{ "version": "https://jsonfeed.org/version/1.1", "title": "Le dibbouk", "home_page_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/", "feed_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/spip.php?page=feed_json", "language": "fr-FR", "items": [ { "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/40-jours.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/40-jours.html", "title": "40 jours ", "date_published": "2025-04-06T17:07:08Z", "date_modified": "2025-10-25T02:34:36Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "

( 40 jours \/ \u00e9criture quotidienne, \u00e0 partir d’une proposition diff\u00e9rente.<\/a><\/p>\n

Patrick B. 2022\nsommaire<\/strong> : Jour 1<\/a> \u00b7 Jour 2<\/a> \u00b7 Jour 3<\/a> \u00b7 Jour 4<\/a> \u00b7 Jour 5<\/a> \u00b7 Jour 6<\/a> \u00b7 Jour 7<\/a> \u00b7 Jour 8<\/a> \u00b7 Jour 9<\/a> \u00b7 Jour 10<\/a> \u00b7 Jour 11<\/a> \u00b7 Jour 12<\/a> \u00b7 Jour 13<\/a> \u00b7 Jour 14<\/a> \u00b7 Jour 15<\/a> \u00b7 Jour 16<\/a> \u00b7 Jour 17<\/a> \u00b7 Jour 18<\/a> \u00b7 Jour 19<\/a> \u00b7 Jour 20<\/a> \u00b7 Jour 21<\/a> \u00b7 Jour 22<\/a> \u00b7 Jour 23<\/a> \u00b7 Jour 24<\/a> \u00b7 Jour 25<\/a> \u00b7 Jour 26<\/a> \u00b7 Jour 27<\/a> \u00b7 Jour 28<\/a> \u00b7 Jour 29<\/a> \u00b7 Jour 30<\/a> \u00b7 Jour 31<\/a> \u00b7 Jour 32<\/a> \u00b7 Jour 33<\/a> \u00b7 Jour 34<\/a> \u00b7 Jour 35<\/a> \u00b7 Jour 36<\/a> \u00b7 Jour 37<\/a> \u00b7 Jour 38<\/a> \u00b7 Jour 39<\/a> \u00b7 Jour 40<\/a><\/em><\/p>\n


\n

Jour 1<\/a><\/h2>\n

contrainte<\/strong> : une suite de blocs o\u00f9 chaque fragment commence par une image mentale, d\u00e9crite de fa\u00e7on plastique, g\u00e9om\u00e9trique ou sensorielle sans narration, puis un : qui introduit la l\u00e9gende, l\u2019ancrage, la r\u00e9v\u00e9lation de ce que c\u2019est, ce que \u00e7a dit, ce que \u00e7a cache. C\u2019est un jeu de tension entre ce qu\u2019on voit et ce qu\u2019on comprend — ou pas.<\/em><\/p>\n


\nUne enfilade de fen\u00eatres bl\u00eames, des rectangles r\u00e9p\u00e9t\u00e9s, identiques, sur un ciel sourd, un jour sans lumi\u00e8re :\nRue entre Morillons et Dombasle, Paris 15e. Aucun nom. Il revient toujours. Pour voir s\u2019il est encore l\u00e0.\n

Une vitrine sans reflet, une surface trop propre, rien n\u2019y accroche, tout y glisse :\nL\u2019ancien marchand de couleurs. Disparu. Un salon l\u2019a remplac\u00e9. Lisse. Anonyme. Aucune odeur ne filtre.<\/p>\n

Un cri f\u00e9minin traverse la rue, \u00e9touff\u00e9, tordu. Ce n\u2019est pas pour lui. Il le re\u00e7oit quand m\u00eame :\n« Sophie », dit la voix. Lui entend « Magali ». Une marelle effac\u00e9e, des pigeons qui fuient. Un pass\u00e9 invent\u00e9.<\/p>\n

Un paquet de cornets surprises, fan\u00e9s, serr\u00e9s dans un panier de fil plastique, papier jauni, transparents gondol\u00e9s :\nIls sont encore l\u00e0. \u00c0 la boulangerie. Rien n\u2019a boug\u00e9. Il ne les prend pas. Il sait ce qu\u2019il y trouverait : plus rien.<\/p>\n

Une ombre dans le m\u00e9tro, visage tourn\u00e9 vers la vitre noire. Rien n\u2019y est visible. Pas m\u00eame soi :\nIl est reparti. Encore une fois. Mais il reviendra. Il manque un d\u00e9tail. Toujours un d\u00e9tail.<\/p>\n

<\/a><\/p>\n

Jour 2<\/h2>\n

contrainte<\/strong> \nUn texte qui produise un effet de mouvement par son encha\u00eenement fluide, sa syntaxe transparente, son progressif d\u00e9ploiement spatial.<\/em><\/p>\n


\n

Une goutte de sueur perle sur un index — minuscule bulle suspendue, pr\u00eate \u00e0 choir. L\u2019index, droit, appartient \u00e0 une main — elle-m\u00eame rattach\u00e9e \u00e0 un bras qui prolonge un torse, vertical, plant\u00e9 dans une pi\u00e8ce \u00e9troite o\u00f9 l\u2019air colle aux murs. Sur le sol, un linol\u00e9um d\u2019une teinte impossible \u00e0 nommer, entre beige vieilli et gris d\u2019abandon ; un livre cale une table bancale — Camus, en service secondaire. La fen\u00eatre, f\u00eal\u00e9e en haut \u00e0 gauche, laisse passer le souffle discontinu du quartier : rumeurs lointaines, moteur qui tousse, radio oubli\u00e9e dans une cuisine ouverte. Au bout de la rue, la gare laisse \u00e9chapper ses voix synth\u00e9tiques, appels au d\u00e9part \u00e9gren\u00e9s sur les haut-parleurs : voie B, train pour Lyon, quelques minutes de retard. La ville s\u2019ouvre alors, vague tentaculaire, empilement de murs, de silences, de gestes r\u00e9p\u00e9t\u00e9s dans mille autres pi\u00e8ces identiques. Plus loin, le pays — formes floues, limites politiques approximatives, d\u00e9coup\u00e9es comme \u00e0 la r\u00e8gle sur un fond d\u2019ignorance commune. Puis le continent, masse de terres grumeleuse pos\u00e9e sur une plaque tectonique agit\u00e9e d\u2019humeurs invisibles. Et plus loin encore : la plan\u00e8te, bleu pass\u00e9, balanc\u00e9e dans sa rotation, minuscule, caboss\u00e9e, accroch\u00e9e \u00e0 une \u00e9toile quelconque, dans un syst\u00e8me qui n\u2019a rien demand\u00e9 \u00e0 personne — et le cosmos tout autour, sans explication jointe, sans l\u00e9gende en marge, une \u00e9nigme vaste, en suspens, comme cette goutte de sueur au d\u00e9part de tout.<\/p>\n

Jour 3<\/a><\/h2>\n

contrainte<\/strong>\nCr\u00e9er une repr\u00e9sentation mentale d\u2019une fa\u00e7ade ouverte, o\u00f9 chaque compartiment de l\u2019espace contient un fragment de vie.\nC\u2019est un texte de dissection urbaine, de curiosit\u00e9 partag\u00e9e, un tableau mental \u00e0 la Perec.<\/em><\/p>\n


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Dans la premi\u00e8re pi\u00e8ce, un gar\u00e7on, quinze ans peut-\u00eatre, la t\u00eate contre la vitre d\u2019un train. Il regarde le paysage d\u00e9filer sans le voir. Dans ses mains, un livre entrouvert. Il ne lit pas.<\/p>\n

Plus haut, dans une autre pi\u00e8ce, la lumi\u00e8re est jaune. Une fille, droite comme une statue, attend devant une maison basse. Dans la cour, un gar\u00e7on l\u2019enlace maladroitement. Leurs visages sont proches, mais il n\u2019y a pas de baiser.<\/p>\n

Un \u00e9tage plus bas, une table en bois, un linol\u00e9um froid, une assiette de soupe. Une Gitane se consume dans un cendrier Cinzano. Un vieil homme boit un verre de blanc lim\u00e9. La t\u00e9l\u00e9 est allum\u00e9e, personne ne la regarde.<\/p>\n

Au centre, une chambre de pension. Un gar\u00e7on, en uniforme, tente un demi-soleil \u00e0 la barre fixe, en vain. Un pion passe entre les tables avec des lettres \u00e0 distribuer. Le gar\u00e7on ouvre l\u2019enveloppe comme on ouvre un pi\u00e8ge.<\/p>\n

\u00c0 gauche, dans une pi\u00e8ce \u00e9troite, un gar\u00e7on relit une lettre au bord de la Viosne. Il marche. Il plisse les yeux. Il cherche un secret derri\u00e8re les mots simples. Il s\u2019accroche \u00e0 cette id\u00e9e-l\u00e0 comme \u00e0 une corde lisse.<\/p>\n

\u00c0 droite, dans une autre pi\u00e8ce du m\u00eame \u00e9tage, il r\u00e9dige une r\u00e9ponse. Il froisse. Il recommence. Il d\u00e9chire. Il recommence encore. Une lumi\u00e8re faible tombe sur le bureau. Il gratte le papier jusqu\u2019\u00e0 ce qu\u2019il ne reste que lui.<\/p>\n

Plus haut encore, un atelier pr\u00eat\u00e9. Un \u00e9vier, un paquet de lettres. \u00c0 dix heures trente, il craque une allumette. Le feu ronge l\u2019encre, les plis, les souvenirs. Il regarde sans bouger. Les flammes l\u00e8chent l\u2019\u00e9vier. Rien ne crie.<\/p>\n

Sur le toit, il y a la sc\u00e8ne qu\u2019il ne regarde plus : deux corps enlac\u00e9s dans une cour de ferme. Elle rougit, confuse. L\u2019autre gar\u00e7on se retourne : un visage qu\u2019il conna\u00eet, qu\u2019elle avait dit d\u00e9tester. Il sourit, triste. Puis il s\u2019en va.<\/p>\n

Jour 4<\/a><\/h2>\n

contrainte<\/strong><\/p>\n