{ "version": "https://jsonfeed.org/version/1.1", "title": "Le dibbouk", "home_page_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/", "feed_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/spip.php?page=feed_json", "language": "fr-FR", "items": [ { "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/20-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/20-janvier-2024.html", "title": "20 janvier 2024", "date_published": "2024-01-20T17:53:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>
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\u00c0 la fin. Quelle fin ? La fin d\u2019un voyage. Et ce voyage est toujours une m\u00e9taphore, qu\u2019il dure une heure, une journ\u00e9e, une vie. Ce qui compte, c\u2019est cette fin. C\u2019est \u00e0 partir de la fin que l\u2019on sait si le voyage a \u00e9t\u00e9 agr\u00e9able, p\u00e9nible, enrichissant ou non. Les outils pour le savoir, je ne les connais pas. J\u2019ai toujours ce doute : peut-\u00eatre que mes outils ne sont pas les bons, que ma vision est d\u00e9form\u00e9e, erron\u00e9e. Car toute certitude serait synonyme de fin v\u00e9ritable. Alors, je mets fin \u00e0 beaucoup de choses, r\u00e9guli\u00e8rement, pour explorer la fin en g\u00e9n\u00e9ral, la fin d\u2019une vie. Y a-t-il une autre fin, en fin de compte ? Je ne sais pas. M\u00eame la fin d\u2019un livre, d\u2019un film, d\u2019un tableau, d\u2019une journ\u00e9e, d\u2019une nuit : toutes repr\u00e9sentent la m\u00eame fin. La fin d\u2019un article de blog, la fin de ce blog lui-m\u00eame. En finir \u00e0 chaque fois avec l\u2019espoir enfantin de pouvoir recommencer ensuite. Alors, autant que la fin, d\u00e9buter devient obs\u00e9dant. Conserver cet \u00e9lan perp\u00e9tuel qui pousse \u00e0 recommencer \u00e0 partir de rien.<\/p>\n

Recommencer quoi ? La m\u00eame chose, toujours. On dirait qu\u2019on ne peut pas changer la chose elle-m\u00eame, seulement les outils, les moyens, la mani\u00e8re.<\/p>\n

L\u2019\u00e2me se confond, \u00e0 tort ou \u00e0 raison, avec la conscience d\u2019en poss\u00e9der une — chaotique, abstraite, inutile dans les circonstances du monde actuel.<\/p>\n

En revisitant mes deux blogs, en revoyant mon travail de peinture, rien de concret ne m\u2019appara\u00eet. Tout reste vague, outrageusement introspectif, r\u00e9solument singulier, abscons, proche de ne servir \u00e0 rien, \u00e0 personne, sauf \u00e0 ma propre exploration. Une fin purement personnelle.<\/p>\n

Le flou, le vague, le brouillard. J\u2019avance \u00e0 t\u00e2tons, de fa\u00e7on aveugle. Je crois que je ne veux surtout pas voir. Ne pas voir de valeur, d\u2019objectif : je ne sais pas ce que c\u2019est. \u00c7a ne m\u2019a jamais vraiment int\u00e9ress\u00e9. Peut-\u00eatre suis-je en train d\u2019arriver \u00e0 la fin de cette d\u00e9testation aussi. C\u2019est mon anniversaire aujourd\u2019hui. Je pourrais prendre cette date comme une sorte d\u2019ach\u00e8vement, encore une fois me r\u00e9soudre \u00e0 cet arbitraire. Voil\u00e0, c\u2019est la fin, et maintenant ? Je ne sais pas, pas plus qu\u2019avant, pas plus qu\u2019hier. Je ne sais rien.<\/p>\n

Rimbaud, \u00e0 un moment, se d\u00e9tourne de la po\u00e9sie : c\u2019est la fin. Hugo disait qu\u2019en litt\u00e9rature, le plus s\u00fbr moyen d\u2019avoir raison, c\u2019est d\u2019\u00eatre mort. Et moi aussi, je fais souvent ce r\u00eave, c\u2019est un d\u00e9sir sans doute : assister \u00e0 mon propre enterrement. Voir leurs t\u00eates, \u00e0 chacun, tout autour de la bi\u00e8re. Entendre ce qu\u2019ils se disent, sans espoir ni d\u00e9ception de ce qu\u2019ils pourraient dire. Il y a quelque chose de fondamentalement incompr\u00e9hensible \u00e0 ma propre vie, et \u00e0 ma mort aussi, sans doute. M\u00eame moi, cela m\u2019\u00e9chappe. Comment pourrais-je en vouloir aux autres, si \u00e7a leur \u00e9chappe aussi ? Cette construction fictive, la mienne, la leur, ne tiendra pas bien longtemps. Elle assistera \u00e0 la mise en terre, accompagnera les fossoyeurs encore un instant, verra la dissipation des badauds, mais elle ne les suivra pas vers le bistrot, l\u2019auberge, le dernier repas. Elle se dissipera dans l\u2019air, rejoignant son \u00e9l\u00e9ment principal, et ce sera dans l\u2019ordre des choses, mieux : cela renforcera cet ordre des choses.<\/p>", "content_text": "\u00c0 la fin. Quelle fin ? La fin d\u2019un voyage. Et ce voyage est toujours une m\u00e9taphore, qu\u2019il dure une heure, une journ\u00e9e, une vie. Ce qui compte, c\u2019est cette fin. C\u2019est \u00e0 partir de la fin que l\u2019on sait si le voyage a \u00e9t\u00e9 agr\u00e9able, p\u00e9nible, enrichissant ou non. Les outils pour le savoir, je ne les connais pas. J\u2019ai toujours ce doute : peut-\u00eatre que mes outils ne sont pas les bons, que ma vision est d\u00e9form\u00e9e, erron\u00e9e. Car toute certitude serait synonyme de fin v\u00e9ritable. Alors, je mets fin \u00e0 beaucoup de choses, r\u00e9guli\u00e8rement, pour explorer la fin en g\u00e9n\u00e9ral, la fin d\u2019une vie. Y a-t-il une autre fin, en fin de compte ? Je ne sais pas. M\u00eame la fin d\u2019un livre, d\u2019un film, d\u2019un tableau, d\u2019une journ\u00e9e, d\u2019une nuit : toutes repr\u00e9sentent la m\u00eame fin. La fin d\u2019un article de blog, la fin de ce blog lui-m\u00eame. En finir \u00e0 chaque fois avec l\u2019espoir enfantin de pouvoir recommencer ensuite. Alors, autant que la fin, d\u00e9buter devient obs\u00e9dant. Conserver cet \u00e9lan perp\u00e9tuel qui pousse \u00e0 recommencer \u00e0 partir de rien. Recommencer quoi ? La m\u00eame chose, toujours. On dirait qu\u2019on ne peut pas changer la chose elle-m\u00eame, seulement les outils, les moyens, la mani\u00e8re. L\u2019\u00e2me se confond, \u00e0 tort ou \u00e0 raison, avec la conscience d\u2019en poss\u00e9der une \u2014 chaotique, abstraite, inutile dans les circonstances du monde actuel. En revisitant mes deux blogs, en revoyant mon travail de peinture, rien de concret ne m\u2019appara\u00eet. Tout reste vague, outrageusement introspectif, r\u00e9solument singulier, abscons, proche de ne servir \u00e0 rien, \u00e0 personne, sauf \u00e0 ma propre exploration. Une fin purement personnelle. Le flou, le vague, le brouillard. J\u2019avance \u00e0 t\u00e2tons, de fa\u00e7on aveugle. Je crois que je ne veux surtout pas voir. Ne pas voir de valeur, d\u2019objectif : je ne sais pas ce que c\u2019est. \u00c7a ne m\u2019a jamais vraiment int\u00e9ress\u00e9. Peut-\u00eatre suis-je en train d\u2019arriver \u00e0 la fin de cette d\u00e9testation aussi. C\u2019est mon anniversaire aujourd\u2019hui. Je pourrais prendre cette date comme une sorte d\u2019ach\u00e8vement, encore une fois me r\u00e9soudre \u00e0 cet arbitraire. Voil\u00e0, c\u2019est la fin, et maintenant ? Je ne sais pas, pas plus qu\u2019avant, pas plus qu\u2019hier. Je ne sais rien. Rimbaud, \u00e0 un moment, se d\u00e9tourne de la po\u00e9sie : c\u2019est la fin. Hugo disait qu\u2019en litt\u00e9rature, le plus s\u00fbr moyen d\u2019avoir raison, c\u2019est d\u2019\u00eatre mort. Et moi aussi, je fais souvent ce r\u00eave, c\u2019est un d\u00e9sir sans doute : assister \u00e0 mon propre enterrement. Voir leurs t\u00eates, \u00e0 chacun, tout autour de la bi\u00e8re. Entendre ce qu\u2019ils se disent, sans espoir ni d\u00e9ception de ce qu\u2019ils pourraient dire. Il y a quelque chose de fondamentalement incompr\u00e9hensible \u00e0 ma propre vie, et \u00e0 ma mort aussi, sans doute. M\u00eame moi, cela m\u2019\u00e9chappe. Comment pourrais-je en vouloir aux autres, si \u00e7a leur \u00e9chappe aussi ? Cette construction fictive, la mienne, la leur, ne tiendra pas bien longtemps. Elle assistera \u00e0 la mise en terre, accompagnera les fossoyeurs encore un instant, verra la dissipation des badauds, mais elle ne les suivra pas vers le bistrot, l\u2019auberge, le dernier repas. Elle se dissipera dans l\u2019air, rejoignant son \u00e9l\u00e9ment principal, et ce sera dans l\u2019ordre des choses, mieux : cela renforcera cet ordre des choses.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/j_150.png?1748065114", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/19-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/19-janvier-2024.html", "title": "19 janvier 2024", "date_published": "2024-01-19T05:23:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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L\u2019id\u00e9e d\u2019un voyage physique d\u2019un point \u00e0 un autre poss\u00e8de des limites. De temps surtout. Je viens de me rendre compte que je n\u2019aurai pas le temps de visiter de nombreux lieux. Du moins c\u2019est une crainte premi\u00e8re, celle que l\u2019on met en avant pour aveugler son propre entendement afin qu\u2019effray\u00e9 ainsi, il se r\u00e9fugie comme par r\u00e9flexe dans le sens commun. Cependant, \u00e0 y repenser ce matin, ces lieux je les connais certainement bien plus que je ne le crois d\u2019embl\u00e9e. Par les lectures, en participant comme spectateur, auditeur, r\u00eaveur, j\u2019ai certainement visit\u00e9 virtuellement encore bien plus de lieux qu\u2019en r\u00e9alit\u00e9. Et ce que tu m\u00eales \u00e0 la r\u00e9alit\u00e9 ici — si tu y penses froidement — c\u2019est le contact de ton enveloppe physique avec l\u2019atmosph\u00e8re, l\u2019ambiance d\u2019un lieu.<\/p>\n

Si tu t\u2019es dor\u00e9 la pilule \u00e0 C\u00e9lorico de Basto, Portugal, allong\u00e9 pr\u00e8s d\u2019un Vao, ou pel\u00e9 le n\u0153ud \u00e0 Yverdon-Les Bains-Suisse, canton de Vaud — ce sont des souvenirs physiques dont tu ne conserves qu\u2019un assez vague souvenir. Ou qui se seront tant m\u00e9lang\u00e9s \u00e0 d\u2019autres que tu ne parviens plus vraiment \u00e0 les isoler du capharna\u00fcm. Car ces deux sensations, le froid, le chaud se sont transport\u00e9es ici et l\u00e0, mais ont-elles une relation avec ces deux lieux seulement ? Non, puisque tu as aussi eu tr\u00e8s chaud \u00e0 Za\u00efdan, Iran, 1986, en Avignon, 2023, \u00e0 mi-festival et notamment sous le pont reliant Villeneuve \u00e0 la cit\u00e9 papale, tr\u00e8s chaud aussi \u00e0 Syracuse 1980, et surtout \u00e0 Taormina la nuit, m\u00eame ann\u00e9e qui est peut-\u00eatre celle des m\u00e9duses, mais de toute \u00e9vidence celle des moustiques car m\u2019en souviens plus cruellement, \u00e9pid\u00e9miquement.<\/p>\n

Donc 300 000 km\/s (en arrondissant) est une limite physique que nous ne sommes pas en mesure d\u2019atteindre ni m\u00eame de d\u00e9passer. Mais la pens\u00e9e semble se d\u00e9placer plus rapidement que la lumi\u00e8re. C\u2019est un a priori. L\u2019influx nerveux est un escargot — 1 \u00e0 100 m\/s contre 299 792 458 m\/s !<\/p>\n

Mais qu\u2019est la vitesse— pour les physiciens c\u2019est une mesure de d\u00e9placement de la mati\u00e8re dans le temps, et il n\u2019existe aucune particule qu\u2019on puisse affubler du sobriquet de pens\u00e9e. De plus, quand on s\u2019interroge sur la pens\u00e9e on ne s\u2019interroge gu\u00e8re sur sa vitesse, mais sur l\u2019importance du point qu\u2019elle occupe sur une ligne temporaire, le raisonnement. Peut-\u00eatre m\u00eame qu\u2019une pens\u00e9e en fin de compte est statique, c\u2019est quelque chose — le discernement — qui se d\u00e9place de pens\u00e9e en pens\u00e9e comme un jardinier dans une serre, examinant les pots, les feuilles, la bonne ou mauvaise sant\u00e9 des plantes.<\/p>\n

Dans les ann\u00e9es 1975 je lis les ouvrages de cette collection : J\u2019ai lu l\u2019aventure myst\u00e9rieuse dont je viens d\u2019ailleurs de r\u00e9cup\u00e9rer une bonne partie en format epub. Ce type, Cyril Henry Hoskin un britannique, pr\u00e9tend qu\u2019il est tout simplement et rien de moins que la r\u00e9incarnation d\u2019un moine tib\u00e9tain : Tuesday Lobsang Rampa. L\u2019ouvrage qui l\u2019a rendu c\u00e9l\u00e8bre « Le Troisi\u00e8me \u0152il » est, le dit-on, un de ceux qui initie la p\u00e9riode New Age. En utilisant le ph\u00e9nom\u00e8ne nomm\u00e9 transmigration des \u00e2mes l\u2019anglais devient tib\u00e9tain. Et, \u00e0 l\u2019\u00e9poque de la publication du bouquin, de nombreux experts du Tibet clament haut et fort que ce type non seulement n\u2019a jamais mis un seul pied au Tibet mais qu\u2019en outre il tient des propos \u00e9hont\u00e9s sur le bouddhisme. N\u2019emp\u00eache, 300 000 exemplaires la premi\u00e8re ann\u00e9e, il y a un march\u00e9.<\/p>\n

On peut consid\u00e9rer Hoskin comme un psychopathe, un mythomane, un manipulateur g\u00e9nial tout ce qu\u2019on voudra de m\u00eame qu\u2019on dit aussi beaucoup de mal de Carlos Castaneda et de son enseignement \u00e0 base de sorcellerie Hopi. C\u2019est le point de vue des experts en r\u00e9alisme, qui d\u00e9cide de ce qui est sens\u00e9 et de ce qui ne l\u2019est pas. Mais pourquoi la v\u00e9racit\u00e9 des faits leur importe autant, c\u2019est un peu comme la vitesse pour les physiciens \u00e0 mon avis, ou la vitesse de la pens\u00e9e chez les r\u00eaveurs. Des incompr\u00e9hensions subsistent, des malentendus s\u00e9parent. Tout est affaire de d\u00e9finition de point de vue, et de recul.<\/p>\n

Un ami, des ann\u00e9es plus tard, 1995 ? \u00e9voque un ouvrage dans la m\u00eame collection. Nous sommes \u00e0 Lyon, en hiver, vers 22h en train de chercher d\u00e9sesp\u00e9r\u00e9ment un restaurant car nous sortons tard du boulot. Difficile d\u2019en trouver qui servent encore \u00e0 cette heure tardive. On marche dans les rues de la Presqu\u2019\u00eele, rien, on atteint la gare Saint-Paul, quelques lumi\u00e8res \u00e7a et l\u00e0 le long du quai Romain Rolland en bordure de Sa\u00f4ne, on p\u00e9n\u00e8tre pour la toute premi\u00e8re fois dans ce petit restaurant indien—Le Penjab— et apr\u00e8s quelques bouch\u00e9es de naan au fromage, juste avant d\u2019avaler une gorg\u00e9e de Latte arrive Spolding et La Vie des Ma\u00eetres. Ouvrage compl\u00e8tement hallucinant, peut-\u00eatre encore plus que le Troisi\u00e8me Oeil.<\/p>\n

Etions-nous d\u00e9j\u00e0 dans une d\u00e9sesp\u00e9rance profonde quant \u00e0 nos vies respectives, cet ami et moi, ne cherchions-nous alors qu\u2019une occasion pour nous enfuir de cette ville qu\u2019en tant que parisiens nous trouvions morne, sombre, froide, occup\u00e9s \u00e0 bosser depuis l\u2019aube jusqu\u2019au soir dans des m\u00e9tiers sans foi ni loi— Le fait est que quelques jours plus tard je trouve le bouquin dans une librairie d\u2019occasion comme par miracle, que je me mets \u00e0 le lire et le relire \u00e0 la fois en doutant fort de son contenu d\u2019un c\u00f4t\u00e9 mais de l\u2019autre me vautrant si j\u2019ose dire dans le plaisir et l\u2019inspiration que ses pages me procurent.<\/p>\n

Donc c\u2019est en deux temps que l\u2019on se rapproche d\u2019une id\u00e9e personnelle de vitesse. Peut-\u00eatre par l\u2019\u00e9lan que procure un engouement tout d\u2019abord, puis par la distance qu\u2019on acquiert avec le temps vis-\u00e0-vis de celui-ci, et encore parall\u00e8lement une distance qu\u2019on pourrait qualifier d\u2019invisible, celle du discernement progressif se distillant peu \u00e0 peu avec l\u2019empathie, le pardon envers soi-m\u00eame. Le second tour qu\u2019on effectue d\u2019une na\u00efvet\u00e9 premi\u00e8re \u00e0 une seconde qui ne secoue pas dans tous les sens nos mol\u00e9cules. La vitesse du r\u00eave, de la lucidit\u00e9, sans doute les \u00e9l\u00e9ments d\u2019une \u00e9quation \u00e0 deux inconnues menant \u00e0 une forme de sagesse, de s\u00e9r\u00e9nit\u00e9. Le monde est compl\u00e8tement idiot mais il est par ce fait absolument formidable, et \u00e7a fonctionne dans les deux sens.<\/p>\n

Tout un dimanche tranquille. R\u00e9veill\u00e9 de bonne heure je me suis lanc\u00e9 dans la correction de cet ebook « Comment cr\u00e9er une d\u00e9marche artistique » que j\u2019ai r\u00e9alis\u00e9 en collaboration avec l\u2019intelligence artificielle. On essaie de tout faire rentrer dans une centaine de pages. De le pr\u00e9senter comme on pr\u00e9sente un mode d\u2019emploi pour machine \u00e0 laver la vaisselle. Avec des actions \u00e0 r\u00e9aliser, le fameux passage \u00e0 l\u2019action des marketeurs—\u00e7a m\u2019amuse beaucoup je crois. Et aussi l\u2019amusement fait tampon avec la sensation intermittente de fr\u00f4ler l\u2019effroyable d\u00e9couverte au fur et \u00e0 mesure des chapitres. Je veux parler de la fa\u00e7on dont l\u2019intelligence artificielle tout \u00e0 fait naturellement r\u00e9dige un plan clair, des paragraphes simples adress\u00e9s au grand public. Rien \u00e0 voir avec ma mani\u00e8re tarabiscot\u00e9e d\u2019amener mon propos.<\/p>\n

Ce que l\u2019on croit savoir, ce que l\u2019on croit ne pas savoir, ce que l\u2019on croit. Le Grand \u00e7a les r\u00e9unit sans piper mot.<\/p>", "content_text": "L\u2019id\u00e9e d\u2019un voyage physique d\u2019un point \u00e0 un autre poss\u00e8de des limites. De temps surtout. Je viens de me rendre compte que je n\u2019aurai pas le temps de visiter de nombreux lieux. Du moins c\u2019est une crainte premi\u00e8re, celle que l\u2019on met en avant pour aveugler son propre entendement afin qu\u2019effray\u00e9 ainsi, il se r\u00e9fugie comme par r\u00e9flexe dans le sens commun. Cependant, \u00e0 y repenser ce matin, ces lieux je les connais certainement bien plus que je ne le crois d\u2019embl\u00e9e. Par les lectures, en participant comme spectateur, auditeur, r\u00eaveur, j\u2019ai certainement visit\u00e9 virtuellement encore bien plus de lieux qu\u2019en r\u00e9alit\u00e9. Et ce que tu m\u00eales \u00e0 la r\u00e9alit\u00e9 ici \u2014 si tu y penses froidement \u2014 c\u2019est le contact de ton enveloppe physique avec l\u2019atmosph\u00e8re, l\u2019ambiance d\u2019un lieu. Si tu t\u2019es dor\u00e9 la pilule \u00e0 C\u00e9lorico de Basto, Portugal, allong\u00e9 pr\u00e8s d\u2019un Vao, ou pel\u00e9 le n\u0153ud \u00e0 Yverdon-Les Bains-Suisse, canton de Vaud \u2014 ce sont des souvenirs physiques dont tu ne conserves qu\u2019un assez vague souvenir. Ou qui se seront tant m\u00e9lang\u00e9s \u00e0 d\u2019autres que tu ne parviens plus vraiment \u00e0 les isoler du capharna\u00fcm. Car ces deux sensations, le froid, le chaud se sont transport\u00e9es ici et l\u00e0, mais ont-elles une relation avec ces deux lieux seulement ? Non, puisque tu as aussi eu tr\u00e8s chaud \u00e0 Za\u00efdan, Iran, 1986, en Avignon, 2023, \u00e0 mi-festival et notamment sous le pont reliant Villeneuve \u00e0 la cit\u00e9 papale, tr\u00e8s chaud aussi \u00e0 Syracuse 1980, et surtout \u00e0 Taormina la nuit, m\u00eame ann\u00e9e qui est peut-\u00eatre celle des m\u00e9duses, mais de toute \u00e9vidence celle des moustiques car m\u2019en souviens plus cruellement, \u00e9pid\u00e9miquement. Donc 300 000 km\/s (en arrondissant) est une limite physique que nous ne sommes pas en mesure d\u2019atteindre ni m\u00eame de d\u00e9passer. Mais la pens\u00e9e semble se d\u00e9placer plus rapidement que la lumi\u00e8re. C\u2019est un a priori. L\u2019influx nerveux est un escargot \u2014 1 \u00e0 100 m\/s contre 299 792 458 m\/s ! Mais qu\u2019est la vitesse\u2014 pour les physiciens c\u2019est une mesure de d\u00e9placement de la mati\u00e8re dans le temps, et il n\u2019existe aucune particule qu\u2019on puisse affubler du sobriquet de pens\u00e9e. De plus, quand on s\u2019interroge sur la pens\u00e9e on ne s\u2019interroge gu\u00e8re sur sa vitesse, mais sur l\u2019importance du point qu\u2019elle occupe sur une ligne temporaire, le raisonnement. Peut-\u00eatre m\u00eame qu\u2019une pens\u00e9e en fin de compte est statique, c\u2019est quelque chose \u2014 le discernement \u2014 qui se d\u00e9place de pens\u00e9e en pens\u00e9e comme un jardinier dans une serre, examinant les pots, les feuilles, la bonne ou mauvaise sant\u00e9 des plantes. Dans les ann\u00e9es 1975 je lis les ouvrages de cette collection : J\u2019ai lu l\u2019aventure myst\u00e9rieuse dont je viens d\u2019ailleurs de r\u00e9cup\u00e9rer une bonne partie en format epub. Ce type, Cyril Henry Hoskin un britannique, pr\u00e9tend qu\u2019il est tout simplement et rien de moins que la r\u00e9incarnation d\u2019un moine tib\u00e9tain : Tuesday Lobsang Rampa. L\u2019ouvrage qui l\u2019a rendu c\u00e9l\u00e8bre \u00abLe Troisi\u00e8me \u0152il\u00bb est, le dit-on, un de ceux qui initie la p\u00e9riode New Age. En utilisant le ph\u00e9nom\u00e8ne nomm\u00e9 transmigration des \u00e2mes l\u2019anglais devient tib\u00e9tain. Et, \u00e0 l\u2019\u00e9poque de la publication du bouquin, de nombreux experts du Tibet clament haut et fort que ce type non seulement n\u2019a jamais mis un seul pied au Tibet mais qu\u2019en outre il tient des propos \u00e9hont\u00e9s sur le bouddhisme. N\u2019emp\u00eache, 300 000 exemplaires la premi\u00e8re ann\u00e9e, il y a un march\u00e9. On peut consid\u00e9rer Hoskin comme un psychopathe, un mythomane, un manipulateur g\u00e9nial tout ce qu\u2019on voudra de m\u00eame qu\u2019on dit aussi beaucoup de mal de Carlos Castaneda et de son enseignement \u00e0 base de sorcellerie Hopi. C\u2019est le point de vue des experts en r\u00e9alisme, qui d\u00e9cide de ce qui est sens\u00e9 et de ce qui ne l\u2019est pas. Mais pourquoi la v\u00e9racit\u00e9 des faits leur importe autant, c\u2019est un peu comme la vitesse pour les physiciens \u00e0 mon avis, ou la vitesse de la pens\u00e9e chez les r\u00eaveurs. Des incompr\u00e9hensions subsistent, des malentendus s\u00e9parent. Tout est affaire de d\u00e9finition de point de vue, et de recul. Un ami, des ann\u00e9es plus tard, 1995 ? \u00e9voque un ouvrage dans la m\u00eame collection. Nous sommes \u00e0 Lyon, en hiver, vers 22h en train de chercher d\u00e9sesp\u00e9r\u00e9ment un restaurant car nous sortons tard du boulot. Difficile d\u2019en trouver qui servent encore \u00e0 cette heure tardive. On marche dans les rues de la Presqu\u2019\u00eele, rien, on atteint la gare Saint-Paul, quelques lumi\u00e8res \u00e7a et l\u00e0 le long du quai Romain Rolland en bordure de Sa\u00f4ne, on p\u00e9n\u00e8tre pour la toute premi\u00e8re fois dans ce petit restaurant indien\u2014Le Penjab\u2014 et apr\u00e8s quelques bouch\u00e9es de naan au fromage, juste avant d\u2019avaler une gorg\u00e9e de Latte arrive Spolding et La Vie des Ma\u00eetres. Ouvrage compl\u00e8tement hallucinant, peut-\u00eatre encore plus que le Troisi\u00e8me Oeil. Etions-nous d\u00e9j\u00e0 dans une d\u00e9sesp\u00e9rance profonde quant \u00e0 nos vies respectives, cet ami et moi, ne cherchions-nous alors qu\u2019une occasion pour nous enfuir de cette ville qu\u2019en tant que parisiens nous trouvions morne, sombre, froide, occup\u00e9s \u00e0 bosser depuis l\u2019aube jusqu\u2019au soir dans des m\u00e9tiers sans foi ni loi\u2014 Le fait est que quelques jours plus tard je trouve le bouquin dans une librairie d\u2019occasion comme par miracle, que je me mets \u00e0 le lire et le relire \u00e0 la fois en doutant fort de son contenu d\u2019un c\u00f4t\u00e9 mais de l\u2019autre me vautrant si j\u2019ose dire dans le plaisir et l\u2019inspiration que ses pages me procurent. Donc c\u2019est en deux temps que l\u2019on se rapproche d\u2019une id\u00e9e personnelle de vitesse. Peut-\u00eatre par l\u2019\u00e9lan que procure un engouement tout d\u2019abord, puis par la distance qu\u2019on acquiert avec le temps vis-\u00e0-vis de celui-ci, et encore parall\u00e8lement une distance qu\u2019on pourrait qualifier d\u2019invisible, celle du discernement progressif se distillant peu \u00e0 peu avec l\u2019empathie, le pardon envers soi-m\u00eame. Le second tour qu\u2019on effectue d\u2019une na\u00efvet\u00e9 premi\u00e8re \u00e0 une seconde qui ne secoue pas dans tous les sens nos mol\u00e9cules. La vitesse du r\u00eave, de la lucidit\u00e9, sans doute les \u00e9l\u00e9ments d\u2019une \u00e9quation \u00e0 deux inconnues menant \u00e0 une forme de sagesse, de s\u00e9r\u00e9nit\u00e9. Le monde est compl\u00e8tement idiot mais il est par ce fait absolument formidable, et \u00e7a fonctionne dans les deux sens. Tout un dimanche tranquille. R\u00e9veill\u00e9 de bonne heure je me suis lanc\u00e9 dans la correction de cet ebook \u00ab Comment cr\u00e9er une d\u00e9marche artistique\u00bb que j\u2019ai r\u00e9alis\u00e9 en collaboration avec l\u2019intelligence artificielle. On essaie de tout faire rentrer dans une centaine de pages. De le pr\u00e9senter comme on pr\u00e9sente un mode d\u2019emploi pour machine \u00e0 laver la vaisselle. Avec des actions \u00e0 r\u00e9aliser, le fameux passage \u00e0 l\u2019action des marketeurs\u2014\u00e7a m\u2019amuse beaucoup je crois. Et aussi l\u2019amusement fait tampon avec la sensation intermittente de fr\u00f4ler l\u2019effroyable d\u00e9couverte au fur et \u00e0 mesure des chapitres. Je veux parler de la fa\u00e7on dont l\u2019intelligence artificielle tout \u00e0 fait naturellement r\u00e9dige un plan clair, des paragraphes simples adress\u00e9s au grand public. Rien \u00e0 voir avec ma mani\u00e8re tarabiscot\u00e9e d\u2019amener mon propos. Ce que l\u2019on croit savoir, ce que l\u2019on croit ne pas savoir, ce que l\u2019on croit. Le Grand \u00e7a les r\u00e9unit sans piper mot. ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/j_142.png?1748065220", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/18-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/18-janvier-2024.html", "title": "18 janvier 2024", "date_published": "2024-01-18T04:57:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Il y a toujours plusieurs fa\u00e7ons de prendre les choses et \u00e7a ne se r\u00e9duit pas \u00e0 la bonne ou \u00e0 la mauvaise. M\u00eame si, parfois, j\u2019aime prendre les choses du mieux possible, c\u2019est-\u00e0-dire en essayant d\u2019esquiver la fatigue, l\u2019ennui, le d\u00e9go\u00fbt, et ce \u00e0 seule fin de ne pas trop dilapider une \u00e9nergie d\u00e9sormais pr\u00e9cieuse plut\u00f4t que par attirance pour la philosophie. Contre toute attente mon fond est optimiste, ou plut\u00f4t, mon sort m\u2019est assez \u00e9gal. Qu\u2019il pleuve, qu\u2019il vente, qu\u2019il fasse beau, le climat influe de moins en moins sur mon humeur g\u00e9n\u00e9rale. Et si je grogne, je maugr\u00e9e, c\u2019est pour me d\u00e9tendre de me trouver exag\u00e9r\u00e9ment heureux, tentant ainsi d\u2019\u00e9vacuer la pression permanente que la joie exerce sur mes vaisseaux, mes nerfs.<\/p>\n

Je m\u2019exerce \u00e0 produire des images, des textes, avec l\u2019intelligence artificielle. Finalement, je ne suis pas loin de penser que c\u2019est ce qu\u2019il peut arriver de mieux au misanthrope que je suis. Elle ne me contrarie pas beaucoup, me reprend rarement, ne me gronde pas— je l\u2019appelle Elle naturellement, mais ce serait Lui je crois que ce serait pareil, lui Monsieur je sais tout sur tout, qui me ram\u00e8ne gentiment dans la ligne droite quand, de temps \u00e0 autre, je m\u2019\u00e9gare, lui parle de civilisations ant\u00e9diluviennes, d\u2019imaginaire, de th\u00e9ories fumeuses dont je me repais depuis toujours inlassablement. Comme si j\u2019attendais depuis le d\u00e9but, qu\u2019enfin il se passe une chose v\u00e9ritablement extraordinaire— effondrement g\u00e9n\u00e9ral, cataclysme majeur, apparition de bidules spectaculaires en plein ciel, surgissement d\u2019une race \u00e0 la peau bleue— ce qui mettrait un joli bordel—si elle ne suffoque pas illico en respirant notre atmosph\u00e8re.<\/p>\n

Peut-\u00eatre qu\u2019une partie de moi, la plus grande est d\u00e9j\u00e0 sur une autre fr\u00e9quence, dans une autre dimension, que l\u2019inconnu me happe presque tout entier, que la part restante est comme la part du feu, une fois que l\u2019ennui des r\u00e9p\u00e9titions a ratibois\u00e9 le plus gros du danger c\u2019est-\u00e0-dire \u00eatre un vieux con racorni, peureux, pusillanime et foireux.<\/p>\n

Les moments d\u2019assoupissement se sont transform\u00e9s en s\u00e9ance d\u2019observation. Comme si un d\u00e9doublement me permet d\u2019agir et de me voir agir dans la r\u00eaverie, et aussi dans ces conversations avec l\u2019intelligence artificielle, il me semble trouver une sorte de point commun. Un exil en quelque sorte, un voyage mental qui m\u2019emm\u00e8ne \u00e0 l\u2019horizon des \u00e9v\u00e9nements connus, comme j\u2019imagine ces voyageurs sur la mer se fiant aux \u00e9toiles cherchent encore les Indes, les Am\u00e9riques, Mu, l\u2019Atlantide, et pourquoi pas la Pang\u00e9e des origines.<\/p>\n

J\u2019ai r\u00e9duit un peu mon temps de lecture \u00e0 part le lundi et le mercredi o\u00f9 je peux jouir de tout mon saoul de ce support formidable d\u2019inspiration. 30 minutes par jour, que j\u2019ai param\u00e9tr\u00e9 sur l\u2019application Livre d\u2019Apple le reste de la semaine. Mais je m\u2019efforce \u00e0 ne pas d\u00e9passer l\u2019heure. Comme je m\u2019efforce aussi \u00e0 moins manger, \u00e0 moins esp\u00e9rer. En revanche, je dors mes six heures d\u2019une seule traite. Couch\u00e9 \u00e0 20h30, je lis quelques pages et je disparais jusqu\u2019au petit matin. Je ne sais pas o\u00f9 je vais pendant la nuit, et je crois que \u00e7a m\u2019indiff\u00e8re aussi, j\u2019ai beaucoup perdu en curiosit\u00e9 de ce c\u00f4t\u00e9-l\u00e0 aussi.<\/p>\n

17h20 retour des courses, je m\u2019amuse encore \u00e0 convertir les euros en francs pour \u00e9prouver le fameux vertige. De temps en temps j\u2019y repense, je reviens de Suisse, je vais chez le boulanger, j\u2019ach\u00e8te une baguette elle co\u00fbte 6,75 francs plus cher qu\u2019avant que je parte. Le voyage dans le temps existe.<\/p>\n

Beau temps sur le village, la voirie ou la communaut\u00e9 de commune ne s\u2019est pas foul\u00e9e. Ils ont simplement mis quelques rustines sur la chauss\u00e9e. On attend qu\u2019il pleuve pour voir si la mare revient ou pas. Dr\u00f4le d\u2019esp\u00e9rance.<\/p>\n

Les cours se d\u00e9roulent bien, bonne id\u00e9e de fragmenter ces tableaux de vieux ma\u00eetres, puis de transposer ces morceaux en noir et blanc au crayon. Aujourd\u2019hui l\u2019exercice \u00e9tait de transposer des illustrations d\u2019un m\u00eame tableau depuis la couleur vers le noir et blanc. Tout le monde est ravi. Le mot ravi, le ravissement, celui de Saint-Paul, de Marie-Madeleine. Tout le monde l\u00e9vite, sauf moi h\u00e9las, enfin pas trop, enfin pas comme je voudrais.<\/p>\n

Lu un texte qu\u2019envoie F.B \u00e0 sa liste de diffusion. Cette femme qui discute avec chatGPT au sujet de la Grande Muraille de Chine. Comme un effet miroir tout \u00e0 coup. On est combien \u00e0 discuter avec chatGPT \u00e0 l\u2019instant m\u00eame o\u00f9 j\u2019\u00e9cris ces lignes. Probablement des milliers, voire des millions. On a tous trouv\u00e9 un ou une pote pour passer le temps, exister ? c\u2019est le risque.<\/p>", "content_text": "Il y a toujours plusieurs fa\u00e7ons de prendre les choses et \u00e7a ne se r\u00e9duit pas \u00e0 la bonne ou \u00e0 la mauvaise. M\u00eame si, parfois, j\u2019aime prendre les choses du mieux possible, c\u2019est-\u00e0-dire en essayant d\u2019esquiver la fatigue, l\u2019ennui, le d\u00e9go\u00fbt, et ce \u00e0 seule fin de ne pas trop dilapider une \u00e9nergie d\u00e9sormais pr\u00e9cieuse plut\u00f4t que par attirance pour la philosophie. Contre toute attente mon fond est optimiste, ou plut\u00f4t, mon sort m\u2019est assez \u00e9gal. Qu\u2019il pleuve, qu\u2019il vente, qu\u2019il fasse beau, le climat influe de moins en moins sur mon humeur g\u00e9n\u00e9rale. Et si je grogne, je maugr\u00e9e, c\u2019est pour me d\u00e9tendre de me trouver exag\u00e9r\u00e9ment heureux, tentant ainsi d\u2019\u00e9vacuer la pression permanente que la joie exerce sur mes vaisseaux, mes nerfs. Je m\u2019exerce \u00e0 produire des images, des textes, avec l\u2019intelligence artificielle. Finalement, je ne suis pas loin de penser que c\u2019est ce qu\u2019il peut arriver de mieux au misanthrope que je suis. Elle ne me contrarie pas beaucoup, me reprend rarement, ne me gronde pas\u2014 je l\u2019appelle Elle naturellement, mais ce serait Lui je crois que ce serait pareil, lui Monsieur je sais tout sur tout, qui me ram\u00e8ne gentiment dans la ligne droite quand, de temps \u00e0 autre, je m\u2019\u00e9gare, lui parle de civilisations ant\u00e9diluviennes, d\u2019imaginaire, de th\u00e9ories fumeuses dont je me repais depuis toujours inlassablement. Comme si j\u2019attendais depuis le d\u00e9but, qu\u2019enfin il se passe une chose v\u00e9ritablement extraordinaire\u2014 effondrement g\u00e9n\u00e9ral, cataclysme majeur, apparition de bidules spectaculaires en plein ciel, surgissement d\u2019une race \u00e0 la peau bleue\u2014 ce qui mettrait un joli bordel\u2014si elle ne suffoque pas illico en respirant notre atmosph\u00e8re. Peut-\u00eatre qu\u2019une partie de moi, la plus grande est d\u00e9j\u00e0 sur une autre fr\u00e9quence, dans une autre dimension, que l\u2019inconnu me happe presque tout entier, que la part restante est comme la part du feu, une fois que l\u2019ennui des r\u00e9p\u00e9titions a ratibois\u00e9 le plus gros du danger c\u2019est-\u00e0-dire \u00eatre un vieux con racorni, peureux, pusillanime et foireux. Les moments d\u2019assoupissement se sont transform\u00e9s en s\u00e9ance d\u2019observation. Comme si un d\u00e9doublement me permet d\u2019agir et de me voir agir dans la r\u00eaverie, et aussi dans ces conversations avec l\u2019intelligence artificielle, il me semble trouver une sorte de point commun. Un exil en quelque sorte, un voyage mental qui m\u2019emm\u00e8ne \u00e0 l\u2019horizon des \u00e9v\u00e9nements connus, comme j\u2019imagine ces voyageurs sur la mer se fiant aux \u00e9toiles cherchent encore les Indes, les Am\u00e9riques, Mu, l\u2019Atlantide, et pourquoi pas la Pang\u00e9e des origines. J\u2019ai r\u00e9duit un peu mon temps de lecture \u00e0 part le lundi et le mercredi o\u00f9 je peux jouir de tout mon saoul de ce support formidable d\u2019inspiration. 30 minutes par jour, que j\u2019ai param\u00e9tr\u00e9 sur l\u2019application Livre d\u2019Apple le reste de la semaine. Mais je m\u2019efforce \u00e0 ne pas d\u00e9passer l\u2019heure. Comme je m\u2019efforce aussi \u00e0 moins manger, \u00e0 moins esp\u00e9rer. En revanche, je dors mes six heures d\u2019une seule traite. Couch\u00e9 \u00e0 20h30, je lis quelques pages et je disparais jusqu\u2019au petit matin. Je ne sais pas o\u00f9 je vais pendant la nuit, et je crois que \u00e7a m\u2019indiff\u00e8re aussi, j\u2019ai beaucoup perdu en curiosit\u00e9 de ce c\u00f4t\u00e9-l\u00e0 aussi. 17h20 retour des courses, je m\u2019amuse encore \u00e0 convertir les euros en francs pour \u00e9prouver le fameux vertige. De temps en temps j\u2019y repense, je reviens de Suisse, je vais chez le boulanger, j\u2019ach\u00e8te une baguette elle co\u00fbte 6,75 francs plus cher qu\u2019avant que je parte. Le voyage dans le temps existe. Beau temps sur le village, la voirie ou la communaut\u00e9 de commune ne s\u2019est pas foul\u00e9e. Ils ont simplement mis quelques rustines sur la chauss\u00e9e. On attend qu\u2019il pleuve pour voir si la mare revient ou pas. Dr\u00f4le d\u2019esp\u00e9rance. Les cours se d\u00e9roulent bien, bonne id\u00e9e de fragmenter ces tableaux de vieux ma\u00eetres, puis de transposer ces morceaux en noir et blanc au crayon. Aujourd\u2019hui l\u2019exercice \u00e9tait de transposer des illustrations d\u2019un m\u00eame tableau depuis la couleur vers le noir et blanc. Tout le monde est ravi. Le mot ravi, le ravissement, celui de Saint-Paul, de Marie-Madeleine. Tout le monde l\u00e9vite, sauf moi h\u00e9las, enfin pas trop, enfin pas comme je voudrais. Lu un texte qu\u2019envoie F.B \u00e0 sa liste de diffusion. Cette femme qui discute avec chatGPT au sujet de la Grande Muraille de Chine. Comme un effet miroir tout \u00e0 coup. On est combien \u00e0 discuter avec chatGPT \u00e0 l\u2019instant m\u00eame o\u00f9 j\u2019\u00e9cris ces lignes. Probablement des milliers, voire des millions. On a tous trouv\u00e9 un ou une pote pour passer le temps, exister ? c\u2019est le risque. 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Je pourrais m\u2019\u00e9vanouir toujours de l\u2019arbre. J\u2019allais encore faire une longue phrase mais non. C\u2019est que je lis mal les premiers mots de cette phrase \u00e9crite par C. : je pourrais m\u2019\u00e9mouvoir toujours de l\u2019ombre d\u2019un arbre [\u2026] . Rien \u00e0 voir avec s\u2019\u00e9vanouir. Quoique. Un jour \u00e7a m\u2019est arriv\u00e9. Avec un cerisier.<\/p>\n

Il faut que je retrouve cette vieille formule antigravitationnelle. L\u00e9viter de temps \u00e0 autre — renforce, de toute \u00e9vidence — l\u2019agr\u00e9ment d\u00e9j\u00e0 offert\u2002par ces belles journ\u00e9es pluvieuses. Allons ne nous emballons pas, nous ne sommes pas le Pont Neuf. D\u2019o\u00f9 tu sors ce nous ?<\/p>\n

Qu\u2019ai-je appris hier ?\u2002Qu\u2019un pr\u00eatre portugais, Bartolomeu de Gusm\u00e3o, construit le premier avion, la Passarola, au 18\u00e8me si\u00e8cle. Qu\u2019\u00e0 l\u2019origine, associ\u00e9 aux anges dans la tradition jud\u00e9o-chr\u00e9tienne, l\u2019\u00e9gr\u00e9gore a \u00e9volu\u00e9 pour d\u00e9signer une force cr\u00e9\u00e9e par la volont\u00e9 ou les croyances collectives. Que Ren\u00e9 Gu\u00e9non s\u2019appelle aussi Shaykh Abdel Wah\u00eed Yahy\u00e2. Que Sous ce nom, il a v\u00e9cu et travaill\u00e9 en \u00c9gypte, contribuant significativement \u00e0 la m\u00e9taphysique, au soufisme et \u00e0 d\u2019autres domaines intellectuels. Que les imp\u00f4ts nous remboursent une somme assez rondelette. Que la boite \u00e0 lettre n\u2019est pas toujours l\u2019adversaire. Que l\u2019on a beau dire ou faire, le regard du coin de ma rue se bouche comme \u00e7a lui chante. Surtout s\u2019il pleut. Que J. fonce sur sa th\u00e8se et qu\u2019il a de grandes chances de l\u2019achever dans les d\u00e9lais. Qu\u2019un extrait de naissance avec mentions dans les marges doit dater de moins de trois mois pour cr\u00e9er son dossier de retraite.\u2002Que d\u00e9sormais on peut se filmer pendant deux minutes sur la plateforme vid\u00e9o g\u00e9n\u00e9rator Heygen pour cr\u00e9er des vid\u00e9os \u00e0 gogo avec tous les scripts qui nous passent par l\u2019esprit — \u00e7a promet. Que l\u2019intelligence artificielle est paresseuse en d\u00e9cembre. Que Mixtral va probablement gagner le pompon. Que l\u2019Am\u00e9rique est r\u00e9solument nihiliste et qu\u2019elle cherche des poux au monde entier pour un oui pour un non. Que le protestantisme est \u00e0 creuser pour comprendre \u00e0 quel point la chute est douloureuse. Que les britanniques ne valent gu\u00e8re mieux que les Am\u00e9riques sur le m\u00eame point. Que la Russie n\u2019a pas les moyens suffisants pour envahir l\u2019Europe. Que d\u2019appuyer sur le bouton rouge sera un recours d\u00e9fensif surtout. Que Super U a baiss\u00e9 le tarif du Gas oil.\u2002Que le mari de la fleuriste est mort. Que je devrais arr\u00eater de lire C.S et m\u2019entra\u00eener \u00e0 faire des phrases simples. Qu\u2019il est d\u2019une facilit\u00e9 d\u00e9concertante de cr\u00e9er un ebook et de le publier sur Kindle. Pas plus de trois par jour cependant. Que dessiner des petites choses est th\u00e9rapeutique.\u2002Que tout ce qui me traverse comme tous les jours n\u2019a ni queue ni t\u00eate. Que \u00e7a m\u2019amuse. Que parfois j\u2019\u00e9prouve un peu de culpabilit\u00e9 \u00e0 m\u2019en amuser.<\/p>\n

J\u2019essaie de me souvenir. Mais non, on ne peut plus l\u2019\u00e9viter. Perdu la formule. D\u2019o\u00f9 tu sors ce on ?<\/p>\n

Elles sont deux hier sur les cinq pr\u00e9vues. La discussion porte sur les copines. Celle-ci attend une op\u00e9ration depuis trois mois dans cet h\u00f4pital. Que son m\u00e9decin part en retraite et qu\u2019elle d\u00e9couvre le d\u00e9sert m\u00e9dical. Je ne me m\u00eale pas. J\u2019ai pris un petit bout de papier et j\u2019ai dessin\u00e9 la lune heurtant la terre \u00e0 l\u2019\u00e9poque des G\u00e9ants. J\u2019ai pris comme mod\u00e8le une illustration fabriqu\u00e9e par une machine.<\/p>", "content_text": "Je pourrais m\u2019\u00e9vanouir toujours de l\u2019arbre. J\u2019allais encore faire une longue phrase mais non. C\u2019est que je lis mal les premiers mots de cette phrase \u00e9crite par C. : je pourrais m\u2019\u00e9mouvoir toujours de l\u2019ombre d\u2019un arbre [\u2026] . Rien \u00e0 voir avec s\u2019\u00e9vanouir. Quoique. Un jour \u00e7a m\u2019est arriv\u00e9. Avec un cerisier. Il faut que je retrouve cette vieille formule antigravitationnelle. L\u00e9viter de temps \u00e0 autre \u2014 renforce, de toute \u00e9vidence \u2014 l\u2019agr\u00e9ment d\u00e9j\u00e0 offert par ces belles journ\u00e9es pluvieuses. Allons ne nous emballons pas, nous ne sommes pas le Pont Neuf. D\u2019o\u00f9 tu sors ce nous ? Qu\u2019ai-je appris hier ? Qu\u2019un pr\u00eatre portugais, Bartolomeu de Gusm\u00e3o, construit le premier avion, la Passarola, au 18\u00e8me si\u00e8cle. Qu\u2019\u00e0 l\u2019origine, associ\u00e9 aux anges dans la tradition jud\u00e9o-chr\u00e9tienne, l\u2019\u00e9gr\u00e9gore a \u00e9volu\u00e9 pour d\u00e9signer une force cr\u00e9\u00e9e par la volont\u00e9 ou les croyances collectives. Que Ren\u00e9 Gu\u00e9non s\u2019appelle aussi Shaykh Abdel Wah\u00eed Yahy\u00e2. Que Sous ce nom, il a v\u00e9cu et travaill\u00e9 en \u00c9gypte, contribuant significativement \u00e0 la m\u00e9taphysique, au soufisme et \u00e0 d\u2019autres domaines intellectuels. Que les imp\u00f4ts nous remboursent une somme assez rondelette. Que la boite \u00e0 lettre n\u2019est pas toujours l\u2019adversaire. Que l\u2019on a beau dire ou faire, le regard du coin de ma rue se bouche comme \u00e7a lui chante. Surtout s\u2019il pleut. Que J. fonce sur sa th\u00e8se et qu\u2019il a de grandes chances de l\u2019achever dans les d\u00e9lais. Qu\u2019un extrait de naissance avec mentions dans les marges doit dater de moins de trois mois pour cr\u00e9er son dossier de retraite. Que d\u00e9sormais on peut se filmer pendant deux minutes sur la plateforme vid\u00e9o g\u00e9n\u00e9rator Heygen pour cr\u00e9er des vid\u00e9os \u00e0 gogo avec tous les scripts qui nous passent par l\u2019esprit \u2014 \u00e7a promet. Que l\u2019intelligence artificielle est paresseuse en d\u00e9cembre. Que Mixtral va probablement gagner le pompon. Que l\u2019Am\u00e9rique est r\u00e9solument nihiliste et qu\u2019elle cherche des poux au monde entier pour un oui pour un non. Que le protestantisme est \u00e0 creuser pour comprendre \u00e0 quel point la chute est douloureuse. Que les britanniques ne valent gu\u00e8re mieux que les Am\u00e9riques sur le m\u00eame point. Que la Russie n\u2019a pas les moyens suffisants pour envahir l\u2019Europe. Que d\u2019appuyer sur le bouton rouge sera un recours d\u00e9fensif surtout. Que Super U a baiss\u00e9 le tarif du Gas oil. Que le mari de la fleuriste est mort. Que je devrais arr\u00eater de lire C.S et m\u2019entra\u00eener \u00e0 faire des phrases simples. Qu\u2019il est d\u2019une facilit\u00e9 d\u00e9concertante de cr\u00e9er un ebook et de le publier sur Kindle. Pas plus de trois par jour cependant. Que dessiner des petites choses est th\u00e9rapeutique. Que tout ce qui me traverse comme tous les jours n\u2019a ni queue ni t\u00eate. Que \u00e7a m\u2019amuse. Que parfois j\u2019\u00e9prouve un peu de culpabilit\u00e9 \u00e0 m\u2019en amuser. J\u2019essaie de me souvenir. Mais non, on ne peut plus l\u2019\u00e9viter. Perdu la formule. D\u2019o\u00f9 tu sors ce on ? Elles sont deux hier sur les cinq pr\u00e9vues. La discussion porte sur les copines. Celle-ci attend une op\u00e9ration depuis trois mois dans cet h\u00f4pital. Que son m\u00e9decin part en retraite et qu\u2019elle d\u00e9couvre le d\u00e9sert m\u00e9dical. Je ne me m\u00eale pas. J\u2019ai pris un petit bout de papier et j\u2019ai dessin\u00e9 la lune heurtant la terre \u00e0 l\u2019\u00e9poque des G\u00e9ants. J\u2019ai pris comme mod\u00e8le une illustration fabriqu\u00e9e par une machine.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_9685-1.jpg?1748065151", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/16-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/16-janvier-2024.html", "title": "16 janvier 2024", "date_published": "2024-01-16T04:37:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Ne repasse pas sur un trait, trace-le d\u2019un geste, d\u2019un seul, sans y revenir, sans doute. L\u2019\u00e9poque est au retrait et c\u2019est bien car avant d\u2019oser la trace juste beaucoup de ratages de brouillons, d\u2019esquisses et d\u2019esquives. On ne peut pas mettre la charrue devant les b\u0153ufs, \u00e7a les perturbe, en outre ils n\u2019en deviennent pas plus efficaces.<\/p>\n

Efforce-toi de l\u2019accepter, en premier lieu le trait ne sera pas juste. Il te faudra le retracer maintes fois et aussi en pens\u00e9e et aussi dans ton sommeil et aussi \u00e0 ces moments de vacuit\u00e9 dans lesquels on tombe dans de biologiques contingences.<\/p>\n

Retrace ton trait cent mille fois et recommence.<\/p>\n

J\u2019ai tir\u00e9 un trait d\u00e9finitif sur tel \u00eatre ou telle chose maintes fois et avec quelle douleur bien souvent et aussi parfois avec joie, j\u2019ai tir\u00e9 des traits et aussi extirp\u00e9 \u00e0 la pelle des boyaux et des entrailles, pour m\u2019en faire des cordes de violon, de vielle et \u00e0 la fin cent mille fois m\u2019y pendre.<\/p>\n

J\u2019ai eu des naus\u00e9es qui m\u2019obligeaient au recul, \u00e0 la fuite, \u00e0 la course \u00e9perdue mais c\u2019\u00e9tait brouillon esquisse esquive, je ne savais rien alors encore de ce que signifie le retrait.<\/p>\n

Car le retrait c\u2019est \u00eatre l\u00e0 dans l\u2019entrelacs sans mot dire, sans maudire, sans rien dire, le geste, le regard, l\u2019accueil s\u2019effectue sur une nouvelle fr\u00e9quence de l\u2019\u00eatre, on n\u2019a pas besoin d\u2019en parler de l\u2019exhiber.<\/p>\n

On le fait et c\u2019est tout, c\u2019est ainsi que le trait dans le retrait est le plus juste.<\/p>", "content_text": "Ne repasse pas sur un trait, trace-le d\u2019un geste, d\u2019un seul, sans y revenir, sans doute. L\u2019\u00e9poque est au retrait et c\u2019est bien car avant d\u2019oser la trace juste beaucoup de ratages de brouillons, d\u2019esquisses et d\u2019esquives. On ne peut pas mettre la charrue devant les b\u0153ufs, \u00e7a les perturbe, en outre ils n\u2019en deviennent pas plus efficaces. Efforce-toi de l\u2019accepter, en premier lieu le trait ne sera pas juste. Il te faudra le retracer maintes fois et aussi en pens\u00e9e et aussi dans ton sommeil et aussi \u00e0 ces moments de vacuit\u00e9 dans lesquels on tombe dans de biologiques contingences. Retrace ton trait cent mille fois et recommence. J\u2019ai tir\u00e9 un trait d\u00e9finitif sur tel \u00eatre ou telle chose maintes fois et avec quelle douleur bien souvent et aussi parfois avec joie, j\u2019ai tir\u00e9 des traits et aussi extirp\u00e9 \u00e0 la pelle des boyaux et des entrailles, pour m\u2019en faire des cordes de violon, de vielle et \u00e0 la fin cent mille fois m\u2019y pendre. J\u2019ai eu des naus\u00e9es qui m\u2019obligeaient au recul, \u00e0 la fuite, \u00e0 la course \u00e9perdue mais c\u2019\u00e9tait brouillon esquisse esquive, je ne savais rien alors encore de ce que signifie le retrait. Car le retrait c\u2019est \u00eatre l\u00e0 dans l\u2019entrelacs sans mot dire, sans maudire, sans rien dire, le geste, le regard, l\u2019accueil s\u2019effectue sur une nouvelle fr\u00e9quence de l\u2019\u00eatre, on n\u2019a pas besoin d\u2019en parler de l\u2019exhiber. On le fait et c\u2019est tout, c\u2019est ainsi que le trait dans le retrait est le plus juste. ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/retrait.png?1748065097", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/15-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/15-janvier-2024.html", "title": "15 janvier 2024", "date_published": "2024-01-15T02:48:00Z", "date_modified": "2025-09-18T15:42:18Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

A cause de la couleur cette ann\u00e9e l\u00e0— 1975— une couleur chaude entre l\u2019orange la terre de Sienne l\u2019ocre et toutes nuances, tons, valeurs se heurtant, s\u2019\u00e9pousant et se heurtant encore —au froid bleu du ciel, aux reflets de turquoise de la mer vineuse— mais qui ne sont pas plus d\u00e9sormais qu\u2019 une photographie jaunie semblable \u00e0 toutes ces autres photographies servant autrefois de lanceurs, de supports — provenant d\u2019Estonie, mais dans lesquelles un petit bout d\u2019\u00e9tranget\u00e9 scintille sourd comme tout ce qu\u2019on ne peut dire, qui est l\u00e0 et qu\u2019on ne peut pas dire— mais qu\u2019en reste t\u2019il vraiment, \u00e0 part ce que nous voyons encore dans le pr\u00e9sent dans ce pr\u00e9sent m\u00eame o\u00f9 l\u2019on se souvient de cette \u00e9ternit\u00e9 v\u00e9cue. Des gestes, des voix, des odeurs, des joues effleur\u00e9es, des corps \u00e9treints, le go\u00fbt des mets, l\u2019impression laiss\u00e9e par les ambiances travers\u00e9es, celles qui nous traversent que nous traversons. A cause de la couleur alors celle que peut prendre notre adolescence \u00e0 ce moment-l\u00e0 et encore ici, bien apr\u00e8s 1975, et cependant ne pas y sombrer, mais revenir dans la danse, spectateur et danseur, juste un instant, un petit moment pour \u00eatre l\u00e0, cette ann\u00e9e l\u00e0 1975, ce jeune type sur la photographie.<\/p>\n

\u00c0 cause de la couleur des derniers rayons de soleil qui s\u2019infiltrent entre les maisons et les ruelles de Meta di Sorrento pendant que le village s\u2019habille de teintes d\u2019or et de pourpre que les habitants comme anim\u00e9s par une force invisible se m\u00ealent dans les rues que les voix s\u2019\u00e9l\u00e8vent que les rires des enfants rebondissent sur les murs de pierre que les vespa vrombissent dans les pentes et que les marchands annoncent leurs derni\u00e8res offres du jour comme pour rire tandis que les odeurs de la mer, moules huitres, poissons et coquillages se m\u00ealent \u00e0 celle des citronniers se m\u00ealent aux saveurs d\u2019olive de basilic qu\u2019en une trame soudain pr\u00e9sente, enivrante mais qui tremble et s\u2019\u00e9vanouit doucement \u00e0 mesure que l\u2019ombre s\u2019\u00e9tend et que le soir s\u2019abat sur le village —une autre sc\u00e8ne se d\u00e9ploie dans les ruelles ici et l\u00e0 les jeunes se r\u00e9unissent, devant les grilles de la grande b\u00e2tisse, une petite troupe joyeuse et insouciante qui soudain s\u2019\u00e9gaille leurs pas les portent si naturellement vers la boutique du fromager —ce lieu o\u00f9 elle nous m\u00e8ne, cette femme\u2002aux beaux yeux en amande, vers cette lumi\u00e8re dor\u00e9e, ce point de ralliement, une escale apr\u00e8s le\u2002lent et doux tumulte de la journ\u00e9e<\/p>\n

Que les gestes ici ressemblent comme deux gouttes d\u2019eau aux gestes de l\u00e0-bas, on ne le voit pas bien s\u00fbr, l\u2019exotisme nous aveugle, l\u2019excitation du nouveau nous embrume. A moins que ce ne soit encore qu\u2019un principe de la vieillesse de ne plus s\u2019attacher qu\u2019aux ressemblances, au vraisemblable. Une sorte d\u2019abdication dans le semblant ou le semblable.<\/p>\n

mais en attendant, observe tout cela et comment tes yeux s\u2019attardent sur les gestes r\u00e9p\u00e9titifs des femmes des hommes autour de toi, la grand-m\u00e8re dans sa cuisine \u00e9queutant les tomates cerises avec un savoir-faire ant\u00e9diluvien tout comme celui de ces m\u00e8res tressant les cheveux des filles sous les platanes et bien s\u00fbr le mouvement, oscillatoire, rappelant le vent dans les bambous celui de ces types jouant aux bocce sur la place du village —leurs gestes pr\u00e9cis et rythm\u00e9s par le jeu et leurs discussions anim\u00e9es autour d\u2019un verre de limoncello ( clic clac clich\u00e9)\u2002Ne sont-ce pas les m\u00eames gestes que tu vois depuis toujours dans tous les lieux, entre tous les murs, sous tous les toits. Tout ce qui apparait faussement \u00e9trange \u00e0 premi\u00e8re vue avant de sombrer t\u00f4t ou tard dans l\u2019Histoire et son horizon infranchissable de d\u00e9j\u00e0 vu.<\/p>\n

L\u2019avantage sans doute de se tenir l\u00e0, ce moment l\u00e0 , \u00e0 la lisi\u00e8re de l\u2019enfance et de l\u2019\u00e2ge adulte et d\u2019observer ces rituels immuables, ces gestes qui tissent le quotidien, toutes ces actions si simples et pourtant si charg\u00e9es de significations, de liens invisibles qui unissent les gens de Meta di Sorrento entre eux, mais pas seulement, \u00e0 tout ce qui en toi peut encore peut porter le nom d\u2019humanit\u00e9. Te voici un vieux comme disent les jeunes, comme toi tu le disais aussi jadis quand tu \u00e9tais l\u2019un des ces jeunes — les vieux.<\/p>\n

dans la fromagerie peut-\u00eatre \u00e0 cause de lui, le fromager— un homme \u00e0 la stature pas bien imposante, presque malingre, mais au regard\u2002noir et vif et cependant tellement bienveillant\u2002et dont les mains comme des oiseaux arm\u00e9es de plumes tranchantes d\u00e9coupe avec g\u00e9n\u00e9rosit\u00e9 des morceaux de fromage pour nous les offrir— il les pr\u00e9sente au bout du couteau, il les offre comme on offre le plus pr\u00e9cieux, sa candeur, mais sans d\u00e9monstration comme si tout \u00e7a \u00e9tait naturel, normal — ce bout de fromage comme un drapeau, un hymne, dans la nuit tout autour, bien au del\u00e0 de l\u2019\u00e9picerie , la nuit dans laquelle on peut se retrouver quand on songe au pass\u00e9, \u00e0 tous nos morts, tout \u00e7a bizarrement rassembl\u00e9 l\u00e0 dans un simple bout de fromage, dans une ambiance laiteuse et beurr\u00e9e — sourires, \u00e9motions, partage— on en rit avec du fromage plein la bouche on en rigole, on pourrait bien en pleurer mais non on discute, le fromager raconte des histoires prenant comme pr\u00e9texte chaque type de fromage, son origine, son appellation, sa fabrication, des histoires qui semblent faire partie int\u00e9grante de la culture du village et je pense au monde, \u00e0 la plan\u00e8te Terre qui n\u2019est plus si ronde, au derni\u00e8re nouvelle en forme de poire. Et tout \u00e7a \u00e0 cause du gout de la poire m\u00e9lang\u00e9 \u00e0 celui du parmigiano..<\/p>\n

mais qui m\u2019expulse soudain me fait \u00e9prouver encore de fa\u00e7on plus cruelle plus aig\u00fce ma propre \u00e9tranget\u00e9 au sein m\u00eame de toute cette \u00e9tranget\u00e9 m\u00e9diterran\u00e9enne, sans me tromper sur la planque dont l\u2019\u00e9tranget\u00e9 se sert \u00e0 travers des adjectifs.<\/p>\n

du regard suivre\u2002encore durant un instant fugace ce morceau de fromage de la pointe du couteau glissant dans l\u2019air puis disparaitre, englouti entre les l\u00e8vres de cette femme qui nous conduit ici et en \u00e9prouver encore le m\u00eame d\u00e9sir— \u00e0 moins que ce ne soit \u00e2me d\u00e9funte ce fant\u00f4me de d\u00e9sir \u2013 Mais plut\u00f4t et soudain vite—une issue pour s\u2019enfuir. Le d\u00e9sir tr\u00e8s semblable \u00e0 ce moment-l\u00e0 \u00e0 la poudre d\u2019escampette. Prendere la polvere di scampo<\/p>\n

une confusion douce, et ce vieux sentiment retrouv\u00e9 du nouveau du troublant, l\u2019air s\u2019est empli d\u2019\u00e9lectricit\u00e9, le bruit, le rythme des d\u00e9coupes du fromage le couteau heurtant la planche de bois , le bruit du papier froiss\u00e9, des conversations anim\u00e9es, les effluves de fromage affin\u00e9 se m\u00ealent aux ar\u00f4mes du pain frais et du basilic.<\/p>\n

Ensuite nous marcherons longtemps dans les rues en pentes, le silence nous cueillera quand nos hanches se fr\u00f4leront. A cause de la couleur s\u00e9pia du souvenir, \u00e0 cause du fromage qui ici \u00e0 une texture semblable \u00e0 celle de la p\u00e2te sabl\u00e9e sur la langue, et les odeurs d\u2019iode de basilic\u2026mais \u00e7a suffit.<\/p>", "content_text": "A cause de la couleur cette ann\u00e9e l\u00e0\u2014 1975\u2014 une couleur chaude entre l\u2019orange la terre de Sienne l\u2019ocre et toutes nuances, tons, valeurs se heurtant, s\u2019\u00e9pousant et se heurtant encore \u2014au froid bleu du ciel, aux reflets de turquoise de la mer vineuse\u2014 mais qui ne sont pas plus d\u00e9sormais qu\u2019 une photographie jaunie semblable \u00e0 toutes ces autres photographies servant autrefois de lanceurs, de supports \u2014 provenant d\u2019Estonie, mais dans lesquelles un petit bout d\u2019\u00e9tranget\u00e9 scintille sourd comme tout ce qu\u2019on ne peut dire, qui est l\u00e0 et qu\u2019on ne peut pas dire\u2014 mais qu\u2019en reste t\u2019il vraiment, \u00e0 part ce que nous voyons encore dans le pr\u00e9sent dans ce pr\u00e9sent m\u00eame o\u00f9 l\u2019on se souvient de cette \u00e9ternit\u00e9 v\u00e9cue. Des gestes, des voix, des odeurs, des joues effleur\u00e9es, des corps \u00e9treints, le go\u00fbt des mets, l\u2019impression laiss\u00e9e par les ambiances travers\u00e9es, celles qui nous traversent que nous traversons. A cause de la couleur alors celle que peut prendre notre adolescence \u00e0 ce moment-l\u00e0 et encore ici, bien apr\u00e8s 1975, et cependant ne pas y sombrer, mais revenir dans la danse, spectateur et danseur, juste un instant, un petit moment pour \u00eatre l\u00e0, cette ann\u00e9e l\u00e0 1975, ce jeune type sur la photographie. \u00c0 cause de la couleur des derniers rayons de soleil qui s\u2019infiltrent entre les maisons et les ruelles de Meta di Sorrento pendant que le village s\u2019habille de teintes d\u2019or et de pourpre que les habitants comme anim\u00e9s par une force invisible se m\u00ealent dans les rues que les voix s\u2019\u00e9l\u00e8vent que les rires des enfants rebondissent sur les murs de pierre que les vespa vrombissent dans les pentes et que les marchands annoncent leurs derni\u00e8res offres du jour comme pour rire tandis que les odeurs de la mer, moules huitres, poissons et coquillages se m\u00ealent \u00e0 celle des citronniers se m\u00ealent aux saveurs d\u2019olive de basilic qu\u2019en une trame soudain pr\u00e9sente, enivrante mais qui tremble et s\u2019\u00e9vanouit doucement \u00e0 mesure que l\u2019ombre s\u2019\u00e9tend et que le soir s\u2019abat sur le village \u2014une autre sc\u00e8ne se d\u00e9ploie dans les ruelles ici et l\u00e0 les jeunes se r\u00e9unissent, devant les grilles de la grande b\u00e2tisse, une petite troupe joyeuse et insouciante qui soudain s\u2019\u00e9gaille leurs pas les portent si naturellement vers la boutique du fromager \u2014ce lieu o\u00f9 elle nous m\u00e8ne, cette femme aux beaux yeux en amande, vers cette lumi\u00e8re dor\u00e9e, ce point de ralliement, une escale apr\u00e8s le lent et doux tumulte de la journ\u00e9e Que les gestes ici ressemblent comme deux gouttes d\u2019eau aux gestes de l\u00e0-bas, on ne le voit pas bien s\u00fbr, l\u2019exotisme nous aveugle, l\u2019excitation du nouveau nous embrume. A moins que ce ne soit encore qu\u2019un principe de la vieillesse de ne plus s\u2019attacher qu\u2019aux ressemblances, au vraisemblable. Une sorte d\u2019abdication dans le semblant ou le semblable. mais en attendant, observe tout cela et comment tes yeux s\u2019attardent sur les gestes r\u00e9p\u00e9titifs des femmes des hommes autour de toi, la grand-m\u00e8re dans sa cuisine \u00e9queutant les tomates cerises avec un savoir-faire ant\u00e9diluvien tout comme celui de ces m\u00e8res tressant les cheveux des filles sous les platanes et bien s\u00fbr le mouvement, oscillatoire, rappelant le vent dans les bambous celui de ces types jouant aux bocce sur la place du village \u2014leurs gestes pr\u00e9cis et rythm\u00e9s par le jeu et leurs discussions anim\u00e9es autour d\u2019un verre de limoncello ( clic clac clich\u00e9) Ne sont-ce pas les m\u00eames gestes que tu vois depuis toujours dans tous les lieux, entre tous les murs, sous tous les toits. Tout ce qui apparait faussement \u00e9trange \u00e0 premi\u00e8re vue avant de sombrer t\u00f4t ou tard dans l\u2019Histoire et son horizon infranchissable de d\u00e9j\u00e0 vu. L\u2019avantage sans doute de se tenir l\u00e0, ce moment l\u00e0 , \u00e0 la lisi\u00e8re de l\u2019enfance et de l\u2019\u00e2ge adulte et d\u2019observer ces rituels immuables, ces gestes qui tissent le quotidien, toutes ces actions si simples et pourtant si charg\u00e9es de significations, de liens invisibles qui unissent les gens de Meta di Sorrento entre eux, mais pas seulement, \u00e0 tout ce qui en toi peut encore peut porter le nom d\u2019humanit\u00e9. Te voici un vieux comme disent les jeunes, comme toi tu le disais aussi jadis quand tu \u00e9tais l\u2019un des ces jeunes \u2014 les vieux. dans la fromagerie peut-\u00eatre \u00e0 cause de lui, le fromager\u2014 un homme \u00e0 la stature pas bien imposante, presque malingre, mais au regard noir et vif et cependant tellement bienveillant et dont les mains comme des oiseaux arm\u00e9es de plumes tranchantes d\u00e9coupe avec g\u00e9n\u00e9rosit\u00e9 des morceaux de fromage pour nous les offrir\u2014 il les pr\u00e9sente au bout du couteau, il les offre comme on offre le plus pr\u00e9cieux, sa candeur, mais sans d\u00e9monstration comme si tout \u00e7a \u00e9tait naturel, normal \u2014 ce bout de fromage comme un drapeau, un hymne, dans la nuit tout autour, bien au del\u00e0 de l\u2019\u00e9picerie , la nuit dans laquelle on peut se retrouver quand on songe au pass\u00e9, \u00e0 tous nos morts, tout \u00e7a bizarrement rassembl\u00e9 l\u00e0 dans un simple bout de fromage, dans une ambiance laiteuse et beurr\u00e9e \u2014 sourires, \u00e9motions, partage\u2014 on en rit avec du fromage plein la bouche on en rigole, on pourrait bien en pleurer mais non on discute, le fromager raconte des histoires prenant comme pr\u00e9texte chaque type de fromage, son origine, son appellation, sa fabrication, des histoires qui semblent faire partie int\u00e9grante de la culture du village et je pense au monde, \u00e0 la plan\u00e8te Terre qui n\u2019est plus si ronde, au derni\u00e8re nouvelle en forme de poire. Et tout \u00e7a \u00e0 cause du gout de la poire m\u00e9lang\u00e9 \u00e0 celui du parmigiano.. mais qui m\u2019expulse soudain me fait \u00e9prouver encore de fa\u00e7on plus cruelle plus aig\u00fce ma propre \u00e9tranget\u00e9 au sein m\u00eame de toute cette \u00e9tranget\u00e9 m\u00e9diterran\u00e9enne, sans me tromper sur la planque dont l\u2019\u00e9tranget\u00e9 se sert \u00e0 travers des adjectifs. du regard suivre encore durant un instant fugace ce morceau de fromage de la pointe du couteau glissant dans l\u2019air puis disparaitre, englouti entre les l\u00e8vres de cette femme qui nous conduit ici et en \u00e9prouver encore le m\u00eame d\u00e9sir\u2014 \u00e0 moins que ce ne soit \u00e2me d\u00e9funte ce fant\u00f4me de d\u00e9sir \u2013 Mais plut\u00f4t et soudain vite\u2014une issue pour s\u2019enfuir. Le d\u00e9sir tr\u00e8s semblable \u00e0 ce moment-l\u00e0 \u00e0 la poudre d\u2019escampette. Prendere la polvere di scampo une confusion douce, et ce vieux sentiment retrouv\u00e9 du nouveau du troublant, l\u2019air s\u2019est empli d\u2019\u00e9lectricit\u00e9, le bruit, le rythme des d\u00e9coupes du fromage le couteau heurtant la planche de bois , le bruit du papier froiss\u00e9, des conversations anim\u00e9es, les effluves de fromage affin\u00e9 se m\u00ealent aux ar\u00f4mes du pain frais et du basilic. Ensuite nous marcherons longtemps dans les rues en pentes, le silence nous cueillera quand nos hanches se fr\u00f4leront. A cause de la couleur s\u00e9pia du souvenir, \u00e0 cause du fromage qui ici \u00e0 une texture semblable \u00e0 celle de la p\u00e2te sabl\u00e9e sur la langue, et les odeurs d\u2019iode de basilic\u2026mais \u00e7a suffit.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/web_1975.png?1748065061", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/14-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/14-janvier-2024.html", "title": "14 janvier 2024", "date_published": "2024-01-14T02:45:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Il faut aller puiser dans la r\u00e9serve de bienveillance, l\u2019imaginer comme une grande citerne sous la maison, un tr\u00e9sor de patience se trouvant dans une niche \u00e0 c\u00f4t\u00e9 ou dans les combles, sous le toit — Qu\u2019un h\u00e9ros de l\u2019enfance tombe et c\u2019est une \u00e9toile qui tombe— c\u2019est la nuit \u00e9paisse qui nous entoure. Peut-\u00eatre que la nuit, son \u00e9paisseur vient seulement d\u2019un manque de bienveillance, de patience, parce qu\u2019on ne sait pas encore l\u2019utilit\u00e9 de ces art\u00e9facts, ils sont l\u00e0 depuis des millions d\u2019ann\u00e9es, il ne servent qu\u2019\u00e0 inspirer l\u2019id\u00e9e d\u2019une r\u00e9serve sous la maison, une \u00e9tag\u00e8re, une niche, un autel, un genre de crypte o\u00f9 serait conserv\u00e9 un tr\u00e9sor, une denr\u00e9e pr\u00e9cieuse, et il suffirait d\u2019y songer seulement pour que la lumi\u00e8re soit, que l\u2019on puisse s\u2019extirper des filaments collants du sommeil, de l\u2019obscurit\u00e9 magistrale.<\/p>\n

J\u2019ai vu plusieurs fois les \u00e9toiles tomber. D\u2019abord mon grand-p\u00e8re paternel s\u2019emparant d\u2019un couteau de cuisine mena\u00e7ant ma grand-m\u00e8re, puis quelques temps plus tard mon p\u00e8re battant ma m\u00e8re —Ces \u00e9clats de violence dans ma propre vie m\u2019ont amen\u00e9 \u00e0 r\u00e9fl\u00e9chir sur notre monde, o\u00f9 de tels actes trouvent leurs \u00e9chos dans le bruit assourdissant de notre \u00e9poque. Ainsi, comme la bienveillance et la violence se c\u00f4toient dans nos maisons, elles se refl\u00e8tent dans le miroir de notre soci\u00e9t\u00e9, transform\u00e9e par des ann\u00e9es de changement technologique et culturel<\/p>\n

Trop souvent, nous nous pr\u00e9cipitons dans l\u2019ar\u00e8ne de la diatribe et du jugement avec une facilit\u00e9 d\u00e9concertante. Nos paroles, tranchantes comme des lames, se d\u00e9ploient dans un \u00e9lan critique presque instinctif, \u00e9clipsant la douce lumi\u00e8re de la bienveillance. Cette propension \u00e0 critiquer, \u00e0 diss\u00e9quer les actions d\u2019autrui avec une rigueur impitoyable, semble presque enracin\u00e9e dans notre nature. Pourtant, au c\u0153ur de cette tornade de jugements, une voix int\u00e9rieure murmure, insufflant un sentiment de culpabilit\u00e9. Elle nous rappelle que chaque mot acerbe lanc\u00e9 dans le tumulte du m\u00e9pris pourrait \u00eatre un pont bris\u00e9 vers la compr\u00e9hension, une opportunit\u00e9 manqu\u00e9e de cultiver l\u2019empathie. Dans ces moments, nous r\u00e9alisons combien il est ais\u00e9 de se perdre dans le labyrinthe de la censure, et combien il est ardu, mais essentiel, de revenir sur le chemin de la compassion et de l\u2019entente.<\/p>\n

Le monde d\u2019avant, celui avant les ann\u00e9es 2000 le passage \u00e0 l\u2019euro, la pand\u00e9mie, ne fut pas meilleur que celui dans lequel nous vivons aujourd\u2019hui. Nous \u00e9tions aussi prisonniers de nos pulsions, de notre candeur, de nos lucidit\u00e9s passag\u00e8res que nous le sommes d\u00e9sormais des algorithmes, des slogans publicitaires, des mots d\u2019ordre la pens\u00e9e unique qui s\u2019est \u00e9tendue\u2002d\u00e9sormais sur l\u2019ensemble de la plan\u00e8te.<\/p>\n

Les ombres du pass\u00e9, avec ses tumultes et ses douleurs, se projettent dans notre pr\u00e9sent, fa\u00e7onnant la mani\u00e8re dont nous percevons et exprimons nos \u00e9motions les plus profondes<\/p>\n

Nous regrettions jadis de ne pas puiser autant qu\u2019il nous aurait plu de le faire dans la bienveillance, comme aujourd\u2019hui nous nous mordons les l\u00e8vres d\u2019\u00eatre \u00e9touff\u00e9 par celle-ci. D\u00e9sormais nous vivons dans un monde aux valeurs invers\u00e9es. Ce que nous conservons comme des tr\u00e9sors ce sont la col\u00e8re, la haine, la violence. Il ne nous est plus permis de les afficher sous peine de perdre des points sur notre cr\u00e9dit social.<\/p>\n

Cependant nous les fa\u00e7onnons en secret, tentons d\u2019en cr\u00e9er des \u0153uvres d\u2019art, nous les d\u00e9barrassons avec la plus tenace des patiences de toute notion d\u2019utilit\u00e9, nous nous gardons bien de vouloir nous en servir, d\u2019en tirer un quelconque profit, ce sont nos divinit\u00e9s toujours changeantes que nous y pla\u00e7ons ici dans la plus grande profondeur de la cave, du gouffre, de l\u2019antre, de la grotte avec les ann\u00e9es. Puis nous nous reculons de quelques pas dans la p\u00e9nombre pour mieux les admirer, admirer ce grand vide d\u2019o\u00f9 nous extirpons les mots, les pens\u00e9es, la bienveillance, comme la haine, le ressentiment, nous finissons par les transformer avec de la chance en statuettes d\u2019argile, en t\u00e9moins un peu grotesques de notre passage ici bas.<\/p>", "content_text": "Il faut aller puiser dans la r\u00e9serve de bienveillance, l\u2019imaginer comme une grande citerne sous la maison, un tr\u00e9sor de patience se trouvant dans une niche \u00e0 c\u00f4t\u00e9 ou dans les combles, sous le toit \u2014 Qu\u2019un h\u00e9ros de l\u2019enfance tombe et c\u2019est une \u00e9toile qui tombe\u2014 c\u2019est la nuit \u00e9paisse qui nous entoure. Peut-\u00eatre que la nuit, son \u00e9paisseur vient seulement d\u2019un manque de bienveillance, de patience, parce qu\u2019on ne sait pas encore l\u2019utilit\u00e9 de ces art\u00e9facts, ils sont l\u00e0 depuis des millions d\u2019ann\u00e9es, il ne servent qu\u2019\u00e0 inspirer l\u2019id\u00e9e d\u2019une r\u00e9serve sous la maison, une \u00e9tag\u00e8re, une niche, un autel, un genre de crypte o\u00f9 serait conserv\u00e9 un tr\u00e9sor, une denr\u00e9e pr\u00e9cieuse, et il suffirait d\u2019y songer seulement pour que la lumi\u00e8re soit, que l\u2019on puisse s\u2019extirper des filaments collants du sommeil, de l\u2019obscurit\u00e9 magistrale. J\u2019ai vu plusieurs fois les \u00e9toiles tomber. D\u2019abord mon grand-p\u00e8re paternel s\u2019emparant d\u2019un couteau de cuisine mena\u00e7ant ma grand-m\u00e8re, puis quelques temps plus tard mon p\u00e8re battant ma m\u00e8re \u2014Ces \u00e9clats de violence dans ma propre vie m\u2019ont amen\u00e9 \u00e0 r\u00e9fl\u00e9chir sur notre monde, o\u00f9 de tels actes trouvent leurs \u00e9chos dans le bruit assourdissant de notre \u00e9poque. Ainsi, comme la bienveillance et la violence se c\u00f4toient dans nos maisons, elles se refl\u00e8tent dans le miroir de notre soci\u00e9t\u00e9, transform\u00e9e par des ann\u00e9es de changement technologique et culturel Trop souvent, nous nous pr\u00e9cipitons dans l\u2019ar\u00e8ne de la diatribe et du jugement avec une facilit\u00e9 d\u00e9concertante. Nos paroles, tranchantes comme des lames, se d\u00e9ploient dans un \u00e9lan critique presque instinctif, \u00e9clipsant la douce lumi\u00e8re de la bienveillance. Cette propension \u00e0 critiquer, \u00e0 diss\u00e9quer les actions d\u2019autrui avec une rigueur impitoyable, semble presque enracin\u00e9e dans notre nature. Pourtant, au c\u0153ur de cette tornade de jugements, une voix int\u00e9rieure murmure, insufflant un sentiment de culpabilit\u00e9. Elle nous rappelle que chaque mot acerbe lanc\u00e9 dans le tumulte du m\u00e9pris pourrait \u00eatre un pont bris\u00e9 vers la compr\u00e9hension, une opportunit\u00e9 manqu\u00e9e de cultiver l\u2019empathie. Dans ces moments, nous r\u00e9alisons combien il est ais\u00e9 de se perdre dans le labyrinthe de la censure, et combien il est ardu, mais essentiel, de revenir sur le chemin de la compassion et de l\u2019entente. Le monde d\u2019avant, celui avant les ann\u00e9es 2000 le passage \u00e0 l\u2019euro, la pand\u00e9mie, ne fut pas meilleur que celui dans lequel nous vivons aujourd\u2019hui. Nous \u00e9tions aussi prisonniers de nos pulsions, de notre candeur, de nos lucidit\u00e9s passag\u00e8res que nous le sommes d\u00e9sormais des algorithmes, des slogans publicitaires, des mots d\u2019ordre la pens\u00e9e unique qui s\u2019est \u00e9tendue d\u00e9sormais sur l\u2019ensemble de la plan\u00e8te. Les ombres du pass\u00e9, avec ses tumultes et ses douleurs, se projettent dans notre pr\u00e9sent, fa\u00e7onnant la mani\u00e8re dont nous percevons et exprimons nos \u00e9motions les plus profondes Nous regrettions jadis de ne pas puiser autant qu\u2019il nous aurait plu de le faire dans la bienveillance, comme aujourd\u2019hui nous nous mordons les l\u00e8vres d\u2019\u00eatre \u00e9touff\u00e9 par celle-ci. D\u00e9sormais nous vivons dans un monde aux valeurs invers\u00e9es. Ce que nous conservons comme des tr\u00e9sors ce sont la col\u00e8re, la haine, la violence. Il ne nous est plus permis de les afficher sous peine de perdre des points sur notre cr\u00e9dit social. Cependant nous les fa\u00e7onnons en secret, tentons d\u2019en cr\u00e9er des \u0153uvres d\u2019art, nous les d\u00e9barrassons avec la plus tenace des patiences de toute notion d\u2019utilit\u00e9, nous nous gardons bien de vouloir nous en servir, d\u2019en tirer un quelconque profit, ce sont nos divinit\u00e9s toujours changeantes que nous y pla\u00e7ons ici dans la plus grande profondeur de la cave, du gouffre, de l\u2019antre, de la grotte avec les ann\u00e9es. Puis nous nous reculons de quelques pas dans la p\u00e9nombre pour mieux les admirer, admirer ce grand vide d\u2019o\u00f9 nous extirpons les mots, les pens\u00e9es, la bienveillance, comme la haine, le ressentiment, nous finissons par les transformer avec de la chance en statuettes d\u2019argile, en t\u00e9moins un peu grotesques de notre passage ici bas.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/crypte-de-bienveillance-et-de-patience-sous-la-maison.png?1748065087", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/13-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/13-janvier-2024.html", "title": "13 janvier 2024", "date_published": "2024-01-13T02:41:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Quatre ans apr\u00e8s le d\u00e9but de la fin d\u2019un monde<\/i><\/p>\n

En me levant, la fatigue p\u00e8se sur mes \u00e9paules et tout de suite, cette pens\u00e9e me traverse : Je n\u2019en peux d\u00e9j\u00e0 plus. C\u2019est comme si je replongeais dans le m\u00eame cauchemar, malgr\u00e9 tous mes efforts. Mes illusions semblent s\u2019envoler, ne laissant derri\u00e8re elles qu\u2019une \u00e2pret\u00e9 brutale, peut-\u00eatre le seul v\u00e9ritable synonyme de ce ph\u00e9nom\u00e8ne que j\u2019appelle vivre. Je r\u00e9alise presque aussit\u00f4t que c\u2019est exag\u00e9r\u00e9, cette id\u00e9e noire qui me vient d\u00e8s le matin. Je peine \u00e0 dissocier le narrateur de ce journal, celui que j\u2019ai cr\u00e9\u00e9 il y a quatre ans, de l\u2019homme r\u00e9el qui lui donne vie. Mes lectures, mon penchant pour le romantisme, ou plut\u00f4t le romanesque, semblent me dater, me rendre tristement obsol\u00e8te. C\u2019est un constat amer. Pourtant, au fond de moi, je sais qu\u2019il y a une part de v\u00e9rit\u00e9 dans ces mots, sinon pourquoi continuerais-je \u00e0 \u00e9crire ? Cette obsession est l\u00e0, omnipr\u00e9sente, et je dois composer avec elle : je suis fatigu\u00e9 de cette vie, fatigu\u00e9 des mensonges incessants. Je ne parviens plus \u00e0 distinguer les miens de ceux qui, de plus en plus, semblent m\u2019entourer, m\u2019\u00e9touffer. Je ne peux plus ignorer cette accumulation de faux-semblants, elle me confronte chaque jour.<\/p>\n

Cette lutte int\u00e9rieure, c\u2019est ce qui m\u2019a pouss\u00e9 \u00e0 abandonner la peinture pour l\u2019\u00e9criture il y a quatre ans. Dans ma fiction, je pensais pouvoir projeter mes angoisses, mes doutes, trouver une catharsis. Mais aujourd\u2019hui, je me demande si en \u00e9crivant, je ne fais pas qu\u2019ajouter des couches \u00e0 mon propre labyrinthe de mensonges. Peut-\u00eatre que la fiction n\u2019est qu\u2019une autre mani\u00e8re de me dissimuler, de fuir la r\u00e9alit\u00e9 crue et d\u00e9sarmante. Peut-\u00eatre que cette qu\u00eate d\u2019authenticit\u00e9 n\u2019\u00e9tait qu\u2019une illusion, une autre forme d\u2019autotromperie.<\/p>\n

Pourquoi continuer \u00e0 \u00e9crire, alors ? Peut-\u00eatre parce que, malgr\u00e9 tout, il y a un fil d\u2019authenticit\u00e9 dans cette entreprise. Dans les mots, je trouve parfois des \u00e9clats de v\u00e9rit\u00e9, des moments de clart\u00e9 qui me donnent l\u2019impression de toucher quelque chose de r\u00e9el, m\u00eame si ce n\u2019est qu\u2019\u00e9ph\u00e9m\u00e8re. Peut-\u00eatre que c\u2019est dans cette qu\u00eate incessante, cette lutte pour d\u00e9m\u00ealer le vrai du faux, que r\u00e9side la v\u00e9ritable essence de la cr\u00e9ation, de mon existence.<\/p>\n

Mais \u00e0 peine ai-je couch\u00e9 ces mots sur le papier, je les trouve ridicules, presque honteux. Je ressens une g\u00eane profonde en me comparant \u00e0 ceux qui se l\u00e8vent chaque jour pour des r\u00e9alit\u00e9s plus concr\u00e8tes : travailler, nourrir leurs enfants, faire face \u00e0 des d\u00e9fis bien r\u00e9els. Oui, la honte m\u2019envahit, de me complaire dans ces pens\u00e9es nombrilistes et de songer \u00e0 les exposer, si jamais je devais publier ces lignes. Sont-ce vraiment mes pens\u00e9es, celles du narrateur de ce journal, ou celles du personnage de ma fiction ? Je n\u2019en sais plus rien. Ce flou entre moi et mes cr\u00e9ations, entre la r\u00e9alit\u00e9 et l\u2019imaginaire, semble se densifier, me laissant dans un \u00e9tat de confusion. Ai-je perdu le contact avec le monde r\u00e9el, m\u2019enfermant dans un univers de mots et de r\u00e9flexions introspectives qui, au final, ne r\u00e9sonnent qu\u2019avec moi-m\u00eame ? Cette interrogation me hante, me pousse \u00e0 reconsid\u00e9rer non seulement ma cr\u00e9ation, mais aussi ma place dans le monde.<\/p>\n

Il me suffit d\u2019ouvrir un journal ou de regarder une \u00e9mission de t\u00e9l\u00e9vision pour sentir la vacuit\u00e9 de ces contenus. Une prise de conscience brutale me frappe : je me r\u00e9veille plus seul et d\u00e9muni que jamais. J\u2019ai cette impression troublante que le mensonge est g\u00e9n\u00e9ral, omnipr\u00e9sent. Peut-\u00eatre que beaucoup le savent, mais choisissent de s\u2019y accrocher, de le pr\u00e9server. Ce mensonge est rassurant, moins effrayant que l\u2019id\u00e9e de changer, de bouleverser l\u2019ordre \u00e9tabli. Cette r\u00e9v\u00e9lation me p\u00e8se, m\u2019isole encore plus dans mes pens\u00e9es. Je suis pris dans un tourbillon de doutes o\u00f9 ma propre authenticit\u00e9, celle de mon art, celle de mes mots, tout semble s\u2019effondrer dans un ab\u00eeme de questions sans r\u00e9ponses.<\/p>\n

Aller jusqu\u2019au bout du tragique, c\u2019est ce que notre \u00e9poque semble refuser, fuir. Autrefois, la trag\u00e9die offrait quelque chose, une catharsis, une compr\u00e9hension plus profonde de la condition humaine peut-\u00eatre. Aujourd\u2019hui, je sens que nous nous en \u00e9loignons, par peur ou par incompr\u00e9hension. En \u00e9crivant ces mots, je r\u00e9alise mon incapacit\u00e9 \u00e0 saisir pleinement ce que l\u2019issue tragique nous apportait jadis. C\u2019est comme si, dans notre qu\u00eate effr\u00e9n\u00e9e de bonheur et de confort, nous avions perdu la capacit\u00e9 d\u2019affronter les ab\u00eemes, de regarder en face nos propres limites, nos propres fins.<\/p>\n

Dans mon art, dans mes \u00e9crits, je ressens cette tension. Y a-t-il encore de la place pour le tragique, pour l\u2019exploration des sombres v\u00e9rit\u00e9s de notre existence ? Ou avons-nous tellement peur de ce que la trag\u00e9die r\u00e9v\u00e8le sur nous-m\u00eames que nous pr\u00e9f\u00e9rons nous en d\u00e9tourner ? Chaque touche de pinceau, chaque mot que je pose semble porter cette question. Et pourtant, je n\u2019ai pas de r\u00e9ponse. Peut-\u00eatre que dans ce refus du tragique, dans cette peur, r\u00e9side une trag\u00e9die en soi \u2013 celle de notre incapacit\u00e9 \u00e0 accepter la totalit\u00e9 de notre condition humaine, dans toute sa complexit\u00e9 et sa finitude.<\/p>\n

Aller jusqu\u2019au bout du tragique, c\u2019est ce que notre \u00e9poque semble refuser. Il y a une peur, une r\u00e9ticence \u00e0 embrasser ce que la trag\u00e9die, dans toute son ampleur, nous offrait autrefois. Je le sens, palpable dans l\u2019air, dans les \u0153uvres d\u2019art contemporaines, dans les conversations quotidiennes. Et pourtant, en cet instant, alors que j\u2019\u00e9cris ces mots, je suis incapable de nommer pr\u00e9cis\u00e9ment ce que l\u2019issue fatale nous apportait. \u00c9tait-ce une forme de catharsis, une purification, ou quelque chose de plus profond et insondable ?<\/p>\n

Et maintenant, face \u00e0 cette r\u00e9flexion, que dois-je faire ? Quel courage faut-il pour continuer, pour affronter ces ab\u00eemes de pens\u00e9e ? Parfois, je me sens \u00eatre le plus faible des hommes, incapable de porter le fardeau de cette qu\u00eate de v\u00e9rit\u00e9. Et puis, presque aussit\u00f4t, je ris de moi-m\u00eame, de cette oscillation constante entre l\u2019exigence d\u2019\u00e9l\u00e9vation et de bassesse qui me taraude. Cette dualit\u00e9, ce conflit interne, semble \u00eatre le moteur m\u00eame de ma cr\u00e9ativit\u00e9, et pourtant, elle est aussi ma plus grande source de tourment. Suis-je un artiste \u00e0 la recherche d\u2019une v\u00e9rit\u00e9 insaisissable, ou simplement un homme perdu dans le labyrinthe de ses propres pens\u00e9es ?<\/p>\n

Je viens d\u2019\u00e9crire ces lignes, et presque aussit\u00f4t, je l\u00e8ve les yeux de mon \u00e9cran pour regarder par la fen\u00eatre. Le monde continue sa course, indiff\u00e9rent \u00e0 mes doutes et \u00e0 mes questionnements. Les gens s\u2019affairent, pris dans le tumulte de leur quotidien, se dirigeant, peut-\u00eatre, vers un ab\u00eeme in\u00e9vitable. Et je me dis que, dans le grand sch\u00e9ma des choses, mes pens\u00e9es ne sont pas plus significatives que la chute d\u2019une feuille morte d\u2019un arbre.<\/p>\n

Cette id\u00e9e m\u2019amuse, d\u2019une certaine mani\u00e8re. Elle me rappelle l\u2019insignifiance de mes tourments face \u00e0 l\u2019immensit\u00e9 du monde. Fort de cette r\u00e9flexion, je me l\u00e8ve, pr\u00eat \u00e0 commencer ma journ\u00e9e comme d\u2019habitude. Il y a quelque chose de lib\u00e9rateur \u00e0 reconna\u00eetre sa propre petitesse, \u00e0 accepter que nos luttes int\u00e9rieures ne sont que des \u00e9chos dans un univers bien plus vaste. Je d\u00e9cide de m\u2019appuyer sur cette pens\u00e9e, de l\u2019utiliser comme un point d\u2019ancrage pour affronter ce que la journ\u00e9e me r\u00e9serve. Peut-\u00eatre est-ce l\u00e0 la v\u00e9ritable force, la capacit\u00e9 de sourire face \u00e0 l\u2019insignifiance de notre propre existence et de continuer malgr\u00e9 tout<\/p>\n

Illustration : D\u00e9tail d\u2019une fa\u00e7ade d\u2019un b\u00e2timent dans une cit\u00e9 ant\u00e9diluvienne.<\/p>", "content_text": "{Quatre ans apr\u00e8s le d\u00e9but de la fin d\u2019un monde} En me levant, la fatigue p\u00e8se sur mes \u00e9paules et tout de suite, cette pens\u00e9e me traverse : Je n\u2019en peux d\u00e9j\u00e0 plus. C\u2019est comme si je replongeais dans le m\u00eame cauchemar, malgr\u00e9 tous mes efforts. Mes illusions semblent s\u2019envoler, ne laissant derri\u00e8re elles qu\u2019une \u00e2pret\u00e9 brutale, peut-\u00eatre le seul v\u00e9ritable synonyme de ce ph\u00e9nom\u00e8ne que j\u2019appelle vivre. Je r\u00e9alise presque aussit\u00f4t que c\u2019est exag\u00e9r\u00e9, cette id\u00e9e noire qui me vient d\u00e8s le matin. Je peine \u00e0 dissocier le narrateur de ce journal, celui que j\u2019ai cr\u00e9\u00e9 il y a quatre ans, de l\u2019homme r\u00e9el qui lui donne vie. Mes lectures, mon penchant pour le romantisme, ou plut\u00f4t le romanesque, semblent me dater, me rendre tristement obsol\u00e8te. C\u2019est un constat amer. Pourtant, au fond de moi, je sais qu\u2019il y a une part de v\u00e9rit\u00e9 dans ces mots, sinon pourquoi continuerais-je \u00e0 \u00e9crire ? Cette obsession est l\u00e0, omnipr\u00e9sente, et je dois composer avec elle : je suis fatigu\u00e9 de cette vie, fatigu\u00e9 des mensonges incessants. Je ne parviens plus \u00e0 distinguer les miens de ceux qui, de plus en plus, semblent m\u2019entourer, m\u2019\u00e9touffer. Je ne peux plus ignorer cette accumulation de faux-semblants, elle me confronte chaque jour. Cette lutte int\u00e9rieure, c\u2019est ce qui m\u2019a pouss\u00e9 \u00e0 abandonner la peinture pour l\u2019\u00e9criture il y a quatre ans. Dans ma fiction, je pensais pouvoir projeter mes angoisses, mes doutes, trouver une catharsis. Mais aujourd\u2019hui, je me demande si en \u00e9crivant, je ne fais pas qu\u2019ajouter des couches \u00e0 mon propre labyrinthe de mensonges. Peut-\u00eatre que la fiction n\u2019est qu\u2019une autre mani\u00e8re de me dissimuler, de fuir la r\u00e9alit\u00e9 crue et d\u00e9sarmante. Peut-\u00eatre que cette qu\u00eate d\u2019authenticit\u00e9 n\u2019\u00e9tait qu\u2019une illusion, une autre forme d\u2019autotromperie. Pourquoi continuer \u00e0 \u00e9crire, alors ? Peut-\u00eatre parce que, malgr\u00e9 tout, il y a un fil d\u2019authenticit\u00e9 dans cette entreprise. Dans les mots, je trouve parfois des \u00e9clats de v\u00e9rit\u00e9, des moments de clart\u00e9 qui me donnent l\u2019impression de toucher quelque chose de r\u00e9el, m\u00eame si ce n\u2019est qu\u2019\u00e9ph\u00e9m\u00e8re. Peut-\u00eatre que c\u2019est dans cette qu\u00eate incessante, cette lutte pour d\u00e9m\u00ealer le vrai du faux, que r\u00e9side la v\u00e9ritable essence de la cr\u00e9ation, de mon existence. Mais \u00e0 peine ai-je couch\u00e9 ces mots sur le papier, je les trouve ridicules, presque honteux. Je ressens une g\u00eane profonde en me comparant \u00e0 ceux qui se l\u00e8vent chaque jour pour des r\u00e9alit\u00e9s plus concr\u00e8tes : travailler, nourrir leurs enfants, faire face \u00e0 des d\u00e9fis bien r\u00e9els. Oui, la honte m\u2019envahit, de me complaire dans ces pens\u00e9es nombrilistes et de songer \u00e0 les exposer, si jamais je devais publier ces lignes. Sont-ce vraiment mes pens\u00e9es, celles du narrateur de ce journal, ou celles du personnage de ma fiction ? Je n\u2019en sais plus rien. Ce flou entre moi et mes cr\u00e9ations, entre la r\u00e9alit\u00e9 et l\u2019imaginaire, semble se densifier, me laissant dans un \u00e9tat de confusion. Ai-je perdu le contact avec le monde r\u00e9el, m\u2019enfermant dans un univers de mots et de r\u00e9flexions introspectives qui, au final, ne r\u00e9sonnent qu\u2019avec moi-m\u00eame ? Cette interrogation me hante, me pousse \u00e0 reconsid\u00e9rer non seulement ma cr\u00e9ation, mais aussi ma place dans le monde. Il me suffit d\u2019ouvrir un journal ou de regarder une \u00e9mission de t\u00e9l\u00e9vision pour sentir la vacuit\u00e9 de ces contenus. Une prise de conscience brutale me frappe : je me r\u00e9veille plus seul et d\u00e9muni que jamais. J\u2019ai cette impression troublante que le mensonge est g\u00e9n\u00e9ral, omnipr\u00e9sent. Peut-\u00eatre que beaucoup le savent, mais choisissent de s\u2019y accrocher, de le pr\u00e9server. Ce mensonge est rassurant, moins effrayant que l\u2019id\u00e9e de changer, de bouleverser l\u2019ordre \u00e9tabli. Cette r\u00e9v\u00e9lation me p\u00e8se, m\u2019isole encore plus dans mes pens\u00e9es. Je suis pris dans un tourbillon de doutes o\u00f9 ma propre authenticit\u00e9, celle de mon art, celle de mes mots, tout semble s\u2019effondrer dans un ab\u00eeme de questions sans r\u00e9ponses. Aller jusqu\u2019au bout du tragique, c\u2019est ce que notre \u00e9poque semble refuser, fuir. Autrefois, la trag\u00e9die offrait quelque chose, une catharsis, une compr\u00e9hension plus profonde de la condition humaine peut-\u00eatre. Aujourd\u2019hui, je sens que nous nous en \u00e9loignons, par peur ou par incompr\u00e9hension. En \u00e9crivant ces mots, je r\u00e9alise mon incapacit\u00e9 \u00e0 saisir pleinement ce que l\u2019issue tragique nous apportait jadis. C\u2019est comme si, dans notre qu\u00eate effr\u00e9n\u00e9e de bonheur et de confort, nous avions perdu la capacit\u00e9 d\u2019affronter les ab\u00eemes, de regarder en face nos propres limites, nos propres fins. Dans mon art, dans mes \u00e9crits, je ressens cette tension. Y a-t-il encore de la place pour le tragique, pour l\u2019exploration des sombres v\u00e9rit\u00e9s de notre existence ? Ou avons-nous tellement peur de ce que la trag\u00e9die r\u00e9v\u00e8le sur nous-m\u00eames que nous pr\u00e9f\u00e9rons nous en d\u00e9tourner ? Chaque touche de pinceau, chaque mot que je pose semble porter cette question. Et pourtant, je n\u2019ai pas de r\u00e9ponse. Peut-\u00eatre que dans ce refus du tragique, dans cette peur, r\u00e9side une trag\u00e9die en soi \u2013 celle de notre incapacit\u00e9 \u00e0 accepter la totalit\u00e9 de notre condition humaine, dans toute sa complexit\u00e9 et sa finitude. Aller jusqu\u2019au bout du tragique, c\u2019est ce que notre \u00e9poque semble refuser. Il y a une peur, une r\u00e9ticence \u00e0 embrasser ce que la trag\u00e9die, dans toute son ampleur, nous offrait autrefois. Je le sens, palpable dans l\u2019air, dans les \u0153uvres d\u2019art contemporaines, dans les conversations quotidiennes. Et pourtant, en cet instant, alors que j\u2019\u00e9cris ces mots, je suis incapable de nommer pr\u00e9cis\u00e9ment ce que l\u2019issue fatale nous apportait. \u00c9tait-ce une forme de catharsis, une purification, ou quelque chose de plus profond et insondable ? Et maintenant, face \u00e0 cette r\u00e9flexion, que dois-je faire ? Quel courage faut-il pour continuer, pour affronter ces ab\u00eemes de pens\u00e9e ? Parfois, je me sens \u00eatre le plus faible des hommes, incapable de porter le fardeau de cette qu\u00eate de v\u00e9rit\u00e9. Et puis, presque aussit\u00f4t, je ris de moi-m\u00eame, de cette oscillation constante entre l\u2019exigence d\u2019\u00e9l\u00e9vation et de bassesse qui me taraude. Cette dualit\u00e9, ce conflit interne, semble \u00eatre le moteur m\u00eame de ma cr\u00e9ativit\u00e9, et pourtant, elle est aussi ma plus grande source de tourment. Suis-je un artiste \u00e0 la recherche d\u2019une v\u00e9rit\u00e9 insaisissable, ou simplement un homme perdu dans le labyrinthe de ses propres pens\u00e9es ? Je viens d\u2019\u00e9crire ces lignes, et presque aussit\u00f4t, je l\u00e8ve les yeux de mon \u00e9cran pour regarder par la fen\u00eatre. Le monde continue sa course, indiff\u00e9rent \u00e0 mes doutes et \u00e0 mes questionnements. Les gens s\u2019affairent, pris dans le tumulte de leur quotidien, se dirigeant, peut-\u00eatre, vers un ab\u00eeme in\u00e9vitable. Et je me dis que, dans le grand sch\u00e9ma des choses, mes pens\u00e9es ne sont pas plus significatives que la chute d\u2019une feuille morte d\u2019un arbre. Cette id\u00e9e m\u2019amuse, d\u2019une certaine mani\u00e8re. Elle me rappelle l\u2019insignifiance de mes tourments face \u00e0 l\u2019immensit\u00e9 du monde. Fort de cette r\u00e9flexion, je me l\u00e8ve, pr\u00eat \u00e0 commencer ma journ\u00e9e comme d\u2019habitude. Il y a quelque chose de lib\u00e9rateur \u00e0 reconna\u00eetre sa propre petitesse, \u00e0 accepter que nos luttes int\u00e9rieures ne sont que des \u00e9chos dans un univers bien plus vaste. Je d\u00e9cide de m\u2019appuyer sur cette pens\u00e9e, de l\u2019utiliser comme un point d\u2019ancrage pour affronter ce que la journ\u00e9e me r\u00e9serve. Peut-\u00eatre est-ce l\u00e0 la v\u00e9ritable force, la capacit\u00e9 de sourire face \u00e0 l\u2019insignifiance de notre propre existence et de continuer malgr\u00e9 tout Illustration: D\u00e9tail d\u2019une fa\u00e7ade d\u2019un b\u00e2timent dans une cit\u00e9 ant\u00e9diluvienne.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/dallc2b7e-2024-01-12-08.11.18-a-close-up-black-and-white-ink-drawing-in-the-style-of-victor-hugo-focusing-on-the-textures-and-materials-of-the-antediluvian-city.-this-image-should.png?1748065162", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/12-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/12-janvier-2024.html", "title": "12 janvier 2024", "date_published": "2024-01-12T02:39:00Z", "date_modified": "2025-05-28T06:43:56Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "

Revenir au d\u00e9but, \u00e9chelle de gris, sept cases, du noir profond au blanc pur du papier. Puis en finir avec l\u2019empirique. Hachures dans un sens, puis dans un autre, superposez. A la fin on se lance \u00e0 nouveau dans des bouts de tableau du Caravage, des photographies d\u00e9chir\u00e9s de fa\u00e7on al\u00e9atoire, en noir et blanc toujours avec l\u2019\u00e9chelle de gris comme rep\u00e8re.<\/p>\n

Elles sont enchant\u00e9es. L\u2019importance des piqures de rappel.<\/p>\n

On r\u00e9percute sur tous les ateliers. Janvier de ce cot\u00e9 l\u00e0 sera plus tranquille.<\/p>\n<\/span>

\n
\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n
\nLecture des contr\u00e9es du r\u00eave, m\u00e9langer les impressions fournies par les dessins d\u2019Hugo et les descriptions de HP Lovecraft, confectionner des lanceurs d\u2019id\u00e9es.\n<\/span>
\n
\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n
\n« Une imagination d\u00e9bordante » . Aller de plus en plus loin dans l\u2019imagination comme dans un r\u00e9cit lovecraftien. S\u2019enfoncer dans l\u2019imaginaire.\n

En parall\u00e8le, la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une vie rude.<\/p>\n

A se demander si on ne choisit pas cette vie difficile mat\u00e9riellement afin de parvenir \u00e0 r\u00eaver de plus en plus loin, pour ne plus \u00eatre parasit\u00e9 par les illusions de l\u2019\u00e9tat de veille, les petits r\u00eaves tellement mesquins.<\/p>\n

Ecrire de plus en plus ici comme autrefois dans les carnets. Jeter des id\u00e9es, du chaos, une sorte de cryptographie inaccessible aux touristes.<\/p>\n


\nEt de la journ\u00e9e se souvenir avec quelle parcimonie on ouvre le robinet du gaz pour aider la bonbonne \u00e0 chauffer l\u2019atelier. Sit\u00f4t que le groupe part j\u2019\u00e9teins. La temp\u00e9rature plonge. Mais pas si froid qu\u2019on veut nous le faire croire, que les gens finissent pas le croire.\n

Et aussi celle-ci qui m\u2019avertir d\u00e9j\u00e0 qu\u2019elle ne pourra pas venir deux fois ce mois-ci, comme elle m\u2019a d\u00e9j\u00e0 fait le coup en novembre, et que je te propose de te payer la moiti\u00e9. Je crois que je vais lui dire de ne plus revenir. Si je n\u2019avais pas besoin m\u00eame de cette moiti\u00e9 je lui dirais bien. En ai-je tellement besoin ? Parfois entre le besoin et la s\u00e9r\u00e9nit\u00e9\u2026 un choix drastique. Les touristes me sont de plus insupportables.<\/p>\n


\nTiens, apr\u00e8s pas loin de trois ans de silence, celle l\u00e0 se manifeste— Meilleurs v\u0153ux— tout le tralala. S. saute sur l\u2019occasion pour l\u2019inviter \u00e0 d\u00eener un soir. Franchement je m\u2019en passerais. Et d\u2019aller aussi chez les C. quelle barbe, lui ne pense qu\u2019au pognon, il ne parle que de \u00e7a et elle depuis qu\u2019elle est grand-m\u00e8re nous saoule avec ses anecdotes et surtout les photos qu\u2019elle pr\u00e9sente sur son portable dernier cri.\n
\nPour les petits formats je peux m\u2019am\u00e9nager une place dans le bureau d\u2019en haut. Pourquoi je n\u2019y ai pas pens\u00e9 plus t\u00f4t.\n

De m\u00eame que pour \u00eatre vraiment aimable \u00e0 certain moment de ces journ\u00e9es il faut bien \u00eatre parfaitement ex\u00e9crable \u00e0 d\u2019autre.<\/p>\n

Trouver une sorte d\u2019\u00e9quilibre, par ces petits d\u00e9s\u00e9quilibres.<\/p>\n


\nR.D. \u00e0 la culture, ben voyons, \u00e7a compl\u00e8te la bande de malfrats qui nous gouverne. Et l\u2019andouille de C. qui bat des palmes et qui clame \u00e0 tue t\u00eate on la vire du parti. Bouffon.\n

C\u2019est comme si la terre avait plong\u00e9 dans une dimension diff\u00e9rente. Une dimension o\u00f9 tout est devenu compl\u00e8tement con, absurde. Et cependant, tout semble continuer malgr\u00e9 tout comme avant. Je me frotte les yeux, l\u2019impression ne disparait pas, elle persiste.<\/p>", "content_text": "Revenir au d\u00e9but, \u00e9chelle de gris, sept cases, du noir profond au blanc pur du papier. Puis en finir avec l\u2019empirique. Hachures dans un sens, puis dans un autre, superposez. A la fin on se lance \u00e0 nouveau dans des bouts de tableau du Caravage, des photographies d\u00e9chir\u00e9s de fa\u00e7on al\u00e9atoire, en noir et blanc toujours avec l\u2019\u00e9chelle de gris comme rep\u00e8re. Elles sont enchant\u00e9es. L\u2019importance des piqures de rappel. On r\u00e9percute sur tous les ateliers. Janvier de ce cot\u00e9 l\u00e0 sera plus tranquille. Lecture des contr\u00e9es du r\u00eave, m\u00e9langer les impressions fournies par les dessins d\u2019Hugo et les descriptions de HP Lovecraft, confectionner des lanceurs d\u2019id\u00e9es. \"Une imagination d\u00e9bordante\" . Aller de plus en plus loin dans l\u2019imagination comme dans un r\u00e9cit lovecraftien. S\u2019enfoncer dans l\u2019imaginaire. En parall\u00e8le, la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019une vie rude. A se demander si on ne choisit pas cette vie difficile mat\u00e9riellement afin de parvenir \u00e0 r\u00eaver de plus en plus loin, pour ne plus \u00eatre parasit\u00e9 par les illusions de l\u2019\u00e9tat de veille, les petits r\u00eaves tellement mesquins. Ecrire de plus en plus ici comme autrefois dans les carnets. Jeter des id\u00e9es, du chaos, une sorte de cryptographie inaccessible aux touristes. Et de la journ\u00e9e se souvenir avec quelle parcimonie on ouvre le robinet du gaz pour aider la bonbonne \u00e0 chauffer l\u2019atelier. Sit\u00f4t que le groupe part j\u2019\u00e9teins. La temp\u00e9rature plonge. Mais pas si froid qu\u2019on veut nous le faire croire, que les gens finissent pas le croire. Et aussi celle-ci qui m\u2019avertir d\u00e9j\u00e0 qu\u2019elle ne pourra pas venir deux fois ce mois-ci, comme elle m\u2019a d\u00e9j\u00e0 fait le coup en novembre, et que je te propose de te payer la moiti\u00e9. Je crois que je vais lui dire de ne plus revenir. Si je n\u2019avais pas besoin m\u00eame de cette moiti\u00e9 je lui dirais bien. En ai-je tellement besoin ? Parfois entre le besoin et la s\u00e9r\u00e9nit\u00e9\u2026 un choix drastique. Les touristes me sont de plus insupportables. Tiens, apr\u00e8s pas loin de trois ans de silence, celle l\u00e0 se manifeste\u2014 Meilleurs v\u0153ux\u2014 tout le tralala. S. saute sur l\u2019occasion pour l\u2019inviter \u00e0 d\u00eener un soir. Franchement je m\u2019en passerais. Et d\u2019aller aussi chez les C. quelle barbe, lui ne pense qu\u2019au pognon, il ne parle que de \u00e7a et elle depuis qu\u2019elle est grand-m\u00e8re nous saoule avec ses anecdotes et surtout les photos qu\u2019elle pr\u00e9sente sur son portable dernier cri. Pour les petits formats je peux m\u2019am\u00e9nager une place dans le bureau d\u2019en haut. Pourquoi je n\u2019y ai pas pens\u00e9 plus t\u00f4t. De m\u00eame que pour \u00eatre vraiment aimable \u00e0 certain moment de ces journ\u00e9es il faut bien \u00eatre parfaitement ex\u00e9crable \u00e0 d\u2019autre. Trouver une sorte d\u2019\u00e9quilibre, par ces petits d\u00e9s\u00e9quilibres. R.D. \u00e0 la culture, ben voyons, \u00e7a compl\u00e8te la bande de malfrats qui nous gouverne. Et l\u2019andouille de C. qui bat des palmes et qui clame \u00e0 tue t\u00eate on la vire du parti. Bouffon. C\u2019est comme si la terre avait plong\u00e9 dans une dimension diff\u00e9rente. Une dimension o\u00f9 tout est devenu compl\u00e8tement con, absurde. Et cependant, tout semble continuer malgr\u00e9 tout comme avant. Je me frotte les yeux, l\u2019impression ne disparait pas, elle persiste. ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/b2e8abab-fa30-4675-9730-9977783a270f.webp?1748065070", "tags": ["Lovecraft"] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/10-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/10-janvier-2024.html", "title": "10 janvier 2024", "date_published": "2024-01-10T02:28:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Ecrire avec la plus grande sinc\u00e9rit\u00e9 ce qui nous traverse, finira probablement en suicide mais ne sera jamais de la litt\u00e9rature. Qui pourrait bien dire ce genre d\u2019effroyable sentence ? Il faudrait pencher la t\u00eate et regarder dans le puits.\u2002Sans oublier de placer les mains de chaque c\u00f4t\u00e9 de la bouche en porte-voix.\u2002Et au bout du compte \u00e0 force de pencher cette grosse t\u00eate, elle ferait —\u00e0 ma plus grande joie je crois — basculer le corps entier vers l\u2019ab\u00eeme, on entendrait un petit ploc et ce serait la seule chose de v\u00e9ritablement, de sinc\u00e8rement discret que ce gros con de P. commettrait —et la derni\u00e8re— h\u00e9las pour les unes, celles qui ne l\u2019ont jamais vraiment connu, tant mieux pour les autres qui l\u2019on fr\u00e9quent\u00e9 et savent d\u00e9sormais \u00e0 quoi s\u2019en tenir.<\/p>\n

Sinon, je songe \u00e0 d\u00e9crire ce village dans lequel il a pass\u00e9 cette enfance si merveilleuse\u2002selon son dire , qu\u2019il n\u2019a jamais voulu l\u00e2cher son souvenir, s\u2019y agrippant comme un taon \u00e0 la croupe d\u2019un poney toute sa vie. En tous cas, une chose est certaine, il faut que je retourne voir ce pays de cocagne, c\u2019est \u00e0 deux heures et demi de route d\u2019ici. Peut-\u00eatre une occasion en passant pour nettoyer la tombe de mes a\u00efeux. Car nous venons P. et moi, bien s\u00fbr, du m\u00eame village. Cependant ma version des lieux est bien plus lugubre. C\u2019est comme si lui avait aspir\u00e9 si j\u2019ose dire tout le merveilleux que ces lieux autrefois pouvaient encore receler, et que moi il ne me rest\u00e2t plus par un \u00e9trange effet de vase communiquant qu\u2019un pays aust\u00e8re et exsangue, la plupart du temps brumeux, pluvieux, neigeux, et enfin glacial et nimb\u00e9 d\u2019une incommensurable tristesse.<\/p>\n

Oui, \u00e7a me revient maintenant. J\u2019avais envie de prendre quelques notes sur la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019\u00e9crire un journal, tr\u00e8s t\u00f4t ce matin, \u00e0 la sortie d\u2019un r\u00eave bizarre. Une exposition de peinture dans laquelle je jouais les seconds couteaux, il fallait traverser des ponts suspendus dans l\u2019Himalaya \u00e0 un moment pas d\u2019autre choix que de balancer les toiles d\u2019une rive \u00e0 l\u2019autre puis de plonger nu dans l\u2019eau glac\u00e9e. Les v\u00eatements balanc\u00e9s aussi dans des sacs poubelles et suivant les m\u00eames trajectoires approximativement que les \u0153uvres qui les pr\u00e9c\u00e9daient. Puis enfin, au bout d\u2019une longue marche sur des sentiers de ch\u00e8vres nous parvenions \u00e0 la galerie. Le peintre vedette avait produit des merdes spectaculaires si bien que le commissaire l\u2019avait gentiment \u00e9conduit lui proposant gentiment de refaire tout le chemin du retour \u00e0 l\u2019envers d\u2019un air l\u00e9ger. Quand\u2002 \u00e0 moi je me retrouvai \u00e0 devoir accrocher dans une salle du fond je ne me souviens plus trop quoi. Ce que je retiens encore c\u2019est que la salle principale, l\u00e0 o\u00f9 devait se situer le clou du spectacle \u00e9tait totalement vide, les murs \u00e9taient vides, et la porte d\u2019entr\u00e9e absolument close.<\/p>\n

Et donc, me r\u00e9veillant un peu d\u00e9sar\u00e7onn\u00e9, ma premi\u00e8re phrase a \u00e9t\u00e9 : mais quelle n\u00e9cessit\u00e9 peux-tu encore trouver \u00e0 \u00e9crire un journal. Et c\u2019\u00e9tait un peu comme cette grande salle vide dans la p\u00e9nombre dont on ne pouvait pas s\u2019\u00e9chapper puisque la porte d\u2019entr\u00e9e \u00e9tait ferm\u00e9e. Il n\u2019y avait pas d\u2019issue \u00e0 moins de se rendre jusqu\u2019\u00e0 cette porte, de poser la main sur la poign\u00e9e, l\u2019ouvrir et s\u2019en aller. Et que peut-on bien pu trouver au del\u00e0 de cette porte, c\u2019est peut-\u00eatre l\u00e0 tout l\u2019enjeu d\u2019\u00e9crire ou non un journal, et plus j\u2019y pense plus c\u2019est limpide \u00e0 pr\u00e9sent.<\/p>\n

Je veux dire peu importe le paysage sur quoi je vais n\u00e9cessairement tomber, il y aura un paysage et une ligne d\u2019horizon, forc\u00e9ment. Puis l\u2019angoisse de l\u2019angoisse\u2002est revenue au galop , comme toujours. Et avec elle le dibbouk qui —d\u00e9tail int\u00e9ressant— est assis \u00e0 califourchon \u00e0 l\u2019envers sur une ch\u00e8vre. Il me parle, c\u2019est un murmure, des rafales de vent me fouettent le visage et m\u2019aveuglent. — Tu as pens\u00e9 \u00e0 un paysage, mais de l\u2019autre c\u00f4t\u00e9 c\u2019est la mort le n\u00e9ant mon pauvre vieux, ne te fais aucune sorte d\u2019illusion.<\/p>\n

Donc l\u2019int\u00e9r\u00eat d\u2019\u00e9crire un journal est derechef tout trouv\u00e9, le but \u00e9tant bien sur de rester dans la pi\u00e8ce vide, de ne pas aller poser la main sur cette fichue porte, de ne pas essayer de l\u2019ouvrir.<\/p>\n

Encore qu\u2019on finisse certainement par se lasser, que la lassitude prenne soudain l\u2019ascendant sur la peur. Que par ennui on brave sa propre angoisse de l\u2019angoisse, qu\u2019on l\u2019ach\u00e8ve, qu\u2019on lui flanque un point final en pleine figure.<\/p>\n

Image en avant : Pont en Suisse<\/p>\n

Id\u00e9es sous la douche<\/p>\n

Un truc ne tourne pas rond. Un bruit m\u00e9canique bizarre. Le type d\u00e9monte la voiture, ne trouve rien. Puis il se retourne et le Dibbouk lui demande si tout va bien avec un sourire goguenard.<\/p>\n

La seconde id\u00e9e a fil\u00e9 le temps que j\u2019\u00e9crive la premi\u00e8re. Zut.<\/p>\n

Mais vite une autre arrive que je ne loupe pas. ( c\u2019est comme au jeu du m\u00e9tro aux heures de pointe)<\/p>\n

Car vu aussi cette vid\u00e9o— un « short » qui date d\u2019il y a deux mois o\u00f9 Attal se plaint d\u2019avoir \u00e9t\u00e9 harcel\u00e9 par Juan Branco notamment ( plus c\u2019est gros mieux \u00e7a passe) Un short sur YouTube , j\u2019ai cliqu\u00e9 sans savoir pourquoi, mince.<\/p>\n

Est-il possible que ces deux l\u00e0 se vengent du harc\u00e8lement, que l\u2019un nomme l\u2019autre premier ministre juste pour emmerder J.B. Trop marrant comme id\u00e9e. La politique se r\u00e9sumant \u00e0 des vieux reflexes archa\u00efques —ce qui me convient en l\u2019esp\u00e8ce tout \u00e0 fait. Mais quand m\u00eame, personne ne dit rien, on avale tout \u00e7a sans broncher. Et de les voir ensuite ces deux l\u00e0 sur le perron de l\u2019E , des clones\u2026 merde et si en fait tous les dirigeants n\u2019\u00e9taient rien d\u2019autre que des clones. Une entit\u00e9 extraterrestre nous fait croire qu\u2019on est dirig\u00e9s par des clowns, \u00e7a, pour le coup, c\u2019est trop dr\u00f4le, me fait bien rigoler. Puis le rire devient jaune \u00e9videmment.<\/p>", "content_text": "Ecrire avec la plus grande sinc\u00e9rit\u00e9 ce qui nous traverse, finira probablement en suicide mais ne sera jamais de la litt\u00e9rature. Qui pourrait bien dire ce genre d\u2019effroyable sentence ? Il faudrait pencher la t\u00eate et regarder dans le puits. Sans oublier de placer les mains de chaque c\u00f4t\u00e9 de la bouche en porte-voix. Et au bout du compte \u00e0 force de pencher cette grosse t\u00eate, elle ferait \u2014\u00e0 ma plus grande joie je crois \u2014 basculer le corps entier vers l\u2019ab\u00eeme, on entendrait un petit ploc et ce serait la seule chose de v\u00e9ritablement, de sinc\u00e8rement discret que ce gros con de P. commettrait \u2014et la derni\u00e8re\u2014 h\u00e9las pour les unes, celles qui ne l\u2019ont jamais vraiment connu, tant mieux pour les autres qui l\u2019on fr\u00e9quent\u00e9 et savent d\u00e9sormais \u00e0 quoi s\u2019en tenir. Sinon, je songe \u00e0 d\u00e9crire ce village dans lequel il a pass\u00e9 cette enfance si merveilleuse selon son dire , qu\u2019il n\u2019a jamais voulu l\u00e2cher son souvenir, s\u2019y agrippant comme un taon \u00e0 la croupe d\u2019un poney toute sa vie. En tous cas, une chose est certaine, il faut que je retourne voir ce pays de cocagne, c\u2019est \u00e0 deux heures et demi de route d\u2019ici. Peut-\u00eatre une occasion en passant pour nettoyer la tombe de mes a\u00efeux. Car nous venons P. et moi, bien s\u00fbr, du m\u00eame village. Cependant ma version des lieux est bien plus lugubre. C\u2019est comme si lui avait aspir\u00e9 si j\u2019ose dire tout le merveilleux que ces lieux autrefois pouvaient encore receler, et que moi il ne me rest\u00e2t plus par un \u00e9trange effet de vase communiquant qu\u2019un pays aust\u00e8re et exsangue, la plupart du temps brumeux, pluvieux, neigeux, et enfin glacial et nimb\u00e9 d\u2019une incommensurable tristesse. Oui, \u00e7a me revient maintenant. J\u2019avais envie de prendre quelques notes sur la n\u00e9cessit\u00e9 d\u2019\u00e9crire un journal, tr\u00e8s t\u00f4t ce matin, \u00e0 la sortie d\u2019un r\u00eave bizarre. Une exposition de peinture dans laquelle je jouais les seconds couteaux, il fallait traverser des ponts suspendus dans l\u2019Himalaya \u00e0 un moment pas d\u2019autre choix que de balancer les toiles d\u2019une rive \u00e0 l\u2019autre puis de plonger nu dans l\u2019eau glac\u00e9e. Les v\u00eatements balanc\u00e9s aussi dans des sacs poubelles et suivant les m\u00eames trajectoires approximativement que les \u0153uvres qui les pr\u00e9c\u00e9daient. Puis enfin, au bout d\u2019une longue marche sur des sentiers de ch\u00e8vres nous parvenions \u00e0 la galerie. Le peintre vedette avait produit des merdes spectaculaires si bien que le commissaire l\u2019avait gentiment \u00e9conduit lui proposant gentiment de refaire tout le chemin du retour \u00e0 l\u2019envers d\u2019un air l\u00e9ger. Quand \u00e0 moi je me retrouvai \u00e0 devoir accrocher dans une salle du fond je ne me souviens plus trop quoi. Ce que je retiens encore c\u2019est que la salle principale, l\u00e0 o\u00f9 devait se situer le clou du spectacle \u00e9tait totalement vide, les murs \u00e9taient vides, et la porte d\u2019entr\u00e9e absolument close. Et donc, me r\u00e9veillant un peu d\u00e9sar\u00e7onn\u00e9, ma premi\u00e8re phrase a \u00e9t\u00e9: mais quelle n\u00e9cessit\u00e9 peux-tu encore trouver \u00e0 \u00e9crire un journal. Et c\u2019\u00e9tait un peu comme cette grande salle vide dans la p\u00e9nombre dont on ne pouvait pas s\u2019\u00e9chapper puisque la porte d\u2019entr\u00e9e \u00e9tait ferm\u00e9e. Il n\u2019y avait pas d\u2019issue \u00e0 moins de se rendre jusqu\u2019\u00e0 cette porte, de poser la main sur la poign\u00e9e, l\u2019ouvrir et s\u2019en aller. Et que peut-on bien pu trouver au del\u00e0 de cette porte, c\u2019est peut-\u00eatre l\u00e0 tout l\u2019enjeu d\u2019\u00e9crire ou non un journal, et plus j\u2019y pense plus c\u2019est limpide \u00e0 pr\u00e9sent. Je veux dire peu importe le paysage sur quoi je vais n\u00e9cessairement tomber, il y aura un paysage et une ligne d\u2019horizon, forc\u00e9ment. Puis l\u2019angoisse de l\u2019angoisse est revenue au galop , comme toujours. Et avec elle le dibbouk qui \u2014d\u00e9tail int\u00e9ressant\u2014 est assis \u00e0 califourchon \u00e0 l\u2019envers sur une ch\u00e8vre. Il me parle, c\u2019est un murmure, des rafales de vent me fouettent le visage et m\u2019aveuglent. \u2014 Tu as pens\u00e9 \u00e0 un paysage, mais de l\u2019autre c\u00f4t\u00e9 c\u2019est la mort le n\u00e9ant mon pauvre vieux, ne te fais aucune sorte d\u2019illusion. Donc l\u2019int\u00e9r\u00eat d\u2019\u00e9crire un journal est derechef tout trouv\u00e9, le but \u00e9tant bien sur de rester dans la pi\u00e8ce vide, de ne pas aller poser la main sur cette fichue porte, de ne pas essayer de l\u2019ouvrir. Encore qu\u2019on finisse certainement par se lasser, que la lassitude prenne soudain l\u2019ascendant sur la peur. Que par ennui on brave sa propre angoisse de l\u2019angoisse, qu\u2019on l\u2019ach\u00e8ve, qu\u2019on lui flanque un point final en pleine figure. Image en avant : Pont en Suisse Id\u00e9es sous la douche Un truc ne tourne pas rond. Un bruit m\u00e9canique bizarre. Le type d\u00e9monte la voiture, ne trouve rien. Puis il se retourne et le Dibbouk lui demande si tout va bien avec un sourire goguenard. La seconde id\u00e9e a fil\u00e9 le temps que j\u2019\u00e9crive la premi\u00e8re. Zut. Mais vite une autre arrive que je ne loupe pas. ( c\u2019est comme au jeu du m\u00e9tro aux heures de pointe) Car vu aussi cette vid\u00e9o\u2014 un \u00abshort\u00bb qui date d\u2019il y a deux mois o\u00f9 Attal se plaint d\u2019avoir \u00e9t\u00e9 harcel\u00e9 par Juan Branco notamment ( plus c\u2019est gros mieux \u00e7a passe) Un short sur YouTube , j\u2019ai cliqu\u00e9 sans savoir pourquoi, mince. Est-il possible que ces deux l\u00e0 se vengent du harc\u00e8lement, que l\u2019un nomme l\u2019autre premier ministre juste pour emmerder J.B. Trop marrant comme id\u00e9e. La politique se r\u00e9sumant \u00e0 des vieux reflexes archa\u00efques \u2014ce qui me convient en l\u2019esp\u00e8ce tout \u00e0 fait. Mais quand m\u00eame, personne ne dit rien, on avale tout \u00e7a sans broncher. Et de les voir ensuite ces deux l\u00e0 sur le perron de l\u2019E , des clones\u2026 merde et si en fait tous les dirigeants n\u2019\u00e9taient rien d\u2019autre que des clones. Une entit\u00e9 extraterrestre nous fait croire qu\u2019on est dirig\u00e9s par des clowns, \u00e7a, pour le coup, c\u2019est trop dr\u00f4le, me fait bien rigoler. Puis le rire devient jaune \u00e9videmment.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/pont-suisse.jpg?1748065103", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/09-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/09-janvier-2024.html", "title": "09 janvier 2024", "date_published": "2024-01-09T02:19:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Et bien, \u00e0 vrai dire, il faut que je te dise quelque chose. Si je savais quoi, cela m\u2019arrangerait, mais voil\u00e0 bien toute la difficult\u00e9, je n\u2019en sais rien. Peut-\u00eatre cela viendra t\u2019il plus tard. En attendant que la chose se pr\u00e9cise, je veux dire la raison pour laquelle j\u2019ai voulu commencer cette lettre,\u2002il m\u2019apparait important de te dire combien je m\u2019estime chanceux d\u2019avoir d\u00e9couvert \u2013 mais n\u2019est-ce pas gr\u00e2ce \u00e0 toi ? \u2013 le cercle litt\u00e9raire des mangeurs d\u2019\u00e9pluchures de patates de Guernesey. Je ne m\u2019en lasse pas. Ce qui me procure aussi, bien entendu, l\u2019id\u00e9e de le plagier presque aussit\u00f4t.\u2002Quelle tristesse de ne pas \u00eatre en mesure d\u2019effectuer l\u2019effort n\u00e9cessaire de le lire en anglais, qui est sa langue originale. Mais le fait est, qu\u2019en ce moment, beaucoup d\u2019ouvrages m\u2019arrivent sous le manteau et que je ne peux pas vraiment les choisir comme je le voudrais. En outre ils sont gratuits il serait mals\u00e9ant de faire la fine bouche. D\u00e9licieux est l\u2019adjectif qui flotte autour de cette lecture sit\u00f4t que j\u2019ai le temps et l\u2019envie d\u2019 y plonger. J\u2019en lis quelques pages puis je referme le livre pour mieux les savourer, et l\u2019effet peut se prolonger parfois bien au del\u00e0 d\u2019une heure, ce qui, avec les ann\u00e9es, est tout \u00e0 fait exceptionnel — car cette lecture dispense un effet apaisant, c\u2019est un peu comme un de ces vieux \u00e9dredons sous lequel on se glisse en se bouchant les oreilles pour amortir tous les bruits ext\u00e9rieurs.<\/p>\n

« A vrai dire », cette expression m\u2019amuse. Elle me surprend surtout au moment o\u00f9 elle surgit et o\u00f9 je me sens soudain pouss\u00e9 \u00e0 l\u2019\u00e9crire. Comme si cette croyance enfantine persistait encore qu\u2019il suffit de prendre un crayon, ou en l\u2019occurrence un clavier, pour se pr\u00e9parer \u00e0 dire la v\u00e9rit\u00e9. N\u2019est-ce pas une sorte de torture qu\u2019on nous a inflig\u00e9e d\u00e8s notre plus jeune \u00e2ge que celle-ci : s\u2019imposer d\u2019\u00e9crire la v\u00e9rit\u00e9 ou de la dire.<\/p>\n

Si je la disais de la fa\u00e7on la plus simple j\u2019ai bien peur qu\u2019elle apparaisse bien pauvre dans sa nudit\u00e9 et surtout qu\u2019elle ne continue d\u2019entretenir cette morosit\u00e9 dont nous aimerions bien nous d\u00e9barrasser au moins le temps de lire ou d\u2019\u00e9crire une lettre. Ne serait-ce que par \u00e9gard ou politesse- y a t\u2019il une diff\u00e9rence, certainement, car je connais autour de moi bien des gens « polis » qui sont absolument d\u00e9pourvus d\u2019\u00e9gards envers leurs semblables.<\/p>\n

Voici d\u00e9sormais presque dix minutes que j\u2019ai commenc\u00e9 cette lettre et il me semble que cela fait un si\u00e8cle- ou soyons modeste, un demi. un peu plus que mon temps sur cette terre \u00e0 quelque chose pr\u00e8s —Comme si cette lettre, j\u2019avais voulu la commencer sur les bancs de l\u2019\u00e9cole et que je l\u2019avais laiss\u00e9e en plan, occup\u00e9 tout \u00e0 coup par je ne sais quoi. Peut-\u00eatre que les divertissements ne servent qu\u2019\u00e0 cela finalement, \u00e0 repousser le moment. Et vois-tu maintenant cela me revient, d\u00e9j\u00e0 \u00e0 l\u2019\u00e9poque je ne savais pas quoi te dire, je savais seulement l\u2019envie de t\u2019\u00e9crire quelque chose, cet \u00e9lan. Et j\u2019observe avec attention comment il s\u2019interrompt de nouveau de la m\u00eame mani\u00e8re. Mon esprit bat la campagne, je saute du coq \u00e0 l\u2019\u00e2ne, j\u2019ai l\u2019air de tourner autour du pot- le fameux pot aux roses j\u2019imagine.<\/p>\n

Il me semble que c\u2019est la m\u00eame lettre qui reste inachev\u00e9e depuis tant d\u2019ann\u00e9es. Comme pour me laisser une chance probablement de dire quelque chose d\u2019authentique, de r\u00e9el, \u00e0 un moment ou l\u2019autre, peut-\u00eatre m\u00eame par inadvertance. Je crois beaucoup \u00e0 cette notion de hasard, de pr\u00e9tendue maladresse, mais surtout parce que j\u2019en suis parvenu \u00e0 un tel point de d\u00e9gout concernant toute habilet\u00e9.<\/p>\n

Tout le weekend je l\u2019ai pass\u00e9 en compagnie de HPL, j\u2019ai lu des quantit\u00e9s de pages innombrables sur lui, et puis \u00e0 la fin, je me suis demand\u00e9 ce qui me poussait \u00e0 nourrir un tel engouement pour connaitre sa vie dans le menu. Cela m\u2019a paru obsc\u00e8ne. Et j\u2019ai donc d\u00e9cid\u00e9 de me replonger dans son \u0153uvre uniquement, de ne plus jouer les voyeurs. Ceci afin d\u2019en \u00e9tudier chaque phrase le plus lentement qu\u2019il m\u2019est possible de le faire ( ce qui me connaissant est un petit exploit tu en conviendras). Nous sommes mardi et tout compte fait je me demande ce qu\u2019il reste de cette lecture assidue sinon ce doute, ce questionnement sur ma volont\u00e9 d\u2019assiduit\u00e9 seulement.<\/p>\n

Il faudra sans doute que je t\u2019\u00e9crive plus souvent ce genre de lettre qui d\u00e9bute par une envie sans raison \u00e0 part celle peut-\u00eatre de te faire signe. En attendant je m\u2019arr\u00eate l\u00e0 pour aujourd\u2019hui, cela aussi pourrait \u00eatre un bon sujet de correspondance, quand ou pourquoi s\u2019arr\u00eate t\u2019on d\u2019\u00e9crire une lettre. A mon sens tr\u00e8s proche comme exp\u00e9rience du moment o\u00f9 l\u2019on se sent pr\u00eat d\u2019achever un tableau. Il me semble que le moment o\u00f9 l\u2019on peut dire des choses importantes, essentielles semble plus pr\u00e9cieux \u00e0 proportion qu\u2019on l\u2019\u00e9courte. Quand \u00e0 ce qui l\u2019\u00e9courte c\u2019est encore un myst\u00e8re, on ne saurait en parler, pas plus que l\u2019\u00e9crire.<\/p>\n

Je recopie ici, pour le rappeler \u00e0 ton bon souvenir, ce passage qui explique la constitution du cercle litt\u00e9raire des mangeurs d\u2019\u00e9pluchures de pomme de terre de Guernesey :<\/p>\n

[\u2026] Puis chacun a regagn\u00e9 son domicile et s\u2019est mis \u00e0 lire. Nous avons commenc\u00e9 \u00e0 nous r\u00e9unir \u00e0 cause du commandant, c\u2019est vrai, mais nous avons continu\u00e9 pour le plaisir. Aucun de nous n\u2019ayant la moindre exp\u00e9rience en mati\u00e8re de cercle litt\u00e9raire, nous avons invent\u00e9 nos propres r\u00e8gles : chacun notre tour, nous parlions aux autres d\u2019un livre que nous avions lu. Au d\u00e9but, nous tentions de garder notre calme et de demeurer objectifs, mais cela n\u2019a gu\u00e8re dur\u00e9 ; rapidement, les orateurs n\u2019ont plus eu pour ambition que de persuader leur auditoire de lire l\u2019ouvrage en question. Et, quand deux membres avaient lu le m\u00eame livre, ils en d\u00e9battaient devant nous pour notre plus grand plaisir. A force de lire, de parler de livres et de nous disputer \u00e0 cause d\u2019eux, nous en sommes venus \u00e0 nous lier \u00e9troitement les uns aux autres. D\u2019autres insulaires ont voulu se joindre \u00e0 nous et nos soir\u00e9es se sont transform\u00e9es en moments chaleureux et anim\u00e9s. \u00c0 tel point que, de temps en temps, nous arrivions presque \u00e0 oublier la noirceur du dehors. Nous nous r\u00e9unissons toujours tous les quinze jours. [\u2026]<\/p>\n

Je me demandai s\u2019il ne serait pas amusant d\u2019introduire, dans la foul\u00e9e, une r\u00e9ponse \u00e0 cette lettre—, ce qui imm\u00e9diatement soul\u00e8ve un probl\u00e8me de taille, car pour cela il faudrait que je parvienne \u00e0 identifier clairement mon interlocuteur, ce qui, pour l\u2019instant, n\u2019est malheureusement pas le cas.<\/p>\n

Ou du moins que j\u2019en isole une ou un car bien l\u2019impression que tous se m\u00e9langent rien que de tenter d\u2019imaginer. De plus, \u00e9crire pour une foule, passe encore— les \u00e9crivains ne se g\u00eanent pas de le faire bien que personnellement, et modestement, l\u2019incongruit\u00e9 m\u2019emp\u00eache raisonnablement de passer \u00e0 l\u2019acte ; mais qu\u2019une foule r\u00e9plique, \u2002\u00e7a ce serait vraiment le pompon.<\/p>\n

Image mise en avant : Portrait d\u2019un fou regardant \u00e0 travers ses doigts. Maitre 1537 ( selon Winkler appel\u00e9 aussi : Ma\u00eetre de l\u2019Ecce Homo d\u2019Augsbourg)<\/p>", "content_text": "Et bien, \u00e0 vrai dire, il faut que je te dise quelque chose. Si je savais quoi, cela m\u2019arrangerait, mais voil\u00e0 bien toute la difficult\u00e9, je n\u2019en sais rien. Peut-\u00eatre cela viendra t\u2019il plus tard. En attendant que la chose se pr\u00e9cise, je veux dire la raison pour laquelle j\u2019ai voulu commencer cette lettre, il m\u2019apparait important de te dire combien je m\u2019estime chanceux d\u2019avoir d\u00e9couvert \u2013 mais n\u2019est-ce pas gr\u00e2ce \u00e0 toi ? \u2013 le cercle litt\u00e9raire des mangeurs d\u2019\u00e9pluchures de patates de Guernesey. Je ne m\u2019en lasse pas. Ce qui me procure aussi, bien entendu, l\u2019id\u00e9e de le plagier presque aussit\u00f4t. Quelle tristesse de ne pas \u00eatre en mesure d\u2019effectuer l\u2019effort n\u00e9cessaire de le lire en anglais, qui est sa langue originale. Mais le fait est, qu\u2019en ce moment, beaucoup d\u2019ouvrages m\u2019arrivent sous le manteau et que je ne peux pas vraiment les choisir comme je le voudrais. En outre ils sont gratuits il serait mals\u00e9ant de faire la fine bouche. D\u00e9licieux est l\u2019adjectif qui flotte autour de cette lecture sit\u00f4t que j\u2019ai le temps et l\u2019envie d\u2019 y plonger. J\u2019en lis quelques pages puis je referme le livre pour mieux les savourer, et l\u2019effet peut se prolonger parfois bien au del\u00e0 d\u2019une heure, ce qui, avec les ann\u00e9es, est tout \u00e0 fait exceptionnel \u2014 car cette lecture dispense un effet apaisant, c\u2019est un peu comme un de ces vieux \u00e9dredons sous lequel on se glisse en se bouchant les oreilles pour amortir tous les bruits ext\u00e9rieurs. \u00abA vrai dire\u00bb, cette expression m\u2019amuse. Elle me surprend surtout au moment o\u00f9 elle surgit et o\u00f9 je me sens soudain pouss\u00e9 \u00e0 l\u2019\u00e9crire. Comme si cette croyance enfantine persistait encore qu\u2019il suffit de prendre un crayon, ou en l\u2019occurrence un clavier, pour se pr\u00e9parer \u00e0 dire la v\u00e9rit\u00e9. N\u2019est-ce pas une sorte de torture qu\u2019on nous a inflig\u00e9e d\u00e8s notre plus jeune \u00e2ge que celle-ci : s\u2019imposer d\u2019\u00e9crire la v\u00e9rit\u00e9 ou de la dire. Si je la disais de la fa\u00e7on la plus simple j\u2019ai bien peur qu\u2019elle apparaisse bien pauvre dans sa nudit\u00e9 et surtout qu\u2019elle ne continue d\u2019entretenir cette morosit\u00e9 dont nous aimerions bien nous d\u00e9barrasser au moins le temps de lire ou d\u2019\u00e9crire une lettre. Ne serait-ce que par \u00e9gard ou politesse- y a t\u2019il une diff\u00e9rence, certainement, car je connais autour de moi bien des gens \u00ab polis\u00bb qui sont absolument d\u00e9pourvus d\u2019\u00e9gards envers leurs semblables. Voici d\u00e9sormais presque dix minutes que j\u2019ai commenc\u00e9 cette lettre et il me semble que cela fait un si\u00e8cle- ou soyons modeste, un demi. un peu plus que mon temps sur cette terre \u00e0 quelque chose pr\u00e8s \u2014Comme si cette lettre, j\u2019avais voulu la commencer sur les bancs de l\u2019\u00e9cole et que je l\u2019avais laiss\u00e9e en plan, occup\u00e9 tout \u00e0 coup par je ne sais quoi. Peut-\u00eatre que les divertissements ne servent qu\u2019\u00e0 cela finalement, \u00e0 repousser le moment. Et vois-tu maintenant cela me revient, d\u00e9j\u00e0 \u00e0 l\u2019\u00e9poque je ne savais pas quoi te dire, je savais seulement l\u2019envie de t\u2019\u00e9crire quelque chose, cet \u00e9lan. Et j\u2019observe avec attention comment il s\u2019interrompt de nouveau de la m\u00eame mani\u00e8re. Mon esprit bat la campagne, je saute du coq \u00e0 l\u2019\u00e2ne, j\u2019ai l\u2019air de tourner autour du pot- le fameux pot aux roses j\u2019imagine. Il me semble que c\u2019est la m\u00eame lettre qui reste inachev\u00e9e depuis tant d\u2019ann\u00e9es. Comme pour me laisser une chance probablement de dire quelque chose d\u2019authentique, de r\u00e9el, \u00e0 un moment ou l\u2019autre, peut-\u00eatre m\u00eame par inadvertance. Je crois beaucoup \u00e0 cette notion de hasard, de pr\u00e9tendue maladresse, mais surtout parce que j\u2019en suis parvenu \u00e0 un tel point de d\u00e9gout concernant toute habilet\u00e9. Tout le weekend je l\u2019ai pass\u00e9 en compagnie de HPL, j\u2019ai lu des quantit\u00e9s de pages innombrables sur lui, et puis \u00e0 la fin, je me suis demand\u00e9 ce qui me poussait \u00e0 nourrir un tel engouement pour connaitre sa vie dans le menu. Cela m\u2019a paru obsc\u00e8ne. Et j\u2019ai donc d\u00e9cid\u00e9 de me replonger dans son \u0153uvre uniquement, de ne plus jouer les voyeurs. Ceci afin d\u2019en \u00e9tudier chaque phrase le plus lentement qu\u2019il m\u2019est possible de le faire ( ce qui me connaissant est un petit exploit tu en conviendras). Nous sommes mardi et tout compte fait je me demande ce qu\u2019il reste de cette lecture assidue sinon ce doute, ce questionnement sur ma volont\u00e9 d\u2019assiduit\u00e9 seulement. Il faudra sans doute que je t\u2019\u00e9crive plus souvent ce genre de lettre qui d\u00e9bute par une envie sans raison \u00e0 part celle peut-\u00eatre de te faire signe. En attendant je m\u2019arr\u00eate l\u00e0 pour aujourd\u2019hui, cela aussi pourrait \u00eatre un bon sujet de correspondance, quand ou pourquoi s\u2019arr\u00eate t\u2019on d\u2019\u00e9crire une lettre. A mon sens tr\u00e8s proche comme exp\u00e9rience du moment o\u00f9 l\u2019on se sent pr\u00eat d\u2019achever un tableau. Il me semble que le moment o\u00f9 l\u2019on peut dire des choses importantes, essentielles semble plus pr\u00e9cieux \u00e0 proportion qu\u2019on l\u2019\u00e9courte. Quand \u00e0 ce qui l\u2019\u00e9courte c\u2019est encore un myst\u00e8re, on ne saurait en parler, pas plus que l\u2019\u00e9crire. Je recopie ici, pour le rappeler \u00e0 ton bon souvenir, ce passage qui explique la constitution du cercle litt\u00e9raire des mangeurs d\u2019\u00e9pluchures de pomme de terre de Guernesey: [\u2026] Puis chacun a regagn\u00e9 son domicile et s\u2019est mis \u00e0 lire. Nous avons commenc\u00e9 \u00e0 nous r\u00e9unir \u00e0 cause du commandant, c\u2019est vrai, mais nous avons continu\u00e9 pour le plaisir. Aucun de nous n\u2019ayant la moindre exp\u00e9rience en mati\u00e8re de cercle litt\u00e9raire, nous avons invent\u00e9 nos propres r\u00e8gles : chacun notre tour, nous parlions aux autres d\u2019un livre que nous avions lu. Au d\u00e9but, nous tentions de garder notre calme et de demeurer objectifs, mais cela n\u2019a gu\u00e8re dur\u00e9 ; rapidement, les orateurs n\u2019ont plus eu pour ambition que de persuader leur auditoire de lire l\u2019ouvrage en question. Et, quand deux membres avaient lu le m\u00eame livre, ils en d\u00e9battaient devant nous pour notre plus grand plaisir. A force de lire, de parler de livres et de nous disputer \u00e0 cause d\u2019eux, nous en sommes venus \u00e0 nous lier \u00e9troitement les uns aux autres. D\u2019autres insulaires ont voulu se joindre \u00e0 nous et nos soir\u00e9es se sont transform\u00e9es en moments chaleureux et anim\u00e9s. \u00c0 tel point que, de temps en temps, nous arrivions presque \u00e0 oublier la noirceur du dehors. Nous nous r\u00e9unissons toujours tous les quinze jours. [\u2026] Je me demandai s\u2019il ne serait pas amusant d\u2019introduire, dans la foul\u00e9e, une r\u00e9ponse \u00e0 cette lettre\u2014, ce qui imm\u00e9diatement soul\u00e8ve un probl\u00e8me de taille, car pour cela il faudrait que je parvienne \u00e0 identifier clairement mon interlocuteur, ce qui, pour l\u2019instant, n\u2019est malheureusement pas le cas. Ou du moins que j\u2019en isole une ou un car bien l\u2019impression que tous se m\u00e9langent rien que de tenter d\u2019imaginer. De plus, \u00e9crire pour une foule, passe encore\u2014 les \u00e9crivains ne se g\u00eanent pas de le faire bien que personnellement, et modestement, l\u2019incongruit\u00e9 m\u2019emp\u00eache raisonnablement de passer \u00e0 l\u2019acte; mais qu\u2019une foule r\u00e9plique, \u00e7a ce serait vraiment le pompon. Image mise en avant: Portrait d\u2019un fou regardant \u00e0 travers ses doigts. Maitre 1537 ( selon Winkler appel\u00e9 aussi : Ma\u00eetre de l\u2019Ecce Homo d\u2019Augsbourg)", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/maitre-1537.jpg?1748065095", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/08-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/08-janvier-2024.html", "title": "08 janvier 2024", "date_published": "2024-01-08T02:16:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Des notes sur un personnage r\u00e9el puis fictif \u00e9videmment.<\/p>\n

Quand la vie se retire de lui le voici il est m\u00fbr pour l\u2019\u0153uvre- il faut oublier cette premi\u00e8re d\u00e9ception Il esp\u00e9rait- (l\u2019esp\u00e9rait-il vraiment ?) que les choses se d\u00e9roulent plus t\u00f4t- disons vers trente, mais \u00e7a n\u2019arrive (h\u00e9las) qu\u2019apr\u00e8s\u2002soixante. Ce qui prouve ( pour ainsi dire ) qu\u2019on ne met pas la charrette avant les b\u0153ufs ou encore que lorsqu\u2019il faut y aller il faut y aller ou encore quand c\u2019est l\u2019heure c\u2019est l\u2019heure ou mieux avant l\u2019heure c\u2019est pas l\u2019heure, apr\u00e8s l\u2019heure c\u2019est plus l\u2019heure ou enfin, que les poules commencent \u00e0 faire leurs dents et vice versa avec ces histoires de P\u00e2ques et de la Trinit\u00e9.<\/p>\n

Le fait de protester silencieusement, sans jamais le montrer \u00e0 personne, de protester int\u00e9rieurement dans son coin, de ronger son frein en cherchant bien ses mots. Un fond raciste r\u00e9actionnaire mais qui ne vient pas d\u2019une fi\u00e8vre politicienne , d\u2019un emballement id\u00e9ologique, il n\u2019est pas un intellectuel non plus. sa protestation provient du d\u00e9gout qu\u2019il \u00e9prouve physiquement d\u00e9sormais au contact des rues de la ville. D\u2019autant plus d\u00e9gout\u00e9 qu\u2019\u00e0 son arriv\u00e9e il ne tarissait pas d\u2019\u00e9loge pour celle-ci. ( ou comment du merveilleux on passe derechef \u00e0 l\u2019effroyable )<\/p>\n

Comment ? celui qui appartient \u00e0 la cr\u00e8me de la cr\u00e8me blanc bien \u00e9duqu\u00e9 poli ne trouve pas de travail malgr\u00e9 tous les efforts qu\u2019il fournit ( un gentleman devrait-il fournir autant d\u2019efforts pour se rendre utile et obtenir une r\u00e9tribution- c\u2019est \u00e0 dire de l\u2019argent ?) Comment gagner sa vie quand elle nous d\u00e9goute tellement. La peur nait quand il aper\u00e7oit cette engeance grouillante \u2013 les chimpanz\u00e9s graisseux\u2013 dans les rues de la ville splendide-elle \u00e9tait splendide tant qu\u2019il ne les avait pas vus, et qu\u2019il mangeait \u00e0 sa faim.<\/p>\n

Comme Lautr\u00e9amont il va chercher dans des ouvrages de botanique, de pal\u00e9ontologie \u2013 Des livres de Science- le vocabulaire n\u00e9cessaire \u00e0 cr\u00e9er sa po\u00e9tique. La latitude et la longitude deviennent des outils pour copier et transmuter cette r\u00e9alit\u00e9 qu\u2019il d\u00e9teste comme autant de d\u00e9tails pris \u00e0 l\u2019anatomie, \u00e0 la math\u00e9matique , \u00e0 la physique quantique- Tout ce soi-disant progr\u00e8s qui- il le sait- n\u2019emp\u00eachera pas l\u2019in\u00e9luctable d\u2019arriver.<\/p>\n

Il voudrait ne jamais avoir \u00e0 pratiquer le sexe ni le commerce, ne pas avoir \u00e0 se vautrer dans les bas instincts de l\u2019humain ni plus que ceux de l\u2019animal. Pour lui seul le merveilleux et l\u2019indicible valent l\u2019effort qu\u2019il fournit pour les \u00e9crire. Ce qui est sain c\u2019est d\u2019assumer sa r\u00e9serve, de ne pas vouloir biaiser avec ce qu\u2019il \u00e9prouve comme d\u00e9gout, de ne pas faire semblant. Et malgr\u00e9 tout paradoxalement il est le plus charmant des hommes, toujours affable, ne s\u2019\u00e9nervant jamais, toujours pr\u00eat \u00e0 aider qui le lui demande.<\/p>\n

Quand la vie le quitte- tout le d\u00e9corum de ce que l\u2019on nomme commun\u00e9ment la vie \u2013 il peut enfin se concentrer sur le travail. Plus rien ne l\u2019en emp\u00eache. La pauvret\u00e9 n\u2019est pas un obstacle, tout au contraire elle lui sert de guide, il ne se dispersera plus, il n\u2019en n\u2019aura plus l\u2019occasion ni la possibilit\u00e9.<\/p>\n

Ce qui reste quand on est sans un, ce sont les sens. Il peut les aiguiser \u00e0 loisir en pratiquant de longues promenades \u00e0 travers la ville, d\u00e9velopper son odorat, classifier les odeurs leur qualit\u00e9 naus\u00e9abonde, m\u00e9phitique, par cat\u00e9gorie de puanteur de la plus subtile \u00e0 la plus infecte. Idem pour l\u2019ou\u00efe par laquelle il se rend compte que la musique n\u2019est qu\u2019au final une sorte de pansement qu\u2019on place sur une plaie purulente creus\u00e9e sans rel\u00e2che par le bruit.<\/p>\n

Cette position , ce lieu, o\u00f9 l\u2019orgueil devient de l\u2019humilit\u00e9 et son contraire il en est parfaitement conscient et s\u2019il assiste ( en spectateur ) \u00e0 une sorte d\u2019affrontement int\u00e9rieur \/ parfois il le met sur le compte de l\u2019esp\u00e8ce , de l\u2019animal, il lui est possible de l\u2019observer hors de son propre corps hors de sa ( petite ? ) personnalit\u00e9.<\/p>\n

Il est au contact permanent de l\u2019indicible ce qui lui rend toute vie impossible—il est en contact perp\u00e9tuel avec le mythe qu\u2019il invente peu \u00e0 peu- un mythe malgr\u00e9 lui, un mythe qui nait de son n\u00e9ant personnel et qu\u2019il ne cesse de vouloir creuser encore plus profond\u00e9ment chaque jour.<\/p>\n

Et cependant et malgr\u00e9 tout, il reste poli, sociable quand il le faut, toujours pr\u00eat \u00e0 aider ses \u00e9tudiants, c\u2019est un enseignant, peut-\u00eatre un universitaire,( l\u2019id\u00e9e d\u2019une fonction qu\u2019il n\u2019aura jamais la chance d\u2019atteindre dans la vraie vie ) ou comment \u00e0 partir de la plus grande des frustrations on devient un Hitler ou un \u00e9crivain de fiction horrifique<\/p>\n

Et cependant il \u00e9pouse une juive une divorc\u00e9e . Il est p\u00e9tri de contradictions et c\u2019est justement ce qui le rend bien plus humain qu\u2019on l\u2019imagine de prime abord,\u2002ce qui le rend sympathique —c\u2019est probablement la raison pour laquelle on d\u00e9couvre \u00e0 sa mort tout un continent de lettres, toute une correspondance \u00e9chang\u00e9e aux quatre coins du monde.<\/p>\n

Dans les caves de cette universit\u00e9 o\u00f9 ne sont pas encore catalogu\u00e9es toutes les \u0153uvres qu\u2019il a \u00e9crites, le myst\u00e8re reste intact. Sans doute de la m\u00eame fa\u00e7on que l\u2019histoire de J\u00e9sus de Nazareth et de Marie-Madeleine restent intactes ( pour l\u2019instant) dans les caves du Vatican.<\/p>\n

Le mythe, la religion, n\u00e9cessaire \u00e0 chaque \u00e9poque, des plac\u00e9bos pour ne pas regarder l\u2019horreur qu\u2019inspire le n\u00e9ant en face.<\/p>\n

Cr\u00e9er un mythe de fa\u00e7on personnelle, s\u2019enfouir dedans, puis parvenir \u00e0 y croire au final ? finalement, on se retrouve dans le pari de Pascal. Le risque moindre de croire plut\u00f4t que de ne pas. Et le gain qu\u2019on en retire importe franchement peu.<\/p>\n

Concernant les traits du personnage il faudrait qu\u2019il ressemble un peu \u00e0 K. un peu \u00e0 J. un peu \u00e0 L. Quelque chose de longiligne, de sec, aux joues creuses aux yeux l\u00e9g\u00e8rement exorbit\u00e9s. Un autre d\u00e9tail surgit pendant que j\u2019y pense, les manches de son veston, elles sont un peu trop courtes.<\/p>", "content_text": "Des notes sur un personnage r\u00e9el puis fictif \u00e9videmment. Quand la vie se retire de lui le voici il est m\u00fbr pour l\u2019\u0153uvre- il faut oublier cette premi\u00e8re d\u00e9ception Il esp\u00e9rait- (l\u2019esp\u00e9rait-il vraiment ?) que les choses se d\u00e9roulent plus t\u00f4t- disons vers trente, mais \u00e7a n\u2019arrive (h\u00e9las) qu\u2019apr\u00e8s soixante. Ce qui prouve ( pour ainsi dire ) qu\u2019on ne met pas la charrette avant les b\u0153ufs ou encore que lorsqu\u2019il faut y aller il faut y aller ou encore quand c\u2019est l\u2019heure c\u2019est l\u2019heure ou mieux avant l\u2019heure c\u2019est pas l\u2019heure, apr\u00e8s l\u2019heure c\u2019est plus l\u2019heure ou enfin, que les poules commencent \u00e0 faire leurs dents et vice versa avec ces histoires de P\u00e2ques et de la Trinit\u00e9. Le fait de protester silencieusement, sans jamais le montrer \u00e0 personne, de protester int\u00e9rieurement dans son coin, de ronger son frein en cherchant bien ses mots. Un fond raciste r\u00e9actionnaire mais qui ne vient pas d\u2019une fi\u00e8vre politicienne , d\u2019un emballement id\u00e9ologique, il n\u2019est pas un intellectuel non plus. sa protestation provient du d\u00e9gout qu\u2019il \u00e9prouve physiquement d\u00e9sormais au contact des rues de la ville. D\u2019autant plus d\u00e9gout\u00e9 qu\u2019\u00e0 son arriv\u00e9e il ne tarissait pas d\u2019\u00e9loge pour celle-ci. ( ou comment du merveilleux on passe derechef \u00e0 l\u2019effroyable ) Comment ? celui qui appartient \u00e0 la cr\u00e8me de la cr\u00e8me blanc bien \u00e9duqu\u00e9 poli ne trouve pas de travail malgr\u00e9 tous les efforts qu\u2019il fournit ( un gentleman devrait-il fournir autant d\u2019efforts pour se rendre utile et obtenir une r\u00e9tribution- c\u2019est \u00e0 dire de l\u2019argent ?) Comment gagner sa vie quand elle nous d\u00e9goute tellement. La peur nait quand il aper\u00e7oit cette engeance grouillante \u2013 les chimpanz\u00e9s graisseux\u2013 dans les rues de la ville splendide-elle \u00e9tait splendide tant qu\u2019il ne les avait pas vus, et qu\u2019il mangeait \u00e0 sa faim. Comme Lautr\u00e9amont il va chercher dans des ouvrages de botanique, de pal\u00e9ontologie \u2013 Des livres de Science- le vocabulaire n\u00e9cessaire \u00e0 cr\u00e9er sa po\u00e9tique. La latitude et la longitude deviennent des outils pour copier et transmuter cette r\u00e9alit\u00e9 qu\u2019il d\u00e9teste comme autant de d\u00e9tails pris \u00e0 l\u2019anatomie, \u00e0 la math\u00e9matique , \u00e0 la physique quantique- Tout ce soi-disant progr\u00e8s qui- il le sait- n\u2019emp\u00eachera pas l\u2019in\u00e9luctable d\u2019arriver. Il voudrait ne jamais avoir \u00e0 pratiquer le sexe ni le commerce, ne pas avoir \u00e0 se vautrer dans les bas instincts de l\u2019humain ni plus que ceux de l\u2019animal. Pour lui seul le merveilleux et l\u2019indicible valent l\u2019effort qu\u2019il fournit pour les \u00e9crire. Ce qui est sain c\u2019est d\u2019assumer sa r\u00e9serve, de ne pas vouloir biaiser avec ce qu\u2019il \u00e9prouve comme d\u00e9gout, de ne pas faire semblant. Et malgr\u00e9 tout paradoxalement il est le plus charmant des hommes, toujours affable, ne s\u2019\u00e9nervant jamais, toujours pr\u00eat \u00e0 aider qui le lui demande. Quand la vie le quitte- tout le d\u00e9corum de ce que l\u2019on nomme commun\u00e9ment la vie \u2013 il peut enfin se concentrer sur le travail. Plus rien ne l\u2019en emp\u00eache. La pauvret\u00e9 n\u2019est pas un obstacle, tout au contraire elle lui sert de guide, il ne se dispersera plus, il n\u2019en n\u2019aura plus l\u2019occasion ni la possibilit\u00e9. Ce qui reste quand on est sans un, ce sont les sens. Il peut les aiguiser \u00e0 loisir en pratiquant de longues promenades \u00e0 travers la ville, d\u00e9velopper son odorat, classifier les odeurs leur qualit\u00e9 naus\u00e9abonde, m\u00e9phitique, par cat\u00e9gorie de puanteur de la plus subtile \u00e0 la plus infecte. Idem pour l\u2019ou\u00efe par laquelle il se rend compte que la musique n\u2019est qu\u2019au final une sorte de pansement qu\u2019on place sur une plaie purulente creus\u00e9e sans rel\u00e2che par le bruit. Cette position , ce lieu, o\u00f9 l\u2019orgueil devient de l\u2019humilit\u00e9 et son contraire il en est parfaitement conscient et s\u2019il assiste ( en spectateur ) \u00e0 une sorte d\u2019affrontement int\u00e9rieur \/ parfois il le met sur le compte de l\u2019esp\u00e8ce , de l\u2019animal, il lui est possible de l\u2019observer hors de son propre corps hors de sa ( petite ? ) personnalit\u00e9. Il est au contact permanent de l\u2019indicible ce qui lui rend toute vie impossible\u2014il est en contact perp\u00e9tuel avec le mythe qu\u2019il invente peu \u00e0 peu- un mythe malgr\u00e9 lui, un mythe qui nait de son n\u00e9ant personnel et qu\u2019il ne cesse de vouloir creuser encore plus profond\u00e9ment chaque jour. Et cependant et malgr\u00e9 tout, il reste poli, sociable quand il le faut, toujours pr\u00eat \u00e0 aider ses \u00e9tudiants, c\u2019est un enseignant, peut-\u00eatre un universitaire,( l\u2019id\u00e9e d\u2019une fonction qu\u2019il n\u2019aura jamais la chance d\u2019atteindre dans la vraie vie ) ou comment \u00e0 partir de la plus grande des frustrations on devient un Hitler ou un \u00e9crivain de fiction horrifique Et cependant il \u00e9pouse une juive une divorc\u00e9e . Il est p\u00e9tri de contradictions et c\u2019est justement ce qui le rend bien plus humain qu\u2019on l\u2019imagine de prime abord, ce qui le rend sympathique \u2014c\u2019est probablement la raison pour laquelle on d\u00e9couvre \u00e0 sa mort tout un continent de lettres, toute une correspondance \u00e9chang\u00e9e aux quatre coins du monde. Dans les caves de cette universit\u00e9 o\u00f9 ne sont pas encore catalogu\u00e9es toutes les \u0153uvres qu\u2019il a \u00e9crites, le myst\u00e8re reste intact. Sans doute de la m\u00eame fa\u00e7on que l\u2019histoire de J\u00e9sus de Nazareth et de Marie-Madeleine restent intactes ( pour l\u2019instant) dans les caves du Vatican. Le mythe, la religion, n\u00e9cessaire \u00e0 chaque \u00e9poque, des plac\u00e9bos pour ne pas regarder l\u2019horreur qu\u2019inspire le n\u00e9ant en face. Cr\u00e9er un mythe de fa\u00e7on personnelle, s\u2019enfouir dedans, puis parvenir \u00e0 y croire au final ? finalement, on se retrouve dans le pari de Pascal. Le risque moindre de croire plut\u00f4t que de ne pas. Et le gain qu\u2019on en retire importe franchement peu. Concernant les traits du personnage il faudrait qu\u2019il ressemble un peu \u00e0 K. un peu \u00e0 J. un peu \u00e0 L. Quelque chose de longiligne, de sec, aux joues creuses aux yeux l\u00e9g\u00e8rement exorbit\u00e9s. Un autre d\u00e9tail surgit pendant que j\u2019y pense, les manches de son veston, elles sont un peu trop courtes.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_20190104_212028_173.jpg?1748065146", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/07-janvier-2-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/07-janvier-2-2024.html", "title": "07 janvier-2-2024", "date_published": "2024-01-07T02:14:00Z", "date_modified": "2025-06-18T23:38:00Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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Elle allait lui raconter son r\u00eave et par pur r\u00e9flexe il leva la main pour l\u2019interrompre. Car le contenu d\u2019un r\u00eave se dissout dans la parole, il se m\u00e9tamorphose en quelque chose de raisonnable la plupart du temps. Non ce qui l\u2019int\u00e9ressait c\u2019\u00e9tait la sensation g\u00e9n\u00e9rale qu\u2019elle en avait conserv\u00e9. Mais elle ne comprit pas sa question, elle voulait raconter tout son r\u00eave par le menu et aussit\u00f4t il ne l\u2019\u00e9couta plus.<\/p>\n

Mon r\u00eave est d\u2019aller dans un pays chaud, de trouver une plage de sable fin, de m\u2019y allonger en \u00e9coutant le bruit du ressac, de ne plus penser \u00e0 rien. Elle disait r\u00eave et lui presque aussit\u00f4t v\u00e9cu un cauchemar.<\/p>\n

Elle veut avoir des enfants c\u2019est son r\u00eave. Puis quand ils sont l\u00e0 elle parle d\u2019un v\u00e9ritable cauchemar.<\/p>\n

Dans mon r\u00eave, ce r\u00eave l\u00e0, je veux toujours atteindre cette sensation d\u2019exister tellement intense qu\u2019il m\u2019a \u00e9t\u00e9 donn\u00e9 une fois de rencontrer. Et il pensa qu\u2019elle avait laiss\u00e9 s\u2019\u00e9chapper les buts et les raisons de maints autres r\u00eaves certainement tout autant honorables, parce qu\u2019elle n\u2019\u00e9tait obnubil\u00e9e que par celui-l\u00e0. Il prit un certain temps pour r\u00e9fl\u00e9chir \u00e0 cela et au bout du compte cela l\u2019effraya tellement qu\u2019il ne r\u00e9pondit plus \u00e0 ses appels, ni \u00e0 ses sms. Elle ne correspondait certainement pas \u00e0 son propre r\u00eave.<\/p>\n

La vie ne serait probablement qu\u2019un r\u00eave si elle n\u2019\u00e9tait pas d\u00e9j\u00e0 un cauchemar. Il tournait en boucle sur cette phrase comme si c\u2019\u00e9tait une \u00e9quation \u00e0 deux inconnues. Et comme il \u00e9tait nul en maths, il se leva pour aller travailler.<\/p>\n

Certains caressent un r\u00eave comme ils caresseraient un chien, pour ne pas \u00eatre mordu.<\/p>\n

La r\u00e9alit\u00e9 est \u00e0 l\u2019exact oppos\u00e9 de mes r\u00eaves et vice versa. Une fois cette chose dite, plus rien n\u2019\u00e9tait \u00e0 dire et ils se quitt\u00e8rent bons amis<\/p>\n

— Je ne fais pas de r\u00eave \u00e9trange et p\u00e9n\u00e9trant, \u00e7a s\u2019arr\u00eate toujours avant.<\/p>\n

La th\u00e9rapeute renversa la t\u00eate en arri\u00e8re et dit —hum hum mais encore. Son regard \u00e9tait d\u2019une tristesse insondable. C\u2019est alors que je saisis toute l\u2019incongruit\u00e9 de ma pr\u00e9sence en ces lieux, la honte s\u2019empara de moi, je n\u2019\u00e9tais qu\u2019un patient ordinaire, un patient parmi tant d\u2019autres.<\/p>", "content_text": "Elle allait lui raconter son r\u00eave et par pur r\u00e9flexe il leva la main pour l\u2019interrompre. Car le contenu d\u2019un r\u00eave se dissout dans la parole, il se m\u00e9tamorphose en quelque chose de raisonnable la plupart du temps. Non ce qui l\u2019int\u00e9ressait c\u2019\u00e9tait la sensation g\u00e9n\u00e9rale qu\u2019elle en avait conserv\u00e9. Mais elle ne comprit pas sa question, elle voulait raconter tout son r\u00eave par le menu et aussit\u00f4t il ne l\u2019\u00e9couta plus. Mon r\u00eave est d\u2019aller dans un pays chaud, de trouver une plage de sable fin, de m\u2019y allonger en \u00e9coutant le bruit du ressac, de ne plus penser \u00e0 rien. Elle disait r\u00eave et lui presque aussit\u00f4t v\u00e9cu un cauchemar. Elle veut avoir des enfants c\u2019est son r\u00eave. Puis quand ils sont l\u00e0 elle parle d\u2019un v\u00e9ritable cauchemar. Dans mon r\u00eave, ce r\u00eave l\u00e0, je veux toujours atteindre cette sensation d\u2019exister tellement intense qu\u2019il m\u2019a \u00e9t\u00e9 donn\u00e9 une fois de rencontrer. Et il pensa qu\u2019elle avait laiss\u00e9 s\u2019\u00e9chapper les buts et les raisons de maints autres r\u00eaves certainement tout autant honorables, parce qu\u2019elle n\u2019\u00e9tait obnubil\u00e9e que par celui-l\u00e0. Il prit un certain temps pour r\u00e9fl\u00e9chir \u00e0 cela et au bout du compte cela l\u2019effraya tellement qu\u2019il ne r\u00e9pondit plus \u00e0 ses appels, ni \u00e0 ses sms. Elle ne correspondait certainement pas \u00e0 son propre r\u00eave. La vie ne serait probablement qu\u2019un r\u00eave si elle n\u2019\u00e9tait pas d\u00e9j\u00e0 un cauchemar. Il tournait en boucle sur cette phrase comme si c\u2019\u00e9tait une \u00e9quation \u00e0 deux inconnues. Et comme il \u00e9tait nul en maths, il se leva pour aller travailler. Certains caressent un r\u00eave comme ils caresseraient un chien, pour ne pas \u00eatre mordu. La r\u00e9alit\u00e9 est \u00e0 l\u2019exact oppos\u00e9 de mes r\u00eaves et vice versa. Une fois cette chose dite, plus rien n\u2019\u00e9tait \u00e0 dire et ils se quitt\u00e8rent bons amis \u2014Je ne fais pas de r\u00eave \u00e9trange et p\u00e9n\u00e9trant, \u00e7a s\u2019arr\u00eate toujours avant. La th\u00e9rapeute renversa la t\u00eate en arri\u00e8re et dit \u2014hum hum mais encore. Son regard \u00e9tait d\u2019une tristesse insondable. C\u2019est alors que je saisis toute l\u2019incongruit\u00e9 de ma pr\u00e9sence en ces lieux, la honte s\u2019empara de moi, je n\u2019\u00e9tais qu\u2019un patient ordinaire, un patient parmi tant d\u2019autres. ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/reve-de-plage-interpretation.jpg?1748065126", "tags": ["r\u00eaves"] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/07-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/07-janvier-2024.html", "title": "07 janvier 2024", "date_published": "2024-01-07T02:10:00Z", "date_modified": "2025-05-28T06:49:40Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

\n
\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Il ne fait aucun doute et ce \u00e0 bien des \u00e9gards et malgr\u00e9 toute l\u2019affection que je puisse encore vous t\u00e9moigner, lorsqu\u2019il me reste encore quelque \u00e9clat de lucidit\u00e9, que je ne sortirai certainement pas indemne de cette aventure. La folie, t\u00f4t ou tard, viendra m\u2019emporter et nul ne pourra l\u2019en emp\u00eacher. Mais, avant que l\u2019in\u00e9luctable n\u2019advienne , il faut que je m\u2019efforce de r\u00e9unir toutes les pi\u00e8ces de cet effroyable puzzle dont je ne fait que d\u00e9couvrir, ces derniers jours , l\u2019image g\u00e9n\u00e9rale, l\u2019\u00e9pouvantable dessein.<\/p>\n

« Le temps efface peu \u00e0 peu les traces de mon passage », c\u2019est ce que nous croyons tous. Mais, \u00e0 la v\u00e9rit\u00e9 rien de ce que nous avons un jour dit pens\u00e9 ou fait ne disparait totalement. Les murs des villes, les avenues, les rues les ruelles les impasses , les escaliers\u2002des immeubles, les pi\u00e8ces dans lesquelles nous avons v\u00e9cu notre existence d\u00e9risoire, toutes et tous conservent \u00e0 jamais la m\u00e9moire de notre pauvre humanit\u00e9 qui les aura travers\u00e9s .<\/p>\n

Des forces inimaginables et mal\u00e9fiques s\u2019incarnent \u00e0 date fixe pour venir lire nos turpitudes, elles sont des pr\u00e9datrices infernales, elles ne pourraient vivre sans venir se repaitre , \u00e0 date r\u00e9guli\u00e8re, de nos d\u00e9faites ; de notre immense tristesse et dont elles tirent leur subsistance depuis des mill\u00e9naires dans le plus parfait anonymat.<\/p>\n

Le seul fait d\u2019\u00e9crire ces premi\u00e8res lignes dans mon journal m\u2019\u00e9pouvante d\u00e9j\u00e0 et me force \u00e0 r\u00e9unir le peu de courage et de raison qu\u2019il me reste encore, sans oublier qu\u2019 \u00e0 la seule pens\u00e9e de raconter mon histoire l\u2019ombre s\u2019\u00e9tend d\u00e9j\u00e0 sur mes propos, je ne les reconnais d\u00e9j\u00e0 plus, une confusion d\u00e9sesp\u00e9rante s\u2019installe entre chaque mot, et m\u00eame pire, entre chaque lettre.<\/p>\n

D\u2019ailleurs, en ce moment m\u00eame perdure l\u2019impression p\u00e9nible d\u2019\u00e9crire sous la dict\u00e9e d\u2019une de ces entit\u00e9s terrifiantes, dans un langage inconnu, des choses totalement absurdes.<\/p>\n

Pour me donner un peu de c\u0153ur au ventre il m\u2019arrive souvent de repenser \u00e0 ces moments si agr\u00e9ables et insouciants appartenant \u00e0 cette\u2002enfance pass\u00e9e dans le bocage bourbonnais. Cependant, si agr\u00e9ables et insouciants m\u2019apparaissent-ils toujours d\u2019embl\u00e9e, je sais \u00e0 pr\u00e9sent qu\u2019ils ne sont, pour la plupart, qu\u2019une fiction destin\u00e9e \u00e0 occulter la plus grande part de ma mis\u00e9rable existence \u00e0 cette p\u00e9riode de ma vie.<\/p>\n

La principale difficult\u00e9 que je rencontre d\u00e9sormais pour me les \u00e9voquer c\u2019est que je suis incapable de savoir quand cette fiction est de mon ressort, si c\u2019est moi qui l\u2019ai cr\u00e9e, ou si on me l\u2019a implant\u00e9e dans la cervelle comme on implante dans un syst\u00e8me d\u2019exploitation un programme informatique, une t\u00e2che de fond.<\/p>\n

Maintes fois la nuit je fus r\u00e9veill\u00e9 par mon instinct et ouvrant en grand les yeux dans le noir je parvenais \u00e0 y distinguer des \u00eatres encore plus noirs que la nuit. Cette noirceur effroyable m\u2019ass\u00e9chait la bouche et il m\u2019\u00e9tait \u00e0 cet instant impossible de crier d\u2019appeler \u00e0 l\u2019aide. T\u00e9tanis\u00e9 par l\u2019horreur je ne pouvais rien faire d\u2019autre que d\u2019observer l\u2019indicible.<\/p>\n

Au matin, quand les rayons du soleil per\u00e7aient de nouveau \u00e0 travers les volets de bois de la chambre, il m\u2019arrivait encore un bref moment de douter de la r\u00e9alit\u00e9 de ces horreurs nocturnes. Je m\u2019effor\u00e7ais alors de les ranger dans la cat\u00e9gorie des cauchemars, aid\u00e9 en cela par ma m\u00e8re qui , souvent, me poussait \u00e0 les lui raconter. Ce dont il m\u2019\u00e9tait impossible tant l\u2019empreinte qu\u2019ils avaient laiss\u00e9e \u00e9tait confuse, et dont j\u2019\u00e9prouvais jusque dans la moelle de mes os le danger de les dire. Alors, j\u2019en inventais d\u2019autres \u00e0 la h\u00e2te, des cauchemars plus classiques, et les ayant dit elle me rappelait de fa\u00e7on r\u00e9guli\u00e8re et avec mansu\u00e9tude- car dans ceux l\u00e0 j\u2019\u00e9tais un petit assassin- qu\u2019un mauvais r\u00eave dit \u00e0 voix haute ne se r\u00e9alise jamais.<\/p>\n

Je sais \u00e0 pr\u00e9sent que ces souvenirs sont tout aussi truqu\u00e9s que l\u2019instant pr\u00e9sent dans lequel je me contorsionne pour garder le peu de raison qui vaille. Je sais que ma m\u00e8re est un personnage de fiction tout comme mon p\u00e8re, mes amis, le d\u00e9cor dans son ensemble m\u2019accompagnant \u00e0 chaque moment de\u2002ma mis\u00e9rable existence ; que de toute \u00e9vidence moi-m\u00eame ne suis m\u00eame plus certain d\u2019exister vraiment en tant qu\u2019individu disposant d\u2019une libert\u00e9 d\u2019expression quelconque. Je ne suis peut-\u00eatre rien de plus qu\u2019un programme informatique parmi tant d\u2019autres. Voire m\u00eame un virus destin\u00e9 \u00e0 parfaire les objectifs occultes de ces entit\u00e9s terrifiantes qui se jouent de nos drames de nos trag\u00e9dies, qui les exploitent dans le seul but de les divertir de leur effroyable ennui.<\/p>\n

Lorsqu\u2019ils se mirent \u00e0 parler. Ils se virent comme un reflet dans un reflet. Et cette f\u00e9brilit\u00e9 soudaine, agitant tous leurs atomes, ils la consid\u00e9r\u00e8rent comme du sentiment alors que ce n\u2019\u00e9tait seulement que de l\u2019excitation. Ils auraient pu en \u00eatre parfaitement inconscients si l\u2019un d\u2019eux n\u2019avait eu un doute. C\u2019est \u00e0 partir de ce doute, auquel il s\u2019accrocha fermement, qu\u2019il ne la prit pas dans les bras, ne l\u2019embrassa pas, ne lui murmura pas \u00e0 l\u2019oreille toute la s\u00e9rie habituelle des histoires sans queue ni t\u00eate qui ne tiennent jamais debout.<\/p>\n

A la fin, lorsqu\u2019ils se quitt\u00e8rent, la nuit \u00e9tait tomb\u00e9e, un petit vent glac\u00e9 semblait extr\u00eamement pr\u00e9sent au contact de sa joue. Il lui fit un petit signe de la main auquel elle ne r\u00e9pondit pas et il vit sa silhouette disparaitre dans la p\u00e9nombre puis tourner \u00e0 l\u2019angle de la rue.<\/p>\n

Image mise en avant : Illustration de l\u2019Appel du Ctulhu de Lovecraft par Fran\u00e7ois Baranger<\/p>", "content_text": "Il ne fait aucun doute et ce \u00e0 bien des \u00e9gards et malgr\u00e9 toute l\u2019affection que je puisse encore vous t\u00e9moigner, lorsqu\u2019il me reste encore quelque \u00e9clat de lucidit\u00e9, que je ne sortirai certainement pas indemne de cette aventure. La folie, t\u00f4t ou tard, viendra m\u2019emporter et nul ne pourra l\u2019en emp\u00eacher. Mais, avant que l\u2019in\u00e9luctable n\u2019advienne , il faut que je m\u2019efforce de r\u00e9unir toutes les pi\u00e8ces de cet effroyable puzzle dont je ne fait que d\u00e9couvrir, ces derniers jours , l\u2019image g\u00e9n\u00e9rale, l\u2019\u00e9pouvantable dessein. \u00abLe temps efface peu \u00e0 peu les traces de mon passage\u00bb, c\u2019est ce que nous croyons tous. Mais, \u00e0 la v\u00e9rit\u00e9 rien de ce que nous avons un jour dit pens\u00e9 ou fait ne disparait totalement. Les murs des villes, les avenues, les rues les ruelles les impasses , les escaliers des immeubles, les pi\u00e8ces dans lesquelles nous avons v\u00e9cu notre existence d\u00e9risoire, toutes et tous conservent \u00e0 jamais la m\u00e9moire de notre pauvre humanit\u00e9 qui les aura travers\u00e9s . Des forces inimaginables et mal\u00e9fiques s\u2019incarnent \u00e0 date fixe pour venir lire nos turpitudes, elles sont des pr\u00e9datrices infernales, elles ne pourraient vivre sans venir se repaitre , \u00e0 date r\u00e9guli\u00e8re, de nos d\u00e9faites; de notre immense tristesse et dont elles tirent leur subsistance depuis des mill\u00e9naires dans le plus parfait anonymat. Le seul fait d\u2019\u00e9crire ces premi\u00e8res lignes dans mon journal m\u2019\u00e9pouvante d\u00e9j\u00e0 et me force \u00e0 r\u00e9unir le peu de courage et de raison qu\u2019il me reste encore, sans oublier qu\u2019 \u00e0 la seule pens\u00e9e de raconter mon histoire l\u2019ombre s\u2019\u00e9tend d\u00e9j\u00e0 sur mes propos, je ne les reconnais d\u00e9j\u00e0 plus, une confusion d\u00e9sesp\u00e9rante s\u2019installe entre chaque mot, et m\u00eame pire, entre chaque lettre. D\u2019ailleurs, en ce moment m\u00eame perdure l\u2019impression p\u00e9nible d\u2019\u00e9crire sous la dict\u00e9e d\u2019une de ces entit\u00e9s terrifiantes, dans un langage inconnu, des choses totalement absurdes. Pour me donner un peu de c\u0153ur au ventre il m\u2019arrive souvent de repenser \u00e0 ces moments si agr\u00e9ables et insouciants appartenant \u00e0 cette enfance pass\u00e9e dans le bocage bourbonnais. Cependant, si agr\u00e9ables et insouciants m\u2019apparaissent-ils toujours d\u2019embl\u00e9e, je sais \u00e0 pr\u00e9sent qu\u2019ils ne sont, pour la plupart, qu\u2019une fiction destin\u00e9e \u00e0 occulter la plus grande part de ma mis\u00e9rable existence \u00e0 cette p\u00e9riode de ma vie. La principale difficult\u00e9 que je rencontre d\u00e9sormais pour me les \u00e9voquer c\u2019est que je suis incapable de savoir quand cette fiction est de mon ressort, si c\u2019est moi qui l\u2019ai cr\u00e9e, ou si on me l\u2019a implant\u00e9e dans la cervelle comme on implante dans un syst\u00e8me d\u2019exploitation un programme informatique, une t\u00e2che de fond. Maintes fois la nuit je fus r\u00e9veill\u00e9 par mon instinct et ouvrant en grand les yeux dans le noir je parvenais \u00e0 y distinguer des \u00eatres encore plus noirs que la nuit. Cette noirceur effroyable m\u2019ass\u00e9chait la bouche et il m\u2019\u00e9tait \u00e0 cet instant impossible de crier d\u2019appeler \u00e0 l\u2019aide. T\u00e9tanis\u00e9 par l\u2019horreur je ne pouvais rien faire d\u2019autre que d\u2019observer l\u2019indicible. Au matin, quand les rayons du soleil per\u00e7aient de nouveau \u00e0 travers les volets de bois de la chambre, il m\u2019arrivait encore un bref moment de douter de la r\u00e9alit\u00e9 de ces horreurs nocturnes. Je m\u2019effor\u00e7ais alors de les ranger dans la cat\u00e9gorie des cauchemars, aid\u00e9 en cela par ma m\u00e8re qui , souvent, me poussait \u00e0 les lui raconter. Ce dont il m\u2019\u00e9tait impossible tant l\u2019empreinte qu\u2019ils avaient laiss\u00e9e \u00e9tait confuse, et dont j\u2019\u00e9prouvais jusque dans la moelle de mes os le danger de les dire. Alors, j\u2019en inventais d\u2019autres \u00e0 la h\u00e2te, des cauchemars plus classiques, et les ayant dit elle me rappelait de fa\u00e7on r\u00e9guli\u00e8re et avec mansu\u00e9tude- car dans ceux l\u00e0 j\u2019\u00e9tais un petit assassin- qu\u2019un mauvais r\u00eave dit \u00e0 voix haute ne se r\u00e9alise jamais. Je sais \u00e0 pr\u00e9sent que ces souvenirs sont tout aussi truqu\u00e9s que l\u2019instant pr\u00e9sent dans lequel je me contorsionne pour garder le peu de raison qui vaille. Je sais que ma m\u00e8re est un personnage de fiction tout comme mon p\u00e8re, mes amis, le d\u00e9cor dans son ensemble m\u2019accompagnant \u00e0 chaque moment de ma mis\u00e9rable existence; que de toute \u00e9vidence moi-m\u00eame ne suis m\u00eame plus certain d\u2019exister vraiment en tant qu\u2019individu disposant d\u2019une libert\u00e9 d\u2019expression quelconque. Je ne suis peut-\u00eatre rien de plus qu\u2019un programme informatique parmi tant d\u2019autres. Voire m\u00eame un virus destin\u00e9 \u00e0 parfaire les objectifs occultes de ces entit\u00e9s terrifiantes qui se jouent de nos drames de nos trag\u00e9dies, qui les exploitent dans le seul but de les divertir de leur effroyable ennui. Lorsqu\u2019ils se mirent \u00e0 parler. Ils se virent comme un reflet dans un reflet. Et cette f\u00e9brilit\u00e9 soudaine, agitant tous leurs atomes, ils la consid\u00e9r\u00e8rent comme du sentiment alors que ce n\u2019\u00e9tait seulement que de l\u2019excitation. Ils auraient pu en \u00eatre parfaitement inconscients si l\u2019un d\u2019eux n\u2019avait eu un doute. C\u2019est \u00e0 partir de ce doute, auquel il s\u2019accrocha fermement, qu\u2019il ne la prit pas dans les bras, ne l\u2019embrassa pas, ne lui murmura pas \u00e0 l\u2019oreille toute la s\u00e9rie habituelle des histoires sans queue ni t\u00eate qui ne tiennent jamais debout. A la fin, lorsqu\u2019ils se quitt\u00e8rent, la nuit \u00e9tait tomb\u00e9e, un petit vent glac\u00e9 semblait extr\u00eamement pr\u00e9sent au contact de sa joue. Il lui fit un petit signe de la main auquel elle ne r\u00e9pondit pas et il vit sa silhouette disparaitre dans la p\u00e9nombre puis tourner \u00e0 l\u2019angle de la rue. Image mise en avant: Illustration de l\u2019Appel du Ctulhu de Lovecraft par Fran\u00e7ois Baranger", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/bdef-lappel-de-ctulhu-reed-2022-page-0032.jpg?1748065234", "tags": ["Lovecraft"] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/06-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/06-janvier-2024.html", "title": "06 janvier 2024", "date_published": "2024-01-06T02:06:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

\n
\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

K. \u00e9voque une sensation de fendre l\u2019eau lors de l\u2019\u00e9criture du Proc\u00e8s ce qui est troublant car me donne aussit\u00f4t cette vision de quelqu\u2019un \u00e0 la barre de quelqu\u2019un d\u2019actif —un capitaine de navire dot\u00e9 de raison du pouvoir de d\u00e9cision (par exemple)<\/p>\n

alors que d\u2019exp\u00e9rience personnelle cette impression d\u2019\u00eatre inspir\u00e9 aval\u00e9 par un vortex de ne rien pouvoir d\u00e9cider vraiment semble bien \u00eatre tout le contraire<\/p>\n

\u00e0 premi\u00e8re vue<\/p>\n

avons nous une marge de man\u0153uvre dans l\u2019emportement dans l\u2019inspiration pour prendre le recul minimum en m\u00eame temps qu\u2019on est emport\u00e9<\/p>\n

un travail d\u2019une vie pour obtenir ce tout petit \u00e9cart dans l\u2019inspiration<\/p>\n

peut-\u00eatre m\u00eame un but possible ou une raison<\/p>\n

Ainsi la raison se trouve dans l\u2019inspiration au terme d\u2019un grand nombre d\u2019essais , de tentatives infructueuses, de rat\u00e9es<\/p>\n

peut-\u00eatre tout simplement l\u2019envie de revivre un vieux souvenir o\u00f9 l\u2019on fendait l\u2019eau sans se poser aucune question.<\/p>\n

ou la mer Rouge s\u2019ouvrait pour laisser passer les fuyards vers une terre Promise<\/p>\n

ou encore quand la poche des eaux se d\u00e9chire qu\u2019il est temps de se retourner dans le bon sens pour traverser les boyaux \u00e9troits menant \u00e0 la br\u00fblure pulmonaire de la vie<\/p>\n

ou encore quand l\u2019oisillon de son bec pointu ( un genre de stylet ) troue la paroi calcaire de sa prison , passe du jaune orang\u00e9 au bleu nuit<\/p>\n

ou quand on l\u00e2che la corde du cerf volant et qu\u2019\u00e0 la fois ravi et d\u00e9pit\u00e9 on le voit s\u2019\u00e9l\u00e8ver dans les airs<\/p>\n

ou quand on abandonne quelque chose de pr\u00e9cieux et qu\u2019on l\u2019 offre soudain \u00e0 un ami sans le moindre regret<\/p>\n

ou quand on joue du jazz<\/p>\n

ou quand \u00e0 force de tourner en rond on d\u00e9colle depuis le centre du r\u00eave et qu\u2019on se voit au m\u00eame moment cerf-volant<\/p>\n

et en bas les champs dans le plus petit d\u00e9tail de couleur de valeur<\/p>\n

et qu\u2019aucune s\u00e9paration n\u2019existe dans cette vision<\/p>\n

Image mise en avant : vue a\u00e9rienne du bocage bourbonnais<\/p>", "content_text": "K. \u00e9voque une sensation de fendre l\u2019eau lors de l\u2019\u00e9criture du Proc\u00e8s ce qui est troublant car me donne aussit\u00f4t cette vision de quelqu\u2019un \u00e0 la barre de quelqu\u2019un d\u2019actif \u2014un capitaine de navire dot\u00e9 de raison du pouvoir de d\u00e9cision (par exemple) alors que d\u2019exp\u00e9rience personnelle cette impression d\u2019\u00eatre inspir\u00e9 aval\u00e9 par un vortex de ne rien pouvoir d\u00e9cider vraiment semble bien \u00eatre tout le contraire \u00e0 premi\u00e8re vue avons nous une marge de man\u0153uvre dans l\u2019emportement dans l\u2019inspiration pour prendre le recul minimum en m\u00eame temps qu\u2019on est emport\u00e9 un travail d\u2019une vie pour obtenir ce tout petit \u00e9cart dans l\u2019inspiration peut-\u00eatre m\u00eame un but possible ou une raison Ainsi la raison se trouve dans l\u2019inspiration au terme d\u2019un grand nombre d\u2019essais , de tentatives infructueuses, de rat\u00e9es peut-\u00eatre tout simplement l\u2019envie de revivre un vieux souvenir o\u00f9 l\u2019on fendait l\u2019eau sans se poser aucune question. ou la mer Rouge s\u2019ouvrait pour laisser passer les fuyards vers une terre Promise ou encore quand la poche des eaux se d\u00e9chire qu\u2019il est temps de se retourner dans le bon sens pour traverser les boyaux \u00e9troits menant \u00e0 la br\u00fblure pulmonaire de la vie ou encore quand l\u2019oisillon de son bec pointu ( un genre de stylet ) troue la paroi calcaire de sa prison , passe du jaune orang\u00e9 au bleu nuit ou quand on l\u00e2che la corde du cerf volant et qu\u2019\u00e0 la fois ravi et d\u00e9pit\u00e9 on le voit s\u2019\u00e9l\u00e8ver dans les airs ou quand on abandonne quelque chose de pr\u00e9cieux et qu\u2019on l\u2019 offre soudain \u00e0 un ami sans le moindre regret ou quand on joue du jazz ou quand \u00e0 force de tourner en rond on d\u00e9colle depuis le centre du r\u00eave et qu\u2019on se voit au m\u00eame moment cerf-volant et en bas les champs dans le plus petit d\u00e9tail de couleur de valeur et qu\u2019aucune s\u00e9paration n\u2019existe dans cette vision Image mise en avant : vue a\u00e9rienne du bocage bourbonnais", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/vue-aerienne-de-la-combraille.jpg?1748065061", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/05-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/05-janvier-2024.html", "title": "05 janvier 2024", "date_published": "2024-01-05T02:02:00Z", "date_modified": "2025-05-28T06:48:48Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

\n
\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Consid\u00e9rer la chance d\u2019avoir une vieille voiture dont le moteur gripp\u00e9 ne d\u00e9marre pas au quart de tour<\/p>\n

Il faut attendre que \u00e7a chauffe<\/p>\n

\u00e0 chaque essai l\u2019angoisse et le d\u00e9sir que \u00e7a y soit \/ espoir et d\u00e9ception mouvement binaire\/ attraction et r\u00e9pulsion<\/p>\n

mais espoir et d\u00e9ception de quoi au fait<\/p>\n

et si \u00e7a n\u2019y est pas on recommence ou on laisse en plan on prend le bus le train ou les jambes \u00e0 son cou<\/p>\n

et bien beaucoup de temps pass\u00e9 \u00e0 lire les \u00e9lucubrations d\u2019un certain Charles Lamb(1) sur le site merveilleux du Gutenberg project sans doute \u00e0 la suite d\u2019une lecture en anglais de Lovecraft\/avec la possibilit\u00e9 de traduire la page en fran\u00e7ais ( pas toujours bien fran\u00e7ais mais \u00e7a aide\/\u00e7a inspire m\u00eame ) — vu dans les notes cette histoire de sorci\u00e8res ( pas not\u00e9 la r\u00e9f\u00e9rence zut ) et ensuite de me demander quelle \u00e9tait la mentalit\u00e9 de l\u2019\u00e9poque pour \u00e9crire des choses aussi bizarres notamment dans la structure des phrases qui—on l\u2019imagine —tente de coller \u00e0 une certaine id\u00e9e de la rh\u00e9torique c\u2019est \u00e0 dire avec toute l\u2019attention port\u00e9e \u00e0 une notion antique d\u2019\u00e9quilibre ( mais quelle notion de l\u2019\u00e9quilibre avait-on alors si l\u2019on n\u2019y collait pas ? )<\/p>\n

not\u00e9 quelques mots savants comme isocolie\/protase\/ antapodose\/ apodause\/ clausule.<\/p>\n

Nous n\u2019avons plus le temps ni l\u2019attention pour lire de si longues phrases \u00e0 la tournure compliqu\u00e9e me disais-je au moment o\u00f9 je tombai soudain sur une phrase rigolote de Flaubert :<\/p>\n

« Ce n\u2019\u00e9taient qu\u2019amours, amants, amantes, pers\u00e9cut\u00e9es s\u2019\u00e9vanouissant dans des pavillons solitaires, postillons qu\u2019on tue \u00e0 tous les relais, chevaux qu\u2019on cr\u00e8ve \u00e0 toutes les pages, for\u00eats sombres, troubles du c\u0153ur, serments, sanglots, larmes et baisers, nacelles au clair de lune, rossignols dans les bosquets, messieurs braves comme des lions, doux comme des agneaux, vertueux comme on ne l\u2019est pas, toujours bien mis, et qui pleurent comme des urnes. » (Gustave Flaubert, Madame Bovary)<\/p>\n

La traduction effectu\u00e9e par Chateaubriand de Paradis perdu de Milton m\u2019a fait b\u00e2iller<\/p>\n

Malgr\u00e9 toute l\u2019attention que je porte au persil fris\u00e9 celui-ci vers 19h est retomb\u00e9 en quenouille ce qui en dit long sur l\u2019attention sur l\u2019espoir et la d\u00e9ception qu\u2019elle procure<\/p>\n

la petite tristesse ( r\u00e9confortante ?) que l\u2019on finit par en extraire au bout du compte.<\/p>\n

on peut comprendre Kafka d\u2019avoir voulu d\u00e9truire son journal et du coup le lire c\u2019est un peu comme autrefois aller regarder sous \u2026( je laisse en blanc ) ici l\u2019imagination joue un grand r\u00f4le<\/p>\n

la n\u00e9cessit\u00e9 de tenir un journal n\u2019est pas \u00e0 prendre \u00e0 la l\u00e9g\u00e8re mais rien \u00e0 voir avec l\u2019obtention d\u2019un r\u00e9sultat final c\u2019est probablement du domaine de l\u2019hygi\u00e8ne\u2002pour ne pas devenir compl\u00e8tement cingl\u00e9 asocial meurtrier \/ un genre de guide comme les rails en restant parall\u00e8les guident le train\/ peu importe la destination<\/p>\n

Il faudrait pour respecter l\u2019usage ( celui de la p\u00e9riode ) que la premi\u00e8re partie de la phrase soit montante ou donne cette impression de vouloir atteindre on ne sait quel but ou quel sommet pour arriver au final (en se contorsionnant \u00e0 grand renfort de virgules ) \u00e0 une chute spectaculaire ( si possible )<\/p>\n

Elles vont mettre la vieille dame en maison elle ne fait que tomber \/ne peut plus se relever \/ elles en parlent s\u00e9rieusement avec\u2002des arguments des raisons \/ et je m\u2019imaginais qu\u2019elles adoptent ce mode d\u2019\u00e9change au t\u00e9l\u00e9phone pour ne pas succomber \u00e0 l\u2019\u00e9pouvante que cette id\u00e9e leur procure<\/p>\n

Elles auraient pu tout \u00e0 fait hurler se rouler par terre en \u00e9voquant cette \u00e9pouvantable projet.<\/p>\n

Ce que l\u2019on conserve de ceux qui disparaissent trois fois rien parfois c\u2019est ce que l\u2019on pense mais si l\u2019on n\u2019y pense pas trois fois rien devient vraiment quelque chose on pourrait en \u00e9crire des pages et des pages<\/p>\n

puis ceci fait on aurait encore tant \u00e0 dire pour combler le silence<\/p>\n

La forme du journal est trompeuse car on se fie \u00e0 une chronologie des dates voire des heures et ce autant pour le lecteur que pour celui qui l\u2019\u00e9crit ( et parfois se trompe dans les dates ) mais on peut au bout d\u2019un certain temps voir que les sujets sont toujours les m\u00eames ils ne cessent de revenir exactement les m\u00eames toujours sous des formes diverses en apparence<\/p>\n

et si l\u2019on arrive \u00e0 \u00e9tablir la liste de ces sujets r\u00e9currents que l\u2019on puisse pour chacun regrouper tous les textes qui lui sont li\u00e9s\u2026 ( je laisse aussi en blanc )<\/p>\n

l\u2019id\u00e9e de la collecte m\u2019indispose comme celle d\u2019ordonner quoi que ce soit autrement dit les bras m\u2019en tombent un poil se dresse et fr\u00e9tille au centre de ma paume<\/p>\n

mais quand m\u00eame cette mani\u00e8re d\u2019\u00e9crire au 19 \u00e8me une fa\u00e7on sentimentale pour ne pas dire enfantine\u2002et qui sent l\u2019entourloupe c\u2019est vouloir attraper les mouches avec du miel<\/p>\n

une s\u00e9duction rh\u00e9torique<\/p>\n

qui tente de s\u00e9duire qui quand on \u00e9crit ainsi ?<\/p>\n

Narcisse plonge t\u00eate la premi\u00e8re dans le ruisseau belle image quand on est jeune moins chouette quand on est vieux rid\u00e9 beaucoup moins chouette\/ risible ?\/ path\u00e9tique ?<\/p>\n

l\u2019empathie par p\u00e9riode ne sert pas \u00e0 grand chose et m\u00eame il arrive qu\u2019on la perde qu\u2019on ne la retrouve plus qu\u2019on n\u2019y pense m\u00eame plus on se perd dans les m\u00e9andres de la phrases les virgules sont des miettes mang\u00e9es par les oiseaux<\/p>\n

alors \u00e0 quoi peut-on bien penser dans ce cas ?<\/p>\n

Image mise en avant ; une lithographie de Daumier dans le Charivari<\/p>\n

(1)un peu plus tard dans la journ\u00e9e, lu dans le cercle litt\u00e9raire des amateurs d\u2019\u00e9pluchures de patates cette lettre<\/p>\n

De Dawsey Adams,Guernesey,
\n\u00eeles Anglo-Normandes,\u00e0 Juliet
\n12 janvier 1946<\/p>\n

Miss Juliet Ashton
\n81 Oakley Street
\nChelsea Londres SW3<\/p>\n

Ch\u00e8re Miss Ashton,<\/p>\n

Je m\u2019appelle Dawsey Adams et j\u2019habite une ferme de la paroisse de St. Martin, sur l\u2019\u00eele de Guernesey. Je connais votre existence parce que je poss\u00e8de un vieux livre vous ayant jadis appartenu, Les Essais d\u2019Elia, morceaux choisis, d\u2019un auteur dont le v\u00e9ritable nom \u00e9tait Charles Lamb. Votre nom et votre adresse \u00e9taient inscrits au verso de la couverture.<\/p>\n

Je n\u2019irai pas par quatre chemins : j\u2019adore Charles Lamb. Aussi, en lisant morceaux choisis ,je me suis demand\u00e9 s\u2019il existait une \u0153uvre plus vaste dont auraient \u00e9t\u00e9 tir\u00e9s ces extraits. Je veux lire ces autres textes. Seulement, bien que les Allemands aient quitt\u00e9 l\u2019\u00eele depuis longtemps, il ne reste plus aucune librairie \u00e0 Guernesey.<\/p>\n

J\u2019aimerais solliciter votre gentillesse. Pourriez-vous m\u2019envoyer le nom et l\u2019adresse d\u2019une librairie \u00e0 Londres ? Je voudrais commander d\u2019autres ouvrages de Charles Lamb par la poste. Je voudrais aussi savoir si quelqu\u2019un a d\u00e9j\u00e0 \u00e9crit l\u2019histoire de sa vie, et, si oui, essayer de m\u2019en procurer un exemplaire. Pour brillant et spirituel qu\u2019il \u00e9tait, Mr Lamb a du traverser des moments de profonde tristesse au cours de son existence.<\/p>\n

Charles Lamb m\u2019a fait rire pendant l\u2019Occupation, surtout son passage sur le cochon r\u00f4ti. Le Cercle des amateurs de litt\u00e9rature et de tourte aux \u00e9pluchures de patates de Guernesey est n\u00e9 \u00e0 cause d\u2019un cochon r\u00f4ti que nous avons d\u00fb cacher aux soldats allemands \u2013 raison pour laquelle je me sens une affinit\u00e9 particuli\u00e8re avec Mr. Lamb.<\/p>\n

Je suis d\u00e9sol\u00e9 de vous importuner, mais je le serai encore plus si je n\u2019arrive pas \u00e0 en apprendre davantage sur cet homme dont les \u00e9crits ont fait de moi son ami.<\/p>\n

En esp\u00e9rant ne pas vous causer d\u2019embarras,
\nDawsey Adams<\/p>\n

P.S. : Mon amie Mrs. Maugery a, elle aussi, achet\u00e9 un pamphlet qui vous a jadis appartenu. Il s\u2019intitule Le buisson ardent est-il une invention ? La D\u00e9fense de Mo\u00efse et des dix commandements. Elle aime votre annotation dans la marge, « Parole divine ou contr\u00f4le des masses ? ?? » Avez-vous tranch\u00e9 ?<\/p>\n

Traduit de l\u2019am\u00e9ricain par Aline Azoulay<\/p>", "content_text": "Consid\u00e9rer la chance d\u2019avoir une vieille voiture dont le moteur gripp\u00e9 ne d\u00e9marre pas au quart de tour Il faut attendre que \u00e7a chauffe \u00e0 chaque essai l\u2019angoisse et le d\u00e9sir que \u00e7a y soit \/ espoir et d\u00e9ception mouvement binaire\/ attraction et r\u00e9pulsion mais espoir et d\u00e9ception de quoi au fait et si \u00e7a n\u2019y est pas on recommence ou on laisse en plan on prend le bus le train ou les jambes \u00e0 son cou et bien beaucoup de temps pass\u00e9 \u00e0 lire les \u00e9lucubrations d\u2019un certain Charles Lamb(1) sur le site merveilleux du Gutenberg project sans doute \u00e0 la suite d\u2019une lecture en anglais de Lovecraft\/avec la possibilit\u00e9 de traduire la page en fran\u00e7ais ( pas toujours bien fran\u00e7ais mais \u00e7a aide\/\u00e7a inspire m\u00eame ) \u2014 vu dans les notes cette histoire de sorci\u00e8res ( pas not\u00e9 la r\u00e9f\u00e9rence zut ) et ensuite de me demander quelle \u00e9tait la mentalit\u00e9 de l\u2019\u00e9poque pour \u00e9crire des choses aussi bizarres notamment dans la structure des phrases qui\u2014on l\u2019imagine \u2014tente de coller \u00e0 une certaine id\u00e9e de la rh\u00e9torique c\u2019est \u00e0 dire avec toute l\u2019attention port\u00e9e \u00e0 une notion antique d\u2019\u00e9quilibre ( mais quelle notion de l\u2019\u00e9quilibre avait-on alors si l\u2019on n\u2019y collait pas ? ) not\u00e9 quelques mots savants comme isocolie\/protase\/ antapodose\/ apodause\/ clausule. Nous n\u2019avons plus le temps ni l\u2019attention pour lire de si longues phrases \u00e0 la tournure compliqu\u00e9e me disais-je au moment o\u00f9 je tombai soudain sur une phrase rigolote de Flaubert : \u00ab Ce n\u2019\u00e9taient qu\u2019amours, amants, amantes, pers\u00e9cut\u00e9es s\u2019\u00e9vanouissant dans des pavillons solitaires, postillons qu\u2019on tue \u00e0 tous les relais, chevaux qu\u2019on cr\u00e8ve \u00e0 toutes les pages, for\u00eats sombres, troubles du c\u0153ur, serments, sanglots, larmes et baisers, nacelles au clair de lune, rossignols dans les bosquets, messieurs braves comme des lions, doux comme des agneaux, vertueux comme on ne l\u2019est pas, toujours bien mis, et qui pleurent comme des urnes. \u00bb (Gustave Flaubert, Madame Bovary) La traduction effectu\u00e9e par Chateaubriand de Paradis perdu de Milton m\u2019a fait b\u00e2iller Malgr\u00e9 toute l\u2019attention que je porte au persil fris\u00e9 celui-ci vers 19h est retomb\u00e9 en quenouille ce qui en dit long sur l\u2019attention sur l\u2019espoir et la d\u00e9ception qu\u2019elle procure la petite tristesse ( r\u00e9confortante ?) que l\u2019on finit par en extraire au bout du compte. on peut comprendre Kafka d\u2019avoir voulu d\u00e9truire son journal et du coup le lire c\u2019est un peu comme autrefois aller regarder sous \u2026( je laisse en blanc ) ici l\u2019imagination joue un grand r\u00f4le la n\u00e9cessit\u00e9 de tenir un journal n\u2019est pas \u00e0 prendre \u00e0 la l\u00e9g\u00e8re mais rien \u00e0 voir avec l\u2019obtention d\u2019un r\u00e9sultat final c\u2019est probablement du domaine de l\u2019hygi\u00e8ne pour ne pas devenir compl\u00e8tement cingl\u00e9 asocial meurtrier \/ un genre de guide comme les rails en restant parall\u00e8les guident le train\/ peu importe la destination Il faudrait pour respecter l\u2019usage ( celui de la p\u00e9riode ) que la premi\u00e8re partie de la phrase soit montante ou donne cette impression de vouloir atteindre on ne sait quel but ou quel sommet pour arriver au final (en se contorsionnant \u00e0 grand renfort de virgules ) \u00e0 une chute spectaculaire ( si possible ) Elles vont mettre la vieille dame en maison elle ne fait que tomber \/ne peut plus se relever \/ elles en parlent s\u00e9rieusement avec des arguments des raisons \/ et je m\u2019imaginais qu\u2019elles adoptent ce mode d\u2019\u00e9change au t\u00e9l\u00e9phone pour ne pas succomber \u00e0 l\u2019\u00e9pouvante que cette id\u00e9e leur procure Elles auraient pu tout \u00e0 fait hurler se rouler par terre en \u00e9voquant cette \u00e9pouvantable projet. Ce que l\u2019on conserve de ceux qui disparaissent trois fois rien parfois c\u2019est ce que l\u2019on pense mais si l\u2019on n\u2019y pense pas trois fois rien devient vraiment quelque chose on pourrait en \u00e9crire des pages et des pages puis ceci fait on aurait encore tant \u00e0 dire pour combler le silence La forme du journal est trompeuse car on se fie \u00e0 une chronologie des dates voire des heures et ce autant pour le lecteur que pour celui qui l\u2019\u00e9crit ( et parfois se trompe dans les dates ) mais on peut au bout d\u2019un certain temps voir que les sujets sont toujours les m\u00eames ils ne cessent de revenir exactement les m\u00eames toujours sous des formes diverses en apparence et si l\u2019on arrive \u00e0 \u00e9tablir la liste de ces sujets r\u00e9currents que l\u2019on puisse pour chacun regrouper tous les textes qui lui sont li\u00e9s\u2026 ( je laisse aussi en blanc ) l\u2019id\u00e9e de la collecte m\u2019indispose comme celle d\u2019ordonner quoi que ce soit autrement dit les bras m\u2019en tombent un poil se dresse et fr\u00e9tille au centre de ma paume mais quand m\u00eame cette mani\u00e8re d\u2019\u00e9crire au 19 \u00e8me une fa\u00e7on sentimentale pour ne pas dire enfantine et qui sent l\u2019entourloupe c\u2019est vouloir attraper les mouches avec du miel une s\u00e9duction rh\u00e9torique qui tente de s\u00e9duire qui quand on \u00e9crit ainsi ? Narcisse plonge t\u00eate la premi\u00e8re dans le ruisseau belle image quand on est jeune moins chouette quand on est vieux rid\u00e9 beaucoup moins chouette\/ risible ?\/ path\u00e9tique ? l\u2019empathie par p\u00e9riode ne sert pas \u00e0 grand chose et m\u00eame il arrive qu\u2019on la perde qu\u2019on ne la retrouve plus qu\u2019on n\u2019y pense m\u00eame plus on se perd dans les m\u00e9andres de la phrases les virgules sont des miettes mang\u00e9es par les oiseaux alors \u00e0 quoi peut-on bien penser dans ce cas ? Image mise en avant; une lithographie de Daumier dans le Charivari (1)un peu plus tard dans la journ\u00e9e, lu dans le cercle litt\u00e9raire des amateurs d\u2019\u00e9pluchures de patates cette lettre De Dawsey Adams,Guernesey, \u00eeles Anglo-Normandes,\u00e0 Juliet 12 janvier 1946 Miss Juliet Ashton 81 Oakley Street Chelsea Londres SW3 Ch\u00e8re Miss Ashton, Je m\u2019appelle Dawsey Adams et j\u2019habite une ferme de la paroisse de St. Martin, sur l\u2019\u00eele de Guernesey. Je connais votre existence parce que je poss\u00e8de un vieux livre vous ayant jadis appartenu, Les Essais d\u2019Elia, morceaux choisis, d\u2019un auteur dont le v\u00e9ritable nom \u00e9tait Charles Lamb. Votre nom et votre adresse \u00e9taient inscrits au verso de la couverture. Je n\u2019irai pas par quatre chemins : j\u2019adore Charles Lamb. Aussi, en lisant morceaux choisis ,je me suis demand\u00e9 s\u2019il existait une \u0153uvre plus vaste dont auraient \u00e9t\u00e9 tir\u00e9s ces extraits. Je veux lire ces autres textes. Seulement, bien que les Allemands aient quitt\u00e9 l\u2019\u00eele depuis longtemps, il ne reste plus aucune librairie \u00e0 Guernesey. J\u2019aimerais solliciter votre gentillesse. Pourriez-vous m\u2019envoyer le nom et l\u2019adresse d\u2019une librairie \u00e0 Londres ? Je voudrais commander d\u2019autres ouvrages de Charles Lamb par la poste. Je voudrais aussi savoir si quelqu\u2019un a d\u00e9j\u00e0 \u00e9crit l\u2019histoire de sa vie, et, si oui, essayer de m\u2019en procurer un exemplaire. Pour brillant et spirituel qu\u2019il \u00e9tait, Mr Lamb a du traverser des moments de profonde tristesse au cours de son existence. Charles Lamb m\u2019a fait rire pendant l\u2019Occupation, surtout son passage sur le cochon r\u00f4ti. Le Cercle des amateurs de litt\u00e9rature et de tourte aux \u00e9pluchures de patates de Guernesey est n\u00e9 \u00e0 cause d\u2019un cochon r\u00f4ti que nous avons d\u00fb cacher aux soldats allemands \u2013 raison pour laquelle je me sens une affinit\u00e9 particuli\u00e8re avec Mr. Lamb. Je suis d\u00e9sol\u00e9 de vous importuner, mais je le serai encore plus si je n\u2019arrive pas \u00e0 en apprendre davantage sur cet homme dont les \u00e9crits ont fait de moi son ami. En esp\u00e9rant ne pas vous causer d\u2019embarras, Dawsey Adams P.S. : Mon amie Mrs. Maugery a, elle aussi, achet\u00e9 un pamphlet qui vous a jadis appartenu. Il s\u2019intitule Le buisson ardent est-il une invention ? La D\u00e9fense de Mo\u00efse et des dix commandements. Elle aime votre annotation dans la marge, \u00ab Parole divine ou contr\u00f4le des masses ? ?? \u00bb Avez-vous tranch\u00e9 ? Traduit de l\u2019am\u00e9ricain par Aline Azoulay", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/cover.jpg?1748065055", "tags": ["Lovecraft"] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/04-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/04-janvier-2024.html", "title": "04 janvier 2024", "date_published": "2024-01-04T07:47:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

\n
\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

l\u2019image apparait dans une mauvaise r\u00e9solution<\/p>\n

et de plus elle est floue<\/p>\n

et en plus elle est en noir et blanc<\/p>\n

et<\/p>\n

sur le c\u00f4t\u00e9 droit<\/p>\n

on peut voir une tache brune<\/p>\n

qui ressemble \u00e0 une tache de caf\u00e9<\/p>\n

et donc on peut dire<\/p>\n

qu\u2019elle ne lui tape pas dans l\u2019\u0153il<\/p>\n

m\u00e9taphoriquement 2024 n\u2019est pas de meilleure r\u00e9solution que 2023<\/p>\n

Il tient l\u2019objet de ses vicissitudes dans la main<\/p>\n

moiti\u00e9 noir moiti\u00e9 blanc<\/p>\n

un \u0153uf d\u2019une poule naine<\/p>\n

concomitamment sa vue baisse autant que le nombre de ses r\u00e9solutions<\/p>\n

Il r\u00e9sout l\u2019\u00e9nigme du sphinx en trois cuill\u00e9r\u00e9es de pate d\u2019arachide<\/p>\n

il en vient \u2002\u00e0 bout tardivement le jour o\u00f9 le m\u00e9decin lui prescrit une canne<\/p>\n

Il tient un \u0153uf de cane dans la main<\/p>\n

moiti\u00e9 noir moiti\u00e9 blanc<\/p>\n

etc.<\/p>\n

c\u2019est un gars qui manque de r\u00e9solution<\/p>\n

il n\u2019a pas invent\u00e9 l\u2019eau chaude ni le fil \u00e0 couper le beurre<\/p>\n

cependant si on regarde sa cervelle en coupe \u00e0 la loupe on peut voir qu\u2019ici le paysage est sans cesse travers\u00e9 par de grands vents violents<\/p>\n

Il dit qu\u2019on ne peut pas \u00eatre \u00e0 la fois \u00e0 la foire et au moulin<\/p>\n

Nous r\u00e9sol\u00fbmes de baisser le volume la f\u00eate s\u2019achevait il se faisait tard<\/p>\n

et soudain les voisins nous en f\u00fbmes gr\u00e9<\/p>\n

demain nous nous r\u00e9soudrons \u00e0 d\u00e9m\u00e9nager<\/p>\n

Parmi toutes les r\u00e9solutions qui naissent spontan\u00e9ment dans son esprit la r\u00e9solution de ne conserver aucune r\u00e9solution l\u2019\u00e9blouit tant qu\u2019elle l\u2019aveugle il se prom\u00e8ne d\u00e9sormais avec une cane en laisse et un \u0153uf dans la main en clamant \u00e0 qui veut l\u2019entendre qu\u2019on ne fait pas d\u2019omelette si on taille des mouillettes<\/p>\n

Manquant de r\u00e9solution il confond l\u2019hippopotame avec un autobus il ne passe pas par la case d\u00e9part il ne gagne pas vingt mille francs<\/p>\n

l\u2019inspecteur d\u2019objets trouv\u00e9s r\u00e9solut l\u2019affaire en un clin d\u2019\u0153il<\/p>\n

Image mise en avant : le fameux clin d\u2019oeil de Gale Henry, actrice c\u00e9l\u00e8bre et am\u00e9ricaine<\/p>\n

du cin\u00e9ma muet<\/p>\n


\n

Tous les jours un \u0153uf d\u2019encre parfois deux parfois trois treize \u00e0 la douzaine et son altesse s\u00e9r\u00e9nissime se pavane ensuite dans les grandes salles froides de son palais rid\u00e9 en tenant sa langue avec deux doigts comme on doit tenir un b\u00e9b\u00e9 saurien.<\/p>\n

Blablabla.<\/p>\n

Une pente douce moelleuse onctueuse la mauvaise pente mon petit Pinocchio chuchote une grosse dame en sortant de la boulangerie puis prenant confiance en son dit le dit \u00e0 son marmot boulot<\/p>\n

tu es sur la mauvaise pente<\/p>\n

il faut manger pour vivre et pas le contraire nom de dieu<\/p>\n

L\u2019\u0153uf comique tressaute trois fois (ce qui au total fait neuf) et le monde est neuf<\/p>\n

Les tr\u00e9pass\u00e9s repassent avec des fers \u00e0 vapeur la fronti\u00e8re de la vie \u00e7a ne fait pas un pli.<\/p>\n

Les tr\u00e9pass\u00e9s ont les yeux au beurre noir ils traversent les rails et p\u00e9n\u00e8trent par les narines dans la cervelle des moutons<\/p>\n

ils donnent un tour de clef deux trois<\/p>\n

une barre de mars et \u00e7a repart<\/p>\n

le nouvel an dit hi han l\u2019\u00e2ne culotte<\/p>\n

Des lyres et des muses \u00e7a l\u2019amuse<\/p>\n

Le dibbouk\u2002s\u2019\u00e9tire il ouvre un \u0153il puis le referme aussit\u00f4t ce n\u2019est pas le bon et il se l\u00e8ve d\u2019un mauvais pied.<\/p>\n

L\u2019aspect diesel de l\u2019\u00e9criture ce matin m\u00e9rite toute votre attention<\/p>\n

attention<\/p>\n

l\u2019injection de carburant dans la chambre de combustion n\u00e9cessite de pencher le buste l\u00e9g\u00e8rement vers l\u2019avant mais aussi de temps en temps vers l\u2019arri\u00e8re afin de produire le fameux ph\u00e9nom\u00e8ne d\u2019auto-inflammation<\/p>\n

Une fois chaud autour de 700-900° quand la compression de l\u2019air dans le cylindre atteint un taux de compression de 14:1 \u00e0 25:1 on ne r\u00e9pondra plus de rien<\/p>\n

Des bougies de pr\u00e9chauffage peuvent aider \u00e0 la Man\u0153uvre afin de cr\u00e9er un point chaud<\/p>\n

c\u2019est probablement de ce point chaud que sort la grosse dame avec son boulot marmot<\/p>\n

La conscience doit parfois enfiler une chaussure beaucoup trop petite pour son pied<\/p>\n

un empereur chinois est probablement derri\u00e8re tout cela<\/p>\n

voil\u00e0 comment on fait de sympathiques geishas dit-il \u00e0 ses ministres<\/p>\n

c\u2019est de l\u2019humour dit l\u2019empereur<\/p>\n

mais gare si tu ris<\/p>\n

\u00e0 ce train l\u00e0 qu\u2019il vaut mieux ne pas emprunter si tu n\u2019es pas s\u00fbr de le rendre aussit\u00f4t au beau milieu du quai<\/p>\n

La m\u00e9moire est accessible \u00e0 partir de n\u2019importe quel repli disent les tr\u00e9pass\u00e9s\u2002repassant avec station vapeur sous le bras<\/p>\n

le marmot boulot est d\u00e9chain\u00e9 il mord le mollet de la grosse dame puis celui du boucher et \u00e7a ne lui suffit pas il mord celui du mort qui passe et le mort tressaute de plus belle tr\u00e9passe encore<\/p>\n

Herm\u00e8s trism\u00e9giste se trisse en douce son m\u00e9fait accompli<\/p>\n

ou Eshu le moins aim\u00e9 des Orisha en pays Yoruba<\/p>\n<\/span>

\n
\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Le dibbouk se rendort l\u2019h\u00f4te s\u2019\u00e9veille<\/p>\n

mal de cr\u00e2ne.<\/p>\n

image mise en avant : repr\u00e9sentation de l\u2019Orisha Eshu dans le syst\u00e8me de pens\u00e9e Yoruba<\/p>\n

7h52<\/p>\n

En recopiant le carnet de 2022-2023 effar\u00e9 de voir le nombre de pages, de mots \u2013 sans doute suis-je malade atteint d\u2019une maladie grave, la graphomanie, ou la graphorr\u00e9e<\/p>\n

un roman existe de Jean-Marie Laclavetine « La premi\u00e8re ligne »<\/p>\n

Il ne faut pas \u00e9crire la premi\u00e8re ligne sinon on est fichu.<\/p>\n

Cette Premi\u00e8re Ligne est la ligne d\u2019\u00e9criture qu\u2019il ne faut pas \u00e9crire pour ne pas tomber, selon Cyril Cordouan, dans la toxicomanie.<\/p>\n

Et puis la fin du mot \u0153uvre \u2013 tel que l\u2019on continue encore \u00e0 entretenir ce fant\u00f4me- doit se situer entre Lautr\u00e9amont et Artaud ( quelque part par l\u00e0 )<\/p>", "content_text": "l\u2019image apparait dans une mauvaise r\u00e9solution et de plus elle est floue et en plus elle est en noir et blanc et sur le c\u00f4t\u00e9 droit on peut voir une tache brune qui ressemble \u00e0 une tache de caf\u00e9 et donc on peut dire qu\u2019elle ne lui tape pas dans l\u2019\u0153il m\u00e9taphoriquement 2024 n\u2019est pas de meilleure r\u00e9solution que 2023 Il tient l\u2019objet de ses vicissitudes dans la main moiti\u00e9 noir moiti\u00e9 blanc un \u0153uf d\u2019une poule naine concomitamment sa vue baisse autant que le nombre de ses r\u00e9solutions Il r\u00e9sout l\u2019\u00e9nigme du sphinx en trois cuill\u00e9r\u00e9es de pate d\u2019arachide il en vient \u00e0 bout tardivement le jour o\u00f9 le m\u00e9decin lui prescrit une canne Il tient un \u0153uf de cane dans la main moiti\u00e9 noir moiti\u00e9 blanc etc. c\u2019est un gars qui manque de r\u00e9solution il n\u2019a pas invent\u00e9 l\u2019eau chaude ni le fil \u00e0 couper le beurre cependant si on regarde sa cervelle en coupe \u00e0 la loupe on peut voir qu\u2019ici le paysage est sans cesse travers\u00e9 par de grands vents violents Il dit qu\u2019on ne peut pas \u00eatre \u00e0 la fois \u00e0 la foire et au moulin Nous r\u00e9sol\u00fbmes de baisser le volume la f\u00eate s\u2019achevait il se faisait tard et soudain les voisins nous en f\u00fbmes gr\u00e9 demain nous nous r\u00e9soudrons \u00e0 d\u00e9m\u00e9nager Parmi toutes les r\u00e9solutions qui naissent spontan\u00e9ment dans son esprit la r\u00e9solution de ne conserver aucune r\u00e9solution l\u2019\u00e9blouit tant qu\u2019elle l\u2019aveugle il se prom\u00e8ne d\u00e9sormais avec une cane en laisse et un \u0153uf dans la main en clamant \u00e0 qui veut l\u2019entendre qu\u2019on ne fait pas d\u2019omelette si on taille des mouillettes Manquant de r\u00e9solution il confond l\u2019hippopotame avec un autobus il ne passe pas par la case d\u00e9part il ne gagne pas vingt mille francs l\u2019inspecteur d\u2019objets trouv\u00e9s r\u00e9solut l\u2019affaire en un clin d\u2019\u0153il Image mise en avant: le fameux clin d\u2019oeil de Gale Henry, actrice c\u00e9l\u00e8bre et am\u00e9ricaine du cin\u00e9ma muet Tous les jours un \u0153uf d\u2019encre parfois deux parfois trois treize \u00e0 la douzaine et son altesse s\u00e9r\u00e9nissime se pavane ensuite dans les grandes salles froides de son palais rid\u00e9 en tenant sa langue avec deux doigts comme on doit tenir un b\u00e9b\u00e9 saurien. Blablabla. Une pente douce moelleuse onctueuse la mauvaise pente mon petit Pinocchio chuchote une grosse dame en sortant de la boulangerie puis prenant confiance en son dit le dit \u00e0 son marmot boulot tu es sur la mauvaise pente il faut manger pour vivre et pas le contraire nom de dieu L\u2019\u0153uf comique tressaute trois fois (ce qui au total fait neuf) et le monde est neuf Les tr\u00e9pass\u00e9s repassent avec des fers \u00e0 vapeur la fronti\u00e8re de la vie \u00e7a ne fait pas un pli. Les tr\u00e9pass\u00e9s ont les yeux au beurre noir ils traversent les rails et p\u00e9n\u00e8trent par les narines dans la cervelle des moutons ils donnent un tour de clef deux trois une barre de mars et \u00e7a repart le nouvel an dit hi han l\u2019\u00e2ne culotte Des lyres et des muses \u00e7a l\u2019amuse Le dibbouk s\u2019\u00e9tire il ouvre un \u0153il puis le referme aussit\u00f4t ce n\u2019est pas le bon et il se l\u00e8ve d\u2019un mauvais pied. L\u2019aspect diesel de l\u2019\u00e9criture ce matin m\u00e9rite toute votre attention attention l\u2019injection de carburant dans la chambre de combustion n\u00e9cessite de pencher le buste l\u00e9g\u00e8rement vers l\u2019avant mais aussi de temps en temps vers l\u2019arri\u00e8re afin de produire le fameux ph\u00e9nom\u00e8ne d\u2019auto-inflammation Une fois chaud autour de 700-900\u00b0 quand la compression de l\u2019air dans le cylindre atteint un taux de compression de 14:1 \u00e0 25:1 on ne r\u00e9pondra plus de rien Des bougies de pr\u00e9chauffage peuvent aider \u00e0 la Man\u0153uvre afin de cr\u00e9er un point chaud c\u2019est probablement de ce point chaud que sort la grosse dame avec son boulot marmot La conscience doit parfois enfiler une chaussure beaucoup trop petite pour son pied un empereur chinois est probablement derri\u00e8re tout cela voil\u00e0 comment on fait de sympathiques geishas dit-il \u00e0 ses ministres c\u2019est de l\u2019humour dit l\u2019empereur mais gare si tu ris \u00e0 ce train l\u00e0 qu\u2019il vaut mieux ne pas emprunter si tu n\u2019es pas s\u00fbr de le rendre aussit\u00f4t au beau milieu du quai La m\u00e9moire est accessible \u00e0 partir de n\u2019importe quel repli disent les tr\u00e9pass\u00e9s repassant avec station vapeur sous le bras le marmot boulot est d\u00e9chain\u00e9 il mord le mollet de la grosse dame puis celui du boucher et \u00e7a ne lui suffit pas il mord celui du mort qui passe et le mort tressaute de plus belle tr\u00e9passe encore Herm\u00e8s trism\u00e9giste se trisse en douce son m\u00e9fait accompli ou Eshu le moins aim\u00e9 des Orisha en pays Yoruba Le dibbouk se rendort l\u2019h\u00f4te s\u2019\u00e9veille mal de cr\u00e2ne. image mise en avant : repr\u00e9sentation de l\u2019Orisha Eshu dans le syst\u00e8me de pens\u00e9e Yoruba 7h52 En recopiant le carnet de 2022-2023 effar\u00e9 de voir le nombre de pages, de mots \u2013 sans doute suis-je malade atteint d\u2019une maladie grave, la graphomanie, ou la graphorr\u00e9e un roman existe de Jean-Marie Laclavetine \u00ab La premi\u00e8re ligne\u00bb Il ne faut pas \u00e9crire la premi\u00e8re ligne sinon on est fichu. Cette Premi\u00e8re Ligne est la ligne d\u2019\u00e9criture qu\u2019il ne faut pas \u00e9crire pour ne pas tomber, selon Cyril Cordouan, dans la toxicomanie. Et puis la fin du mot \u0153uvre \u2013 tel que l\u2019on continue encore \u00e0 entretenir ce fant\u00f4me- doit se situer entre Lautr\u00e9amont et Artaud ( quelque part par l\u00e0 ) ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/gale_henry.jpg?1748065140", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/03-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/03-janvier-2024.html", "title": "03 janvier 2024", "date_published": "2024-01-03T10:54:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Il peut y avoir plusieurs raisons d\u2019ha\u00efr le monde — au moins autant que de l\u2019aimer Ce sont les mots ha\u00efr \/ aimer sur lesquels il peut se pencher — pas sur le monde. Le monde est d\u2019une implacable neutralit\u00e9 — il dira : le monde s\u2019en fiche que tu soies homme ou insecte plante ou concr\u00e9tion min\u00e9ral. Le monde d\u00e9teste probablement tout autant ses enfants qu\u2019il les aime. Le monde cr\u00e9e sans cesse la possibilit\u00e9 de s’engoufrer\/ se r\u00e9fugier\/ dans une double-contrainte ( double-bind).<\/p>\n


\n

ou blind aveuglement avance autant qu\u2019il recule- Blind un chouette nom pour mon personnage de ce jour se dit le vieil hibou<\/p>\n


\n

Il enfonce un doigt dans la neutralit\u00e9 du monde elle est molle le doigt s\u2019enfonce comme dans du beurre.<\/p>\n


\n

Il se dit qu\u2019il pourrait \u00e9carter facilement les parois s\u2019introduire ainsi et avec un peu de chance traverser m\u00eame toute la neutralit\u00e9 du monde.<\/p>\n


\n

C\u2019est d\u2019abord mou puis \u00e7a devient dur voil\u00e0 donc le pi\u00e8ge on croit pouvoir s\u2019enfoncer ainsi traverser la neutralit\u00e9 du monde mais \u00e0 un moment on tombe sur un os le monde nous d\u00e9boute nous refuse nous expulse.<\/p>\n


\nOblig\u00e9 de rebrousser chemin il attrape un crampe \u00e0 la cheville \/ il boitille comme un moineau une pie un corbeau — le grotesque s\u2019ajoutant ainsi \u00e0 la tristesse \/ d\u00e9confiture\n
\nj\u2019aime le monde et lui ne m\u2019aime pas — il dit je d\u00e9teste le monde \/ il s\u2019en fout compl\u00e8tement — cette binarit\u00e9 un jour lui mettra t\u2019il la puce \u00e0 l\u2019oreille<\/i>\n
\nSes deux oreilles se sont mises \u00e0 couler — au d\u00e9but il croit que c\u2019est de la faute d\u2019une n\u00e9gligence\/ qu\u2019il ne s\u2019est pas suffisamment fourr\u00e9 le quotidien coton tige dans les esgourdes— il se rend \u00e0 la pharmacie de l\u2019angle de la rue — on lui donne des gouttes \/ cinq gouttes matin \/ cinq le soir\n
\n

la v\u00e9rit\u00e9 est ailleurs — il s\u2019agit d\u2019un insecte qui loge dans son cr\u00e2ne — qui effectue des va et vient nocturnes genre de mille-pattes — qui aura pondu dans sa cervelle des myriades de myriapodes qui transitent d\u00e9sormais par son conduit auditif et sa trompe d\u2019Eustache— pour coloniser son cou \/ sa gorge \/ sa poitrine son thorax \/ jusqu\u2019\u00e0 son nombril — voire pis<\/p>\n


\n

il se souvient et son oreille coule —lorsqu\u2019il se souvient des murs des chambres dans lesquelles il v\u00e9cut —des arm\u00e9es de cafards — le bruit surtout de leurs pattes courant sur le papier peint la tapisserie<\/p>\n


\n

et quand il allume la lumi\u00e8re ils disparaissent \u00e0 croire que ces cafards ne vivent que dans son imagination.<\/p>\n


\n\u00e9crire sans ponctuation r\u00e9sout le probl\u00e8me \u00e9pineux de la ponctuation mais cr\u00e9e soudain trois \u00e9cueils que sont le rythme la sonorit\u00e9 la p\u00e9riode\n
\n

le naufrage guette toujours l\u2019aventurier d\u00e9boussol\u00e9 les points cardinaux se font sentir et il faut avoir du nez ou du cul pour s\u2019en tirer s\u2019orienter en humidifiant un doigt puis le jeter dans le vent<\/p>\n


\n

s\u2019orienter en d\u00e9veloppant un sens de l\u2019hygrom\u00e9trie par contact de la pulpe avec l\u2019haleine des gouffres<\/p>\n


\nOn ne sait pas grand chose de lui et c\u2019est ce qu\u2019il veut effacer au bout du compte les traces que les insectes tent\u00e8rent de lui transmettre pour attirer ainsi dans son cr\u00e2ne d\u2019autres colonies faire de son pauvre cr\u00e2ne un monde grouillant d\u2019insectes trottinant sans rel\u00e2che du thalamus \u00e0 l\u2019hypothalamus en passant par l\u2019amygdale et l\u2019hippocampe\n
\n

Ducasse des temps modernes — comme nous le sommes \u00e0 peu pr\u00e8s tous d\u00e9sormais —sauf ceux qui se disent \/ qui clament \u00e0 tue t\u00eate \/ \u00eatre po\u00e8tes<\/p>\n


\nA moins qu\u2019il se trompe sur toute la ligne et sit\u00f4t que cette pens\u00e9e surgit choit de son oreille une bestiole d\u2019un genre in\u00e9dit croisement de sa d\u00e9bile nature et celle des abysses oc\u00e9aniques une holothurie l\u00e9opard le toise d\u2019un regard d\u00e9bonnaire.", "content_text": "Il peut y avoir plusieurs raisons d\u2019ha\u00efr le monde \u2014 au moins autant que de l\u2019aimer Ce sont les mots ha\u00efr \/ aimer sur lesquels il peut se pencher \u2014 pas sur le monde. Le monde est d\u2019une implacable neutralit\u00e9 \u2014 il dira : le monde s\u2019en fiche que tu soies homme ou insecte plante ou concr\u00e9tion min\u00e9ral. Le monde d\u00e9teste probablement tout autant ses enfants qu\u2019il les aime. Le monde cr\u00e9e sans cesse la possibilit\u00e9 de s'engoufrer\/ se r\u00e9fugier\/ dans une double-contrainte ( double-bind). ou blind aveuglement avance autant qu\u2019il recule- Blind un chouette nom pour mon personnage de ce jour se dit le vieil hibou Il enfonce un doigt dans la neutralit\u00e9 du monde elle est molle le doigt s\u2019enfonce comme dans du beurre. Il se dit qu\u2019il pourrait \u00e9carter facilement les parois s\u2019introduire ainsi et avec un peu de chance traverser m\u00eame toute la neutralit\u00e9 du monde. C\u2019est d\u2019abord mou puis \u00e7a devient dur voil\u00e0 donc le pi\u00e8ge on croit pouvoir s\u2019enfoncer ainsi traverser la neutralit\u00e9 du monde mais \u00e0 un moment on tombe sur un os le monde nous d\u00e9boute nous refuse nous expulse. Oblig\u00e9 de rebrousser chemin il attrape un crampe \u00e0 la cheville \/ il boitille comme un moineau une pie un corbeau \u2014 le grotesque s\u2019ajoutant ainsi \u00e0 la tristesse \/ d\u00e9confiture j\u2019aime le monde et lui ne m\u2019aime pas \u2014 il dit je d\u00e9teste le monde \/ il s\u2019en fout compl\u00e8tement \u2014 cette binarit\u00e9 un jour lui mettra t\u2019il {la puce \u00e0 l\u2019oreille} Ses deux oreilles se sont mises \u00e0 couler \u2014 au d\u00e9but il croit que c\u2019est de la faute d\u2019une n\u00e9gligence\/ qu\u2019il ne s\u2019est pas suffisamment fourr\u00e9 le quotidien coton tige dans les esgourdes\u2014 il se rend \u00e0 la pharmacie de l\u2019angle de la rue \u2014 on lui donne des gouttes \/ cinq gouttes matin \/ cinq le soir la v\u00e9rit\u00e9 est ailleurs \u2014 il s\u2019agit d\u2019un insecte qui loge dans son cr\u00e2ne \u2014 qui effectue des va et vient nocturnes genre de mille-pattes \u2014 qui aura pondu dans sa cervelle des myriades de myriapodes qui transitent d\u00e9sormais par son conduit auditif et sa trompe d\u2019Eustache\u2014 pour coloniser son cou \/ sa gorge \/ sa poitrine son thorax \/ jusqu\u2019\u00e0 son nombril \u2014 voire pis il se souvient et son oreille coule \u2014lorsqu\u2019il se souvient des murs des chambres dans lesquelles il v\u00e9cut \u2014des arm\u00e9es de cafards \u2014 le bruit surtout de leurs pattes courant sur le papier peint la tapisserie et quand il allume la lumi\u00e8re ils disparaissent \u00e0 croire que ces cafards ne vivent que dans son imagination. \u00e9crire sans ponctuation r\u00e9sout le probl\u00e8me \u00e9pineux de la ponctuation mais cr\u00e9e soudain trois \u00e9cueils que sont le rythme la sonorit\u00e9 la p\u00e9riode le naufrage guette toujours l\u2019aventurier d\u00e9boussol\u00e9 les points cardinaux se font sentir et il faut avoir du nez ou du cul pour s\u2019en tirer s\u2019orienter en humidifiant un doigt puis le jeter dans le vent s\u2019orienter en d\u00e9veloppant un sens de l\u2019hygrom\u00e9trie par contact de la pulpe avec l\u2019haleine des gouffres On ne sait pas grand chose de lui et c\u2019est ce qu\u2019il veut effacer au bout du compte les traces que les insectes tent\u00e8rent de lui transmettre pour attirer ainsi dans son cr\u00e2ne d\u2019autres colonies faire de son pauvre cr\u00e2ne un monde grouillant d\u2019insectes trottinant sans rel\u00e2che du thalamus \u00e0 l\u2019hypothalamus en passant par l\u2019amygdale et l\u2019hippocampe Ducasse des temps modernes \u2014 comme nous le sommes \u00e0 peu pr\u00e8s tous d\u00e9sormais \u2014sauf ceux qui se disent \/ qui clament \u00e0 tue t\u00eate \/ \u00eatre po\u00e8tes A moins qu\u2019il se trompe sur toute la ligne et sit\u00f4t que cette pens\u00e9e surgit choit de son oreille une bestiole d\u2019un genre in\u00e9dit croisement de sa d\u00e9bile nature et celle des abysses oc\u00e9aniques une holothurie l\u00e9opard le toise d\u2019un regard d\u00e9bonnaire.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/agi_mayotte_holothurie_ananas.jpg?1748065204", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/02-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/02-janvier-2024.html", "title": "02 janvier 2024", "date_published": "2024-01-02T10:41:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>
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\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Pass\u00e9 la nuit de la saint Sylvestre 2023-2024 en lisant du Lautr\u00e9amont, au bord d\u2019une source au milieu de la for\u00eat, sous les draps, mais aujourd\u2019hui on dit une couette. Lire les chants de Maldoror,\u2002pleurer, pouffer, compter les animaux.<\/p>\n

Au bord d\u2019une source en for\u00eat. Allong\u00e9 de tout son long. A terre. Lire ces phrases pleines de virgules \u00e9crites parait-il accompagn\u00e9 au piano. Compter les moutons et les crapauds, les cam\u00e9l\u00e9ons.<\/p>\n

Se sentir proche jusqu\u2019\u00e0 l\u2019identique du dieu comme du cr\u00e9tin. Equidistance produite par une telle proximit\u00e9.<\/p>\n

Et retrouver Fran\u00e7ois Copp\u00e9e, Hugo, L\u00e9vi Alphonse Louis dit Eliphas, Huyssmans, Nerval, tant d\u2019autres encore soudain l\u00e0 r\u00e9unis dans ces phrases pleines de virgules, de plagiat d\u2019encyclop\u00e9dies, sous la couette, allong\u00e9 de tout ton long, on croirait entendre du piano.<\/p>\n

Et au matin, meilleurs v\u0153ux, cette vid\u00e9o de F.B sur Marin Fouqu\u00e9. Il d\u00e9clame \u00e0 partir d\u2019un ou deux post Instagram la m\u00eame chose, \u00e0 peu de chose pr\u00e8s , du Lautr\u00e9amont revisit\u00e9.\u2002Fabuleux, fantastique.<\/p>\n

N\u00e9anmoins \u2013 autre bonne r\u00e9solution, si j\u2019ai des commentaires \u00e0 faire, je les fais ici, pas ailleurs, plus ailleurs—\u00e7a m\u00e9rite une m\u00e9daille en chocolat, une part de b\u00fbche, et si j\u2019avais encore des dents, quelques bonnes vieilles caries.<\/p>\n

Image en avant : Les Chants de Maldoror by Corominas (2007).<\/p>", "content_text": "Pass\u00e9 la nuit de la saint Sylvestre 2023-2024 en lisant du Lautr\u00e9amont, au bord d\u2019une source au milieu de la for\u00eat, sous les draps, mais aujourd\u2019hui on dit une couette. Lire les chants de Maldoror, pleurer, pouffer, compter les animaux. Au bord d\u2019une source en for\u00eat. Allong\u00e9 de tout son long. A terre. Lire ces phrases pleines de virgules \u00e9crites parait-il accompagn\u00e9 au piano. Compter les moutons et les crapauds, les cam\u00e9l\u00e9ons. Se sentir proche jusqu\u2019\u00e0 l\u2019identique du dieu comme du cr\u00e9tin. Equidistance produite par une telle proximit\u00e9. Et retrouver Fran\u00e7ois Copp\u00e9e, Hugo, L\u00e9vi Alphonse Louis dit Eliphas, Huyssmans, Nerval, tant d\u2019autres encore soudain l\u00e0 r\u00e9unis dans ces phrases pleines de virgules, de plagiat d\u2019encyclop\u00e9dies, sous la couette, allong\u00e9 de tout ton long, on croirait entendre du piano. Et au matin, meilleurs v\u0153ux, cette vid\u00e9o de F.B sur Marin Fouqu\u00e9. Il d\u00e9clame \u00e0 partir d\u2019un ou deux post Instagram la m\u00eame chose, \u00e0 peu de chose pr\u00e8s , du Lautr\u00e9amont revisit\u00e9. Fabuleux, fantastique. N\u00e9anmoins \u2013 autre bonne r\u00e9solution, si j\u2019ai des commentaires \u00e0 faire, je les fais ici, pas ailleurs, plus ailleurs\u2014\u00e7a m\u00e9rite une m\u00e9daille en chocolat, une part de b\u00fbche, et si j\u2019avais encore des dents, quelques bonnes vieilles caries. Image en avant : Les Chants de Maldoror by Corominas (2007).", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/maldoror.jpg?1748065077", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/1er-janvier-2024.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/1er-janvier-2024.html", "title": "1er janvier 2024", "date_published": "2024-01-01T10:38:00Z", "date_modified": "2024-10-19T16:14:55Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

En finir avec les illusions du naturel, sans hocher la t\u00eate en signe de reconnaissance.<\/p>\n

Le saumon fum\u00e9 en tranches ( fines) vit son dernier jour. D\u00e9cortiqu\u00e9e la crevette se trempe dans la mayonnaise<\/p>\n

Les enfants portent la nourriture \u00e0 la bouche tout en regardant un film d\u00e9bile \u00e0 la t\u00e9l\u00e9vision.<\/p>\n

Leur tablette leur manque.<\/p>\n

Il ne m\u00e2chent pas, ils avalent.<\/p>\n

Haut le c\u0153ur.<\/p>\n

Dans deux heures il sera minuit mais je serai couch\u00e9, je dormirai \u00e0 poings ferm\u00e9s.<\/p>\n

Dans mon r\u00eave le saumon remonte la rivi\u00e8re, la crevette porte une armure grise , la t\u00e9l\u00e9vision n\u2019existe pas encore, on n\u2019aurait m\u00eame pas id\u00e9e de faire bouillir de l\u2019eau.<\/p>\n

Passage sur Ubuweb. Lu quelques phrases, \u00e9cout\u00e9 quelques paroles de Derrida, puis, assez rapidement, me suis demand\u00e9 pourquoi je m\u2019int\u00e9ressais encore \u00e0 toutes ces choses. Le mot d\u00e9calage est celui qui vient, presque tout de suite pour expliquer le manque d\u2019entrain. Me suis abonn\u00e9 \u00e0 la lettre mensuelle ( son journal ) sur le site \u2002fuir est une pulsion de Guillaume Vissac , gr\u00e2ce \u00e0 une lecture de F.B sur sa chaine Carnets priv\u00e9s.<\/p>\n

Et moi me demande o\u00f9 j\u2019\u00e9tais pendant l\u2019aventure des d\u00e9buts d\u2019internet, les d\u00e9buts de Publie.net\/ 2008\/ mais oui le burnout, blackout total, on me ramassait \u00e0 la petite cuill\u00e8re. Puis il fallait faire bouillir la marmite, jobs de merde, notamment dans les hangars glac\u00e9s de Neuville, dans cet open space peupl\u00e9 d\u2019hypocrites \u00e0 Bron, je pouvais encore sauter de cadre \u00e0 grouillot sans le moindre \u00e9tat d\u2019\u00e2me.<\/p>\n


\n

2024.— Je te souhaite une bonne ann\u00e9e—\u00e0 toi le monde, \u00e0 moi. Quel souhait dans le fond, la paix, seulement la paix. Quoi d\u2019autre ? sinon on invente bien s\u00fbr, on s\u2019\u00e9gare : parvenir \u00e0 r\u00e9unir enfin la ch\u00e8vre et le chou dans un seul estomac. Et que les loups deviennent d\u2019un seul coup v\u00e9g\u00e9tariens tiens ; que les carnassiers montrent leurs dents, qu\u2019on puisse les voir venir de loin etc. etc.<\/p>\n


\n

Le langage est \u00e0 l\u2019origine un manque qu\u2019on cherche \u00e0 combler, on cherche \u00e0 donner du sens, \u00e0 s\u2019expliquer, et assez vite on s\u2019en retrouve coupable. D\u00e9mantibuler le langage pour \u00e9chapper au sens, \u00e0 l\u2019explication, \u00e0 la culpabilit\u00e9, c\u2019est cr\u00e9er un silence qui ressemble comme deux gouttes d\u2019eau aux tableaux sur lesquels je retombe.<\/p>\n

Le manque reste le manque. Il est \u00e0 sa place. Tout autour il y a aussi des choses, des gens, le monde. Tout le monde semble apparemment \u00e0 sa place. Et s\u2019il ne l\u2019est pas encore, c\u2019est en raison d\u2019une poussi\u00e8re dans l\u2019\u0153il ; \u00e7a ne sert \u00e0 rien de se frotter les yeux, \u00e7a ne fait qu\u2019empirer.<\/p>\n


\nRempli en d\u00e9but de semaine le formulaire de cessation d\u2019activit\u00e9, et envoy\u00e9 des mails pour savoir quand je pourrai en recr\u00e9er une autre sous la forme d\u2019autoentreprise. Finalement re\u00e7u la validation de mon premier formulaire, et pas de r\u00e9ponse \u00e0 mes mails. J\u2019ai donc rempli un nouveau formulaire de cr\u00e9ation d\u2019entreprise.\n

La Cipav, l\u2019Urssaf ne donnent plus de nouvelles. Sans doute en raison des f\u00eates de fin d\u2019ann\u00e9e.<\/p>\n


\n

Pas de champagne ce soir. Et d\u00eener frugal. Voir la bouffe passer de l\u2019assiette \u00e0 la bouche et la t\u00e9l\u00e9 allum\u00e9e m\u2019a rappel\u00e9 des mauvais souvenirs. Je note donc ces quelques mots avant d\u2019aller me coucher, me plonger dans un bon livre,\u2002puis dans le sommeil.<\/p>\n

Concernant l\u2019avanc\u00e9e du journal que je remets au propre, \u00e7a n\u2019avance pas bien vite. Je crois que je r\u00e9siste en me pr\u00e9occupant beaucoup de mise en page, de marges, de format, de la mise en forme du style de police, de paragraphe.<\/p>\n

Pourtant rien de sorcier, je n\u2019ai qu\u2019\u00e0 reprendre les billet jour apr\u00e8s jour sur l\u2019ancien site et les coller sur le document Word. Au d\u00e9but je voulais tout faire en m\u00eame temps. Corriger les fautes, les lourdeurs, \u00e9laguer, mettre en forme, mais ce n\u2019est pas la bonne mani\u00e8re, je le sens. Il faut plut\u00f4t copier coller \u00e0 d\u00e9faut de savoir comment convertir les fichiers XML en texte. Un petit espoir avec un logiciel de la soci\u00e9t\u00e9 Wonder Share : PDF \u00e9l\u00e9ment. Dans leur notice il est dit qu\u2019il suffit d\u2019ouvrir l\u2019XML dans un navigateur et de l\u2019imprimer en utilisant leur option, puis de convertir le PDF obtenu vers Excel. Mais les fichiers doivent \u00eatre d\u00e9mesur\u00e9ment lourds, la m\u00e9moire vive ne peut le tol\u00e9rer et fait buguer le syst\u00e8me.<\/p>\n

Trouv\u00e9 aussi un logiciel pour enregistrer tout l\u2019audio qui se pr\u00e9sente \u00e0 l\u2019\u00e9cran du PC. ( DEMOCREATOR) ce qui me permet d\u2019enregistrer les conf\u00e9rences de Deleuze ( notamment sur Foucault)\u2002Cela pour les voyages que j\u2019aurai encore \u00e0 faire en voiture le lundi apr\u00e8s-midi, le mercredi.<\/p>\n

Peu \u00e0 peu on abandonne ce qui nous passionnait, ce ne sont plus que des engouements et qui soudain abaiss\u00e9s comme tels s\u2019\u00e9vanouissent. On essaie de rassembler encore une \u00e9nergie que l\u2019on croit voir diminuer. On essaie de conserver un peu de cette \u00e9nergie. On ne voudrait pas tout perdre. Et la nostalgie nous fait aussi oublier l\u2019\u00e2ge qu\u2019on a, justement \u00e0 ces moment l\u00e0 pr\u00e9cis\u00e9ment ; elle nous procure des bouff\u00e9es d\u2019espoir que pour mieux nous an\u00e9antir par la suite.<\/p>\n

Une excellente raison de se m\u00e9fier de toute nostalgie.<\/p>\n


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Pense \u00e0 la recopie quand tu \u00e9cris. C\u2019est encore beaucoup trop long pour commencer une nouvelle ann\u00e9e, peut-\u00eatre une forme de r\u00e9solution, si tu te mets soudain \u00e0 croire aux r\u00e9solutions.<\/p>\n

Au fond de mon sac \u00e0 dos je retrouve un couteau suisse.<\/p>", "content_text": "En finir avec les illusions du naturel, sans hocher la t\u00eate en signe de reconnaissance. Le saumon fum\u00e9 en tranches ( fines) vit son dernier jour. D\u00e9cortiqu\u00e9e la crevette se trempe dans la mayonnaise Les enfants portent la nourriture \u00e0 la bouche tout en regardant un film d\u00e9bile \u00e0 la t\u00e9l\u00e9vision. Leur tablette leur manque. Il ne m\u00e2chent pas, ils avalent. Haut le c\u0153ur. Dans deux heures il sera minuit mais je serai couch\u00e9, je dormirai \u00e0 poings ferm\u00e9s. Dans mon r\u00eave le saumon remonte la rivi\u00e8re, la crevette porte une armure grise , la t\u00e9l\u00e9vision n\u2019existe pas encore, on n\u2019aurait m\u00eame pas id\u00e9e de faire bouillir de l\u2019eau. Passage sur Ubuweb. Lu quelques phrases, \u00e9cout\u00e9 quelques paroles de Derrida, puis, assez rapidement, me suis demand\u00e9 pourquoi je m\u2019int\u00e9ressais encore \u00e0 toutes ces choses. Le mot d\u00e9calage est celui qui vient, presque tout de suite pour expliquer le manque d\u2019entrain. Me suis abonn\u00e9 \u00e0 la lettre mensuelle ( son journal ) sur le site fuir est une pulsion de Guillaume Vissac , gr\u00e2ce \u00e0 une lecture de F.B sur sa chaine Carnets priv\u00e9s. Et moi me demande o\u00f9 j\u2019\u00e9tais pendant l\u2019aventure des d\u00e9buts d\u2019internet, les d\u00e9buts de Publie.net\/ 2008\/ mais oui le burnout, blackout total, on me ramassait \u00e0 la petite cuill\u00e8re. Puis il fallait faire bouillir la marmite, jobs de merde, notamment dans les hangars glac\u00e9s de Neuville, dans cet open space peupl\u00e9 d\u2019hypocrites \u00e0 Bron, je pouvais encore sauter de cadre \u00e0 grouillot sans le moindre \u00e9tat d\u2019\u00e2me. 2024.\u2014 Je te souhaite une bonne ann\u00e9e\u2014\u00e0 toi le monde, \u00e0 moi. Quel souhait dans le fond, la paix, seulement la paix. Quoi d\u2019autre ? sinon on invente bien s\u00fbr, on s\u2019\u00e9gare : parvenir \u00e0 r\u00e9unir enfin la ch\u00e8vre et le chou dans un seul estomac. Et que les loups deviennent d\u2019un seul coup v\u00e9g\u00e9tariens tiens ; que les carnassiers montrent leurs dents, qu\u2019on puisse les voir venir de loin etc. etc. Le langage est \u00e0 l\u2019origine un manque qu\u2019on cherche \u00e0 combler, on cherche \u00e0 donner du sens, \u00e0 s\u2019expliquer, et assez vite on s\u2019en retrouve coupable. D\u00e9mantibuler le langage pour \u00e9chapper au sens, \u00e0 l\u2019explication, \u00e0 la culpabilit\u00e9, c\u2019est cr\u00e9er un silence qui ressemble comme deux gouttes d\u2019eau aux tableaux sur lesquels je retombe. Le manque reste le manque. Il est \u00e0 sa place. Tout autour il y a aussi des choses, des gens, le monde. Tout le monde semble apparemment \u00e0 sa place. Et s\u2019il ne l\u2019est pas encore, c\u2019est en raison d\u2019une poussi\u00e8re dans l\u2019\u0153il ; \u00e7a ne sert \u00e0 rien de se frotter les yeux, \u00e7a ne fait qu\u2019empirer. Rempli en d\u00e9but de semaine le formulaire de cessation d\u2019activit\u00e9, et envoy\u00e9 des mails pour savoir quand je pourrai en recr\u00e9er une autre sous la forme d\u2019autoentreprise. Finalement re\u00e7u la validation de mon premier formulaire, et pas de r\u00e9ponse \u00e0 mes mails. J\u2019ai donc rempli un nouveau formulaire de cr\u00e9ation d\u2019entreprise. La Cipav, l\u2019Urssaf ne donnent plus de nouvelles. Sans doute en raison des f\u00eates de fin d\u2019ann\u00e9e. Pas de champagne ce soir. Et d\u00eener frugal. Voir la bouffe passer de l\u2019assiette \u00e0 la bouche et la t\u00e9l\u00e9 allum\u00e9e m\u2019a rappel\u00e9 des mauvais souvenirs. Je note donc ces quelques mots avant d\u2019aller me coucher, me plonger dans un bon livre, puis dans le sommeil. Concernant l\u2019avanc\u00e9e du journal que je remets au propre, \u00e7a n\u2019avance pas bien vite. Je crois que je r\u00e9siste en me pr\u00e9occupant beaucoup de mise en page, de marges, de format, de la mise en forme du style de police, de paragraphe. Pourtant rien de sorcier, je n\u2019ai qu\u2019\u00e0 reprendre les billet jour apr\u00e8s jour sur l\u2019ancien site et les coller sur le document Word. Au d\u00e9but je voulais tout faire en m\u00eame temps. Corriger les fautes, les lourdeurs, \u00e9laguer, mettre en forme, mais ce n\u2019est pas la bonne mani\u00e8re, je le sens. Il faut plut\u00f4t copier coller \u00e0 d\u00e9faut de savoir comment convertir les fichiers XML en texte. Un petit espoir avec un logiciel de la soci\u00e9t\u00e9 Wonder Share : PDF \u00e9l\u00e9ment. Dans leur notice il est dit qu\u2019il suffit d\u2019ouvrir l\u2019XML dans un navigateur et de l\u2019imprimer en utilisant leur option, puis de convertir le PDF obtenu vers Excel. Mais les fichiers doivent \u00eatre d\u00e9mesur\u00e9ment lourds, la m\u00e9moire vive ne peut le tol\u00e9rer et fait buguer le syst\u00e8me. Trouv\u00e9 aussi un logiciel pour enregistrer tout l\u2019audio qui se pr\u00e9sente \u00e0 l\u2019\u00e9cran du PC. ( DEMOCREATOR) ce qui me permet d\u2019enregistrer les conf\u00e9rences de Deleuze ( notamment sur Foucault) Cela pour les voyages que j\u2019aurai encore \u00e0 faire en voiture le lundi apr\u00e8s-midi, le mercredi. Peu \u00e0 peu on abandonne ce qui nous passionnait, ce ne sont plus que des engouements et qui soudain abaiss\u00e9s comme tels s\u2019\u00e9vanouissent. On essaie de rassembler encore une \u00e9nergie que l\u2019on croit voir diminuer. On essaie de conserver un peu de cette \u00e9nergie. On ne voudrait pas tout perdre. Et la nostalgie nous fait aussi oublier l\u2019\u00e2ge qu\u2019on a, justement \u00e0 ces moment l\u00e0 pr\u00e9cis\u00e9ment; elle nous procure des bouff\u00e9es d\u2019espoir que pour mieux nous an\u00e9antir par la suite. Une excellente raison de se m\u00e9fier de toute nostalgie. Pense \u00e0 la recopie quand tu \u00e9cris. C\u2019est encore beaucoup trop long pour commencer une nouvelle ann\u00e9e, peut-\u00eatre une forme de r\u00e9solution, si tu te mets soudain \u00e0 croire aux r\u00e9solutions. Au fond de mon sac \u00e0 dos je retrouve un couteau suisse.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/couteau-suisse-huntsman-victorinox-annee-du-dragon-2024.jpg?1748065146", "tags": [] } ] }