiqu\u00e9e**, jug\u00e9e anachronique - **Expositions universelles** (Chicago 1893, San Francisco 1915) interpr\u00e9t\u00e9es comme vitrines Tartaria dissimul\u00e9es - **Rez\u2011de\u2011chauss\u00e9e enfouis** (mud flood), consid\u00e9r\u00e9s comme traces physiques - **Photos d\u00e9sert\u00e9es de foule**, vues comme preuve de d\u00e9peuplement d'apr\u00e8s-cataclysme 👉 [Wikipedia \u2013 Tartarian Empire (conspiracy)](https:\/\/en.wikipedia.org\/wiki\/Tartarian_Empire) :contentReference[oaicite:2]{index=2} 👉 [Bloomberg \u2013 \u201cQAnon de l\u2019architecture\u201d par Zach Mortice](https:\/\/www.bloomberg.com\/news\/features\/2021-04-27\/inside-architecture-s-wildest-conspiracy-theory) :contentReference[oaicite:3]{index=3} ### Vid\u00e9aste populaire : Le canal **Jon Levi** est une r\u00e9f\u00e9rence visuelle pour les passionn\u00e9s : [chaine Youtube](https:\/\/www.youtube.com\/@jonlevichannel) --- ## IV. Technologies disparues : que nous a-t-on vol\u00e9 ? Selon les partisans de Tartaria : - Une **\u00e9nergie libre** (\u00e9ther, \u00e9nergie atmosph\u00e9rique) - Des **structures vibratoires** (flux sonores, r\u00e9sonance) - Une **architecture fonctionnelle** (clochers et d\u00f4mes comme d\u00e9tecteurs ou capteurs) Des b\u00e2timents embl\u00e9matiques (tour Eiffel, cath\u00e9drales) seraient r\u00e9employ\u00e9s en masques technologiques. Les \u00e9lites auraient **dissimul\u00e9 ces savoirs**, impos\u00e9 l\u2019\u00e8re des \u00e9nergies fossiles pour affaiblir les populations. 👉 [ExplorersWeb \u2013 Tartaria exploration mysteries](https:\/\/explorersweb.com\/exploration-mysteries-tartarian-empire\/) :contentReference[oaicite:5]{index=5} --- ## Conclusion : Des mythes pour survivre \u00e0 la modernit\u00e9 La **simulation** et **Tartaria** offrent un m\u00eame r\u00e9cit : la r\u00e9alit\u00e9 peut \u00eatre **programm\u00e9e, modifi\u00e9e, effac\u00e9e**. Ces mythes alimentent notre intuition que **quelque chose cloche** dans notre histoire et nos soci\u00e9t\u00e9s. > *\u00ab Nous nous racontons des histoires pour vivre. \u00bb* > \u2014 Joan Didion Ils r\u00e9v\u00e8lent notre **attrait pour le merveilleux**, notre besoin de **sens** et de **contr\u00f4le**, m\u00eame s\u2019il est construit sur des hypoth\u00e8ses fragiles. Et si derri\u00e8re ces mythes, **quelqu\u2019un modifiait ou mod\u00e9lisait** notre perception du monde ? --- ",
        "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/1182px-1806_cary_map_of_tartary_or_central_asia_-_geographicus_-_tartary-cary-1806.jpg?1750776335",
        "tags": ["relev\u00e9", "essai", "r\u00e9alit\u00e9 truqu\u00e9e"]
      }
    
      ,{
        "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/black-goo-quand-la-fiction-devient-realite-conspirationniste.html",
        "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/black-goo-quand-la-fiction-devient-realite-conspirationniste.html",
        "title": "Black Goo : Quand la fiction devient r\u00e9alit\u00e9 conspirationniste",
        "date_published": "2025-06-24T08:34:37Z",
        "date_modified": "2025-06-24T09:00:55Z",
        "author": {"name": "Patrick Blanchon"},
        "content_html": " <\/a>\n<\/figure>\n<\/div>\n
<\/a>\n<\/figure>\n<\/div>\nLe ph\u00e9nom\u00e8ne du \"black goo\" : entre science et fiction<\/h1>\n
Les racines historiques : quand la science \u00e9claire le mythe<\/h2>\n
L’\u00e9mergence contemporaine : de la fiction \u00e0 la \"r\u00e9alit\u00e9\"<\/h2>\n
Le martyr du mouvement et la dynamique testimoniale<\/h2>\n
L’\u00e9cosyst\u00e8me num\u00e9rique et ses dynamiques<\/h2>\n
L’analyse scientifique : distinguer le possible de l’impossible<\/h2>\n
Chronologie d’une transformation<\/h2>\n
Les dynamiques sociales sous-jacentes<\/h2>\n
L’institutionnalisation progressive<\/h2>\n
Recommandations pour une approche critique<\/h2>\n
Conclusion : miroir de nos anxi\u00e9t\u00e9s<\/h2>\n
\n \n<\/figure>\n<\/div>\n
\n<\/figure>\n<\/div>\n📍 Castaneda : d\u00e9placer le point d\u2019assemblage<\/h3>\n
🕳\ufe0f Perec : d\u00e9nombrer l\u2019invisible<\/h3>\n
🎴 Sophie Calle : l\u2019objet comme trace d\u2019un rituel<\/h3>\n
🕊\ufe0f Barthes : reconna\u00eetre les nouveaux dieux<\/h3>\n
📓 Ernaux, Brainard, Ingold\u2026 autres formes d’attention<\/h3>\n
🌍 Nicolas Nova : cartographier les signes faibles<\/h3>\n
🔎 Conclusion : une d\u00e9rive dans le r\u00e9el<\/h3>\n
Atlantide<\/h2>\n
\n<\/md><\/p>\nAtlantis<\/h2>\n
 \n<\/figure>\n<\/div>",
        "content_text": " ## Atlantide Je crois que la premi\u00e8re fois que j\u2019ai entendu le mot, j\u2019\u00e9tais gamin. Atlantide. C\u2019\u00e9tait \u00e0 l\u2019\u00e9cole, ou peut-\u00eatre \u00e0 la t\u00e9l\u00e9, je ne sais plus. Une \u00eele perdue. Aval\u00e9e par la mer. Une civilisation disparue comme on efface un mot sur une ardoise. Je n\u2019y ai pas pens\u00e9 pendant des ann\u00e9es. Et puis un soir, tard, sur mon t\u00e9l\u00e9phone, dans ce genre d\u2019insomnie o\u00f9 le r\u00e9el devient mou, j\u2019ai vu passer une vid\u00e9o. \u00c7a parlait d\u2019une route sous-marine. Des blocs de calcaire align\u00e9s, pas tr\u00e8s profonds, \u00e0 Bimini. On voyait tr\u00e8s bien les formes. Trop bien peut-\u00eatre. Et la voix, douce, un peu trop calme pour \u00eatre honn\u00eate, murmurait : on ne vous dit pas tout. J\u2019ai regard\u00e9. Puis j\u2019ai regard\u00e9 encore. Et sans m\u2019en rendre compte, je cherchais. Pas des preuves. Autre chose. Je crois que je cherchais \u00e0 croire. Un peu. Pas compl\u00e8tement. Mais juste assez pour que \u00e7a tienne. Comme un fil invisible entre ce monde-ci et un autre, qu\u2019on aurait perdu. C\u2019est \u00e9trange, la mani\u00e8re dont les r\u00e9cits nous attrapent. On croit qu\u2019on les regarde. Qu\u2019on les choisit. Mais c\u2019est eux qui nous choisissent. Je vis dans un village en Is\u00e8re, tranquille, avec des collines, des nuages bas, et cette lumi\u00e8re de fin d\u2019apr\u00e8s-midi qui a parfois quelque chose d\u2019ind\u00e9cidable. Ici, les maisons sont vieilles, pas toujours belles, mais elles tiennent. Elles racontent. Je marche souvent, surtout quand le monde me p\u00e8se. Et parfois, je regarde les pierres comme si elles avaient des secrets. Comme si elles venaient d\u2019ailleurs. De plus loin que l\u2019histoire. C\u2019est idiot, je sais. Mais il y a des jours o\u00f9 l\u2019on a besoin que les choses racontent plus que ce qu\u2019elles montrent. Des jours o\u00f9 on aimerait qu\u2019un mur soit aussi un vestige. Atlantide, c\u2019est ce mot qu\u2019on glisse entre deux silences. Ce mot qui revient quand tout le reste s\u2019effondre. On pourrait dire que c\u2019est une fable, une invention de philosophe. Un avertissement. Mais personne ne veut entendre l\u2019avertissement. Ce qu\u2019on retient, c\u2019est l\u2019image. Une cit\u00e9 engloutie. Belle. Sereine. Peut-\u00eatre un peu trop parfaite. Et on la cherche. Encore aujourd\u2019hui. Sur TikTok, sur Google Earth, dans les cartes anciennes, dans les r\u00eaves. Ce n\u2019est plus de la recherche. C\u2019est de la hantise. Une m\u00e9moire qu\u2019on aurait sans l\u2019avoir v\u00e9cue. Une blessure avant la blessure. Je vois passer des vid\u00e9os : ruines immerg\u00e9es, voix doucereuses, zooms lents sur des anomalies g\u00e9ologiques. Je ne suis pas dupe. Je sais que tout \u00e7a flotte, que c\u2019est instable. Mais j\u2019y retourne. Comme on retourne dans une maison vide, juste pour sentir ce qu\u2019il en reste. L\u2019Atlantide est devenue une interface. Une surface sur laquelle chacun projette ses manques. Ceux qui y voient des technologies perdues, une \u00e9nergie propre, une sagesse oubli\u00e9e. Ceux qui y cherchent des r\u00e9ponses au monde d\u2019aujourd\u2019hui, \u00e0 sa vitesse, \u00e0 son indiff\u00e9rence. On pourrait en rire. Mais c\u2019est trop s\u00e9rieux pour \u00eatre moqu\u00e9. Parce que ce qu\u2019on nomme Atlantide, aujourd\u2019hui, ce n\u2019est pas un lieu. C\u2019est un refus. Un refus de l\u2019architecture muette, des villes qui ne disent rien, des machines qui \u00e9puisent. Un refus de cette modernit\u00e9 s\u00e8che, sans promesse. Et dans ce refus, il y a de la beaut\u00e9. M\u00eame dans l\u2019exc\u00e8s. M\u00eame dans le flou. Quand je tombe sur ces images g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA, avec leurs arches translucides, leurs d\u00f4mes lumineux, leurs places silencieuses, je ne peux pas m\u2019emp\u00eacher d\u2019y croire. Pas au sens litt\u00e9ral. Mais au sens du manque. Ce sont des cartes d\u2019un monde qu\u2019on voudrait m\u00e9riter. Je pourrais parler de Tesla, de l\u2019\u00e9ther, de tous ces r\u00e9cits secondaires qui s\u2019agr\u00e8gent. Je pourrais analyser. D\u00e9monter. Mais je crois que ce n\u2019est pas \u00e7a qui compte. Ce qui compte, c\u2019est la fa\u00e7on dont tout \u00e7a r\u00e9sonne. Dont \u00e7a nous fait marcher. Chercher. Imaginer. Peut-\u00eatre que la v\u00e9rit\u00e9, l\u00e0-dedans, n\u2019a jamais \u00e9t\u00e9 la question. Peut-\u00eatre qu\u2019il s\u2019agit juste d\u2019avoir encore un espace pour esp\u00e9rer autrement. Parfois je me dis que l\u2019Atlantide n\u2019a pas disparu. Qu\u2019elle est en nous. Fragment\u00e9e. Diffuse. Une sorte de n\u00e9gatif du r\u00e9el. Quelque chose qu\u2019on per\u00e7oit dans les marges, dans les plis, dans les silences. Je pense \u00e0 ces vieux escaliers qui ne m\u00e8nent nulle part. \u00c0 ces portes mur\u00e9es qu\u2019on croise dans certaines villes. \u00c0 ces ruines qu\u2019on ne regarde plus. Ce sont peut-\u00eatre \u00e7a, les vraies preuves. Pas des vestiges. Des appels. Alors non, je ne crois pas \u00e0 l\u2019Atlantide comme on croit \u00e0 un continent. Mais je crois \u00e0 ce que ce mot d\u00e9place. Je crois \u00e0 ce qu\u2019il rend possible. Un espace mental. Une \u00e9chapp\u00e9e. Une mani\u00e8re de continuer \u00e0 d\u00e9sirer. Et dans un monde qui se r\u00e9tr\u00e9cit, c\u2019est d\u00e9j\u00e0 beaucoup. Je crois que la premi\u00e8re fois que j\u2019ai entendu le mot, j\u2019\u00e9tais gamin. Atlantide. C\u2019\u00e9tait \u00e0 l\u2019\u00e9cole, ou peut-\u00eatre \u00e0 la t\u00e9l\u00e9, je ne sais plus. Une \u00eele perdue. Aval\u00e9e par la mer. Une civilisation disparue comme on efface un mot sur une ardoise. Je n\u2019y ai pas pens\u00e9 pendant des ann\u00e9es. Et puis un soir, tard, sur mon t\u00e9l\u00e9phone, dans ce genre d\u2019insomnie o\u00f9 le r\u00e9el devient mou, j\u2019ai vu passer une vid\u00e9o. \u00c7a parlait d\u2019une route sous-marine. Des blocs de calcaire align\u00e9s, pas tr\u00e8s profonds, \u00e0 Bimini. On voyait tr\u00e8s bien les formes. Trop bien peut-\u00eatre. Et la voix, douce, un peu trop calme pour \u00eatre honn\u00eate, murmurait : on ne vous dit pas tout. J\u2019ai regard\u00e9. Puis j\u2019ai regard\u00e9 encore. Et sans m\u2019en rendre compte, je cherchais. Pas des preuves. Autre chose. Je crois que je cherchais \u00e0 croire. Un peu. Pas compl\u00e8tement. Mais juste assez pour que \u00e7a tienne. Comme un fil invisible entre ce monde-ci et un autre, qu\u2019on aurait perdu. C\u2019est \u00e9trange, la mani\u00e8re dont les r\u00e9cits nous attrapent. On croit qu\u2019on les regarde. Qu\u2019on les choisit. Mais c\u2019est eux qui nous choisissent. Je vis dans un village en Is\u00e8re, tranquille, avec des collines, des nuages bas, et cette lumi\u00e8re de fin d\u2019apr\u00e8s-midi qui a parfois quelque chose d\u2019ind\u00e9cidable. Ici, les maisons sont vieilles, pas toujours belles, mais elles tiennent. Elles racontent. Je marche souvent, surtout quand le monde me p\u00e8se. Et parfois, je regarde les pierres comme si elles avaient des secrets. Comme si elles venaient d\u2019ailleurs. De plus loin que l\u2019histoire. C\u2019est idiot, je sais. Mais il y a des jours o\u00f9 l\u2019on a besoin que les choses racontent plus que ce qu\u2019elles montrent. Des jours o\u00f9 on aimerait qu\u2019un mur soit aussi un vestige. Atlantide, c\u2019est ce mot qu\u2019on glisse entre deux silences. Ce mot qui revient quand tout le reste s\u2019effondre. On pourrait dire que c\u2019est une fable, une invention de philosophe. Un avertissement. Mais personne ne veut entendre l\u2019avertissement. Ce qu\u2019on retient, c\u2019est l\u2019image. Une cit\u00e9 engloutie. Belle. Sereine. Peut-\u00eatre un peu trop parfaite. Et on la cherche. Encore aujourd\u2019hui. Sur TikTok, sur Google Earth, dans les cartes anciennes, dans les r\u00eaves. Ce n\u2019est plus de la recherche. C\u2019est de la hantise. Une m\u00e9moire qu\u2019on aurait sans l\u2019avoir v\u00e9cue. Une blessure avant la blessure. Je vois passer des vid\u00e9os : ruines immerg\u00e9es, voix doucereuses, zooms lents sur des anomalies g\u00e9ologiques. Je ne suis pas dupe. Je sais que tout \u00e7a flotte, que c\u2019est instable. Mais j\u2019y retourne. Comme on retourne dans une maison vide, juste pour sentir ce qu\u2019il en reste. L\u2019Atlantide est devenue une interface. Une surface sur laquelle chacun projette ses manques. Ceux qui y voient des technologies perdues, une \u00e9nergie propre, une sagesse oubli\u00e9e. Ceux qui y cherchent des r\u00e9ponses au monde d\u2019aujourd\u2019hui, \u00e0 sa vitesse, \u00e0 son indiff\u00e9rence. On pourrait en rire. Mais c\u2019est trop s\u00e9rieux pour \u00eatre moqu\u00e9. Parce que ce qu\u2019on nomme Atlantide, aujourd\u2019hui, ce n\u2019est pas un lieu. C\u2019est un refus. Un refus de l\u2019architecture muette, des villes qui ne disent rien, des machines qui \u00e9puisent. Un refus de cette modernit\u00e9 s\u00e8che, sans promesse. Et dans ce refus, il y a de la beaut\u00e9. M\u00eame dans l\u2019exc\u00e8s. M\u00eame dans le flou. Quand je tombe sur ces images g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA, avec leurs arches translucides, leurs d\u00f4mes lumineux, leurs places silencieuses, je ne peux pas m\u2019emp\u00eacher d\u2019y croire. Pas au sens litt\u00e9ral. Mais au sens du manque. Ce sont des cartes d\u2019un monde qu\u2019on voudrait m\u00e9riter. Je pourrais parler de Tesla, de l\u2019\u00e9ther, de tous ces r\u00e9cits secondaires qui s\u2019agr\u00e8gent. Je pourrais analyser. D\u00e9monter. Mais je crois que ce n\u2019est pas \u00e7a qui compte. Ce qui compte, c\u2019est la fa\u00e7on dont tout \u00e7a r\u00e9sonne. Dont \u00e7a nous fait marcher. Chercher. Imaginer. Peut-\u00eatre que la v\u00e9rit\u00e9, l\u00e0-dedans, n\u2019a jamais \u00e9t\u00e9 la question. Peut-\u00eatre qu\u2019il s\u2019agit juste d\u2019avoir encore un espace pour esp\u00e9rer autrement. Parfois je me dis que l\u2019Atlantide n\u2019a pas disparu. Qu\u2019elle est en nous. Fragment\u00e9e. Diffuse. Une sorte de n\u00e9gatif du r\u00e9el. Quelque chose qu\u2019on per\u00e7oit dans les marges, dans les plis, dans les silences. Je pense \u00e0 ces vieux escaliers qui ne m\u00e8nent nulle part. \u00c0 ces portes mur\u00e9es qu\u2019on croise dans certaines villes. \u00c0 ces ruines qu\u2019on ne regarde plus. Ce sont peut-\u00eatre \u00e7a, les vraies preuves. Pas des vestiges. Des appels. Alors non, je ne crois pas \u00e0 l\u2019Atlantide comme on croit \u00e0 un continent. Mais je crois \u00e0 ce que ce mot d\u00e9place. Je crois \u00e0 ce qu\u2019il rend possible. Un espace mental. Une \u00e9chapp\u00e9e. Une mani\u00e8re de continuer \u00e0 d\u00e9sirer. Et dans un monde qui se r\u00e9tr\u00e9cit, c\u2019est d\u00e9j\u00e0 beaucoup. nda : j'ai cherch\u00e9 des images de l'Atlantide et j'ai \u00e9t\u00e9 stup\u00e9fi\u00e9 de voir que 90% des images sont d\u00e9sormais g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA. ## Atlantis I think the first time I heard the word, I was a child. Atlantis. It was at school, or perhaps on television, I no longer remember. A lost island. Swallowed by the sea. A civilization erased the way one erases a word from a slate. I didn't think about it for years. And then one evening, late, on my phone, in that kind of insomnia where reality becomes soft, I saw a video scroll by. It spoke of an underwater road. Limestone blocks aligned, not very deep, at Bimini. You could see the forms very clearly. Too clearly, perhaps. And the voice, gentle, a little too calm to be honest, murmured: \"They don't tell you everything.\" I watched. Then I watched again. And without realizing it, I was searching. Not for proof. Something else. I think I was searching for belief. A little. Not completely. But just enough for it to hold. Like an invisible thread between this world and another we had lost. It's strange, the way narratives catch us. We think we're watching them. That we choose them. But they choose us. I live in a village in Is\u00e8re, quiet, with hills, low clouds, and that light of late afternoon that sometimes has something undecidable about it. Here, the houses are old, not always beautiful, but they hold. They tell stories. I walk often, especially when the world weighs on me. And sometimes, I look at the stones as if they held secrets. As if they came from elsewhere. From further back than history. It's foolish, I know. But there are days when one needs things to tell more than what they show. Days when one would like a wall to also be a vestige. Atlantis is that word you slip between two silences. That word that returns when everything else collapses. You could say it's a fable, a philosopher's invention. A warning. But no one wants to hear the warning. What we retain is the image. A sunken city. Beautiful. Serene. Perhaps a little too perfect. And we search for it. Still today. On TikTok, on Google Earth, in ancient maps, in dreams. It's no longer research. It's haunting. A nostalgia without memory. I see videos pass by: submerged ruins, honeyed voices, slow zooms on geological anomalies. I'm not fooled. I know all this is floating, unstable. But I return to it. The way one returns to an empty house, just to feel what remains of it. Atlantis has become an interface. A surface onto which each person projects their lacks. Those who see in it lost technologies, clean energy, forgotten wisdom. Those who seek in it answers to today's world, to its speed, to its indifference. One could laugh at it. But it's too serious to be mocked. Because what we call Atlantis, today, is not a place. It's a refusal. A refusal of mute architecture, of cities that say nothing, of machines that exhaust. A refusal of this dry modernity, without promise. And in this refusal, there is beauty. Even in excess. Even in blur. When I come across these AI-generated images, with their translucent arches, their luminous domes, their silent squares, I can't help but believe in them. Not in the literal sense. But in the sense of lack. They are maps of a world we would want to deserve. I could speak of Tesla, of ether, of all these secondary narratives that aggregate. I could analyze. Dismantle. But I think that's not what matters. What matters is the way all this resonates. How it makes us walk. Search. Imagine. Truth, in all this, was never the question. It's just about still having a space where hoping functions. Sometimes I tell myself that Atlantis hasn't disappeared. That it's in us. Fragmented. Diffuse. A kind of negative of the real. Something we perceive in the margins, in the folds, in the silences. I think of those old staircases that lead nowhere. Of those walled-up doors we encounter in certain cities. Of those ruins we no longer look at. These are perhaps the real proofs. Not vestiges. Calls. So no, I don't believe in Atlantis the way one believes in a continent. But I believe in what this word displaces. I believe in what it makes possible. A mental space. An escape. A way to continue desiring. And in a world that shrinks, that's already a great deal. ",
        "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/atlantide-1.jpg?1750457453",
        "tags": ["essai", "atlantide"]
      }
    
  ]
}
\n<\/figure>\n<\/div>",
        "content_text": " ## Atlantide Je crois que la premi\u00e8re fois que j\u2019ai entendu le mot, j\u2019\u00e9tais gamin. Atlantide. C\u2019\u00e9tait \u00e0 l\u2019\u00e9cole, ou peut-\u00eatre \u00e0 la t\u00e9l\u00e9, je ne sais plus. Une \u00eele perdue. Aval\u00e9e par la mer. Une civilisation disparue comme on efface un mot sur une ardoise. Je n\u2019y ai pas pens\u00e9 pendant des ann\u00e9es. Et puis un soir, tard, sur mon t\u00e9l\u00e9phone, dans ce genre d\u2019insomnie o\u00f9 le r\u00e9el devient mou, j\u2019ai vu passer une vid\u00e9o. \u00c7a parlait d\u2019une route sous-marine. Des blocs de calcaire align\u00e9s, pas tr\u00e8s profonds, \u00e0 Bimini. On voyait tr\u00e8s bien les formes. Trop bien peut-\u00eatre. Et la voix, douce, un peu trop calme pour \u00eatre honn\u00eate, murmurait : on ne vous dit pas tout. J\u2019ai regard\u00e9. Puis j\u2019ai regard\u00e9 encore. Et sans m\u2019en rendre compte, je cherchais. Pas des preuves. Autre chose. Je crois que je cherchais \u00e0 croire. Un peu. Pas compl\u00e8tement. Mais juste assez pour que \u00e7a tienne. Comme un fil invisible entre ce monde-ci et un autre, qu\u2019on aurait perdu. C\u2019est \u00e9trange, la mani\u00e8re dont les r\u00e9cits nous attrapent. On croit qu\u2019on les regarde. Qu\u2019on les choisit. Mais c\u2019est eux qui nous choisissent. Je vis dans un village en Is\u00e8re, tranquille, avec des collines, des nuages bas, et cette lumi\u00e8re de fin d\u2019apr\u00e8s-midi qui a parfois quelque chose d\u2019ind\u00e9cidable. Ici, les maisons sont vieilles, pas toujours belles, mais elles tiennent. Elles racontent. Je marche souvent, surtout quand le monde me p\u00e8se. Et parfois, je regarde les pierres comme si elles avaient des secrets. Comme si elles venaient d\u2019ailleurs. De plus loin que l\u2019histoire. C\u2019est idiot, je sais. Mais il y a des jours o\u00f9 l\u2019on a besoin que les choses racontent plus que ce qu\u2019elles montrent. Des jours o\u00f9 on aimerait qu\u2019un mur soit aussi un vestige. Atlantide, c\u2019est ce mot qu\u2019on glisse entre deux silences. Ce mot qui revient quand tout le reste s\u2019effondre. On pourrait dire que c\u2019est une fable, une invention de philosophe. Un avertissement. Mais personne ne veut entendre l\u2019avertissement. Ce qu\u2019on retient, c\u2019est l\u2019image. Une cit\u00e9 engloutie. Belle. Sereine. Peut-\u00eatre un peu trop parfaite. Et on la cherche. Encore aujourd\u2019hui. Sur TikTok, sur Google Earth, dans les cartes anciennes, dans les r\u00eaves. Ce n\u2019est plus de la recherche. C\u2019est de la hantise. Une m\u00e9moire qu\u2019on aurait sans l\u2019avoir v\u00e9cue. Une blessure avant la blessure. Je vois passer des vid\u00e9os : ruines immerg\u00e9es, voix doucereuses, zooms lents sur des anomalies g\u00e9ologiques. Je ne suis pas dupe. Je sais que tout \u00e7a flotte, que c\u2019est instable. Mais j\u2019y retourne. Comme on retourne dans une maison vide, juste pour sentir ce qu\u2019il en reste. L\u2019Atlantide est devenue une interface. Une surface sur laquelle chacun projette ses manques. Ceux qui y voient des technologies perdues, une \u00e9nergie propre, une sagesse oubli\u00e9e. Ceux qui y cherchent des r\u00e9ponses au monde d\u2019aujourd\u2019hui, \u00e0 sa vitesse, \u00e0 son indiff\u00e9rence. On pourrait en rire. Mais c\u2019est trop s\u00e9rieux pour \u00eatre moqu\u00e9. Parce que ce qu\u2019on nomme Atlantide, aujourd\u2019hui, ce n\u2019est pas un lieu. C\u2019est un refus. Un refus de l\u2019architecture muette, des villes qui ne disent rien, des machines qui \u00e9puisent. Un refus de cette modernit\u00e9 s\u00e8che, sans promesse. Et dans ce refus, il y a de la beaut\u00e9. M\u00eame dans l\u2019exc\u00e8s. M\u00eame dans le flou. Quand je tombe sur ces images g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA, avec leurs arches translucides, leurs d\u00f4mes lumineux, leurs places silencieuses, je ne peux pas m\u2019emp\u00eacher d\u2019y croire. Pas au sens litt\u00e9ral. Mais au sens du manque. Ce sont des cartes d\u2019un monde qu\u2019on voudrait m\u00e9riter. Je pourrais parler de Tesla, de l\u2019\u00e9ther, de tous ces r\u00e9cits secondaires qui s\u2019agr\u00e8gent. Je pourrais analyser. D\u00e9monter. Mais je crois que ce n\u2019est pas \u00e7a qui compte. Ce qui compte, c\u2019est la fa\u00e7on dont tout \u00e7a r\u00e9sonne. Dont \u00e7a nous fait marcher. Chercher. Imaginer. Peut-\u00eatre que la v\u00e9rit\u00e9, l\u00e0-dedans, n\u2019a jamais \u00e9t\u00e9 la question. Peut-\u00eatre qu\u2019il s\u2019agit juste d\u2019avoir encore un espace pour esp\u00e9rer autrement. Parfois je me dis que l\u2019Atlantide n\u2019a pas disparu. Qu\u2019elle est en nous. Fragment\u00e9e. Diffuse. Une sorte de n\u00e9gatif du r\u00e9el. Quelque chose qu\u2019on per\u00e7oit dans les marges, dans les plis, dans les silences. Je pense \u00e0 ces vieux escaliers qui ne m\u00e8nent nulle part. \u00c0 ces portes mur\u00e9es qu\u2019on croise dans certaines villes. \u00c0 ces ruines qu\u2019on ne regarde plus. Ce sont peut-\u00eatre \u00e7a, les vraies preuves. Pas des vestiges. Des appels. Alors non, je ne crois pas \u00e0 l\u2019Atlantide comme on croit \u00e0 un continent. Mais je crois \u00e0 ce que ce mot d\u00e9place. Je crois \u00e0 ce qu\u2019il rend possible. Un espace mental. Une \u00e9chapp\u00e9e. Une mani\u00e8re de continuer \u00e0 d\u00e9sirer. Et dans un monde qui se r\u00e9tr\u00e9cit, c\u2019est d\u00e9j\u00e0 beaucoup. Je crois que la premi\u00e8re fois que j\u2019ai entendu le mot, j\u2019\u00e9tais gamin. Atlantide. C\u2019\u00e9tait \u00e0 l\u2019\u00e9cole, ou peut-\u00eatre \u00e0 la t\u00e9l\u00e9, je ne sais plus. Une \u00eele perdue. Aval\u00e9e par la mer. Une civilisation disparue comme on efface un mot sur une ardoise. Je n\u2019y ai pas pens\u00e9 pendant des ann\u00e9es. Et puis un soir, tard, sur mon t\u00e9l\u00e9phone, dans ce genre d\u2019insomnie o\u00f9 le r\u00e9el devient mou, j\u2019ai vu passer une vid\u00e9o. \u00c7a parlait d\u2019une route sous-marine. Des blocs de calcaire align\u00e9s, pas tr\u00e8s profonds, \u00e0 Bimini. On voyait tr\u00e8s bien les formes. Trop bien peut-\u00eatre. Et la voix, douce, un peu trop calme pour \u00eatre honn\u00eate, murmurait : on ne vous dit pas tout. J\u2019ai regard\u00e9. Puis j\u2019ai regard\u00e9 encore. Et sans m\u2019en rendre compte, je cherchais. Pas des preuves. Autre chose. Je crois que je cherchais \u00e0 croire. Un peu. Pas compl\u00e8tement. Mais juste assez pour que \u00e7a tienne. Comme un fil invisible entre ce monde-ci et un autre, qu\u2019on aurait perdu. C\u2019est \u00e9trange, la mani\u00e8re dont les r\u00e9cits nous attrapent. On croit qu\u2019on les regarde. Qu\u2019on les choisit. Mais c\u2019est eux qui nous choisissent. Je vis dans un village en Is\u00e8re, tranquille, avec des collines, des nuages bas, et cette lumi\u00e8re de fin d\u2019apr\u00e8s-midi qui a parfois quelque chose d\u2019ind\u00e9cidable. Ici, les maisons sont vieilles, pas toujours belles, mais elles tiennent. Elles racontent. Je marche souvent, surtout quand le monde me p\u00e8se. Et parfois, je regarde les pierres comme si elles avaient des secrets. Comme si elles venaient d\u2019ailleurs. De plus loin que l\u2019histoire. C\u2019est idiot, je sais. Mais il y a des jours o\u00f9 l\u2019on a besoin que les choses racontent plus que ce qu\u2019elles montrent. Des jours o\u00f9 on aimerait qu\u2019un mur soit aussi un vestige. Atlantide, c\u2019est ce mot qu\u2019on glisse entre deux silences. Ce mot qui revient quand tout le reste s\u2019effondre. On pourrait dire que c\u2019est une fable, une invention de philosophe. Un avertissement. Mais personne ne veut entendre l\u2019avertissement. Ce qu\u2019on retient, c\u2019est l\u2019image. Une cit\u00e9 engloutie. Belle. Sereine. Peut-\u00eatre un peu trop parfaite. Et on la cherche. Encore aujourd\u2019hui. Sur TikTok, sur Google Earth, dans les cartes anciennes, dans les r\u00eaves. Ce n\u2019est plus de la recherche. C\u2019est de la hantise. Une m\u00e9moire qu\u2019on aurait sans l\u2019avoir v\u00e9cue. Une blessure avant la blessure. Je vois passer des vid\u00e9os : ruines immerg\u00e9es, voix doucereuses, zooms lents sur des anomalies g\u00e9ologiques. Je ne suis pas dupe. Je sais que tout \u00e7a flotte, que c\u2019est instable. Mais j\u2019y retourne. Comme on retourne dans une maison vide, juste pour sentir ce qu\u2019il en reste. L\u2019Atlantide est devenue une interface. Une surface sur laquelle chacun projette ses manques. Ceux qui y voient des technologies perdues, une \u00e9nergie propre, une sagesse oubli\u00e9e. Ceux qui y cherchent des r\u00e9ponses au monde d\u2019aujourd\u2019hui, \u00e0 sa vitesse, \u00e0 son indiff\u00e9rence. On pourrait en rire. Mais c\u2019est trop s\u00e9rieux pour \u00eatre moqu\u00e9. Parce que ce qu\u2019on nomme Atlantide, aujourd\u2019hui, ce n\u2019est pas un lieu. C\u2019est un refus. Un refus de l\u2019architecture muette, des villes qui ne disent rien, des machines qui \u00e9puisent. Un refus de cette modernit\u00e9 s\u00e8che, sans promesse. Et dans ce refus, il y a de la beaut\u00e9. M\u00eame dans l\u2019exc\u00e8s. M\u00eame dans le flou. Quand je tombe sur ces images g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA, avec leurs arches translucides, leurs d\u00f4mes lumineux, leurs places silencieuses, je ne peux pas m\u2019emp\u00eacher d\u2019y croire. Pas au sens litt\u00e9ral. Mais au sens du manque. Ce sont des cartes d\u2019un monde qu\u2019on voudrait m\u00e9riter. Je pourrais parler de Tesla, de l\u2019\u00e9ther, de tous ces r\u00e9cits secondaires qui s\u2019agr\u00e8gent. Je pourrais analyser. D\u00e9monter. Mais je crois que ce n\u2019est pas \u00e7a qui compte. Ce qui compte, c\u2019est la fa\u00e7on dont tout \u00e7a r\u00e9sonne. Dont \u00e7a nous fait marcher. Chercher. Imaginer. Peut-\u00eatre que la v\u00e9rit\u00e9, l\u00e0-dedans, n\u2019a jamais \u00e9t\u00e9 la question. Peut-\u00eatre qu\u2019il s\u2019agit juste d\u2019avoir encore un espace pour esp\u00e9rer autrement. Parfois je me dis que l\u2019Atlantide n\u2019a pas disparu. Qu\u2019elle est en nous. Fragment\u00e9e. Diffuse. Une sorte de n\u00e9gatif du r\u00e9el. Quelque chose qu\u2019on per\u00e7oit dans les marges, dans les plis, dans les silences. Je pense \u00e0 ces vieux escaliers qui ne m\u00e8nent nulle part. \u00c0 ces portes mur\u00e9es qu\u2019on croise dans certaines villes. \u00c0 ces ruines qu\u2019on ne regarde plus. Ce sont peut-\u00eatre \u00e7a, les vraies preuves. Pas des vestiges. Des appels. Alors non, je ne crois pas \u00e0 l\u2019Atlantide comme on croit \u00e0 un continent. Mais je crois \u00e0 ce que ce mot d\u00e9place. Je crois \u00e0 ce qu\u2019il rend possible. Un espace mental. Une \u00e9chapp\u00e9e. Une mani\u00e8re de continuer \u00e0 d\u00e9sirer. Et dans un monde qui se r\u00e9tr\u00e9cit, c\u2019est d\u00e9j\u00e0 beaucoup. nda : j'ai cherch\u00e9 des images de l'Atlantide et j'ai \u00e9t\u00e9 stup\u00e9fi\u00e9 de voir que 90% des images sont d\u00e9sormais g\u00e9n\u00e9r\u00e9es par IA. ## Atlantis I think the first time I heard the word, I was a child. Atlantis. It was at school, or perhaps on television, I no longer remember. A lost island. Swallowed by the sea. A civilization erased the way one erases a word from a slate. I didn't think about it for years. And then one evening, late, on my phone, in that kind of insomnia where reality becomes soft, I saw a video scroll by. It spoke of an underwater road. Limestone blocks aligned, not very deep, at Bimini. You could see the forms very clearly. Too clearly, perhaps. And the voice, gentle, a little too calm to be honest, murmured: \"They don't tell you everything.\" I watched. Then I watched again. And without realizing it, I was searching. Not for proof. Something else. I think I was searching for belief. A little. Not completely. But just enough for it to hold. Like an invisible thread between this world and another we had lost. It's strange, the way narratives catch us. We think we're watching them. That we choose them. But they choose us. I live in a village in Is\u00e8re, quiet, with hills, low clouds, and that light of late afternoon that sometimes has something undecidable about it. Here, the houses are old, not always beautiful, but they hold. They tell stories. I walk often, especially when the world weighs on me. And sometimes, I look at the stones as if they held secrets. As if they came from elsewhere. From further back than history. It's foolish, I know. But there are days when one needs things to tell more than what they show. Days when one would like a wall to also be a vestige. Atlantis is that word you slip between two silences. That word that returns when everything else collapses. You could say it's a fable, a philosopher's invention. A warning. But no one wants to hear the warning. What we retain is the image. A sunken city. Beautiful. Serene. Perhaps a little too perfect. And we search for it. Still today. On TikTok, on Google Earth, in ancient maps, in dreams. It's no longer research. It's haunting. A nostalgia without memory. I see videos pass by: submerged ruins, honeyed voices, slow zooms on geological anomalies. I'm not fooled. I know all this is floating, unstable. But I return to it. The way one returns to an empty house, just to feel what remains of it. Atlantis has become an interface. A surface onto which each person projects their lacks. Those who see in it lost technologies, clean energy, forgotten wisdom. Those who seek in it answers to today's world, to its speed, to its indifference. One could laugh at it. But it's too serious to be mocked. Because what we call Atlantis, today, is not a place. It's a refusal. A refusal of mute architecture, of cities that say nothing, of machines that exhaust. A refusal of this dry modernity, without promise. And in this refusal, there is beauty. Even in excess. Even in blur. When I come across these AI-generated images, with their translucent arches, their luminous domes, their silent squares, I can't help but believe in them. Not in the literal sense. But in the sense of lack. They are maps of a world we would want to deserve. I could speak of Tesla, of ether, of all these secondary narratives that aggregate. I could analyze. Dismantle. But I think that's not what matters. What matters is the way all this resonates. How it makes us walk. Search. Imagine. Truth, in all this, was never the question. It's just about still having a space where hoping functions. Sometimes I tell myself that Atlantis hasn't disappeared. That it's in us. Fragmented. Diffuse. A kind of negative of the real. Something we perceive in the margins, in the folds, in the silences. I think of those old staircases that lead nowhere. Of those walled-up doors we encounter in certain cities. Of those ruins we no longer look at. These are perhaps the real proofs. Not vestiges. Calls. So no, I don't believe in Atlantis the way one believes in a continent. But I believe in what this word displaces. I believe in what it makes possible. A mental space. An escape. A way to continue desiring. And in a world that shrinks, that's already a great deal. ",
        "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/atlantide-1.jpg?1750457453",
        "tags": ["essai", "atlantide"]
      }
    
  ]
}