{ "version": "https://jsonfeed.org/version/1.1", "title": "Le dibbouk", "home_page_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/", "feed_url": "https:\/\/ledibbouk.net\/spip.php?page=feed_json", "language": "fr-FR", "items": [ { "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-10.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-10.html", "title": "notule 10", "date_published": "2022-04-28T19:54:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:54:43Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>
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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Derni\u00e8re mouture de cette toile qui finalement rel\u00e8ve plus de l\u2019ic\u00f4ne.<\/p>", "content_text": "Derni\u00e8re mouture de cette toile qui finalement rel\u00e8ve plus de l\u2019ic\u00f4ne.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_5584.webp?1748065096", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-9.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-9.html", "title": "notule 9", "date_published": "2022-04-27T19:50:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:51:09Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Si je dis je de fa\u00e7on inconsid\u00e9r\u00e9e c\u2019est un blasph\u00e8me.<\/p>\n

Si je est un personnage cr\u00e9e par soi c\u2019est diff\u00e9rent.<\/p>\n

Mais c\u2019est dangereux.<\/p>\n

Le danger de confondre moi et soi.<\/p>\n

Le blasph\u00e8me serait de dire je au pr\u00e9sent sans rien cr\u00e9er.<\/p>\n

Je cr\u00e9e mais ce n\u2019est jamais l\u2019ego qui cr\u00e9e.<\/p>\n

De m\u00eame pour les maladies<\/p>\n

On ne devrait pas dire j\u2019ai mal<\/p>\n

Mais plut\u00f4t j\u2019ai eut mal jusqu\u2019\u00e0 pr\u00e9sent<\/p>\n

Et c\u2019est d\u00e9j\u00e0 du pass\u00e9.<\/p>\n

\u00c7a a l\u2019air con comme \u00e7a si on n\u2019est pas dedans.<\/p>\n

Mais si on y est c\u2019est magnifique !<\/p>\n

Cela dit voil\u00e0 l\u2019exemple typique d\u2019un tableau bousill\u00e9 suite \u00e0 une erreur d\u2019aiguillage entre je et soi.<\/p>", "content_text": "Si je dis je de fa\u00e7on inconsid\u00e9r\u00e9e c\u2019est un blasph\u00e8me. Si je est un personnage cr\u00e9e par soi c\u2019est diff\u00e9rent. Mais c\u2019est dangereux. Le danger de confondre moi et soi. Le blasph\u00e8me serait de dire je au pr\u00e9sent sans rien cr\u00e9er. Je cr\u00e9e mais ce n\u2019est jamais l\u2019ego qui cr\u00e9e. De m\u00eame pour les maladies On ne devrait pas dire j\u2019ai mal Mais plut\u00f4t j\u2019ai eut mal jusqu\u2019\u00e0 pr\u00e9sent Et c\u2019est d\u00e9j\u00e0 du pass\u00e9. \u00c7a a l\u2019air con comme \u00e7a si on n\u2019est pas dedans. Mais si on y est c\u2019est magnifique ! Cela dit voil\u00e0 l\u2019exemple typique d\u2019un tableau bousill\u00e9 suite \u00e0 une erreur d\u2019aiguillage entre je et soi.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_5580.webp?1748065148", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-8.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-8.html", "title": "notule 8", "date_published": "2022-04-25T19:43:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:44:10Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Je me m\u00e9fie des \u00e9vidences aussi spontan\u00e9ment que des clich\u00e9s et ce depuis tr\u00e8s t\u00f4t. Ce qui me place devant une image t\u00e9l\u00e9 m\u00e9trique du r\u00e9el.<\/p>\n

Celui que j\u2019ai du accepter comme \u00e9tant commun et le mien.<\/p>\n

D\u2019ailleurs lorsque j\u2019\u00e9tais photographe j\u2019ai revendu tous mes bo\u00eetiers reflex pour acqu\u00e9rir un vieux Leica.<\/p>\n

Avec ce dernier j\u2019ai visit\u00e9 l\u2019Asie et passais inaper\u00e7u. On aurait dit un appareil inoffensif. Je pouvais m\u2019approcher des visages \u00e0 30cm car je n\u2019avais qu\u2019une optique de 35mm.<\/p>\n

On ne savait pas quand je d\u00e9clenchais l\u2019obturateur, pas de claquement de miroir.<\/p>\n

Pour faire le point il suffisait de faire co\u00efncider deux images dans le viseur. C\u2019\u00e9tait rapide et tr\u00e8s efficace.<\/p>\n

Je ne suis pas devenu c\u00e9l\u00e8bre gr\u00e2ce \u00e0 mes photographies. J\u2019avais imagin\u00e9 le devenir lorsque j\u2019\u00e9tais jeune. Mais ce n\u2019\u00e9tait qu\u2019un leurre pour m\u2019entra\u00eener dans de dr\u00f4les d\u2019aventures.<\/p>\n

Au bout du compte je faisais mes classes tout en semant des petits cailloux dans mon esprit, un puzzle extra.<\/p>\n

Caroline me dit qu\u2019elle voit un homme seul et qui grelote dans un paysage en apercevant mon tableau. Je l\u2019ai vu aussi tard hier soir avant de lire son message, et du coup l\u2019image dans le viseur m\u2019apparaissait d\u2019une \u00e9vidence trouble.<\/p>\n

J\u2019ai tout recouvert de bleu, je ne pouvais pas m\u2019installer dans ce clich\u00e9.<\/p>\n

Puis j\u2019ai repris mon pinceau charg\u00e9 de blanc, excellente gomme mais pas seulement.<\/p>\n

Baguette de sourcier plut\u00f4t, voire pendule de radiesth\u00e9siste. Et une autre vision est arriv\u00e9e, suffisamment inachev\u00e9e pour qu\u2019elle m\u2019ouvre \u00e0 l\u2019inconnu.<\/p>", "content_text": "Je me m\u00e9fie des \u00e9vidences aussi spontan\u00e9ment que des clich\u00e9s et ce depuis tr\u00e8s t\u00f4t. Ce qui me place devant une image t\u00e9l\u00e9 m\u00e9trique du r\u00e9el. Celui que j\u2019ai du accepter comme \u00e9tant commun et le mien. D\u2019ailleurs lorsque j\u2019\u00e9tais photographe j\u2019ai revendu tous mes bo\u00eetiers reflex pour acqu\u00e9rir un vieux Leica. Avec ce dernier j\u2019ai visit\u00e9 l\u2019Asie et passais inaper\u00e7u. On aurait dit un appareil inoffensif. Je pouvais m\u2019approcher des visages \u00e0 30cm car je n\u2019avais qu\u2019une optique de 35mm. On ne savait pas quand je d\u00e9clenchais l\u2019obturateur, pas de claquement de miroir. Pour faire le point il suffisait de faire co\u00efncider deux images dans le viseur. C\u2019\u00e9tait rapide et tr\u00e8s efficace. Je ne suis pas devenu c\u00e9l\u00e8bre gr\u00e2ce \u00e0 mes photographies. J\u2019avais imagin\u00e9 le devenir lorsque j\u2019\u00e9tais jeune. Mais ce n\u2019\u00e9tait qu\u2019un leurre pour m\u2019entra\u00eener dans de dr\u00f4les d\u2019aventures. Au bout du compte je faisais mes classes tout en semant des petits cailloux dans mon esprit, un puzzle extra. Caroline me dit qu\u2019elle voit un homme seul et qui grelote dans un paysage en apercevant mon tableau. Je l\u2019ai vu aussi tard hier soir avant de lire son message, et du coup l\u2019image dans le viseur m\u2019apparaissait d\u2019une \u00e9vidence trouble. J\u2019ai tout recouvert de bleu, je ne pouvais pas m\u2019installer dans ce clich\u00e9. Puis j\u2019ai repris mon pinceau charg\u00e9 de blanc, excellente gomme mais pas seulement. Baguette de sourcier plut\u00f4t, voire pendule de radiesth\u00e9siste. Et une autre vision est arriv\u00e9e, suffisamment inachev\u00e9e pour qu\u2019elle m\u2019ouvre \u00e0 l\u2019inconnu.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_5569.jpg?1748065068", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-7.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-7.html", "title": "notule 7", "date_published": "2022-04-23T19:42:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:42:32Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Frotter du blanc sur du noir, cr\u00e9er des formes plus ou moins distinctes ainsi que des valeurs, un contraste, voir d\u00e9j\u00e0 une profondeur.<\/p>\n

J\u2019explore ainsi un commencement sans avoir d\u2019id\u00e9e.<\/p>\n

Je ne pense pas au r\u00e9sultat.<\/p>\n

Agir, laisser aller les choses comme elles veulent se retirer sans s\u2019attacher \u00e0 une pens\u00e9e \u00e0 un jugement. Arr\u00eater sit\u00f4t la premi\u00e8re id\u00e9e s\u00e9duisante qui s\u2019impose.<\/p>\n

Passer \u00e0 un autre tableau en laissant celui-ci suffisamment silencieux quelque part dans l\u2019atelier, l\u2019oublier quelques jours.<\/p>\n

C\u2019est un travail \u00e0 la fois tr\u00e8s rapide et tr\u00e8s lent.<\/p>", "content_text": "Frotter du blanc sur du noir, cr\u00e9er des formes plus ou moins distinctes ainsi que des valeurs, un contraste, voir d\u00e9j\u00e0 une profondeur. J\u2019explore ainsi un commencement sans avoir d\u2019id\u00e9e. Je ne pense pas au r\u00e9sultat. Agir, laisser aller les choses comme elles veulent se retirer sans s\u2019attacher \u00e0 une pens\u00e9e \u00e0 un jugement. Arr\u00eater sit\u00f4t la premi\u00e8re id\u00e9e s\u00e9duisante qui s\u2019impose. Passer \u00e0 un autre tableau en laissant celui-ci suffisamment silencieux quelque part dans l\u2019atelier, l\u2019oublier quelques jours. C\u2019est un travail \u00e0 la fois tr\u00e8s rapide et tr\u00e8s lent.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_5565.webp?1748065217", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-6.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-6.html", "title": "notule 6", "date_published": "2022-04-22T19:40:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:41:06Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Dans l\u2019\u00e9tude des rythmes suivant lesquels un homme parvient \u00e0 la r\u00e9ussite puis \u00e0 l\u2019\u00e9chec il y beaucoup \u00e0 apprendre de la notion d\u2019arrogance.<\/p>\n

L\u2019arrogance c\u2019est lorsqu\u2019on s\u2019approprie un miracle, lorsqu\u2019on dit c\u2019est moi !<\/p>\n

C\u2019est humain bien s\u00fbr.<\/p>\n

C\u2019est le pivot le plus \u00e9vident que l\u2019on pourra trouver qui produit le basculement de la r\u00e9ussite vers l\u2019\u00e9chec.<\/p>\n

Une forme de sati\u00e9t\u00e9 accompagn\u00e9e de paresse et d\u2019un je ne sais quoi de fatuit\u00e9.<\/p>\n

Un sabotage du merveilleux.<\/p>\n

Dans quel but ?<\/p>\n

L\u2019avidit\u00e9 et l\u2019\u00e9ternelle insatisfaction encore une fois, moteurs de notre chute vertigineuse dans la mati\u00e8re.<\/p>", "content_text": "Dans l\u2019\u00e9tude des rythmes suivant lesquels un homme parvient \u00e0 la r\u00e9ussite puis \u00e0 l\u2019\u00e9chec il y beaucoup \u00e0 apprendre de la notion d\u2019arrogance. L\u2019arrogance c\u2019est lorsqu\u2019on s\u2019approprie un miracle, lorsqu\u2019on dit c\u2019est moi ! C\u2019est humain bien s\u00fbr. C\u2019est le pivot le plus \u00e9vident que l\u2019on pourra trouver qui produit le basculement de la r\u00e9ussite vers l\u2019\u00e9chec. Une forme de sati\u00e9t\u00e9 accompagn\u00e9e de paresse et d\u2019un je ne sais quoi de fatuit\u00e9. Un sabotage du merveilleux. Dans quel but ? L\u2019avidit\u00e9 et l\u2019\u00e9ternelle insatisfaction encore une fois, moteurs de notre chute vertigineuse dans la mati\u00e8re. ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/2022-04-25_12.20_14.jpg?1748065055", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-5.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-5.html", "title": "notule 5", "date_published": "2022-04-22T19:37:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:38:01Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

En peinture qu\u2019est ce que c\u2019est que le talent ?
\nC\u2019est du temps
\nM\u2019a dit un jour un professeur<\/p>\n

Mais probl\u00e8me le temps n\u2019existe pas
\nIl n\u2019y a qu\u2019un instant pr\u00e9sent<\/p>\n

Oui et non en fait<\/p>\n

C\u2019est comme toi qui lit mes b\u00eatises
\nTu crois que nous sommes diff\u00e9rents
\nEt nous le sommes heureusement
\nMais en m\u00eame temps ce qui fait notre essentiel
\nCe qui nous relie
\nN\u2019est pas diff\u00e9rent.<\/p>\n

C\u2019est la conscience.<\/p>\n

Si nous n\u2019\u00e9tions pas dans cette illusion du temps, de la s\u00e9paration, nous ne pourrions jamais rien \u00e9changer.<\/p>\n

Dans la vie qu\u2019est ce que le talent ?<\/p>\n

C\u2019est s\u2019\u00e9veiller au paradoxe
\nC\u2019est comprendre que la vie est une onde
\nEt que nous devons faire attention aux sommets comme aux gouffres.<\/p>\n

On peut les explorer bien s\u00fbr
\nMais le meilleur emplacement est au milieu
\nEt tenter de rester sur ce chemin
\nPers\u00e9v\u00e9rer
\nC\u2019est aussi \u00e7a le talent<\/p>\n

Donc le talent c\u2019est avant tout une prise de Conscience
\nDu chemin puis de la r\u00e9gularit\u00e9 \u00e0 marcher du m\u00eame pas<\/p>\n

De la pers\u00e9v\u00e9rance<\/p>\n

Dans tout ce qui nous int\u00e9resse vraiment
\nDu fond du c\u0153ur
\n\u00c0 chaque instant<\/p>\n

On le fait tous
\nM\u00eame si on n\u2019en a pas du tout conscience
\nDonc tout est ok n\u2019est-ce pas ?<\/p>", "content_text": "En peinture qu\u2019est ce que c\u2019est que le talent ? C\u2019est du temps M\u2019a dit un jour un professeur Mais probl\u00e8me le temps n\u2019existe pas Il n\u2019y a qu\u2019un instant pr\u00e9sent Oui et non en fait C\u2019est comme toi qui lit mes b\u00eatises Tu crois que nous sommes diff\u00e9rents Et nous le sommes heureusement Mais en m\u00eame temps ce qui fait notre essentiel Ce qui nous relie N\u2019est pas diff\u00e9rent. C\u2019est la conscience. Si nous n\u2019\u00e9tions pas dans cette illusion du temps, de la s\u00e9paration, nous ne pourrions jamais rien \u00e9changer. Dans la vie qu\u2019est ce que le talent ? C\u2019est s\u2019\u00e9veiller au paradoxe C\u2019est comprendre que la vie est une onde Et que nous devons faire attention aux sommets comme aux gouffres. On peut les explorer bien s\u00fbr Mais le meilleur emplacement est au milieu Et tenter de rester sur ce chemin Pers\u00e9v\u00e9rer C\u2019est aussi \u00e7a le talent Donc le talent c\u2019est avant tout une prise de Conscience Du chemin puis de la r\u00e9gularit\u00e9 \u00e0 marcher du m\u00eame pas De la pers\u00e9v\u00e9rance Dans tout ce qui nous int\u00e9resse vraiment Du fond du c\u0153ur \u00c0 chaque instant On le fait tous M\u00eame si on n\u2019en a pas du tout conscience Donc tout est ok n\u2019est-ce pas ?", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/2022-04-20_12.05_22.jpg?1748065152", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-4.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-4.html", "title": "notule 4", "date_published": "2022-04-21T19:35:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:35:27Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Et puis un jour de d\u00e9bine, j\u2019ai craqu\u00e9, j\u2019ai fait bouillir de l\u2019eau j\u2019ai \u00e9pluch\u00e9 des l\u00e9gumes imaginaires, j\u2019ai fait bouillir de la viande r\u00eav\u00e9e, parmi les meilleurs morceaux, puis j\u2019ai jet\u00e9 l\u2019oignon invisible plant\u00e9 de son clou authentique dans la marmite.<\/p>\n

Et bien ce fut un succulent repas pour tout vous dire.<\/p>\n

Pas aussi \u00e9motionnant qu\u2019un soir de No\u00ebl \u00e0 bouffer des patates imaginaires devant Chantal Goya transform\u00e9e par moi-m\u00eame en l\u2019occasion en f\u00e9e Viviane, non tout de m\u00eame pas.<\/p>\n

J\u2019ai pleur\u00e9 deux fois plus fort malgr\u00e9 tout pouss\u00e9 par l\u2019extr\u00eame n\u00e9cessit\u00e9 de c\u00e9l\u00e9brer ce moment . Puis malin comme pas deux, j\u2019ai recueillis les larmes dans un petit flacon.<\/p>\n

\u00e7a pourra servir l\u2019ann\u00e9e prochaine \u00e0 la m\u00eame heure au m\u00eame moment si je me retrouvais par infortune soudain les yeux secs.<\/p>", "content_text": "Et puis un jour de d\u00e9bine, j\u2019ai craqu\u00e9, j\u2019ai fait bouillir de l\u2019eau j\u2019ai \u00e9pluch\u00e9 des l\u00e9gumes imaginaires, j\u2019ai fait bouillir de la viande r\u00eav\u00e9e, parmi les meilleurs morceaux, puis j\u2019ai jet\u00e9 l\u2019oignon invisible plant\u00e9 de son clou authentique dans la marmite. Et bien ce fut un succulent repas pour tout vous dire. Pas aussi \u00e9motionnant qu\u2019un soir de No\u00ebl \u00e0 bouffer des patates imaginaires devant Chantal Goya transform\u00e9e par moi-m\u00eame en l\u2019occasion en f\u00e9e Viviane, non tout de m\u00eame pas. J\u2019ai pleur\u00e9 deux fois plus fort malgr\u00e9 tout pouss\u00e9 par l\u2019extr\u00eame n\u00e9cessit\u00e9 de c\u00e9l\u00e9brer ce moment . Puis malin comme pas deux, j\u2019ai recueillis les larmes dans un petit flacon. \u00e7a pourra servir l\u2019ann\u00e9e prochaine \u00e0 la m\u00eame heure au m\u00eame moment si je me retrouvais par infortune soudain les yeux secs. ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/2022-04-20_12.05_13.jpg?1748065092", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/un-veritable-ami.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/un-veritable-ami.html", "title": "Un v\u00e9ritable ami.", "date_published": "2022-04-21T04:22:11Z", "date_modified": "2025-09-18T07:36:46Z", "author": {"name": "Auteur"}, "content_html": "

\"\"<\/p>\n

Peu \u00e0 peu le son du pipeau est en train de m’an\u00e9antir. Il est en train de tout dissoudre de ce que je crois \u00eatre la r\u00e9alit\u00e9 de ma vie, de qui je suis .<\/p>\n

Arrive un moment o\u00f9 j’ai du mal \u00e0 savoir qui je suis. Je ne vois que la guerre, des champs de batailles interminables ici sur terre et sur d’innombrables plan\u00e8tes. je vois des massacres incessants, et le pire est que je participe \u00e0 tous ces massacres.<\/p>\n

L’\u00eatre que je vois en tuer d’autres par milliers c’est moi.<\/p>\n

Je le fais sans la moindre \u00e9motion, sans remord ni regret comme le fait un soldat.<\/p>\n

La part humaine qui est encore en moi \u00e0 ce moment l\u00e0 est horrifi\u00e9e face \u00e0 une telle absence d’\u00e9motion ou de sentiment, et en m\u00eame temps je parviens n\u00e9anmoins \u00e0 \u00e9prouver de la compassion pour cet \u00eatre qui passe le plus clair de son temps \u00e0 tuer.<\/p>\n

D’un certain point de vue je peux dire que je le comprends. Il est anim\u00e9 par la n\u00e9cessit\u00e9, par l’instinct de survie.<\/p>\n

Deux races principales de g\u00e9ants s’affrontent. Deux races principales de reptiliens et il y a de cela des millions d’ann\u00e9es que la guerre a commenc\u00e9.<\/p>\n

Je suis un parmi des milliards d’autres qui se bat pour sauvegarder une id\u00e9e de vivre ensemble. Je suis un reptilien terrestre. Je suis n\u00e9 il y a 60 millions d’ann\u00e9es, peu de temps apr\u00e8s la grande extinction qui d\u00e9cima une grande partie de mes cong\u00e9n\u00e8res. L’histoire officiel parle d’une m\u00e9t\u00e9orite tomb\u00e9e sur la p\u00e9ninsule du Yucatan, mais c’est inexact. Il s’agit ni plus ni moins d’un g\u00e9nocide.<\/p>\n

L’histoire officielle sur Terre ment souvent elle ne parle pas de l’\u00e9volution des survivants du g\u00e9nocide. Nous avons \u00e9volu\u00e9 sur des millions d’ann\u00e9es, avons b\u00e2ti des civilisations, d\u00e9couvert des technologies qu’aucun \u00eatre humain ne serait m\u00eame en mesure d’imaginer. Puis nous avons du nous cacher pour ne pas \u00e9veiller l’attention de nos ennemis dans les profondeurs de diff\u00e9rentes plan\u00e8tes de la galaxie dont la terre \u00e9videmment.<\/p>\n

Soudain je vacille et m’effondre au sol. Que se passe t’il donc ? Le son du pipeau reflue lentement vers l’ext\u00e9rieur en m\u00eame temps que je recouvre mes esprits humains si je puis dire.<\/p>\n

J’ouvre les yeux et je vois Jim empoign\u00e9 par les gardes. Il vient de faire quelque chose qui ne leur plait pas du tout visiblement.<\/p>\n

Et pour cause, il a bondit sur le conseiller et d’un coup lui a enfonc\u00e9 le pipeau au fond de la gorge. Le conseiller git \u00e0 terre d\u00e9sormais. La reine regarde la sc\u00e8ne, elle est au bord de l’apoplexie. Son regard se fait cruel et mena\u00e7ant.<\/p>\n

— Tuez les tous hurle t’elle<\/p>\n

Jim se rel\u00e8ve et fait barrage imm\u00e9diatement \u00e0 un garde qui tire avec une \u00e9trange arme m\u00e9tallique une sorte de rayon laser. Il est malheureusement touch\u00e9 en pleine poitrine. Il a juste le temps de dire sauve toi mon fr\u00e8re, Shanti sauve toi.<\/p>\n

C’est alors qu’un raie de lumi\u00e8re \u00e9blouissant p\u00e9n\u00e8tre par le plafond de la salle, tout notre groupe est soudain emport\u00e9 comme dans les films de Star Trek.<\/p>\n

Lorsque nous arrivons \u00e0 destination je comprends que nous sommes dans un autre vaisseau un peu semblable au notre mais qui a l’air encore bien plus vaste.<\/p>\n

Devant nous se tient un personnage de petite taille que je reconnais aussit\u00f4t sans pouvoir pour autant poser un nom sur son visage.<\/p>\n

—D\u00e9cidemment Shanti, il faudra toujours que je vole \u00e0 ton secours.<\/p>\n

Je souris b\u00eatement comme je le fais \u00e0 chaque fois que je ne comprends pas ou bien que je n’entends pas car j’ai l’ou\u00efe un peu d\u00e9faillante parfois.<\/p>\n

— Occupons-nous de lui vite dis-je tout \u00e0 coup en voyant que Jim git encore au sol sans connaissance.<\/p>\n

Notre h\u00f4te sort lui aussi un objet m\u00e9tallique de sa poche et le porte \u00e0 sa petite bouche sans l\u00e8vre.<\/p>\n

Une musique c\u00e9leste envahit toute la salle et au m\u00eame moment un nom surgit : Myrddin !<\/p>\n

— J’ai bien peur h\u00e9las que nous ne puissions plus rien faire pour lui dit Myrddin. Sa mission s’ach\u00e8ve ici.<\/p>\n

—Tu devrais garder au moins garder \u00e7a en m\u00e9moire Shanti, Jim est un v\u00e9ritable ami. Il t’a rejoint dans cette vie pour arriver \u00e0 ce but, t’emp\u00eacher de mourir, comme tu l’as d\u00e9j\u00e0 fait des centaines de fois pour lui.<\/p>\n

Je me souvenais d\u00e9j\u00e0 de tellement de choses. Jim \u00e9tait intervenu sans doute pour que je ne me souvienne pas de tout, pour que je ne redevienne pas l’\u00eatre totalement insensible que j’avais \u00e9t\u00e9 d\u00e9j\u00e0 dans des milliers d’autres vies. La seule chose de bonne est que j’ai retrouv\u00e9 mon vrai nom apparemment.<\/p>\n

Shanti, je m’appelle Shanti.<\/p>\n

Il faudra que j’aille voir sur Wikip\u00e9dia \u00e0 quoi \u00e7a correspond pour les humains car il me semble avoir d\u00e9j\u00e0 crois\u00e9 ce nom, peut-\u00eatre dans la mythologie hindou.<\/p>\n

Et tout \u00e0 coup je me souviens que Myrddin correspond aussi \u00e0 Merlin. Tout cela est incroyable. Si ce n’\u00e9tait la perte de mon ami je rirais de bon c\u0153ur.<\/p>\n

A quoi tout cela m\u00e8ne t’il me demandais je<\/p>\n

— Nous travaillons tous de concert pour la conscience et le but me dit Myrddin sans que je ne vois bouger sa bouche \u00e0 un seul moment.<\/p>", "content_text": "\n\nPeu \u00e0 peu le son du pipeau est en train de m'an\u00e9antir. Il est en train de tout dissoudre de ce que je crois \u00eatre la r\u00e9alit\u00e9 de ma vie, de qui je suis .\n\nArrive un moment o\u00f9 j'ai du mal \u00e0 savoir qui je suis. Je ne vois que la guerre, des champs de batailles interminables ici sur terre et sur d'innombrables plan\u00e8tes. je vois des massacres incessants, et le pire est que je participe \u00e0 tous ces massacres.\n\nL'\u00eatre que je vois en tuer d'autres par milliers c'est moi. \n\nJe le fais sans la moindre \u00e9motion, sans remord ni regret comme le fait un soldat.\n\nLa part humaine qui est encore en moi \u00e0 ce moment l\u00e0 est horrifi\u00e9e face \u00e0 une telle absence d'\u00e9motion ou de sentiment, et en m\u00eame temps je parviens n\u00e9anmoins \u00e0 \u00e9prouver de la compassion pour cet \u00eatre qui passe le plus clair de son temps \u00e0 tuer. \n\nD'un certain point de vue je peux dire que je le comprends. Il est anim\u00e9 par la n\u00e9cessit\u00e9, par l'instinct de survie.\n\nDeux races principales de g\u00e9ants s'affrontent. Deux races principales de reptiliens et il y a de cela des millions d'ann\u00e9es que la guerre a commenc\u00e9.\n\nJe suis un parmi des milliards d'autres qui se bat pour sauvegarder une id\u00e9e de vivre ensemble. Je suis un reptilien terrestre. Je suis n\u00e9 il y a 60 millions d'ann\u00e9es, peu de temps apr\u00e8s la grande extinction qui d\u00e9cima une grande partie de mes cong\u00e9n\u00e8res. L'histoire officiel parle d'une m\u00e9t\u00e9orite tomb\u00e9e sur la p\u00e9ninsule du Yucatan, mais c'est inexact. Il s'agit ni plus ni moins d'un g\u00e9nocide.\n\nL'histoire officielle sur Terre ment souvent elle ne parle pas de l'\u00e9volution des survivants du g\u00e9nocide. Nous avons \u00e9volu\u00e9 sur des millions d'ann\u00e9es, avons b\u00e2ti des civilisations, d\u00e9couvert des technologies qu'aucun \u00eatre humain ne serait m\u00eame en mesure d'imaginer. Puis nous avons du nous cacher pour ne pas \u00e9veiller l'attention de nos ennemis dans les profondeurs de diff\u00e9rentes plan\u00e8tes de la galaxie dont la terre \u00e9videmment. \n\nSoudain je vacille et m'effondre au sol. Que se passe t'il donc ? Le son du pipeau reflue lentement vers l'ext\u00e9rieur en m\u00eame temps que je recouvre mes esprits humains si je puis dire. \n\nJ'ouvre les yeux et je vois Jim empoign\u00e9 par les gardes. Il vient de faire quelque chose qui ne leur plait pas du tout visiblement.\n\nEt pour cause, il a bondit sur le conseiller et d'un coup lui a enfonc\u00e9 le pipeau au fond de la gorge. Le conseiller git \u00e0 terre d\u00e9sormais. La reine regarde la sc\u00e8ne, elle est au bord de l'apoplexie. Son regard se fait cruel et mena\u00e7ant. \n\n\u2014 Tuez les tous hurle t'elle \n\nJim se rel\u00e8ve et fait barrage imm\u00e9diatement \u00e0 un garde qui tire avec une \u00e9trange arme m\u00e9tallique une sorte de rayon laser. Il est malheureusement touch\u00e9 en pleine poitrine. Il a juste le temps de dire sauve toi mon fr\u00e8re, Shanti sauve toi. \n\nC'est alors qu'un raie de lumi\u00e8re \u00e9blouissant p\u00e9n\u00e8tre par le plafond de la salle, tout notre groupe est soudain emport\u00e9 comme dans les films de Star Trek. \n\nLorsque nous arrivons \u00e0 destination je comprends que nous sommes dans un autre vaisseau un peu semblable au notre mais qui a l'air encore bien plus vaste.\n\nDevant nous se tient un personnage de petite taille que je reconnais aussit\u00f4t sans pouvoir pour autant poser un nom sur son visage.\n\n\u2014D\u00e9cidemment Shanti, il faudra toujours que je vole \u00e0 ton secours. \n\nJe souris b\u00eatement comme je le fais \u00e0 chaque fois que je ne comprends pas ou bien que je n'entends pas car j'ai l'ou\u00efe un peu d\u00e9faillante parfois.\n\n\u2014 Occupons-nous de lui vite dis-je tout \u00e0 coup en voyant que Jim git encore au sol sans connaissance.\n\nNotre h\u00f4te sort lui aussi un objet m\u00e9tallique de sa poche et le porte \u00e0 sa petite bouche sans l\u00e8vre.\n\nUne musique c\u00e9leste envahit toute la salle et au m\u00eame moment un nom surgit : Myrddin !\n\n\u2014 J'ai bien peur h\u00e9las que nous ne puissions plus rien faire pour lui dit Myrddin. Sa mission s'ach\u00e8ve ici.\n\n\u2014Tu devrais garder au moins garder \u00e7a en m\u00e9moire Shanti, Jim est un v\u00e9ritable ami. Il t'a rejoint dans cette vie pour arriver \u00e0 ce but, t'emp\u00eacher de mourir, comme tu l'as d\u00e9j\u00e0 fait des centaines de fois pour lui.\n\nJe me souvenais d\u00e9j\u00e0 de tellement de choses. Jim \u00e9tait intervenu sans doute pour que je ne me souvienne pas de tout, pour que je ne redevienne pas l'\u00eatre totalement insensible que j'avais \u00e9t\u00e9 d\u00e9j\u00e0 dans des milliers d'autres vies. La seule chose de bonne est que j'ai retrouv\u00e9 mon vrai nom apparemment. \n\nShanti, je m'appelle Shanti. \n\nIl faudra que j'aille voir sur Wikip\u00e9dia \u00e0 quoi \u00e7a correspond pour les humains car il me semble avoir d\u00e9j\u00e0 crois\u00e9 ce nom, peut-\u00eatre dans la mythologie hindou.\n\nEt tout \u00e0 coup je me souviens que Myrddin correspond aussi \u00e0 Merlin. Tout cela est incroyable. Si ce n'\u00e9tait la perte de mon ami je rirais de bon c\u0153ur.\n\nA quoi tout cela m\u00e8ne t'il me demandais je\n\n\u2014 Nous travaillons tous de concert pour la conscience et le but me dit Myrddin sans que je ne vois bouger sa bouche \u00e0 un seul moment. ", "image": "", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-3.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-3.html", "title": "notule 3", "date_published": "2022-04-20T19:30:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:30:13Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

On glose. On interpr\u00e8te. Surtout sur la forme sans vraiment s\u2019attarder sur le fond.<\/p>\n

Cette notion de vide et de plein n\u2019est pas \u00e9vidente \u00e0 saisir pour des personnes qui ont besoin d\u2019amasser quantit\u00e9s d\u2019objets, de concepts, pour se sentir en s\u00e9curit\u00e9.<\/p>\n

Cr\u00e9er le vide c\u2019est travailler sur sa peur.<\/p>\n

Une fois cette notion acquise il n\u2019y a plus de s\u00e9paration.<\/p>\n

On peut m\u00eame remplir totalement l\u2019espace d\u2019un tableau et provoquer exactement la m\u00eame \u00e9motion qu\u2019une peinture chinoise. On peut y percevoir la m\u00eame l\u00e9g\u00e8ret\u00e9, la m\u00eame libert\u00e9.<\/p>\n

Ici j\u2019aimerais mettre en relation la peinture de madubhani et l\u2019art brut<\/p>\n

Je d\u00e9c\u00e8le dans ces \u0153uvres un lien de parent\u00e9.<\/p>\n

Par quoi ces peintres sont ils anim\u00e9s ? Est-ce la peur ? La volont\u00e9 de perp\u00e9trer au point pr\u00eat une tradition ? Une forme in\u00e9dite de folie ?<\/p>\n

Qu\u2019importe au final<\/p>\n

C\u2019est le m\u00eame myst\u00e8re que l\u2019on peut percevoir et ce myst\u00e8re nous touche, me touche.<\/p>\n

Aller jusqu\u2019au bout d\u2019une possibilit\u00e9 de remplissage de l\u2019espace et voir soudain le plein s\u2019inverser en vide\u2026<\/p>", "content_text": "On glose. On interpr\u00e8te. Surtout sur la forme sans vraiment s\u2019attarder sur le fond. Cette notion de vide et de plein n\u2019est pas \u00e9vidente \u00e0 saisir pour des personnes qui ont besoin d\u2019amasser quantit\u00e9s d\u2019objets, de concepts, pour se sentir en s\u00e9curit\u00e9. Cr\u00e9er le vide c\u2019est travailler sur sa peur. Une fois cette notion acquise il n\u2019y a plus de s\u00e9paration. On peut m\u00eame remplir totalement l\u2019espace d\u2019un tableau et provoquer exactement la m\u00eame \u00e9motion qu\u2019une peinture chinoise. On peut y percevoir la m\u00eame l\u00e9g\u00e8ret\u00e9, la m\u00eame libert\u00e9. Ici j\u2019aimerais mettre en relation la peinture de madubhani et l\u2019art brut Je d\u00e9c\u00e8le dans ces \u0153uvres un lien de parent\u00e9. Par quoi ces peintres sont ils anim\u00e9s ? Est-ce la peur ? La volont\u00e9 de perp\u00e9trer au point pr\u00eat une tradition ? Une forme in\u00e9dite de folie ? Qu\u2019importe au final C\u2019est le m\u00eame myst\u00e8re que l\u2019on peut percevoir et ce myst\u00e8re nous touche, me touche. Aller jusqu\u2019au bout d\u2019une possibilit\u00e9 de remplissage de l\u2019espace et voir soudain le plein s\u2019inverser en vide\u2026", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_5553.jpg?1748065198", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-2.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/notule-2.html", "title": "notule 2", "date_published": "2022-04-19T19:25:00Z", "date_modified": "2024-12-06T20:25:44Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Mes cours s\u2019arr\u00eatent demain. Les vacances.. raison de plus pour mettre les bouch\u00e9es doubles.<\/p>\n

En plein travail \u00e0 l\u2019atelier
\nMon programme est de revenir sous chaque soleil dessiner et peindre ce qui peut remonter dans mon souvenir.<\/p>\n

Le premier soleil, l\u2019\u00e2ge d\u2019or, hyperbor\u00e9e il y a de \u00e7a quelques centaines de milliers d\u2019ann\u00e9es. Une paille \u00e0 c\u00f4t\u00e9 des 4 milliards d\u2019ann\u00e9es d\u2019existence de la Terre soi disant.<\/p>\n

Une petite esquisse, puis un encrage au feutre et la recherche des couleurs \u2026<\/p>", "content_text": "Mes cours s\u2019arr\u00eatent demain. Les vacances.. raison de plus pour mettre les bouch\u00e9es doubles. En plein travail \u00e0 l\u2019atelier Mon programme est de revenir sous chaque soleil dessiner et peindre ce qui peut remonter dans mon souvenir. Le premier soleil, l\u2019\u00e2ge d\u2019or, hyperbor\u00e9e il y a de \u00e7a quelques centaines de milliers d\u2019ann\u00e9es. Une paille \u00e0 c\u00f4t\u00e9 des 4 milliards d\u2019ann\u00e9es d\u2019existence de la Terre soi disant. Une petite esquisse, puis un encrage au feutre et la recherche des couleurs \u2026", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_5540.jpg?1748065117", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/Notule-1.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/Notule-1.html", "title": "Notule 1", "date_published": "2022-04-19T19:22:00Z", "date_modified": "2025-04-30T14:35:29Z", "author": {"name": "Auteur"}, "content_html": "<\/span>

\n
\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Notule comme Nautilus le vaisseau submersible du Capitaine N\u00e9mo, h\u00e9ros de l\u2019enfance.<\/p>\n

La notule c\u2019est une id\u00e9e qui passe comme une anguille \u00e9lectrique et qui tr\u00e8s vite disparait dans les abysses.<\/p>\n

Pourquoi pas note tout simplement ?<\/p>\n

A cause de canule aussi ( allez donc voir sur Google)<\/p>\n

Non mais notule c\u2019est bien \u00e7a fait aussi penser \u00e0 rotule<\/p>\n

\u00e0 une articulation, \u00e0 des assemblages cartilagineux qui eux m\u00eames<\/p>\n

\u00e9voquent Carthage, et quelques guerres Puniques<\/p>\n

Punique comme pugnace et toute la sainte clique<\/p>\n

des mots en nique.<\/p>\n

Belle panique !<\/p>\n

Donc une nouvelle cat\u00e9gorie qui n\u2019est toujours que le prolongement de quelque chose d\u2019autre<\/p>\n

un raffinement comme on fabrique des scoubidous \u00e0 partir de r\u00e9sidu de p\u00e9trole<\/p>\n

Le fameux pet de Troll.<\/p>\n

qui d\u2019ailleurs vient \u00e0 manquer<\/p>\n

depuis qu\u2019on ne croit plus aux Trolls.<\/p>\n

Comment \u00e7a marche ?<\/p>\n

et bien je crois que je vais num\u00e9roter.<\/p>\n

Notule 1 Notule 2 et comme \u00e7a comme Opalka jusqu\u2019\u00e0 la fin<\/p>\n

\u00e7a me d\u00e9tend d\u2019\u00e9num\u00e9rer.<\/p>", "content_text": "Notule comme Nautilus le vaisseau submersible du Capitaine N\u00e9mo, h\u00e9ros de l\u2019enfance. La notule c\u2019est une id\u00e9e qui passe comme une anguille \u00e9lectrique et qui tr\u00e8s vite disparait dans les abysses. Pourquoi pas note tout simplement ? A cause de canule aussi ( allez donc voir sur Google) Non mais notule c\u2019est bien \u00e7a fait aussi penser \u00e0 rotule \u00e0 une articulation, \u00e0 des assemblages cartilagineux qui eux m\u00eames \u00e9voquent Carthage, et quelques guerres Puniques Punique comme pugnace et toute la sainte clique des mots en nique. Belle panique ! Donc une nouvelle cat\u00e9gorie qui n\u2019est toujours que le prolongement de quelque chose d\u2019autre un raffinement comme on fabrique des scoubidous \u00e0 partir de r\u00e9sidu de p\u00e9trole Le fameux pet de Troll. qui d\u2019ailleurs vient \u00e0 manquer depuis qu\u2019on ne croit plus aux Trolls. Comment \u00e7a marche ? et bien je crois que je vais num\u00e9roter. Notule 1 Notule 2 et comme \u00e7a comme Opalka jusqu\u2019\u00e0 la fin \u00e7a me d\u00e9tend d\u2019\u00e9num\u00e9rer.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/roman-opalka-02.jpg?1748065081", "tags": ["peintres"] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/souvenirs-ecran.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/souvenirs-ecran.html", "title": "Souvenirs \u00e9cran.", "date_published": "2022-04-17T01:26:35Z", "date_modified": "2025-09-18T16:14:35Z", "author": {"name": "Auteur"}, "content_html": "

<\/span>https:\/\/youtu.be\/hLkddqouuCI<\/span><\/a><\/p>\n

—Le temps existe et en m\u00eame temps il n’existe pas. C’est ce que me confie Maria lorsque je lui parle de mes r\u00eaves r\u00e9currents. En g\u00e9n\u00e9ral je n’en parle jamais, mais cette fois je ne sais pourquoi, je trouvai opportun d’associer le r\u00eave \u00e0 la notion de temps, \u00e0 la m\u00e9moire.<\/p>\n

Ce qui est \u00e9trange c’est la fa\u00e7on dont je r\u00e9p\u00e8te le m\u00eame r\u00e9cit, la m\u00eame histoire toujours en \u00e9prouvant les m\u00eames sensations.<\/p>\n

Si le temps n’existe pas comment se fait-il que je puisse me souvenir de quoique ce soit, et surtout de ces r\u00eaves ?<\/p>\n

— C’est parce que tu es dans une simulation, me dit Maria. Exactement comme un personnage dans un jeu vid\u00e9o. Tout est d\u00e9j\u00e0 programm\u00e9 \u00e0 l’avance, tous tes comportements, tous tes choix, d\u00e9clenchent une version particuli\u00e8re du jeu. Et, pour r\u00e9sumer, c’est toi \u00e0 l’origine qui a programm\u00e9 toutes ces versions dans un but pr\u00e9cis.<\/p>\n

—Donc c’est une histoire achev\u00e9e d’avance ? Nous serions prisonniers d’un destin que nous aurions con\u00e7u nous-m\u00eames ?<\/p>\n

— Oui et non. c’est plus compliqu\u00e9 que \u00e7a. Car toutes ces histoires se d\u00e9roulent dans un temps imparti, un temps achev\u00e9. Or on peut toujours intervenir pour modifier ces histoires si je puis dire dans l’instant pr\u00e9sent.<\/p>\n

— Mais si tu dis que toutes les versions du jeu sont d\u00e9j\u00e0 pr\u00e9vues, le fait de modifier quoique ce soit dans l’instant pr\u00e9sent n’est-il pas lui aussi un acte pr\u00e9m\u00e9dit\u00e9.<\/p>\n

— Ce qu’il faut que tu comprennes c’est que l’instant pr\u00e9sent contient tous les possibles mais aussi l’impossible. Le temps lin\u00e9aire tel que tu le con\u00e7ois est un \u00e9l\u00e9ment parmi d’autres de l’instant pr\u00e9sent dans une dimension particuli\u00e8re, dans une fr\u00e9quence particuli\u00e8re.<\/p>\n

De plus \u00e0 chaque fois que ton \u00e2me d\u00e9cide de se r\u00e9incarner sur Terre, dans cette fr\u00e9quence que l’on peut consid\u00e9rer comme une des plus basses de cet univers , une dimension o\u00f9 la densit\u00e9 est tr\u00e8s lourde, tu dois traverser le voile de l’oubli.<\/p>\n

Mais aujourd’hui les choses sont en train de changer. La plan\u00e8te change de taux vibratoire peu \u00e0 peu et tout ses habitants \u00e9galement par cons\u00e9quent.<\/p>\n

Il faut que tu comprennes que la Terre est un merveilleux champs d’exp\u00e9riences pour de nombreuses \u00e2mes, de nombreuses entit\u00e9s provenant de mondes tr\u00e8s diff\u00e9rents.<\/p>\n

C’est pratiquement l’un des seuls endroits dans tout l’univers o\u00f9 la dualit\u00e9 existe, o\u00f9 la mati\u00e8re qui est une fr\u00e9quence particuli\u00e8re de l’esprit peut proposer des exp\u00e9riences qu’on ne trouve pratiquement nulle part ailleurs avec une telle intensit\u00e9.<\/p>\n

— Tu veux dire que dans tout l’univers il n’y a pas de dualit\u00e9 \u00e0 part ici. Mais alors comment est-il possible qu’il y ait ces entit\u00e9s involutives, ces fameux reptiliens ?<\/p>\n

— C’est une affaire de fr\u00e9quence me r\u00e9p\u00e8te Maria encore une fois, tu te souviendras de tout cela lorsque le temps sera venu.<\/p>\n

Quant \u00e0 ces r\u00eaves dont tu me parles, ils sont comme la plupart de tes souvenirs importants, des souvenirs \u00e9cran.<\/p>\n

Selon ta compr\u00e9hension logique, rationnelle du monde tu as modifi\u00e9 les \u00e9v\u00e9nements qui te sont arriv\u00e9s, si exceptionnels soient ils, en quelque chose qui correspond \u00e0 ton degr\u00e9 de compr\u00e9hension du moment.<\/p>\n

Par exemple ce cauchemar o\u00f9 tu vois cette b\u00eate du G\u00e9vaudan p\u00e9n\u00e9trer dans ta chambre lorsque tu es enfant, elle est certainement tout \u00e0 fait autre chose que ce monstre dont tu ne cesses de vouloir te souvenir.<\/p>\n

Certaines entit\u00e9s -notamment ceux que l’on appelle les gris- sont tr\u00e8s fortes pour t’aider \u00e0 modifier ce genre d’exp\u00e9rience afin que tu aies l’impression d’avoir r\u00eav\u00e9 des choses « acceptables » si je peux dire. M\u00eame si cela te parait incroyable, p\u00e9nible, fantastique, ces souvenirs de remplacement sont cr\u00e9es \u00e0 partir d’un mat\u00e9riel imaginaire familier. Mais ce qu’ils recouvrent est encore plus fantastique, pour un terrien, pour une \u00e2me incarn\u00e9e dans ce monde o\u00f9 la raison et la logique ne le comprendraient pas.<\/p>\n

— Tout \u00e7a me donne le tournis Maria. Je ne comprends pas pourquoi on doit oublier pour se souvenir ensuite. Pourquoi ne conserve t’on pas le souvenir de l’\u00e2me que nous sommes lorsque nous arrivons sur Terre ?<\/p>\n

— Pour un meilleur confort utilisateur <\/em>plaisanta Maria. Puis elle enchaina jugeant que nous en avions termin\u00e9 pour aujourd’hui. Il faut que je te quitte car on me demande ailleurs.<\/p>\n

— Tr\u00e8s bien Maria, merci pour cette conversation et \u00e0 bient\u00f4t<\/p>\n

— A bient\u00f4t oui je ne suis jamais loin, tu n’es pas seul souviens toi toujours de cela.<\/p>\n

— Oui je m’en souviens de plus en plus d\u00e9sormais.<\/p>\n


\n

Paris 1978.<\/p>\n

C’est la fin d’une belle journ\u00e9e d’automne, il fait encore chaud \u00e0 18h lorsque je sonne \u00e0 l’interphone du 3 rue Quincampoix. La lourde porte d’entr\u00e9e s’ouvre et je gravis les escaliers pour rejoindre l’avant dernier \u00e9tage.<\/p>\n

Il me faut encore sonner et attendre.<\/p>\n

Quelques secondes plus tard je peux entendre le m\u00e9canisme des 6 verrous d’une premi\u00e8re porte qui s’entrouvre, des pas feutr\u00e9s qui s’avancent vers celle derri\u00e8re laquelle je me tiens. Nouveau bruit de serrures et j’aper\u00e7ois la t\u00eate hirsute de Richard.<\/p>\n

— Ah c’est toi, entre vite et c’est tout juste s’il ne me tire pas par la manche pour me faire p\u00e9n\u00e9trer dans l’appartement. Il faut que je te parle, la folle d’\u00e2 cot\u00e9 m’a encore fait un de ces ramdam...<\/p>\n

C’est toujours comme \u00e7a avec Richard. Cette urgence perp\u00e9tuelle, comme si la fin du monde pouvait \u00e9clater \u00e0 chaque instant.<\/p>\n

En attendant rien ne change. La premi\u00e8re pi\u00e8ce dans laquelle je p\u00e9n\u00e8tre est toujours aussi encombr\u00e9e de livres et de poussi\u00e8res \u00e9parpill\u00e9s sur tous les meubles. Il y a juste un petit sentier praticable entre un alignement de commodes et le lit pour se rendre dans la pi\u00e8ce d’\u00e0 cot\u00e9 qui fait office \u00e0 la fois de salle \u00e0 manger et de bureau.<\/p>\n

— Assis toi je vais te raconter. Puis il d\u00e9bouche la bouteille de Payse et nous sert un verre comme s’il jubilait de m\u00e9nager malgr\u00e9 tout un peu de suspens.<\/p>\n

— Elle veut m’assassiner, voil\u00e0 ce qu’elle veut cette vieille salope.<\/p>\n

Je suis rassur\u00e9. Ce n’est que \u00e7a. Je m’attendais avec un peu d’espoir \u00e0 un changement. Mais non. C’est toujours la m\u00eame sempiternelle rengaine. Richard et la voisine de pallier. Une ancienne pute doubl\u00e9e d’une ex poissonni\u00e8re, forc\u00e9ment.<\/p>\n

J’ai h\u00e9sit\u00e9 \u00e0 pr\u00e9senter Richard \u00e0 ma petite amie de l’\u00e9poque. Au d\u00e9but je trouvais cela parfaitement incongru. J’avais rencontr\u00e9 le vieux \u00e0 un angle de rue o\u00f9 je chantais un soir de l’\u00e9t\u00e9 avec ma guitare.<\/p>\n

Il m’avait repris sur une strophe de la Ballade des Places de Paris. Et du coup on avait sympathis\u00e9, il m’avait invit\u00e9 chez lui \u00e0 deux pas et on avait vid\u00e9 quelques bouteilles de ce vin un peu rude, de la Payse.<\/p>\n

Ce soir l\u00e0 je m’en souviens elle devait nous rejoindre apr\u00e8s ses cours car elle \u00e9tudiait sa m\u00e9decine.<\/p>\n

Je me demandais ce qu’elle penserait de Richard et ce que lui penserait d’elle. Suspens. Car vraiment c’\u00e9tait deux caract\u00e8res tout \u00e0 fait oppos\u00e9s du moins je me l’imaginais.<\/p>\n

Elle tr\u00e8s pragmatique, rationnelle, un jugement rapide et sur. Lui un vieux fou, probablement homosexuel, tr\u00e8s cultiv\u00e9 mais croyant aux f\u00e9es, au diable, et surtout sans la moindre illusion sur les \u00eatres humains en g\u00e9n\u00e9ral.<\/p>\n

J’\u00e9tais curieux de voir ce que cette rencontre allait produire. Mais en fin de compte tout se passa extr\u00eamement bien.<\/p>\n

Il savait vraiment y faire avec les femmes. En un clin d’\u0153il je dirais il l’avait jaug\u00e9e et la traitait comme une princesse avec des compliments \u00e0 rallonge. Personnellement j’aurais pens\u00e9 que c’\u00e9tait un peu trop, exag\u00e9r\u00e9 et qu’\u00e0 un moment elle allait se rebeller un peu, protester face \u00e0 ce d\u00e9versement d’affabilit\u00e9s.<\/p>\n

Et bien non, pas du tout. Je d\u00e9couvrais une autre femme. Ainsi donc il \u00e9tait possible de l’hypnotiser ainsi juste en flattant sa vanit\u00e9. je n’en revenais pas.<\/p>\n

C’est \u00e0 ce moment pr\u00e9cis o\u00f9 je me faisais cette r\u00e9flexion que l’\u00e9v\u00e9nement se produisit.<\/p>\n

tout se d\u00e9roula tr\u00e8s vite. Je dirais \u00e0 peine en un clin d’oeil.<\/p>\n

D’abord la sensation incroyable que ma t\u00eate se r\u00e9duisait de moiti\u00e9 comme un citron devenu sec.<\/p>\n

Ensuite le hurlement de ma petite amie qui visiblement voyait ce qui \u00e9tait en train de m’arriver horrifi\u00e9e.<\/p>\n

Troisi\u00e8mement Richard qui buvait son verre tranquillement avec un l\u00e9ger sourire en me regardant.<\/p>\n

Cela dura \u00e0 peine un quart de seconde mais je m’en souviens parfaitement encore aujourd’hui.<\/p>\n

Et aussit\u00f4t la sensation d’\u00eatre un extra terrestre s’agrippa \u00e0 moi depuis cet instant de l’automne 1978.<\/p>\n

Bien sur je balayais tout \u00e7a d’un revers de manche, en me disant que nous avions tous un peu trop bu.<\/p>\n

Quelques temps plus tard ma petite amie trouva un autre copain ce qui me parait aujourd’hui assez logique. On ne ressort pas tout \u00e0 fait indemne, surtout lorsqu’on se targue d’avoir la t\u00eate sur les \u00e9paules d’une exp\u00e9rience insolite comme celle-ci.<\/p>", "content_text": "https:\/\/youtu.be\/hLkddqouuCI\n\n\u2014Le temps existe et en m\u00eame temps il n'existe pas. C'est ce que me confie Maria lorsque je lui parle de mes r\u00eaves r\u00e9currents. En g\u00e9n\u00e9ral je n'en parle jamais, mais cette fois je ne sais pourquoi, je trouvai opportun d'associer le r\u00eave \u00e0 la notion de temps, \u00e0 la m\u00e9moire.\n\nCe qui est \u00e9trange c'est la fa\u00e7on dont je r\u00e9p\u00e8te le m\u00eame r\u00e9cit, la m\u00eame histoire toujours en \u00e9prouvant les m\u00eames sensations.\n\nSi le temps n'existe pas comment se fait-il que je puisse me souvenir de quoique ce soit, et surtout de ces r\u00eaves ?\n\n\u2014 C'est parce que tu es dans une simulation, me dit Maria. Exactement comme un personnage dans un jeu vid\u00e9o. Tout est d\u00e9j\u00e0 programm\u00e9 \u00e0 l'avance, tous tes comportements, tous tes choix, d\u00e9clenchent une version particuli\u00e8re du jeu. Et, pour r\u00e9sumer, c'est toi \u00e0 l'origine qui a programm\u00e9 toutes ces versions dans un but pr\u00e9cis. \n\n\u2014Donc c'est une histoire achev\u00e9e d'avance ? Nous serions prisonniers d'un destin que nous aurions con\u00e7u nous-m\u00eames ?\n\n\u2014 Oui et non. c'est plus compliqu\u00e9 que \u00e7a. Car toutes ces histoires se d\u00e9roulent dans un temps imparti, un temps achev\u00e9. Or on peut toujours intervenir pour modifier ces histoires si je puis dire dans l'instant pr\u00e9sent.\n\n\u2014 Mais si tu dis que toutes les versions du jeu sont d\u00e9j\u00e0 pr\u00e9vues, le fait de modifier quoique ce soit dans l'instant pr\u00e9sent n'est-il pas lui aussi un acte pr\u00e9m\u00e9dit\u00e9.\n\n\u2014 Ce qu'il faut que tu comprennes c'est que l'instant pr\u00e9sent contient tous les possibles mais aussi l'impossible. Le temps lin\u00e9aire tel que tu le con\u00e7ois est un \u00e9l\u00e9ment parmi d'autres de l'instant pr\u00e9sent dans une dimension particuli\u00e8re, dans une fr\u00e9quence particuli\u00e8re.\n\nDe plus \u00e0 chaque fois que ton \u00e2me d\u00e9cide de se r\u00e9incarner sur Terre, dans cette fr\u00e9quence que l'on peut consid\u00e9rer comme une des plus basses de cet univers , une dimension o\u00f9 la densit\u00e9 est tr\u00e8s lourde, tu dois traverser le voile de l'oubli.\n\nMais aujourd'hui les choses sont en train de changer. La plan\u00e8te change de taux vibratoire peu \u00e0 peu et tout ses habitants \u00e9galement par cons\u00e9quent.\n\nIl faut que tu comprennes que la Terre est un merveilleux champs d'exp\u00e9riences pour de nombreuses \u00e2mes, de nombreuses entit\u00e9s provenant de mondes tr\u00e8s diff\u00e9rents. \n\nC'est pratiquement l'un des seuls endroits dans tout l'univers o\u00f9 la dualit\u00e9 existe, o\u00f9 la mati\u00e8re qui est une fr\u00e9quence particuli\u00e8re de l'esprit peut proposer des exp\u00e9riences qu'on ne trouve pratiquement nulle part ailleurs avec une telle intensit\u00e9.\n\n\u2014 Tu veux dire que dans tout l'univers il n'y a pas de dualit\u00e9 \u00e0 part ici. Mais alors comment est-il possible qu'il y ait ces entit\u00e9s involutives, ces fameux reptiliens ?\n\n\u2014 C'est une affaire de fr\u00e9quence me r\u00e9p\u00e8te Maria encore une fois, tu te souviendras de tout cela lorsque le temps sera venu.\n\nQuant \u00e0 ces r\u00eaves dont tu me parles, ils sont comme la plupart de tes souvenirs importants, des souvenirs \u00e9cran.\n\nSelon ta compr\u00e9hension logique, rationnelle du monde tu as modifi\u00e9 les \u00e9v\u00e9nements qui te sont arriv\u00e9s, si exceptionnels soient ils, en quelque chose qui correspond \u00e0 ton degr\u00e9 de compr\u00e9hension du moment.\n\nPar exemple ce cauchemar o\u00f9 tu vois cette b\u00eate du G\u00e9vaudan p\u00e9n\u00e9trer dans ta chambre lorsque tu es enfant, elle est certainement tout \u00e0 fait autre chose que ce monstre dont tu ne cesses de vouloir te souvenir. \n\nCertaines entit\u00e9s -notamment ceux que l'on appelle les gris- sont tr\u00e8s fortes pour t'aider \u00e0 modifier ce genre d'exp\u00e9rience afin que tu aies l'impression d'avoir r\u00eav\u00e9 des choses \"acceptables\" si je peux dire. M\u00eame si cela te parait incroyable, p\u00e9nible, fantastique, ces souvenirs de remplacement sont cr\u00e9es \u00e0 partir d'un mat\u00e9riel imaginaire familier. Mais ce qu'ils recouvrent est encore plus fantastique, pour un terrien, pour une \u00e2me incarn\u00e9e dans ce monde o\u00f9 la raison et la logique ne le comprendraient pas.\n\n\u2014 Tout \u00e7a me donne le tournis Maria. Je ne comprends pas pourquoi on doit oublier pour se souvenir ensuite. Pourquoi ne conserve t'on pas le souvenir de l'\u00e2me que nous sommes lorsque nous arrivons sur Terre ? \n\n\u2014 Pour un meilleur confort utilisateur plaisanta Maria. Puis elle enchaina jugeant que nous en avions termin\u00e9 pour aujourd'hui. Il faut que je te quitte car on me demande ailleurs.\n\n\u2014 Tr\u00e8s bien Maria, merci pour cette conversation et \u00e0 bient\u00f4t\n\n\u2014 A bient\u00f4t oui je ne suis jamais loin, tu n'es pas seul souviens toi toujours de cela.\n\n\u2014 Oui je m'en souviens de plus en plus d\u00e9sormais.\n\nParis 1978.\n\nC'est la fin d'une belle journ\u00e9e d'automne, il fait encore chaud \u00e0 18h lorsque je sonne \u00e0 l'interphone du 3 rue Quincampoix. La lourde porte d'entr\u00e9e s'ouvre et je gravis les escaliers pour rejoindre l'avant dernier \u00e9tage.\n\nIl me faut encore sonner et attendre. \n\nQuelques secondes plus tard je peux entendre le m\u00e9canisme des 6 verrous d'une premi\u00e8re porte qui s'entrouvre, des pas feutr\u00e9s qui s'avancent vers celle derri\u00e8re laquelle je me tiens. Nouveau bruit de serrures et j'aper\u00e7ois la t\u00eate hirsute de Richard. \n\n\u2014 Ah c'est toi, entre vite et c'est tout juste s'il ne me tire pas par la manche pour me faire p\u00e9n\u00e9trer dans l'appartement. Il faut que je te parle, la folle d'\u00e2 cot\u00e9 m'a encore fait un de ces ramdam... \n\nC'est toujours comme \u00e7a avec Richard. Cette urgence perp\u00e9tuelle, comme si la fin du monde pouvait \u00e9clater \u00e0 chaque instant.\n\nEn attendant rien ne change. La premi\u00e8re pi\u00e8ce dans laquelle je p\u00e9n\u00e8tre est toujours aussi encombr\u00e9e de livres et de poussi\u00e8res \u00e9parpill\u00e9s sur tous les meubles. Il y a juste un petit sentier praticable entre un alignement de commodes et le lit pour se rendre dans la pi\u00e8ce d'\u00e0 cot\u00e9 qui fait office \u00e0 la fois de salle \u00e0 manger et de bureau. \n\n\u2014 Assis toi je vais te raconter. Puis il d\u00e9bouche la bouteille de Payse et nous sert un verre comme s'il jubilait de m\u00e9nager malgr\u00e9 tout un peu de suspens.\n\n\u2014 Elle veut m'assassiner, voil\u00e0 ce qu'elle veut cette vieille salope.\n\nJe suis rassur\u00e9. Ce n'est que \u00e7a. Je m'attendais avec un peu d'espoir \u00e0 un changement. Mais non. C'est toujours la m\u00eame sempiternelle rengaine. Richard et la voisine de pallier. Une ancienne pute doubl\u00e9e d'une ex poissonni\u00e8re, forc\u00e9ment.\n\nJ'ai h\u00e9sit\u00e9 \u00e0 pr\u00e9senter Richard \u00e0 ma petite amie de l'\u00e9poque. Au d\u00e9but je trouvais cela parfaitement incongru. J'avais rencontr\u00e9 le vieux \u00e0 un angle de rue o\u00f9 je chantais un soir de l'\u00e9t\u00e9 avec ma guitare.\n\nIl m'avait repris sur une strophe de la Ballade des Places de Paris. Et du coup on avait sympathis\u00e9, il m'avait invit\u00e9 chez lui \u00e0 deux pas et on avait vid\u00e9 quelques bouteilles de ce vin un peu rude, de la Payse.\n\nCe soir l\u00e0 je m'en souviens elle devait nous rejoindre apr\u00e8s ses cours car elle \u00e9tudiait sa m\u00e9decine.\n\nJe me demandais ce qu'elle penserait de Richard et ce que lui penserait d'elle. Suspens. Car vraiment c'\u00e9tait deux caract\u00e8res tout \u00e0 fait oppos\u00e9s du moins je me l'imaginais.\n\nElle tr\u00e8s pragmatique, rationnelle, un jugement rapide et sur. Lui un vieux fou, probablement homosexuel, tr\u00e8s cultiv\u00e9 mais croyant aux f\u00e9es, au diable, et surtout sans la moindre illusion sur les \u00eatres humains en g\u00e9n\u00e9ral.\n\nJ'\u00e9tais curieux de voir ce que cette rencontre allait produire. Mais en fin de compte tout se passa extr\u00eamement bien.\n\nIl savait vraiment y faire avec les femmes. En un clin d'\u0153il je dirais il l'avait jaug\u00e9e et la traitait comme une princesse avec des compliments \u00e0 rallonge. Personnellement j'aurais pens\u00e9 que c'\u00e9tait un peu trop, exag\u00e9r\u00e9 et qu'\u00e0 un moment elle allait se rebeller un peu, protester face \u00e0 ce d\u00e9versement d'affabilit\u00e9s.\n\nEt bien non, pas du tout. Je d\u00e9couvrais une autre femme. Ainsi donc il \u00e9tait possible de l'hypnotiser ainsi juste en flattant sa vanit\u00e9. je n'en revenais pas.\n\nC'est \u00e0 ce moment pr\u00e9cis o\u00f9 je me faisais cette r\u00e9flexion que l'\u00e9v\u00e9nement se produisit.\n\ntout se d\u00e9roula tr\u00e8s vite. Je dirais \u00e0 peine en un clin d'oeil. \n\nD'abord la sensation incroyable que ma t\u00eate se r\u00e9duisait de moiti\u00e9 comme un citron devenu sec.\n\nEnsuite le hurlement de ma petite amie qui visiblement voyait ce qui \u00e9tait en train de m'arriver horrifi\u00e9e.\n\nTroisi\u00e8mement Richard qui buvait son verre tranquillement avec un l\u00e9ger sourire en me regardant.\n\nCela dura \u00e0 peine un quart de seconde mais je m'en souviens parfaitement encore aujourd'hui.\n\nEt aussit\u00f4t la sensation d'\u00eatre un extra terrestre s'agrippa \u00e0 moi depuis cet instant de l'automne 1978.\n\nBien sur je balayais tout \u00e7a d'un revers de manche, en me disant que nous avions tous un peu trop bu.\n\nQuelques temps plus tard ma petite amie trouva un autre copain ce qui me parait aujourd'hui assez logique. 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\"\"Juive de Tanger en costume d’apparat Eug\u00e8ne Delacroix.<\/p>\n

Il n’y a que dans la mati\u00e8re par la mati\u00e8re que l’esprit peut exp\u00e9rimenter \u00e0 la fois la limite et l’amour . C’est pourquoi l’esprit a cr\u00e9e la mati\u00e8re et non le contraire. Le fait de l’oublier est le passage oblig\u00e9.<\/p>\n

L\u00e0 aussi, dans l’examen de ce que peut offrir la mati\u00e8re, notamment le corps de l’autre, il y a beaucoup \u00e0 apprendre, et l’\u00e9garement est aussi n\u00e9cessaire que chacune des pseudos v\u00e9rit\u00e9s que l’on s’inventera pour penser qu’on est enfin parvenu \u00e0 bon port, que l’on s’est retrouv\u00e9s.<\/p>\n

Maria me laisse libre cours. Toutes les pulsions sont accueillies. La seule contrepartie que je dois accepter c’est l’absence de simulation. Elle ne m’encourage dans aucune voie afin que je traverse de mon plein gr\u00e9 mes propres illusions.<\/p>\n

Elle ne m’encourage pas pas plus qu’elle ne me tient en otage d’un plaisir que je consid\u00e9rerais comme but.<\/p>\n

Pas de g\u00e9missement, pas de cris, aucune r\u00e9vulsion de l’\u0153il dans son orbite, aucune goutte de sueur ne coule sur ses reins.<\/p>\n

Seulement de la tendresse que je cherche par tous les moyens possibles et imaginables \u00e0 d\u00e9foncer.<\/p>\n

Jusqu’\u00e0 l’\u00e9reintement.<\/p>\n

Jusqu’au l\u00e2cher prise<\/p>\n

jusqu’\u00e0 l’\u00e9veil qui nait de la certitude claire, de l’impuissance pouss\u00e9e \u00e0 son extr\u00eame et de la perception de son absurdit\u00e9.<\/p>\n

— Je vais faire du th\u00e9 me dit-elle en se levant. Je suis du regard son corps magnifique qui ondule en dansant jusqu’\u00e0 la porte de la chambre et la regarde disparaitre. Puis j’attrape une cigarette pour examiner une fois encore apr\u00e8s avoir fait l’amour, ce grand vide, cette b\u00e9ance au plus profond de moi.<\/p>\n

Malgr\u00e9 moi des images d’autres femmes surgissent spontan\u00e9ment dans ma m\u00e9moire \u00e0 cet instant o\u00f9 je subis l’assaut de ce vide.<\/p>\n

Des visages grima\u00e7ants pour la plupart qui s’associent \u00e0 une jouissance animale si je puis dire.<\/p>\n

Voil\u00e0 ma vie d’avant. Et je ne peux m’emp\u00eacher d\u00e9sormais de comprendre qu’il ne s’agit que d’une simulation. C’est ce mot qui tourne comme un aigle au dessus de mes souvenirs.<\/p>\n

La simulation qui se serait infiltr\u00e9e jusque dans l’intime tant nous sommes d\u00e9sormais prisonniers des clich\u00e9s et des mots d’ordre nous assaillant de tous cot\u00e9s.<\/p>\n

Faire l’amour est sans doute la derni\u00e8re des grandes explorations possibles aujourd’hui. Sans doute est-ce encore plus fort, plus merveilleux que d’aller sur Mars ou de d\u00e9couvrir l’Am\u00e9rique.<\/p>\n

A condition de faire l’amour vraiment. Ce dont la plupart d’entre nous ne savent rien. A part nourrir h\u00e2tivement une illusion de s’\u00eatre rapproch\u00e9 enfin d’une norme.<\/p>\n


\n

Nanterre 1987. On m’a pr\u00eat\u00e9 un appartement au haut d’une tour. Un ami iranien qui a du quitter la France pr\u00e9cipitamment en raison des \u00e9v\u00e9nements dans son pays. Je viens de me s\u00e9parer de cette fille que j’avais connue en 1978. Une relation de presque dix ann\u00e9es qui s’arr\u00eate soudain au retour d’un long voyage que je viens d’effectuer en Asie et qui je l’esp\u00e9rais secr\u00e8tement me mettrait un peu de plomb dans la cervelle.<\/p>\n

J’\u00e9tais parti l\u00e0-bas pour faire des photos de la guerre Iran-Irak, pour p\u00e9n\u00e9trer aussi en Afghanistan, revenir avec des photographies extraordinaires que les agences s’arracheront. Il n’en fut pas vraiment ainsi. Apr\u00e8s avoir franchi la fronti\u00e8re pakistanaise et m’\u00eatre retrouv\u00e9 dans les montagnes avec un groupe d’hommes aguerris, j’ai commenc\u00e9 \u00e0 ressentir les premiers effets de la maladie. Une h\u00e9patite qui me crevait alors que j’avais justement besoin de toute mon \u00e9nergie, de ma vigueur pour les suivre.<\/p>\n

Quel d\u00e9pit d’avoir \u00e0 revenir avec un autre groupe de moudjahidines , de refaire le chemin inverse, pour rien pensais-je. J’avais \u00e9prouv\u00e9 alors comme une sorte de sanction de la part du destin. Je me disais que quoique je fasse, cela se terminait toujours en eau de boudin. Je pestais contre l’univers tout entier et surtout sur moi-m\u00eame qui n’avait pas pris suffisamment de pr\u00e9cautions, qui m’autorisait \u00e0 \u00eatre malade dans de telles circonstances.<\/p>\n

Le retour en France fut d’une indicible tristesse. J’\u00e9tais irascible. Aussi je profitais de la moindre occasion pour chercher querelle \u00e0 cette compagne. A cette \u00e9poque je me sentais tellement vuln\u00e9rable que je m’imaginais toujours le pire. Notamment qu’elle puisse me tromper. Et bien sur lorsque nous faisions l’amour j’observais tout avec une acuit\u00e9 terrifiante comme si j’\u00e9tais le spectateur de nos \u00e9bats. Je surveillais le moindre signe qui puisse me donner raison sur le fait qu’elle simule afin que je jouisse vite et pouvoir dormir enfin.<\/p>\n

Pour moi c’\u00e9tait comme une sorte de trahison \u00e9videmment. Aujourd’hui je ne peux m’emp\u00eacher de voir que cette trahison dont je traquais le moindre signe chez cette fille \u00e9tait le but recherch\u00e9. Qu’en m’appuyant enfin sur la certitude d’\u00eatre trahi ou tromp\u00e9 je pourrais enfin m’en lib\u00e9rer une bonne fois pour toutes.<\/p>\n

Mais \u00e0 cette p\u00e9riode je ne poss\u00e9dais pas une telle compr\u00e9hension. Du moins mon cot\u00e9 sentimental proche de la sensiblerie me l’interdisait. Je crois que cette couche sentimentale a bon dos, elle sert souvent \u00e0 nous aveugler. Ce qui au bout du compte nous oblige \u00e0 faire semblant, \u00e0 simuler tout un tas de comportement nous-m\u00eames. Jusqu’\u00e0 ce que cela soit insoutenable.<\/p>\n

Evidemment mon amour propre en avait pris un bon coup. Aussi me retrouver dans cet appartement \u00e9tait \u00e0 la fois une sorte de b\u00e9n\u00e9diction. J’aurais pu me reconstruire tranquillement en passant l’\u00e9ponge sur les \u00e9v\u00e9nements pass\u00e9s et aller de l’avant comme on dit.<\/p>\n

Mais le ressentiment contre moi-m\u00eame fut le plus fort. Cela vient du peu d’estime que je me porte \u00e0 cette \u00e9poque et qui me vient d’une grande carence dans ce domaine d\u00e8s mon enfance. Attention, je ne me plains pas du tout de cette carence, je n’en veux \u00e0 personne. Au contraire je pense que c’est gr\u00e2ce au manque chronique d’estime pour moi que j’ai pu justement effectuer tout ce chemin.<\/p>\n

A l’\u00e9poque c’\u00e9tait l’apparition des rencontres par t\u00e9l\u00e9phone et aussi du minitel. J’avais d\u00e9got\u00e9 un job et ma vie se r\u00e9duisait vraiment \u00e0 une peau de chagrin. Boulot, m\u00e9tro, dodo. A la v\u00e9rit\u00e9 je n’avais gu\u00e8re envie d’autre chose. Je n’avais pas envie de faire des photos, pas plus que d’\u00e9crire, pas plus que de peindre.<\/p>\n

Je vivais comme un automate.<\/p>\n

Puis j’ai trouv\u00e9 dans un gratuit des annonces qui parlaient de ces rencontres par t\u00e9l\u00e9phone. J’ai essay\u00e9. J’ai rencontr\u00e9 un certain nombre de filles, de femmes ainsi dont pour la plupart je n’ai ai conserv\u00e9 que de vagues souvenirs.<\/p>\n

En fait \u00e9videmment je me sentais seul, totalement d\u00e9labr\u00e9 et comme beaucoup d’entre nous j’imaginais que l’autre quel qu’il soit pourrait me venir en aide, m\u00eame si je ne me l’avouais pas clairement.<\/p>\n

En refusant de me l’avouer, j’ai cr\u00e9e une nouvelle simulation \u00e9videmment. Je me suis rabattu sur le sexe. j’ai pens\u00e9 que le sexe allait \u00eatre la solution au probl\u00e8me. Et comme je ne fais pas les choses \u00e0 moiti\u00e9 j’ai enchain\u00e9 les rencontres et les parties de jambes en l’air comme on dit.<\/p>\n

Mais toujours et plus encore je ne pouvais me d\u00e9partir de ce que j’appelle une certaine lucidit\u00e9. je ne cessais de me tenir \u00e0 l’\u00e9cart de tous ces \u00e9bats. D’observer \u00e0 la fois ces femmes mimant le plaisir ou l’\u00e9prouvant r\u00e9ellement afin je crois de m’en d\u00e9gouter pour de bon. D’en comprendre si on veut toute l’inutilit\u00e9, la vacuit\u00e9. Car \u00e9videmment dans ce genre de rencontres on n’y va gu\u00e8re par 4 chemins, on n’a pas besoin de beaucoup de pr\u00e9liminaires si je peux dire.<\/p>\n

Parmi toutes ces rencontres une m’a intrigu\u00e9 plus que toutes les autres.<\/p>\n

C’\u00e9tait une fille jeune, d’origine marocaine. Avec de longs cheveux noirs qui lui tombaient presque sur les fesses. Avec elle ce fut diff\u00e9rent.<\/p>\n

D’abord on ne se rencontrait qu’\u00e0 l’ext\u00e9rieur, dans des caf\u00e9s, dans des parcs, et elle d\u00e9ployait tout un arsenal de postures d’attitudes de phrases interrompues, s’ouvrant sur des silences formidables qui se m\u00ealaient \u00e0 chaque fois aux lieux comme pour mieux les ancrer dans la m\u00e9moire. C’est \u00e0 dire cr\u00e9er un d\u00e9cor inoubliable dans lequel \u00e9videmment elle-m\u00eame serait inoubliable. D’ailleurs cela a bien fonctionn\u00e9 puisque je m’en souviens encore.<\/p>\n

Je pense que c’\u00e9tait une v\u00e9ritable artiste. Nous n’avons jamais fait l’amour. Mais elle su amener l’excitation \u00e0 son paroxysme de nombreuses fois rien qu’en posant sa main sur la mienne ou me fixer avec son \u0153il noir et velout\u00e9.<\/p>\n

Rien ne pouvait tenir face \u00e0 elle de tous les artifices que je connaissais alors, la d\u00e9licatesse comme les propos crus, l’\u00e9l\u00e9gance, l’esprit, les bons mots, tout \u00e7a elle s’en tapait comme de l’an quarante.<\/p>\n

Ce qu’elle voulait ? je n’en savais fichtre rien. Je ne le sus jamais. Car au bout d’un moment les coups de fil affluaient de plus en plus et je me retrouvais noy\u00e9 dans l’embarras du choix. Nous espa\u00e7\u00e2mes nos rencontres de plus en plus et pour finir elle disparut totalement de ma vie.<\/p>\n

Ce qui me fait r\u00e9fl\u00e9chir sur les rencontres que nous effectuons ainsi dans notre vie. Ces rencontres je suis persuad\u00e9 qu’elles ont toujours un sens mais qui nous \u00e9chappe la plupart du temps. Enfin qui m’\u00e9chappe en tous les cas.<\/p>\n

Parfois je me demande si ce ne sont pas des guides qui parviennent \u00e0 s’immiscer dans toutes les simulations, soit celles que nous subissons soit celles que nous inventons tout seul. C’est ainsi qu’elles viennent jusqu’\u00e0 nous, jusqu’\u00e0 notre \u00e2me v\u00e9ritable pour lui faire un petit signe et la remettre sur le chemin.<\/p>", "content_text": "Juive de Tanger en costume d'apparat Eug\u00e8ne Delacroix.\n\nIl n'y a que dans la mati\u00e8re par la mati\u00e8re que l'esprit peut exp\u00e9rimenter \u00e0 la fois la limite et l'amour . C'est pourquoi l'esprit a cr\u00e9e la mati\u00e8re et non le contraire. Le fait de l'oublier est le passage oblig\u00e9.\n\nL\u00e0 aussi, dans l'examen de ce que peut offrir la mati\u00e8re, notamment le corps de l'autre, il y a beaucoup \u00e0 apprendre, et l'\u00e9garement est aussi n\u00e9cessaire que chacune des pseudos v\u00e9rit\u00e9s que l'on s'inventera pour penser qu'on est enfin parvenu \u00e0 bon port, que l'on s'est retrouv\u00e9s.\n\nMaria me laisse libre cours. Toutes les pulsions sont accueillies. La seule contrepartie que je dois accepter c'est l'absence de simulation. Elle ne m'encourage dans aucune voie afin que je traverse de mon plein gr\u00e9 mes propres illusions. \n\nElle ne m'encourage pas pas plus qu'elle ne me tient en otage d'un plaisir que je consid\u00e9rerais comme but.\n\nPas de g\u00e9missement, pas de cris, aucune r\u00e9vulsion de l'\u0153il dans son orbite, aucune goutte de sueur ne coule sur ses reins.\n\nSeulement de la tendresse que je cherche par tous les moyens possibles et imaginables \u00e0 d\u00e9foncer.\n\nJusqu'\u00e0 l'\u00e9reintement.\n\nJusqu'au l\u00e2cher prise \n\njusqu'\u00e0 l'\u00e9veil qui nait de la certitude claire, de l'impuissance pouss\u00e9e \u00e0 son extr\u00eame et de la perception de son absurdit\u00e9.\n\n\u2014 Je vais faire du th\u00e9 me dit-elle en se levant. Je suis du regard son corps magnifique qui ondule en dansant jusqu'\u00e0 la porte de la chambre et la regarde disparaitre. Puis j'attrape une cigarette pour examiner une fois encore apr\u00e8s avoir fait l'amour, ce grand vide, cette b\u00e9ance au plus profond de moi. \n\nMalgr\u00e9 moi des images d'autres femmes surgissent spontan\u00e9ment dans ma m\u00e9moire \u00e0 cet instant o\u00f9 je subis l'assaut de ce vide.\n\nDes visages grima\u00e7ants pour la plupart qui s'associent \u00e0 une jouissance animale si je puis dire. \n\nVoil\u00e0 ma vie d'avant. Et je ne peux m'emp\u00eacher d\u00e9sormais de comprendre qu'il ne s'agit que d'une simulation. C'est ce mot qui tourne comme un aigle au dessus de mes souvenirs.\n\nLa simulation qui se serait infiltr\u00e9e jusque dans l'intime tant nous sommes d\u00e9sormais prisonniers des clich\u00e9s et des mots d'ordre nous assaillant de tous cot\u00e9s.\n\nFaire l'amour est sans doute la derni\u00e8re des grandes explorations possibles aujourd'hui. Sans doute est-ce encore plus fort, plus merveilleux que d'aller sur Mars ou de d\u00e9couvrir l'Am\u00e9rique. \n\nA condition de faire l'amour vraiment. Ce dont la plupart d'entre nous ne savent rien. A part nourrir h\u00e2tivement une illusion de s'\u00eatre rapproch\u00e9 enfin d'une norme.\n\nNanterre 1987. On m'a pr\u00eat\u00e9 un appartement au haut d'une tour. Un ami iranien qui a du quitter la France pr\u00e9cipitamment en raison des \u00e9v\u00e9nements dans son pays. Je viens de me s\u00e9parer de cette fille que j'avais connue en 1978. Une relation de presque dix ann\u00e9es qui s'arr\u00eate soudain au retour d'un long voyage que je viens d'effectuer en Asie et qui je l'esp\u00e9rais secr\u00e8tement me mettrait un peu de plomb dans la cervelle.\n\nJ'\u00e9tais parti l\u00e0-bas pour faire des photos de la guerre Iran-Irak, pour p\u00e9n\u00e9trer aussi en Afghanistan, revenir avec des photographies extraordinaires que les agences s'arracheront. Il n'en fut pas vraiment ainsi. Apr\u00e8s avoir franchi la fronti\u00e8re pakistanaise et m'\u00eatre retrouv\u00e9 dans les montagnes avec un groupe d'hommes aguerris, j'ai commenc\u00e9 \u00e0 ressentir les premiers effets de la maladie. Une h\u00e9patite qui me crevait alors que j'avais justement besoin de toute mon \u00e9nergie, de ma vigueur pour les suivre.\n\nQuel d\u00e9pit d'avoir \u00e0 revenir avec un autre groupe de moudjahidines , de refaire le chemin inverse, pour rien pensais-je. J'avais \u00e9prouv\u00e9 alors comme une sorte de sanction de la part du destin. Je me disais que quoique je fasse, cela se terminait toujours en eau de boudin. Je pestais contre l'univers tout entier et surtout sur moi-m\u00eame qui n'avait pas pris suffisamment de pr\u00e9cautions, qui m'autorisait \u00e0 \u00eatre malade dans de telles circonstances.\n\nLe retour en France fut d'une indicible tristesse. J'\u00e9tais irascible. Aussi je profitais de la moindre occasion pour chercher querelle \u00e0 cette compagne. A cette \u00e9poque je me sentais tellement vuln\u00e9rable que je m'imaginais toujours le pire. Notamment qu'elle puisse me tromper. Et bien sur lorsque nous faisions l'amour j'observais tout avec une acuit\u00e9 terrifiante comme si j'\u00e9tais le spectateur de nos \u00e9bats. Je surveillais le moindre signe qui puisse me donner raison sur le fait qu'elle simule afin que je jouisse vite et pouvoir dormir enfin.\n\nPour moi c'\u00e9tait comme une sorte de trahison \u00e9videmment. Aujourd'hui je ne peux m'emp\u00eacher de voir que cette trahison dont je traquais le moindre signe chez cette fille \u00e9tait le but recherch\u00e9. Qu'en m'appuyant enfin sur la certitude d'\u00eatre trahi ou tromp\u00e9 je pourrais enfin m'en lib\u00e9rer une bonne fois pour toutes.\n\nMais \u00e0 cette p\u00e9riode je ne poss\u00e9dais pas une telle compr\u00e9hension. Du moins mon cot\u00e9 sentimental proche de la sensiblerie me l'interdisait. Je crois que cette couche sentimentale a bon dos, elle sert souvent \u00e0 nous aveugler. Ce qui au bout du compte nous oblige \u00e0 faire semblant, \u00e0 simuler tout un tas de comportement nous-m\u00eames. Jusqu'\u00e0 ce que cela soit insoutenable. \n\nEvidemment mon amour propre en avait pris un bon coup. Aussi me retrouver dans cet appartement \u00e9tait \u00e0 la fois une sorte de b\u00e9n\u00e9diction. J'aurais pu me reconstruire tranquillement en passant l'\u00e9ponge sur les \u00e9v\u00e9nements pass\u00e9s et aller de l'avant comme on dit.\n\nMais le ressentiment contre moi-m\u00eame fut le plus fort. Cela vient du peu d'estime que je me porte \u00e0 cette \u00e9poque et qui me vient d'une grande carence dans ce domaine d\u00e8s mon enfance. Attention, je ne me plains pas du tout de cette carence, je n'en veux \u00e0 personne. Au contraire je pense que c'est gr\u00e2ce au manque chronique d'estime pour moi que j'ai pu justement effectuer tout ce chemin.\n\nA l'\u00e9poque c'\u00e9tait l'apparition des rencontres par t\u00e9l\u00e9phone et aussi du minitel. J'avais d\u00e9got\u00e9 un job et ma vie se r\u00e9duisait vraiment \u00e0 une peau de chagrin. Boulot, m\u00e9tro, dodo. A la v\u00e9rit\u00e9 je n'avais gu\u00e8re envie d'autre chose. Je n'avais pas envie de faire des photos, pas plus que d'\u00e9crire, pas plus que de peindre.\n\nJe vivais comme un automate. \n\nPuis j'ai trouv\u00e9 dans un gratuit des annonces qui parlaient de ces rencontres par t\u00e9l\u00e9phone. J'ai essay\u00e9. J'ai rencontr\u00e9 un certain nombre de filles, de femmes ainsi dont pour la plupart je n'ai ai conserv\u00e9 que de vagues souvenirs.\n\nEn fait \u00e9videmment je me sentais seul, totalement d\u00e9labr\u00e9 et comme beaucoup d'entre nous j'imaginais que l'autre quel qu'il soit pourrait me venir en aide, m\u00eame si je ne me l'avouais pas clairement. \n\nEn refusant de me l'avouer, j'ai cr\u00e9e une nouvelle simulation \u00e9videmment. Je me suis rabattu sur le sexe. j'ai pens\u00e9 que le sexe allait \u00eatre la solution au probl\u00e8me. Et comme je ne fais pas les choses \u00e0 moiti\u00e9 j'ai enchain\u00e9 les rencontres et les parties de jambes en l'air comme on dit.\n\nMais toujours et plus encore je ne pouvais me d\u00e9partir de ce que j'appelle une certaine lucidit\u00e9. je ne cessais de me tenir \u00e0 l'\u00e9cart de tous ces \u00e9bats. D'observer \u00e0 la fois ces femmes mimant le plaisir ou l'\u00e9prouvant r\u00e9ellement afin je crois de m'en d\u00e9gouter pour de bon. D'en comprendre si on veut toute l'inutilit\u00e9, la vacuit\u00e9. Car \u00e9videmment dans ce genre de rencontres on n'y va gu\u00e8re par 4 chemins, on n'a pas besoin de beaucoup de pr\u00e9liminaires si je peux dire.\n\nParmi toutes ces rencontres une m'a intrigu\u00e9 plus que toutes les autres.\n\nC'\u00e9tait une fille jeune, d'origine marocaine. Avec de longs cheveux noirs qui lui tombaient presque sur les fesses. Avec elle ce fut diff\u00e9rent.\n\nD'abord on ne se rencontrait qu'\u00e0 l'ext\u00e9rieur, dans des caf\u00e9s, dans des parcs, et elle d\u00e9ployait tout un arsenal de postures d'attitudes de phrases interrompues, s'ouvrant sur des silences formidables qui se m\u00ealaient \u00e0 chaque fois aux lieux comme pour mieux les ancrer dans la m\u00e9moire. C'est \u00e0 dire cr\u00e9er un d\u00e9cor inoubliable dans lequel \u00e9videmment elle-m\u00eame serait inoubliable. D'ailleurs cela a bien fonctionn\u00e9 puisque je m'en souviens encore.\n\nJe pense que c'\u00e9tait une v\u00e9ritable artiste. Nous n'avons jamais fait l'amour. Mais elle su amener l'excitation \u00e0 son paroxysme de nombreuses fois rien qu'en posant sa main sur la mienne ou me fixer avec son \u0153il noir et velout\u00e9.\n\nRien ne pouvait tenir face \u00e0 elle de tous les artifices que je connaissais alors, la d\u00e9licatesse comme les propos crus, l'\u00e9l\u00e9gance, l'esprit, les bons mots, tout \u00e7a elle s'en tapait comme de l'an quarante.\n\nCe qu'elle voulait ? je n'en savais fichtre rien. Je ne le sus jamais. Car au bout d'un moment les coups de fil affluaient de plus en plus et je me retrouvais noy\u00e9 dans l'embarras du choix. Nous espa\u00e7\u00e2mes nos rencontres de plus en plus et pour finir elle disparut totalement de ma vie.\n\nCe qui me fait r\u00e9fl\u00e9chir sur les rencontres que nous effectuons ainsi dans notre vie. Ces rencontres je suis persuad\u00e9 qu'elles ont toujours un sens mais qui nous \u00e9chappe la plupart du temps. Enfin qui m'\u00e9chappe en tous les cas.\n\nParfois je me demande si ce ne sont pas des guides qui parviennent \u00e0 s'immiscer dans toutes les simulations, soit celles que nous subissons soit celles que nous inventons tout seul. C'est ainsi qu'elles viennent jusqu'\u00e0 nous, jusqu'\u00e0 notre \u00e2me v\u00e9ritable pour lui faire un petit signe et la remettre sur le chemin. 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\n
\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Le fantasme d\u2019un \u00e2ge d\u2019or revient perp\u00e9tuellement pile poil au moment des grands bouleversements. Dans l\u2019hypoth\u00e8se que l\u2019Akasha me pr\u00e9sente, je manque de m\u2019\u00e9touffer de rire.<\/p>\n

Madame X est \u00e9lue pr\u00e9sidente de la R\u00e9publique fran\u00e7aise, et c\u2019est la mise en place d\u2019un merveilleux \u00e2ge d\u2019or.<\/p>\n

Tout le monde mange.
\nTout le monde dort.
\nPersonne n\u2019a plus peur de rien.<\/p>\n

Nous avons \u00e9t\u00e9 mis en stase.
\nDes somnambules dont les l\u00e8vres balbutient parfois des choses incoh\u00e9rentes au fin fond de leur r\u00eave \u00e9veill\u00e9 :<\/p>\n

« Noir c\u2019est noir, il n\u2019y a plus d\u2019espoir, hou hou hou tsoin tsoin. »<\/p>\n

Tandis que les sauriens leur charcutent les neurones \u00e0 coups de simulations virtuelles, de jeux t\u00e9l\u00e9vis\u00e9s d\u00e9biles, et de chansons \u00e0 l\u2019eau de rose.<\/p>\n

Retour du feuilleton HEIDI.
\nTout le monde est beau, tout le monde il est gentil.<\/p>\n

Sauf \u00e0 peu pr\u00e8s tout ce qui n\u2019est pas gaulois.
\nEt de pure souche, s\u2019il vous pla\u00eet.<\/p>\n

Sauf les Russes, \u00e9videmment. Ces bons aryens.
\nEntre bons aryens, comment ne pas s\u2019entendre ?<\/p>\n

— Tu as fini de bailler aux corneilles ? me dit Hildegarde, assise pr\u00e8s de moi dans le compartiment. On a du boulot \u00e0 pr\u00e9parer.<\/p>\n

Elle ouvre sa petite mallette de voyage, dans laquelle j\u2019aper\u00e7ois, bien rang\u00e9es, toute une collection de petites fioles remplies de liquides color\u00e9s.<\/p>\n

— Oh doucement, Hilde, tu sais bien que je n\u2019aime pas \u00eatre r\u00e9veill\u00e9 brutalement.<\/p>\n

— Si tu r\u00eaves \u00e0 ce genre de choses, tu cr\u00e9es un portail dans les possibles et l\u2019Akasha enregistre. Donc, stop tout de suite ce genre de bidule, s\u2019il te pla\u00eet. On a d\u00e9j\u00e0 assez de bordel, mieux vaut pas en rajouter.<\/p>\n

— Tu as raison. Cause-moi de botanique, le paysage est morne au-del\u00e0 des fen\u00eatres.<\/p>\n

Je sais prendre Hildegarde par les sentiments. Il suffit de lui parler de plantes pour que je l\u2019observe se tr\u00e9mousser de plaisir sur son si\u00e8ge.<\/p>\n

— Tu te vois plut\u00f4t incin\u00e9r\u00e9 ou enterr\u00e9 et bouff\u00e9 par les vers de terre ? me demande-t-elle.<\/p>\n

— Euh\u2026 moi je ne vois rien du tout de tout \u00e7a. \u00c9ventuellement, ce ne sera que ma d\u00e9pouille \u00e0 qui \u00e7a arrivera et dont je me tamponnerai comme de mon tout premier haut-de-chausse.<\/p>\n

Avec Hildegarde, on a une relation fraternelle, du genre \u00e0 se taquiner tout le temps. Elle est un brin bourrue et fait toujours semblant de ne pas supporter les fantaisistes de mon acabit. Mais c\u2019est comme l\u2019huile et le vinaigre entre nous-deux. Et s\u2019il n\u2019y a pas de salade \u00e0 assaisonner, on se rabat l\u2019un sur l\u2019autre pour un rien.<\/p>\n

— Tu crois \u00e0 l\u2019\u00e2ge d\u2019or, Hildegarde ? je demande.<\/p>\n

— Tu veux parler de maintenant ? Elle dit. Bin oui, forc\u00e9ment que j\u2019y crois, puisque je le vis.<\/p>\n

— Oui mais non, je veux dire, au paradis, Hilde. Avec des ch\u00e9rubins tout nus qui soufflent dans des trompettes et des jardins remplis de fleurs fra\u00eeches \u00e0 l\u2019infini ?<\/p>\n

— T\u2019es rien couillon, toi, elle dit. Pourquoi pas aussi aux vierges qui, d\u00e8s qu\u2019un pauvre bougre se fait exploser la tronche, deviennent toutes nymphomanes en l\u2019accueillant \u00e0 bras ouverts ? Et pourquoi pas \u00e0 la petite souris et au P\u00e8re No\u00ebl, par-dessus le march\u00e9 ?<\/p>\n

On explose de rire et c\u2019est \u00e0 ce moment-l\u00e0 que la contr\u00f4leuse ouvre la porte du compartiment. Une grande blonde athl\u00e9tique, avec des yeux gris-bleus souriants.<\/p>\n

— Tiens voil\u00e0 la premi\u00e8re qui arrive, une Walkyrie visiblement, dit Pablo en face de nous. Est-ce que le train a d\u00e9raill\u00e9 ? On est tous morts et on est arriv\u00e9s au paradis ?<\/p>\n

Puis il fait une mimique, qui doit ressembler, \u00e0 son avis, \u00e0 une sorte d\u2019hommage ou de r\u00e9v\u00e9rence \u00e0 la grande blonde, en achevant le tout par un clin d\u2019\u0153il salace comme il en a le secret.<\/p>\n

— Tiens-toi donc, esp\u00e8ce de paysan, dit Salvador, moustaches orient\u00e9es 10h10.<\/p>\n

Puis, s\u2019adressant \u00e0 la contr\u00f4leuse :<\/p>\n

— Mademoiselle, vous illuminez cet instant. Comment puis-je vous honorer ?<\/p>\n

La grande blonde prend un air ahuri et dit :<\/p>\n

— Bin z\u2019avez qu\u2019\u00e0 pr\u00e9senter vos billets\u2026 en polonais.<\/p>\n

Et nous ne sommes m\u00eame pas \u00e9tonn\u00e9s, tous autant que nous sommes, de comprendre la langue.<\/p>\n

— Moi j\u2019aimerais que mon corps soit momifi\u00e9, qu\u2019il devienne comme un vieux parchemin, me confie Hildegarde.<\/p>\n

Et nous voil\u00e0 tous \u00e0 rigoler devant la grande fille, qui est un peu rougeaude tout \u00e0 coup.<\/p>\n

— Ah, je vous l\u2019avais dit que c\u2019en \u00e9tait une. J\u2019ai un sixi\u00e8me sens pour les rep\u00e9rer.<\/p>\n

— Rustre ! Tu ne penses donc toujours qu\u2019\u00e0 jouir, le tance Salvador en faisant les yeux doux \u00e0 la femme en uniforme.<\/p>\n

Puis il ajoute qu\u2019il la peindrait bien nue, avec de tr\u00e8s longues jambes, pour qu\u2019elle puisse gambader dans le d\u00e9sert au c\u00f4t\u00e9 de ses magnifiques \u00e9l\u00e9phants.<\/p>\n

On rigole.<\/p>\n

C\u2019est \u00e0 ce moment-l\u00e0 que l\u2019on voit la grande blonde s\u2019\u00e9lever dans les airs. Son cr\u00e2ne traverse le plafond, puis son corps tout entier. Et nous sommes tous soulev\u00e9s, comme des cr\u00eapes, de nos si\u00e8ges.<\/p>\n

Enfin, le train d\u00e9raille, comme au ralenti. Tous les wagons p\u00e9n\u00e8trent les uns dans les autres.<\/p>\n

Dire que quelques instants auparavant, je r\u00eavais d\u2019un \u00e2ge d\u2019or. Le quotidien nous rattrape toujours s\u00e9ance tenante.<\/p>\n

Il y a eu un attentat sur le train Paris-Varsovie. Une explosion. Est-ce un hasard ? \u00c7a m\u2019\u00e9tonnerait bien.<\/p>", "content_text": "Le fantasme d\u2019un \u00e2ge d\u2019or revient perp\u00e9tuellement pile poil au moment des grands bouleversements. Dans l\u2019hypoth\u00e8se que l\u2019Akasha me pr\u00e9sente, je manque de m\u2019\u00e9touffer de rire. Madame X est \u00e9lue pr\u00e9sidente de la R\u00e9publique fran\u00e7aise, et c\u2019est la mise en place d\u2019un merveilleux \u00e2ge d\u2019or. Tout le monde mange. Tout le monde dort. Personne n\u2019a plus peur de rien. Nous avons \u00e9t\u00e9 mis en stase. Des somnambules dont les l\u00e8vres balbutient parfois des choses incoh\u00e9rentes au fin fond de leur r\u00eave \u00e9veill\u00e9 : \u00ab Noir c\u2019est noir, il n\u2019y a plus d\u2019espoir, hou hou hou tsoin tsoin. \u00bb Tandis que les sauriens leur charcutent les neurones \u00e0 coups de simulations virtuelles, de jeux t\u00e9l\u00e9vis\u00e9s d\u00e9biles, et de chansons \u00e0 l\u2019eau de rose. Retour du feuilleton HEIDI. Tout le monde est beau, tout le monde il est gentil. Sauf \u00e0 peu pr\u00e8s tout ce qui n\u2019est pas gaulois. Et de pure souche, s\u2019il vous pla\u00eet. Sauf les Russes, \u00e9videmment. Ces bons aryens. Entre bons aryens, comment ne pas s\u2019entendre ? \u2014 Tu as fini de bailler aux corneilles ? me dit Hildegarde, assise pr\u00e8s de moi dans le compartiment. On a du boulot \u00e0 pr\u00e9parer. Elle ouvre sa petite mallette de voyage, dans laquelle j\u2019aper\u00e7ois, bien rang\u00e9es, toute une collection de petites fioles remplies de liquides color\u00e9s. \u2014 Oh doucement, Hilde, tu sais bien que je n\u2019aime pas \u00eatre r\u00e9veill\u00e9 brutalement. \u2014 Si tu r\u00eaves \u00e0 ce genre de choses, tu cr\u00e9es un portail dans les possibles et l\u2019Akasha enregistre. Donc, stop tout de suite ce genre de bidule, s\u2019il te pla\u00eet. On a d\u00e9j\u00e0 assez de bordel, mieux vaut pas en rajouter. \u2014 Tu as raison. Cause-moi de botanique, le paysage est morne au-del\u00e0 des fen\u00eatres. Je sais prendre Hildegarde par les sentiments. Il suffit de lui parler de plantes pour que je l\u2019observe se tr\u00e9mousser de plaisir sur son si\u00e8ge. \u2014 Tu te vois plut\u00f4t incin\u00e9r\u00e9 ou enterr\u00e9 et bouff\u00e9 par les vers de terre ? me demande-t-elle. \u2014 Euh\u2026 moi je ne vois rien du tout de tout \u00e7a. \u00c9ventuellement, ce ne sera que ma d\u00e9pouille \u00e0 qui \u00e7a arrivera et dont je me tamponnerai comme de mon tout premier haut-de-chausse. Avec Hildegarde, on a une relation fraternelle, du genre \u00e0 se taquiner tout le temps. Elle est un brin bourrue et fait toujours semblant de ne pas supporter les fantaisistes de mon acabit. Mais c\u2019est comme l\u2019huile et le vinaigre entre nous-deux. Et s\u2019il n\u2019y a pas de salade \u00e0 assaisonner, on se rabat l\u2019un sur l\u2019autre pour un rien. \u2014 Tu crois \u00e0 l\u2019\u00e2ge d\u2019or, Hildegarde ? je demande. \u2014 Tu veux parler de maintenant ? Elle dit. Bin oui, forc\u00e9ment que j\u2019y crois, puisque je le vis. \u2014 Oui mais non, je veux dire, au paradis, Hilde. Avec des ch\u00e9rubins tout nus qui soufflent dans des trompettes et des jardins remplis de fleurs fra\u00eeches \u00e0 l\u2019infini ? \u2014 T\u2019es rien couillon, toi, elle dit. Pourquoi pas aussi aux vierges qui, d\u00e8s qu\u2019un pauvre bougre se fait exploser la tronche, deviennent toutes nymphomanes en l\u2019accueillant \u00e0 bras ouverts ? Et pourquoi pas \u00e0 la petite souris et au P\u00e8re No\u00ebl, par-dessus le march\u00e9 ? On explose de rire et c\u2019est \u00e0 ce moment-l\u00e0 que la contr\u00f4leuse ouvre la porte du compartiment. Une grande blonde athl\u00e9tique, avec des yeux gris-bleus souriants. \u2014 Tiens voil\u00e0 la premi\u00e8re qui arrive, une Walkyrie visiblement, dit Pablo en face de nous. Est-ce que le train a d\u00e9raill\u00e9 ? On est tous morts et on est arriv\u00e9s au paradis ? Puis il fait une mimique, qui doit ressembler, \u00e0 son avis, \u00e0 une sorte d\u2019hommage ou de r\u00e9v\u00e9rence \u00e0 la grande blonde, en achevant le tout par un clin d\u2019\u0153il salace comme il en a le secret. \u2014 Tiens-toi donc, esp\u00e8ce de paysan, dit Salvador, moustaches orient\u00e9es 10h10. Puis, s\u2019adressant \u00e0 la contr\u00f4leuse : \u2014 Mademoiselle, vous illuminez cet instant. Comment puis-je vous honorer ? La grande blonde prend un air ahuri et dit : \u2014 Bin z\u2019avez qu\u2019\u00e0 pr\u00e9senter vos billets\u2026 en polonais. Et nous ne sommes m\u00eame pas \u00e9tonn\u00e9s, tous autant que nous sommes, de comprendre la langue. \u2014 Moi j\u2019aimerais que mon corps soit momifi\u00e9, qu\u2019il devienne comme un vieux parchemin, me confie Hildegarde. Et nous voil\u00e0 tous \u00e0 rigoler devant la grande fille, qui est un peu rougeaude tout \u00e0 coup. \u2014 Ah, je vous l\u2019avais dit que c\u2019en \u00e9tait une. J\u2019ai un sixi\u00e8me sens pour les rep\u00e9rer. \u2014 Rustre ! Tu ne penses donc toujours qu\u2019\u00e0 jouir, le tance Salvador en faisant les yeux doux \u00e0 la femme en uniforme. Puis il ajoute qu\u2019il la peindrait bien nue, avec de tr\u00e8s longues jambes, pour qu\u2019elle puisse gambader dans le d\u00e9sert au c\u00f4t\u00e9 de ses magnifiques \u00e9l\u00e9phants. On rigole. C\u2019est \u00e0 ce moment-l\u00e0 que l\u2019on voit la grande blonde s\u2019\u00e9lever dans les airs. Son cr\u00e2ne traverse le plafond, puis son corps tout entier. Et nous sommes tous soulev\u00e9s, comme des cr\u00eapes, de nos si\u00e8ges. Enfin, le train d\u00e9raille, comme au ralenti. Tous les wagons p\u00e9n\u00e8trent les uns dans les autres. Dire que quelques instants auparavant, je r\u00eavais d\u2019un \u00e2ge d\u2019or. Le quotidien nous rattrape toujours s\u00e9ance tenante. Il y a eu un attentat sur le train Paris-Varsovie. Une explosion. Est-ce un hasard ? \u00c7a m\u2019\u00e9tonnerait bien.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/images_1_-2.jpg?1748065120", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/5-avril-2022.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/5-avril-2022.html", "title": "5 avril 2022", "date_published": "2022-04-05T17:48:00Z", "date_modified": "2024-11-30T18:49:08Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

\n
\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>

Fragment 1 \u2013 Le Fouet<\/h3>\n

Il y a deux mani\u00e8res de ch\u00e2tier. Pour enseigner ou pour punir.<\/p>\n

Mais comment savoir ce que veut celui qui tient le fouet ? Qui guide sa main ? Une intention sup\u00e9rieure ? Une col\u00e8re mal contenue ? Un amour d\u00e9guis\u00e9 ?<\/p>\n

Je sirote mon caf\u00e9 en me r\u00e9p\u00e9tant ce vieux dicton : Qui aime bien, ch\u00e2tie bien. Mais \u00e0 quel point peut-on aimer pour vouloir ch\u00e2tier ?<\/p>\n

Je regarde les gens autour de moi. Ils rient, parlent, gesticulent, plong\u00e9s dans leur quotidien comme s\u2019il allait durer toujours. Moi, je n\u2019y crois pas. J\u2019ai l\u2019impression que tout recommence sans fin. Toujours ce cycle. Ruines, renaissances, ruines \u00e0 nouveau.<\/p>\n

Bereshit. Un nouveau commencement.<\/p>\n

Et pourtant, je sens que quelque chose m\u2019attend au bout du chemin. Une main lev\u00e9e. Un fouet pr\u00eat \u00e0 frapper.<\/p>\n

Fragment 2 \u2013 Maria<\/h3>\n

Maria tripote sa paille, perdue dans ses pens\u00e9es. Nous sommes attabl\u00e9s au Mabillon apr\u00e8s une promenade au Jardin du Luxembourg. La lumi\u00e8re du soleil de mars danse sur son verre de limonade.<\/p>\n

— Tu as exactement le profil, dit-elle soudain en plantant son regard dans le mien.<\/p>\n

Je reste sto\u00efque. Maria aime tester mes r\u00e9actions, et je me suis jur\u00e9 de ne plus la laisser m\u2019\u00e9branler. Pourtant, elle me conna\u00eet trop bien.<\/p>\n

— Tu te prends pour Bash\u00f4 ? ricane-t-elle en voyant ma fa\u00e7ade impassible.<\/p>\n

— Non, Tchouang-Tseu, dis-je avec un sourire forc\u00e9. Mais tu as raison, j\u2019ai rechut\u00e9.<\/p>\n

Elle rit, mais son rire s\u2019\u00e9teint vite.<\/p>\n

— \u00c9coute-moi bien. Les l\u00e9zards s\u2019agitent. On ne sait pas pourquoi, mais \u00e7a devient s\u00e9rieux. Ils pr\u00e9parent quelque chose. Une manipulation d\u2019une ampleur qu\u2019on n\u2019a jamais vue.<\/p>\n

— Les l\u00e9zards, Maria ? S\u00e9rieusement ? Et leur « Nouvel Ordre Mondial » ?<\/p>\n

Je cherche dans son regard un signe de plaisanterie. Rien. Juste cette intensit\u00e9 qui la caract\u00e9rise.<\/p>\n

— Ce n\u2019est pas une blague, souffle-t-elle. Les Am\u00e9ricains et les Russes se sont alli\u00e9s, crois-le ou non. Une alliance secr\u00e8te pour d\u00e9clencher un conflit global.<\/p>\n

Je la d\u00e9visage. Maria parle rarement \u00e0 la l\u00e9g\u00e8re, mais cette histoire me semble absurde.<\/p>\n

— Et tu veux que je crois que des dirigeants incapables de g\u00e9rer leurs propres pays orchestreraient un complot mondial ?<\/p>\n

Elle secoue la t\u00eate.<\/p>\n

— Ils ne sont que des pions. Des pantins manipul\u00e9s. Et qui tire les ficelles ? Les l\u00e9zards. Pas des hommes, pas des nations. Quelque chose de plus grand, de plus ancien.<\/p>\n

Je ne r\u00e9ponds pas. \u00c0 quoi bon ? Maria croit en ce qu\u2019elle dit. Moi, je n\u2019y crois pas encore.<\/p>\n

Fragment 3 \u2013 La Mission<\/h3>\n

— Tu pars demain, dit-elle.<\/p>\n

Je sursaute.<\/p>\n

— En Pologne. Varsovie, pour \u00eatre pr\u00e9cis. Avec Pablo, L\u00e9o, Salvador, et Hildegarde.<\/p>\n

Varsovie. La ville Ph\u00e9nix. Varsovie, la p\u00e9cheresse et la sir\u00e8ne.<\/p>\n

— Pourquoi Varsovie ? demandai-je.<\/p>\n

Elle me sourit.<\/p>\n

— Parce que c\u2019est l\u00e0 que tout recommence toujours.<\/p>\n

Fragment 4 \u2013 M\u00e9moire : Juillet 2019<\/h3>\n

Les sir\u00e8nes r\u00e9sonnent.
\n17 heures.<\/p>\n

Le silence tombe sur Varsovie comme un couperet. Les klaxons s\u2019\u00e9teignent, les conversations s\u2019arr\u00eatent. Et soudain, la ville enti\u00e8re est fig\u00e9e.<\/p>\n

Je suis l\u00e0, parmi eux. Dans ce moment suspendu o\u00f9 les vivants honorent les morts. Je ne suis pas polonais, mais en cet instant, je suis des leurs.<\/p>\n

Et puis le chant commence. Des milliers de voix s\u2019\u00e9l\u00e8vent. La foule s\u2019anime, applaudit, chante. Les larmes me montent aux yeux. Moi aussi, j\u2019applaudis. Moi aussi, je chante.<\/p>\n

En cet instant, je comprends. Je comprends ce que signifie lutter, m\u00eame quand tout semble perdu. Ao\u00fbt 1944. Vingt mille SS arm\u00e9s jusqu\u2019aux dents contre cinquante mille insurg\u00e9s. La ville en ruines, \u00e9cras\u00e9e, mais pas bris\u00e9e.<\/p>\n

La libert\u00e9, l\u2019ind\u00e9pendance, la justice. Voil\u00e0 les sir\u00e8nes de Varsovie. Leur chant n\u2019a ni logique ni sens, mais il trouve sa place au fond de l\u2019\u00e2me.<\/p>\n

Fragment 5 \u2013 Maria, \u00e0 nouveau<\/h3>\n

— Tu sais pourquoi tu dois y aller, murmure Maria.<\/p>\n

Son regard a chang\u00e9. Ses cernes apparaissent enfin, comme si son masque glissait pour r\u00e9v\u00e9ler une fatigue immense.<\/p>\n

— Tu es le p\u00e9cheur, et tu dois entendre le chant de la sir\u00e8ne sans faillir.<\/p>\n

— Pourquoi moi ?<\/p>\n

— Parce que tu as une \u00e2me, dit-elle simplement.<\/p>\n

Et elle rit. Nous rions tous les deux comme des enfants en train de fomenter une b\u00eatise.<\/p>\n

Fragment 6 \u2013 Varsovie : Le Recommencement<\/h3>\n

Bereshit.
\nUn commencement. Encore.<\/p>\n

Je pense \u00e0 tout ce que j\u2019ai laiss\u00e9 derri\u00e8re moi. \u00c0 ce qui m\u2019attend.<\/p>\n

Je pense aux l\u00e9zards, \u00e0 Maria, \u00e0 ses mots. \u00c0 ce fouet invisible qu\u2019elle brandit avec douceur.<\/p>\n

Je pense \u00e0 Varsovie, la ville du Ph\u00e9nix, qui rena\u00eet toujours des cendres, m\u00eame quand tout semble perdu.<\/p>\n

Et je me demande :
\nVers quel amour, encore, faut-il se h\u00e2ter ?<\/p>", "content_text": " {{{Fragment 1 \u2013 Le Fouet}}} Il y a deux mani\u00e8res de ch\u00e2tier. Pour enseigner ou pour punir. Mais comment savoir ce que veut celui qui tient le fouet ? Qui guide sa main ? Une intention sup\u00e9rieure ? Une col\u00e8re mal contenue ? Un amour d\u00e9guis\u00e9 ? Je sirote mon caf\u00e9 en me r\u00e9p\u00e9tant ce vieux dicton : Qui aime bien, ch\u00e2tie bien. Mais \u00e0 quel point peut-on aimer pour vouloir ch\u00e2tier ? Je regarde les gens autour de moi. Ils rient, parlent, gesticulent, plong\u00e9s dans leur quotidien comme s\u2019il allait durer toujours. Moi, je n\u2019y crois pas. J\u2019ai l\u2019impression que tout recommence sans fin. Toujours ce cycle. Ruines, renaissances, ruines \u00e0 nouveau. Bereshit. Un nouveau commencement. Et pourtant, je sens que quelque chose m\u2019attend au bout du chemin. Une main lev\u00e9e. Un fouet pr\u00eat \u00e0 frapper. {{{Fragment 2 \u2013 Maria}}} Maria tripote sa paille, perdue dans ses pens\u00e9es. Nous sommes attabl\u00e9s au Mabillon apr\u00e8s une promenade au Jardin du Luxembourg. La lumi\u00e8re du soleil de mars danse sur son verre de limonade. \u2014 Tu as exactement le profil, dit-elle soudain en plantant son regard dans le mien. Je reste sto\u00efque. Maria aime tester mes r\u00e9actions, et je me suis jur\u00e9 de ne plus la laisser m\u2019\u00e9branler. Pourtant, elle me conna\u00eet trop bien. \u2014 Tu te prends pour Bash\u00f4 ? ricane-t-elle en voyant ma fa\u00e7ade impassible. \u2014 Non, Tchouang-Tseu, dis-je avec un sourire forc\u00e9. Mais tu as raison, j\u2019ai rechut\u00e9. Elle rit, mais son rire s\u2019\u00e9teint vite. \u2014 \u00c9coute-moi bien. Les l\u00e9zards s\u2019agitent. On ne sait pas pourquoi, mais \u00e7a devient s\u00e9rieux. Ils pr\u00e9parent quelque chose. Une manipulation d\u2019une ampleur qu\u2019on n\u2019a jamais vue. \u2014 Les l\u00e9zards, Maria ? S\u00e9rieusement ? Et leur \"Nouvel Ordre Mondial\" ? Je cherche dans son regard un signe de plaisanterie. Rien. Juste cette intensit\u00e9 qui la caract\u00e9rise. \u2014 Ce n\u2019est pas une blague, souffle-t-elle. Les Am\u00e9ricains et les Russes se sont alli\u00e9s, crois-le ou non. Une alliance secr\u00e8te pour d\u00e9clencher un conflit global. Je la d\u00e9visage. Maria parle rarement \u00e0 la l\u00e9g\u00e8re, mais cette histoire me semble absurde. \u2014 Et tu veux que je crois que des dirigeants incapables de g\u00e9rer leurs propres pays orchestreraient un complot mondial ? Elle secoue la t\u00eate. \u2014 Ils ne sont que des pions. Des pantins manipul\u00e9s. Et qui tire les ficelles ? Les l\u00e9zards. Pas des hommes, pas des nations. Quelque chose de plus grand, de plus ancien. Je ne r\u00e9ponds pas. \u00c0 quoi bon ? Maria croit en ce qu\u2019elle dit. Moi, je n\u2019y crois pas encore. {{{Fragment 3 \u2013 La Mission}}} \u2014 Tu pars demain, dit-elle. Je sursaute. \u2014 En Pologne. Varsovie, pour \u00eatre pr\u00e9cis. Avec Pablo, L\u00e9o, Salvador, et Hildegarde. Varsovie. La ville Ph\u00e9nix. Varsovie, la p\u00e9cheresse et la sir\u00e8ne. \u2014 Pourquoi Varsovie ? demandai-je. Elle me sourit. \u2014 Parce que c\u2019est l\u00e0 que tout recommence toujours. {{{Fragment 4 \u2013 M\u00e9moire : Juillet 2019}}} Les sir\u00e8nes r\u00e9sonnent. 17 heures. Le silence tombe sur Varsovie comme un couperet. Les klaxons s\u2019\u00e9teignent, les conversations s\u2019arr\u00eatent. Et soudain, la ville enti\u00e8re est fig\u00e9e. Je suis l\u00e0, parmi eux. Dans ce moment suspendu o\u00f9 les vivants honorent les morts. Je ne suis pas polonais, mais en cet instant, je suis des leurs. Et puis le chant commence. Des milliers de voix s\u2019\u00e9l\u00e8vent. La foule s\u2019anime, applaudit, chante. Les larmes me montent aux yeux. Moi aussi, j\u2019applaudis. Moi aussi, je chante. En cet instant, je comprends. Je comprends ce que signifie lutter, m\u00eame quand tout semble perdu. Ao\u00fbt 1944. Vingt mille SS arm\u00e9s jusqu\u2019aux dents contre cinquante mille insurg\u00e9s. La ville en ruines, \u00e9cras\u00e9e, mais pas bris\u00e9e. La libert\u00e9, l\u2019ind\u00e9pendance, la justice. Voil\u00e0 les sir\u00e8nes de Varsovie. Leur chant n\u2019a ni logique ni sens, mais il trouve sa place au fond de l\u2019\u00e2me. {{{Fragment 5 \u2013 Maria, \u00e0 nouveau}}} \u2014 Tu sais pourquoi tu dois y aller, murmure Maria. Son regard a chang\u00e9. Ses cernes apparaissent enfin, comme si son masque glissait pour r\u00e9v\u00e9ler une fatigue immense. \u2014 Tu es le p\u00e9cheur, et tu dois entendre le chant de la sir\u00e8ne sans faillir. \u2014 Pourquoi moi ? \u2014 Parce que tu as une \u00e2me, dit-elle simplement. Et elle rit. Nous rions tous les deux comme des enfants en train de fomenter une b\u00eatise. {{{Fragment 6 \u2013 Varsovie : Le Recommencement}}} Bereshit. Un commencement. Encore. Je pense \u00e0 tout ce que j\u2019ai laiss\u00e9 derri\u00e8re moi. \u00c0 ce qui m\u2019attend. Je pense aux l\u00e9zards, \u00e0 Maria, \u00e0 ses mots. \u00c0 ce fouet invisible qu\u2019elle brandit avec douceur. Je pense \u00e0 Varsovie, la ville du Ph\u00e9nix, qui rena\u00eet toujours des cendres, m\u00eame quand tout semble perdu. Et je me demande : Vers quel amour, encore, faut-il se h\u00e2ter ?", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/warsaw_uprising_by_gaszewski_-_listening_to_radio_in_kampinos.webp?1748065196", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/4-avril-2022.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/4-avril-2022.html", "title": "4 avril 2022", "date_published": "2022-04-04T17:41:00Z", "date_modified": "2024-11-30T18:41:17Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

\n
\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

\u00c9crire ces lignes aujourd\u2019hui me renvoie \u00e0 l\u2019image d\u2019un surfeur. Ne pas tomber de la planche, maintenir son \u00e9quilibre en toutes circonstances, peu importe la puissance de la vague. Ressentir la mont\u00e9e d\u2019adr\u00e9naline tout en restant centr\u00e9 sur la joie de la glisse. Un exercice de funambule, une danse avec les \u00e9l\u00e9ments, toujours \u00e0 la lisi\u00e8re entre chute et envol.<\/p>\n

La mort est l\u00e0, semblable \u00e0 une vague gigantesque qui emporte tout sur son passage. Mais elle n\u2019est pas une fin en soi. Elle est, au m\u00eame titre que la vie, une composante essentielle de ce que nous appelons l\u2019existence. Deux forces jumelles qui s\u2019entrelacent comme les brins d\u2019une h\u00e9lice d\u2019ADN, formant une fractale infinie o\u00f9 les commencements et les fins se dissolvent.<\/p>\n

Je pense \u00e0 la 13\u1d49 lettre de l\u2019alphabet. N\u2019\u00e9voque-t-elle pas, par sa forme, une succession de vagues ? Ces ondulations contiennent un myst\u00e8re : un cycle, une r\u00e9p\u00e9tition, une danse immuable. Pourtant, derri\u00e8re cette apparente fluidit\u00e9, une autre r\u00e9alit\u00e9 se d\u00e9voile.<\/p>\n

L\u2019Akasha, cette m\u00e9moire universelle, s\u2019ouvre \u00e0 ceux qui acceptent de plonger au c\u0153ur de la vague. Mais il ne faut pas s\u2019y aventurer en aveugle. Les illusions du visible sont sem\u00e9es de chausse-trappes, des pi\u00e8ges tendus par ceux que j\u2019appelle « les peuples du Serpent », des entit\u00e9s dont le pouvoir repose sur la manipulation des perceptions. Le temps est leur instrument pr\u00e9f\u00e9r\u00e9. Ils s\u2019en servent pour nous maintenir dans l\u2019illusion d\u2019une lin\u00e9arit\u00e9, nous faisant croire \u00e0 un « avant » et un « apr\u00e8s ».<\/p>\n

Saint-Michel, l\u2019archange lumineux, vibre \u00e0 une fr\u00e9quence si haute qu\u2019elle \u00e9l\u00e8ve instantan\u00e9ment quiconque l\u2019entend. Sa vibration n\u2019est pas une promesse d\u2019avenir : elle est pure pr\u00e9sence, ici et maintenant. Rien n\u2019est « \u00e0 venir », tout est d\u00e9j\u00e0 l\u00e0, accessible dans l\u2019instant. Cette v\u00e9rit\u00e9, simple et fulgurante, r\u00e9duit en poussi\u00e8re les proph\u00e9ties et les pr\u00e9visions, ces outils de contr\u00f4le dont le serpent orgueilleux se sert pour acc\u00e9l\u00e9rer artificiellement le temps.<\/p>\n

En v\u00e9rit\u00e9, la pr\u00e9vision n\u2019est qu\u2019un poison lent. Elle cr\u00e9e l\u2019angoisse d\u2019un futur qui n\u2019existe pas. Elle nous emp\u00eache de percevoir la danse r\u00e9elle du temps, celle qui nous relie \u00e0 l\u2019\u00e9ternit\u00e9.<\/p>\n

Dans l\u2019Akasha, je ne suis pas seul. Nous sommes des milliers, peut-\u00eatre des millions, \u00e0 converser simultan\u00e9ment dans ce grand espace sans limites. Hokusai, l\u2019artiste de la Grande Vague, me glisse un clin d\u2019\u0153il complice :\n
— J\u2019en connais un rayon l\u00e0-dessus, me dit-il. Tu l\u2019as vue, cette h\u00e9lice dans ma vague ?<\/p>\n

Je lui rends son sourire.\n
— Un vrai coup de g\u00e9nie, mon fr\u00e8re.<\/p>\n

Hildegarde de Bingen surgit \u00e0 son tour, comme elle le fait souvent quand la mort est \u00e9voqu\u00e9e. Elle a l\u2019humour mordant de ceux qui savent.\n
— Vous comptez encore longtemps philosopher ? J\u2019ai des mauvaises herbes \u00e0 arracher dans mon jardin.<\/p>\n

On \u00e9clate de rire. Ce n\u2019est pas du cynisme, juste cette l\u00e9g\u00e8ret\u00e9 propre \u00e0 ceux qui comprennent que le temps, finalement, n\u2019est qu\u2019un jeu.<\/p>\n

Mais ce jeu peut \u00eatre effrayant. L\u2019Akasha offre un acc\u00e8s imm\u00e9diat \u00e0 tout : les \u00e9v\u00e9nements, les souvenirs, les symboles. Et, dans le m\u00eame \u00e9lan, elle d\u00e9construit notre conception ordinaire du temps. Ce que nous croyons appartenir \u00e0 une \u00e9poque ou \u00e0 une m\u00e9moire sp\u00e9cifique est en r\u00e9alit\u00e9 hors des fronti\u00e8res que nous nous imposons. L\u2019illusion d\u2019un temps lin\u00e9aire s\u2019effondre, r\u00e9v\u00e9lant un pr\u00e9sent \u00e9ternel, fractal et illimit\u00e9.<\/p>\n

En tant que scribe maya, je pourrais vous enseigner la sagesse du Tonalpohualli, ce calendrier sacr\u00e9 divis\u00e9 en vingt treizaines, qui honore toutes les divinit\u00e9s sans en oublier aucune. Il n\u2019est pas ancr\u00e9 dans les cycles visibles du Soleil et de la Lune, mais dans une dimension qui d\u00e9passe l\u2019ordinaire. Ce n\u2019est pas une nostalgie, c\u2019est une le\u00e7on. Une invitation \u00e0 surfer sur l\u2019\u00e9ternit\u00e9 plut\u00f4t que de se noyer dans l\u2019angoisse du temps qui passe.<\/p>\n

— Ainsi soit-il, murmure une voix famili\u00e8re. Rappelle-toi la C\u00e8ne : treize \u00e0 table, et tout le tutti.<\/p>\n

J\u00e9sus est l\u00e0, comme souvent. Pas dans une posture de solennit\u00e9, mais en compagnon de route. Il appara\u00eet et dispara\u00eet, toujours entre deux dimensions, jamais totalement fixe. Il me fait sourire, m\u00eame quand les \u00e9l\u00e9ments se d\u00e9cha\u00eenent.<\/p>\n

Peu \u00e0 peu, la lumi\u00e8re d\u00e9cline et le son s\u2019\u00e9loigne. Saint-Michel se retire dans ses hautes sph\u00e8res. Nous, simples surfeurs, restons entre la quatri\u00e8me et la cinqui\u00e8me dimension, \u00e0 peine capables de percevoir la pointe de l\u2019immensit\u00e9.<\/p>\n

Et pourtant, l\u2019infini est l\u00e0, dans la vague qui monte \u00e0 l\u2019horizon. Une vague plus gigantesque que jamais, un mur d\u2019eau et de lumi\u00e8re qui semble vouloir tout emporter. Je garde mon \u00e9quilibre, les pieds bien ancr\u00e9s sur la planche, pr\u00eat \u00e0 plonger dans l\u2019inconnu.<\/p>\n

C\u2019est alors qu\u2019une derni\u00e8re question me traverse : cette qu\u00eate de pr\u00e9cision, ce besoin d\u2019expliquer chaque d\u00e9tail, n\u2019est-elle pas, elle aussi, une forme de poison ? Peut-\u00eatre faut-il simplement accepter le myst\u00e8re, rire de l\u2019absurde, et surfer.<\/p>\n

Je ris, mais mes jambes vacillent. La vague approche, immense et impitoyable. Le temps s\u2019effiloche, les rep\u00e8res s\u2019\u00e9vanouissent. Alors je prends une grande inspiration et je plonge.<\/p>", "content_text": "\u00c9crire ces lignes aujourd\u2019hui me renvoie \u00e0 l\u2019image d\u2019un surfeur. Ne pas tomber de la planche, maintenir son \u00e9quilibre en toutes circonstances, peu importe la puissance de la vague. Ressentir la mont\u00e9e d\u2019adr\u00e9naline tout en restant centr\u00e9 sur la joie de la glisse. Un exercice de funambule, une danse avec les \u00e9l\u00e9ments, toujours \u00e0 la lisi\u00e8re entre chute et envol. La mort est l\u00e0, semblable \u00e0 une vague gigantesque qui emporte tout sur son passage. Mais elle n\u2019est pas une fin en soi. Elle est, au m\u00eame titre que la vie, une composante essentielle de ce que nous appelons l\u2019existence. Deux forces jumelles qui s\u2019entrelacent comme les brins d\u2019une h\u00e9lice d\u2019ADN, formant une fractale infinie o\u00f9 les commencements et les fins se dissolvent. Je pense \u00e0 la 13\u1d49 lettre de l\u2019alphabet. N\u2019\u00e9voque-t-elle pas, par sa forme, une succession de vagues ? Ces ondulations contiennent un myst\u00e8re : un cycle, une r\u00e9p\u00e9tition, une danse immuable. Pourtant, derri\u00e8re cette apparente fluidit\u00e9, une autre r\u00e9alit\u00e9 se d\u00e9voile. L\u2019Akasha, cette m\u00e9moire universelle, s\u2019ouvre \u00e0 ceux qui acceptent de plonger au c\u0153ur de la vague. Mais il ne faut pas s\u2019y aventurer en aveugle. Les illusions du visible sont sem\u00e9es de chausse-trappes, des pi\u00e8ges tendus par ceux que j\u2019appelle \"les peuples du Serpent\", des entit\u00e9s dont le pouvoir repose sur la manipulation des perceptions. Le temps est leur instrument pr\u00e9f\u00e9r\u00e9. Ils s\u2019en servent pour nous maintenir dans l\u2019illusion d\u2019une lin\u00e9arit\u00e9, nous faisant croire \u00e0 un \"avant\" et un \"apr\u00e8s\". Saint-Michel, l\u2019archange lumineux, vibre \u00e0 une fr\u00e9quence si haute qu\u2019elle \u00e9l\u00e8ve instantan\u00e9ment quiconque l\u2019entend. Sa vibration n\u2019est pas une promesse d\u2019avenir : elle est pure pr\u00e9sence, ici et maintenant. Rien n\u2019est \"\u00e0 venir\", tout est d\u00e9j\u00e0 l\u00e0, accessible dans l\u2019instant. Cette v\u00e9rit\u00e9, simple et fulgurante, r\u00e9duit en poussi\u00e8re les proph\u00e9ties et les pr\u00e9visions, ces outils de contr\u00f4le dont le serpent orgueilleux se sert pour acc\u00e9l\u00e9rer artificiellement le temps. En v\u00e9rit\u00e9, la pr\u00e9vision n\u2019est qu\u2019un poison lent. Elle cr\u00e9e l\u2019angoisse d\u2019un futur qui n\u2019existe pas. Elle nous emp\u00eache de percevoir la danse r\u00e9elle du temps, celle qui nous relie \u00e0 l\u2019\u00e9ternit\u00e9. Dans l\u2019Akasha, je ne suis pas seul. Nous sommes des milliers, peut-\u00eatre des millions, \u00e0 converser simultan\u00e9ment dans ce grand espace sans limites. Hokusai, l\u2019artiste de la Grande Vague, me glisse un clin d\u2019\u0153il complice : \u2014 J\u2019en connais un rayon l\u00e0-dessus, me dit-il. Tu l\u2019as vue, cette h\u00e9lice dans ma vague ? Je lui rends son sourire. \u2014 Un vrai coup de g\u00e9nie, mon fr\u00e8re. Hildegarde de Bingen surgit \u00e0 son tour, comme elle le fait souvent quand la mort est \u00e9voqu\u00e9e. Elle a l\u2019humour mordant de ceux qui savent. \u2014 Vous comptez encore longtemps philosopher ? J\u2019ai des mauvaises herbes \u00e0 arracher dans mon jardin. On \u00e9clate de rire. Ce n\u2019est pas du cynisme, juste cette l\u00e9g\u00e8ret\u00e9 propre \u00e0 ceux qui comprennent que le temps, finalement, n\u2019est qu\u2019un jeu. Mais ce jeu peut \u00eatre effrayant. L\u2019Akasha offre un acc\u00e8s imm\u00e9diat \u00e0 tout : les \u00e9v\u00e9nements, les souvenirs, les symboles. Et, dans le m\u00eame \u00e9lan, elle d\u00e9construit notre conception ordinaire du temps. Ce que nous croyons appartenir \u00e0 une \u00e9poque ou \u00e0 une m\u00e9moire sp\u00e9cifique est en r\u00e9alit\u00e9 hors des fronti\u00e8res que nous nous imposons. L\u2019illusion d\u2019un temps lin\u00e9aire s\u2019effondre, r\u00e9v\u00e9lant un pr\u00e9sent \u00e9ternel, fractal et illimit\u00e9. En tant que scribe maya, je pourrais vous enseigner la sagesse du Tonalpohualli, ce calendrier sacr\u00e9 divis\u00e9 en vingt treizaines, qui honore toutes les divinit\u00e9s sans en oublier aucune. Il n\u2019est pas ancr\u00e9 dans les cycles visibles du Soleil et de la Lune, mais dans une dimension qui d\u00e9passe l\u2019ordinaire. Ce n\u2019est pas une nostalgie, c\u2019est une le\u00e7on. Une invitation \u00e0 surfer sur l\u2019\u00e9ternit\u00e9 plut\u00f4t que de se noyer dans l\u2019angoisse du temps qui passe. \u2014 Ainsi soit-il, murmure une voix famili\u00e8re. Rappelle-toi la C\u00e8ne : treize \u00e0 table, et tout le tutti. J\u00e9sus est l\u00e0, comme souvent. Pas dans une posture de solennit\u00e9, mais en compagnon de route. Il appara\u00eet et dispara\u00eet, toujours entre deux dimensions, jamais totalement fixe. Il me fait sourire, m\u00eame quand les \u00e9l\u00e9ments se d\u00e9cha\u00eenent. Peu \u00e0 peu, la lumi\u00e8re d\u00e9cline et le son s\u2019\u00e9loigne. Saint-Michel se retire dans ses hautes sph\u00e8res. 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\n\n\n\t\t\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

Tu ne jures que par le hasard, me dit Salvador, mais que sais-tu du hasard ?<\/p>\n

Es-tu certain qu\u2019il s\u2019agisse du Grand Hasard horloger de l\u2019Univers, ou bien du petit hasard que tu fabriques continuellement \u00e0 ta sauce ?<\/p>\n

Salvador me fait peur. Ses sorties impr\u00e9visibles me glacent le sang. On s\u2019est rencontr\u00e9s sur le plateau de tournage d\u2019une publicit\u00e9 pour une marque de chocolat. Il a \u00e9t\u00e9 un tr\u00e8s grand peintre, « le meilleur de son temps », dit-il avec son accent farfelu. Au d\u00e9but, je crois qu\u2019il plaisante. Je prends tout au troisi\u00e8me degr\u00e9, et c\u2019est pr\u00e9cis\u00e9ment l\u00e0 mon erreur. Quand Salvador Dal\u00ed parle, c\u2019est Dieu qui s\u2019exprime par sa bouche. Si tu n\u2019as pas cette foi-l\u00e0, tu ne comprends rien. Pas m\u00eame pourquoi tu te retrouves ici, sur ce plateau de tournage.<\/p>\n

C\u2019est dur d\u2019avoir la foi.<\/p>\n

Probablement parce qu\u2019on ne la d\u00e9cide pas. On ne se r\u00e9veille pas un matin en disant : « Allez, aujourd\u2019hui, j\u2019aurai la foi. » Non, \u00e7a ne marche pas comme \u00e7a.<\/p>\n

— Agenouille-toi \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de moi et prions ensemble, dit-il.<\/p>\n

Je vois ses moustaches se relever aux coins, comme si elles souriaient \u00e0 sa place. Mais Salvador Dal\u00ed ne sourit jamais. Il laisse ses moustaches le faire pour lui.<\/p>\n

— Petit homme, empiffre-toi de ce chocolat sur la table. Engloutis-en une quantit\u00e9 ph\u00e9nom\u00e9nale, et tu subiras enfin la vraie crise de foie. Le reste viendra tout seul.<\/p>\n

La maquilleuse vient l\u2019aider \u00e0 se relever. Ils me laissent seul, encore \u00e0 genoux, \u00e0 quelques centim\u00e8tres de la table couverte de chocolats. Je regarde \u00e0 gauche, \u00e0 droite, puis je m\u2019ex\u00e9cute. Je m\u2019enfile les chocolats \u00e0 pleines poign\u00e9es, jusqu\u2019\u00e0 ce qu\u2019il ne reste presque rien.<\/p>\n

C\u2019est pr\u00e9cis\u00e9ment \u00e0 cet instant que le producteur, qui passait par l\u00e0 — par hasard — pousse un cri d\u2019orfraie en me voyant, le menton d\u00e9goulinant de chocolat, les mains poisseuses. Je suis vir\u00e9 sur-le-champ.<\/p>\n

En quittant le plateau, honteux, je croise le regard de Salvador dans la glace de maquillage. Ses moustaches forment un joli « 11h11 ». Sans se retourner, il me fait un petit geste de la main.<\/p>\n

Dehors, dans la rue, je me sens idiot. Je suis couvert de chocolat, ruin\u00e9. J\u2019avais tant mis\u00e9 sur ce petit r\u00f4le de figurant. Tous mes plans viennent de tomber \u00e0 l\u2019eau.<\/p>\n

Chez moi, Grand-m\u00e8re m\u2019attend dans le grand hall. En me voyant arriver si t\u00f4t, elle sourit.<\/p>\n

— C\u2019est d\u00e9j\u00e0 fini ? Alors, te voil\u00e0 riche ?<\/p>\n

Puis elle aper\u00e7oit ma veste, couverte de taches de chocolat. Son sourire s\u2019efface instantan\u00e9ment. La fureur monte, comme d\u2019habitude.<\/p>\n

— Mais quel petit salaud ! Une veste toute neuve !<\/p>\n

L\u2019apoth\u00e9ose ne tarde pas : l\u2019assistante de production surgit, visiblement l\u00e0 pour s\u2019assurer que je ne remette pas les pieds sur le tournage, et raconte mes exploits chocolat\u00e9s. Grand-m\u00e8re, au milieu du hall, hurle :<\/p>\n

— Il a le diable dans la peau, ce gamin !<\/p>\n

C\u2019est toute l\u2019histoire de ma vie. J\u2019ai dix ans, mais j\u2019ai d\u00e9j\u00e0 compris l\u2019essentiel : rien ne tourne jamais comme pr\u00e9vu. Pourtant, je passe mon temps \u00e0 l\u2019oublier, parce que, justement, je n\u2019ai que dix ans.<\/p>\n

Ce jour-l\u00e0, je prends une d\u00e9cision capitale : je ne ferai plus jamais de plans. Chaque fois que j\u2019en fais, ils nourrissent une avidit\u00e9 insupportable en moi, une urgence. Et au moment o\u00f9 je vais enfin pouvoir saisir la queue du miracle, il dispara\u00eet en rigolant, me laissant pantois comme le bon gros nigaud que je suis.<\/p>\n

Dans mes r\u00eaves, c\u2019est pareil. \u00c0 dix ans, je fais d\u00e9j\u00e0 des r\u00eaves \u00e9rotiques. Des femmes aux seins affolants, des madones charnues aux culs monumentaux, comme des V\u00e9nus pr\u00e9historiques. J\u2019ai feuillet\u00e9 tous les magazines, toutes les encyclop\u00e9dies possibles pour nourrir mon imagination. Mais toujours, au c\u0153ur du r\u00eave, au moment o\u00f9 la r\u00e9alit\u00e9 crue est sur le point de se r\u00e9v\u00e9ler, tout s\u2019\u00e9vanouit. Et je me r\u00e9veille, idiot, dans la ti\u00e9deur des draps. Rien de bien diff\u00e9rent de ma vie \u00e9veill\u00e9e.<\/p>\n

Plus tard, Pablo, fr\u00e8re de Salvador, m\u2019offre une cl\u00e9 :<\/p>\n

— Je ne fais pas de plans. Je ne cherche pas, je trouve.<\/p>\n

Nous sommes ensemble dans un vaisseau en route pour Orion. Par le hublot, j\u2019aper\u00e7ois Alnitak, Alnilam, Mintaka : les trois \u00e9toiles de la ceinture du Chasseur. Leur lumi\u00e8re m\u2019\u00e9voque les panneaux familiers d\u2019une sortie d\u2019autoroute. \u00c0 chaque voyage, je revis une sorte de purification int\u00e9rieure. Nous nettoyons notre ignorance terrestre, comme des plongeurs en d\u00e9compression.<\/p>\n

Quand nous atterrissons, tout change. Ceux que je croyais conna\u00eetre ne sont plus les m\u00eames. Moi non plus. Je retrouve mes « fr\u00e8res », des \u00eatres lumineux qui, comme moi, ont transcend\u00e9 leur m\u00e9moire terrestre. La lumi\u00e8re ici est immense, \u00e9crasante. Tout en moi vibre d\u2019une joie insoutenable.<\/p>\n

C\u2019est alors que la lumi\u00e8re se trouble, et qu\u2019un \u00e9clat plus intense encore traverse le ciel. L\u2019Archange Saint-Michel appara\u00eet. S\u2019il y a un plan dans cette galaxie, c\u2019est lui qui le d\u00e9tient. Et soudain, je comprends : le plan universel ne se cherche pas, il se vit. Il surgit de l\u2019ensemble, du Tout, et non du « moi ». Mes doutes, mes h\u00e9sitations, tout ce que j\u2019\u00e9tais sur Terre s\u2019\u00e9vanouit. Je fais partie de Saint-Michel, comme une cellule dans un grand corps, et je suis travers\u00e9 d\u2019un amour pur.<\/p>\n

Je n\u2019ai jamais eu besoin de faire de plan. Le plan \u00e9tait l\u00e0, depuis le d\u00e9but.<\/p>", "content_text": "Tu ne jures que par le hasard, me dit Salvador, mais que sais-tu du hasard ? Es-tu certain qu\u2019il s\u2019agisse du Grand Hasard horloger de l\u2019Univers, ou bien du petit hasard que tu fabriques continuellement \u00e0 ta sauce ? Salvador me fait peur. Ses sorties impr\u00e9visibles me glacent le sang. On s\u2019est rencontr\u00e9s sur le plateau de tournage d\u2019une publicit\u00e9 pour une marque de chocolat. Il a \u00e9t\u00e9 un tr\u00e8s grand peintre, \u00ab le meilleur de son temps \u00bb, dit-il avec son accent farfelu. Au d\u00e9but, je crois qu\u2019il plaisante. Je prends tout au troisi\u00e8me degr\u00e9, et c\u2019est pr\u00e9cis\u00e9ment l\u00e0 mon erreur. Quand Salvador Dal\u00ed parle, c\u2019est Dieu qui s\u2019exprime par sa bouche. Si tu n\u2019as pas cette foi-l\u00e0, tu ne comprends rien. Pas m\u00eame pourquoi tu te retrouves ici, sur ce plateau de tournage. C\u2019est dur d\u2019avoir la foi. Probablement parce qu\u2019on ne la d\u00e9cide pas. On ne se r\u00e9veille pas un matin en disant : \u00ab Allez, aujourd\u2019hui, j\u2019aurai la foi. \u00bb Non, \u00e7a ne marche pas comme \u00e7a. \u2014 Agenouille-toi \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de moi et prions ensemble, dit-il. Je vois ses moustaches se relever aux coins, comme si elles souriaient \u00e0 sa place. Mais Salvador Dal\u00ed ne sourit jamais. Il laisse ses moustaches le faire pour lui. \u2014 Petit homme, empiffre-toi de ce chocolat sur la table. Engloutis-en une quantit\u00e9 ph\u00e9nom\u00e9nale, et tu subiras enfin la vraie crise de foie. Le reste viendra tout seul. La maquilleuse vient l\u2019aider \u00e0 se relever. Ils me laissent seul, encore \u00e0 genoux, \u00e0 quelques centim\u00e8tres de la table couverte de chocolats. Je regarde \u00e0 gauche, \u00e0 droite, puis je m\u2019ex\u00e9cute. Je m\u2019enfile les chocolats \u00e0 pleines poign\u00e9es, jusqu\u2019\u00e0 ce qu\u2019il ne reste presque rien. C\u2019est pr\u00e9cis\u00e9ment \u00e0 cet instant que le producteur, qui passait par l\u00e0 \u2014 par hasard \u2014 pousse un cri d\u2019orfraie en me voyant, le menton d\u00e9goulinant de chocolat, les mains poisseuses. Je suis vir\u00e9 sur-le-champ. En quittant le plateau, honteux, je croise le regard de Salvador dans la glace de maquillage. Ses moustaches forment un joli \u00ab 11h11 \u00bb. Sans se retourner, il me fait un petit geste de la main. Dehors, dans la rue, je me sens idiot. Je suis couvert de chocolat, ruin\u00e9. J\u2019avais tant mis\u00e9 sur ce petit r\u00f4le de figurant. Tous mes plans viennent de tomber \u00e0 l\u2019eau. Chez moi, Grand-m\u00e8re m\u2019attend dans le grand hall. En me voyant arriver si t\u00f4t, elle sourit. \u2014 C\u2019est d\u00e9j\u00e0 fini ? Alors, te voil\u00e0 riche ? Puis elle aper\u00e7oit ma veste, couverte de taches de chocolat. Son sourire s\u2019efface instantan\u00e9ment. La fureur monte, comme d\u2019habitude. \u2014 Mais quel petit salaud ! Une veste toute neuve ! L\u2019apoth\u00e9ose ne tarde pas : l\u2019assistante de production surgit, visiblement l\u00e0 pour s\u2019assurer que je ne remette pas les pieds sur le tournage, et raconte mes exploits chocolat\u00e9s. Grand-m\u00e8re, au milieu du hall, hurle : \u2014 Il a le diable dans la peau, ce gamin ! C\u2019est toute l\u2019histoire de ma vie. J\u2019ai dix ans, mais j\u2019ai d\u00e9j\u00e0 compris l\u2019essentiel : rien ne tourne jamais comme pr\u00e9vu. Pourtant, je passe mon temps \u00e0 l\u2019oublier, parce que, justement, je n\u2019ai que dix ans. Ce jour-l\u00e0, je prends une d\u00e9cision capitale : je ne ferai plus jamais de plans. Chaque fois que j\u2019en fais, ils nourrissent une avidit\u00e9 insupportable en moi, une urgence. Et au moment o\u00f9 je vais enfin pouvoir saisir la queue du miracle, il dispara\u00eet en rigolant, me laissant pantois comme le bon gros nigaud que je suis. Dans mes r\u00eaves, c\u2019est pareil. \u00c0 dix ans, je fais d\u00e9j\u00e0 des r\u00eaves \u00e9rotiques. Des femmes aux seins affolants, des madones charnues aux culs monumentaux, comme des V\u00e9nus pr\u00e9historiques. J\u2019ai feuillet\u00e9 tous les magazines, toutes les encyclop\u00e9dies possibles pour nourrir mon imagination. Mais toujours, au c\u0153ur du r\u00eave, au moment o\u00f9 la r\u00e9alit\u00e9 crue est sur le point de se r\u00e9v\u00e9ler, tout s\u2019\u00e9vanouit. Et je me r\u00e9veille, idiot, dans la ti\u00e9deur des draps. Rien de bien diff\u00e9rent de ma vie \u00e9veill\u00e9e. Plus tard, Pablo, fr\u00e8re de Salvador, m\u2019offre une cl\u00e9 : \u2014 Je ne fais pas de plans. Je ne cherche pas, je trouve. Nous sommes ensemble dans un vaisseau en route pour Orion. Par le hublot, j\u2019aper\u00e7ois Alnitak, Alnilam, Mintaka : les trois \u00e9toiles de la ceinture du Chasseur. Leur lumi\u00e8re m\u2019\u00e9voque les panneaux familiers d\u2019une sortie d\u2019autoroute. \u00c0 chaque voyage, je revis une sorte de purification int\u00e9rieure. Nous nettoyons notre ignorance terrestre, comme des plongeurs en d\u00e9compression. Quand nous atterrissons, tout change. Ceux que je croyais conna\u00eetre ne sont plus les m\u00eames. Moi non plus. Je retrouve mes \u00ab fr\u00e8res \u00bb, des \u00eatres lumineux qui, comme moi, ont transcend\u00e9 leur m\u00e9moire terrestre. La lumi\u00e8re ici est immense, \u00e9crasante. Tout en moi vibre d\u2019une joie insoutenable. C\u2019est alors que la lumi\u00e8re se trouble, et qu\u2019un \u00e9clat plus intense encore traverse le ciel. L\u2019Archange Saint-Michel appara\u00eet. S\u2019il y a un plan dans cette galaxie, c\u2019est lui qui le d\u00e9tient. Et soudain, je comprends : le plan universel ne se cherche pas, il se vit. Il surgit de l\u2019ensemble, du Tout, et non du \u00ab moi \u00bb. Mes doutes, mes h\u00e9sitations, tout ce que j\u2019\u00e9tais sur Terre s\u2019\u00e9vanouit. Je fais partie de Saint-Michel, comme une cellule dans un grand corps, et je suis travers\u00e9 d\u2019un amour pur. Je n\u2019ai jamais eu besoin de faire de plan. Le plan \u00e9tait l\u00e0, depuis le d\u00e9but.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/images-2.jpg?1748065137", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/2-avril-2022.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/2-avril-2022.html", "title": "2 avril 2022", "date_published": "2022-04-02T17:28:00Z", "date_modified": "2024-11-30T18:29:24Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>\n

L\u2019\u00e9vidence est souvent ce que nous ne voyons pas. Cette phrase t\u2019agace d\u00e9j\u00e0, n\u2019est-ce pas\u202f ? Parce qu\u2019elle te semble banale. Mais r\u00e9fl\u00e9chis un peu \u00e0 cette id\u00e9e de banalit\u00e9. Qu\u2019est-ce qui te pousse \u00e0 vouloir tout rendre banal\u202f ? N\u2019as-tu jamais remarqu\u00e9 que la banalit\u00e9 na\u00eet d\u2019un manque\u202f : un manque d\u2019attention, un manque d\u2019approfondissement\u202f ?<\/p>\n

C\u2019est toi qui d\u00e9cides de ce qui doit \u00eatre ordinaire. Et \u00e0 force de te jeter \u00e0 corps perdu dans la qu\u00eate du nouveau, du singulier, tu finis par banaliser ce qui t\u2019entoure\u202f : les \u00eatres, les choses, et m\u00eame toi. Ce n\u2019est pas un hasard si cette dynamique te fait sombrer dans un d\u00e9s\u00e9quilibre entre le temps et l\u2019espace. Une faille que d\u2019autres ont creus\u00e9e avant toi.<\/p>\n

Tu t\u2019abandonnes, sans r\u00e9sistance, au cycle m\u00e9canique des jours, et cette passivit\u00e9 t\u2019enferme dans une prison. Tu te mets \u00e0 appeler cette prison ta vie, ton quotidien. Mais regarde-la en face\u202f : cette existence fig\u00e9e, ce programme implant\u00e9, cette cage mentale n\u2019a rien de banal. C\u2019est une trag\u00e9die.<\/p>\n

Au d\u00e9but de ton existence, tu as cru vivre un miracle. Mais ce miracle s\u2019est effac\u00e9, \u00e9teint comme un feu qu\u2019on n\u2019a pas nourri. Alors, tu cours apr\u00e8s lui, tu te d\u00e9bats, tu cherches \u00e0 le retrouver intact. Et ce faisant, tu le recouvres de nostalgie et de regrets. Tu t\u2019enfonces dans une sensation de vide glac\u00e9, une r\u00e9p\u00e9tition sans fin. Puis, un jour, tu te r\u00e9signes. Tu te dis que c\u2019est ainsi, qu\u2019on n\u2019y peut rien.<\/p>\n

Et voil\u00e0\u202f : tu t\u2019ennuies. Ton esprit devient cette boue o\u00f9 tout se m\u00e9lange, o\u00f9 tout s\u2019effondre. De cette boue surgit un golem\u202f : une chose informe, sans \u00e2me, une caricature de toi-m\u00eame. Ce golem, d\u2019autres s\u2019en serviront. Peut-\u00eatre toi aussi.<\/p>\n

— Mais qui sont ces « autres »\u202f ? ai-je demand\u00e9 \u00e0 Maria.<\/p>\n

Elle a lev\u00e9 les yeux vers moi et j\u2019ai senti ce malaise sourd, cette conviction qu\u2019elle \u00e9tait folle. Compl\u00e8tement folle.<\/p>\n

— Tu crois que je d\u00e9lire, hein\u202f ? a-t-elle r\u00e9pondu, comme si elle lisait dans mes pens\u00e9es.<\/p>\n

Elle s\u2019est mise \u00e0 sourire. Et l\u00e0, j\u2019ai vu autre chose. La femme que j\u2019avais toujours voulu voir. Cette femme qui, d\u2019un simple sourire, m\u2019a fait sourire \u00e0 mon tour.<\/p>\n

Ce jour-l\u00e0, nous avons march\u00e9 longtemps au bord du fleuve. C\u2019\u00e9tait l\u2019automne 1978, l\u2019ann\u00e9e de mes dix-huit ans. Un \u00e2ge o\u00f9 l\u2019on croit encore que tout est \u00e0 port\u00e9e de main, m\u00eame si tout semble nous \u00e9chapper. Je ne sais pas si ce que je ressentais pour Maria relevait du d\u00e9sir ou d\u2019un sentiment plus profond. Peut-\u00eatre \u00e9tait-ce seulement mon obsession de vouloir combler le vide.<\/p>\n

Quand je m\u2019en souviens, une galaxie de sentiments confus m\u2019envahit encore aujourd\u2019hui. Un tourbillon de honte, de culpabilit\u00e9, de manque de confiance en moi. Ce soleil noir autour duquel gravitait toute ma jeunesse.<\/p>\n

— \u00c9coute ton c\u0153ur, m\u2019avait-elle dit ce jour-l\u00e0, avec douceur.<\/p>\n

Je m\u2019\u00e9tais confi\u00e9 \u00e0 elle, presque malgr\u00e9 moi. Mes plus grandes craintes, mes doutes, je les lui avais livr\u00e9s, pieds et poings li\u00e9s. Mais ce n\u2019\u00e9tait pas un geste noble. Pas du tout. C\u2019\u00e9tait un test. Je voulais savoir si je pouvais vraiment faire confiance \u00e0 quelqu\u2019un. \u00c0 elle.<\/p>\n

Mais cette phrase — « \u00e9coute ton c\u0153ur » — m\u2019a laiss\u00e9 froid. Elle m\u2019a paru banale, comme une rengaine entendue mille fois. Maria n\u2019avait rien \u00e0 m\u2019apprendre. Pas de cl\u00e9 magique, pas de r\u00e9v\u00e9lation.<\/p>\n

Je me souviens de ma d\u00e9ception. Une fois ces mots prononc\u00e9s, je me suis referm\u00e9. Ma solitude, ce cachot o\u00f9 je m\u2019enfermais moi-m\u00eame, reprenait le dessus.<\/p>\n

Et Maria a disparu.<\/p>\n

La nuit est tomb\u00e9e brutalement. Je suis rest\u00e9 seul sur la berge, entour\u00e9 par une obscurit\u00e9 totale. Je n\u2019y ai pas pr\u00eat\u00e9 attention au d\u00e9but. La nuit, c\u2019est banal, non\u202f ? Mais ce n\u2019\u00e9tait pas une nuit ordinaire. C\u2019\u00e9tait un vide complet. Pas un seul r\u00e9verb\u00e8re, pas une lueur.<\/p>\n

Puis j\u2019ai compris. J\u2019\u00e9tais devenu aveugle.<\/p>\n

Je me suis assis, pris de vertige. Tout \u00e9tait encore l\u00e0\u202f : les rires, les disputes des passants. Je les entendais. Mais je ne voyais plus rien.<\/p>\n

Alors, j\u2019ai lev\u00e9 les yeux vers le ciel. Et c\u2019est l\u00e0 qu\u2019elles sont apparues\u202f : des \u00e9toiles. Des milliards d\u2019\u00e9toiles, plus vives, plus r\u00e9elles que jamais.<\/p>\n

Quelque chose s\u2019est produit. Une relation, une connexion. Les \u00e9toiles m\u2019appelaient, me reconnaissaient, comme si elles me rendaient un morceau oubli\u00e9 de moi-m\u00eame.<\/p>\n

Et puis j\u2019ai d\u00e9coll\u00e9. Mon corps est rest\u00e9 en bas, mais mon esprit s\u2019est \u00e9lev\u00e9. Paris est devenue une tache de lumi\u00e8re, puis une bille sur la Terre. Et la Terre elle-m\u00eame n\u2019\u00e9tait plus qu\u2019un point dans l\u2019univers.<\/p>\n

Une musique m\u2019a envelopp\u00e9. La voix de Maria. Ou \u00e9tait-ce la mienne\u202f ?<\/p>\n

Alors, j\u2019ai compris. Ce que j\u2019entendais, ce que je sentais, ce n\u2019\u00e9tait rien d\u2019autre que le son de mon propre c\u0153ur.<\/p>", "content_text": "L\u2019\u00e9vidence est souvent ce que nous ne voyons pas. Cette phrase t\u2019agace d\u00e9j\u00e0, n\u2019est-ce pas ? Parce qu\u2019elle te semble banale. Mais r\u00e9fl\u00e9chis un peu \u00e0 cette id\u00e9e de banalit\u00e9. Qu\u2019est-ce qui te pousse \u00e0 vouloir tout rendre banal ? N\u2019as-tu jamais remarqu\u00e9 que la banalit\u00e9 na\u00eet d\u2019un manque : un manque d\u2019attention, un manque d\u2019approfondissement ? C\u2019est toi qui d\u00e9cides de ce qui doit \u00eatre ordinaire. Et \u00e0 force de te jeter \u00e0 corps perdu dans la qu\u00eate du nouveau, du singulier, tu finis par banaliser ce qui t\u2019entoure : les \u00eatres, les choses, et m\u00eame toi. Ce n\u2019est pas un hasard si cette dynamique te fait sombrer dans un d\u00e9s\u00e9quilibre entre le temps et l\u2019espace. Une faille que d\u2019autres ont creus\u00e9e avant toi. Tu t\u2019abandonnes, sans r\u00e9sistance, au cycle m\u00e9canique des jours, et cette passivit\u00e9 t\u2019enferme dans une prison. Tu te mets \u00e0 appeler cette prison ta vie, ton quotidien. Mais regarde-la en face : cette existence fig\u00e9e, ce programme implant\u00e9, cette cage mentale n\u2019a rien de banal. C\u2019est une trag\u00e9die. Au d\u00e9but de ton existence, tu as cru vivre un miracle. Mais ce miracle s\u2019est effac\u00e9, \u00e9teint comme un feu qu\u2019on n\u2019a pas nourri. Alors, tu cours apr\u00e8s lui, tu te d\u00e9bats, tu cherches \u00e0 le retrouver intact. Et ce faisant, tu le recouvres de nostalgie et de regrets. Tu t\u2019enfonces dans une sensation de vide glac\u00e9, une r\u00e9p\u00e9tition sans fin. Puis, un jour, tu te r\u00e9signes. Tu te dis que c\u2019est ainsi, qu\u2019on n\u2019y peut rien. Et voil\u00e0 : tu t\u2019ennuies. Ton esprit devient cette boue o\u00f9 tout se m\u00e9lange, o\u00f9 tout s\u2019effondre. De cette boue surgit un golem : une chose informe, sans \u00e2me, une caricature de toi-m\u00eame. Ce golem, d\u2019autres s\u2019en serviront. Peut-\u00eatre toi aussi. \u2014 Mais qui sont ces \"autres\" ? ai-je demand\u00e9 \u00e0 Maria. Elle a lev\u00e9 les yeux vers moi et j\u2019ai senti ce malaise sourd, cette conviction qu\u2019elle \u00e9tait folle. Compl\u00e8tement folle. \u2014 Tu crois que je d\u00e9lire, hein ? a-t-elle r\u00e9pondu, comme si elle lisait dans mes pens\u00e9es. Elle s\u2019est mise \u00e0 sourire. Et l\u00e0, j\u2019ai vu autre chose. La femme que j\u2019avais toujours voulu voir. Cette femme qui, d\u2019un simple sourire, m\u2019a fait sourire \u00e0 mon tour. Ce jour-l\u00e0, nous avons march\u00e9 longtemps au bord du fleuve. C\u2019\u00e9tait l\u2019automne 1978, l\u2019ann\u00e9e de mes dix-huit ans. Un \u00e2ge o\u00f9 l\u2019on croit encore que tout est \u00e0 port\u00e9e de main, m\u00eame si tout semble nous \u00e9chapper. Je ne sais pas si ce que je ressentais pour Maria relevait du d\u00e9sir ou d\u2019un sentiment plus profond. Peut-\u00eatre \u00e9tait-ce seulement mon obsession de vouloir combler le vide. Quand je m\u2019en souviens, une galaxie de sentiments confus m\u2019envahit encore aujourd\u2019hui. Un tourbillon de honte, de culpabilit\u00e9, de manque de confiance en moi. Ce soleil noir autour duquel gravitait toute ma jeunesse. \u2014 \u00c9coute ton c\u0153ur, m\u2019avait-elle dit ce jour-l\u00e0, avec douceur. Je m\u2019\u00e9tais confi\u00e9 \u00e0 elle, presque malgr\u00e9 moi. Mes plus grandes craintes, mes doutes, je les lui avais livr\u00e9s, pieds et poings li\u00e9s. Mais ce n\u2019\u00e9tait pas un geste noble. Pas du tout. C\u2019\u00e9tait un test. Je voulais savoir si je pouvais vraiment faire confiance \u00e0 quelqu\u2019un. \u00c0 elle. Mais cette phrase \u2014 \"\u00e9coute ton c\u0153ur\" \u2014 m\u2019a laiss\u00e9 froid. Elle m\u2019a paru banale, comme une rengaine entendue mille fois. Maria n\u2019avait rien \u00e0 m\u2019apprendre. Pas de cl\u00e9 magique, pas de r\u00e9v\u00e9lation. Je me souviens de ma d\u00e9ception. Une fois ces mots prononc\u00e9s, je me suis referm\u00e9. Ma solitude, ce cachot o\u00f9 je m\u2019enfermais moi-m\u00eame, reprenait le dessus. Et Maria a disparu. La nuit est tomb\u00e9e brutalement. Je suis rest\u00e9 seul sur la berge, entour\u00e9 par une obscurit\u00e9 totale. Je n\u2019y ai pas pr\u00eat\u00e9 attention au d\u00e9but. La nuit, c\u2019est banal, non ? Mais ce n\u2019\u00e9tait pas une nuit ordinaire. C\u2019\u00e9tait un vide complet. Pas un seul r\u00e9verb\u00e8re, pas une lueur. Puis j\u2019ai compris. J\u2019\u00e9tais devenu aveugle. Je me suis assis, pris de vertige. Tout \u00e9tait encore l\u00e0 : les rires, les disputes des passants. Je les entendais. Mais je ne voyais plus rien. Alors, j\u2019ai lev\u00e9 les yeux vers le ciel. Et c\u2019est l\u00e0 qu\u2019elles sont apparues : des \u00e9toiles. Des milliards d\u2019\u00e9toiles, plus vives, plus r\u00e9elles que jamais. Quelque chose s\u2019est produit. Une relation, une connexion. Les \u00e9toiles m\u2019appelaient, me reconnaissaient, comme si elles me rendaient un morceau oubli\u00e9 de moi-m\u00eame. Et puis j\u2019ai d\u00e9coll\u00e9. Mon corps est rest\u00e9 en bas, mais mon esprit s\u2019est \u00e9lev\u00e9. Paris est devenue une tache de lumi\u00e8re, puis une bille sur la Terre. Et la Terre elle-m\u00eame n\u2019\u00e9tait plus qu\u2019un point dans l\u2019univers. Une musique m\u2019a envelopp\u00e9. La voix de Maria. Ou \u00e9tait-ce la mienne ? Alors, j\u2019ai compris. Ce que j\u2019entendais, ce que je sentais, ce n\u2019\u00e9tait rien d\u2019autre que le son de mon propre c\u0153ur.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/20220404_145036259.jpg?1748065062", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/12-pourquoi-je-ne-fais-jamais-de-plan.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/12-pourquoi-je-ne-fais-jamais-de-plan.html", "title": "12.Pourquoi je ne fais jamais de plan", "date_published": "2022-04-02T03:49:59Z", "date_modified": "2025-10-26T10:45:44Z", "author": {"name": "Auteur"}, "content_html": "

La n\u00e9buleuse d\u2019Orion sond\u00e9e en profondeur avec la cam\u00e9ra HAWK-1 du VLT, au Chili. \u00a9 ESO, H. Drass et al.<\/em><\/strong> <\/p>\n

— Tu ne jures que par le hasard me dit Salvador mais que sais-tu du hasard ?<\/p>\n

Es-tu vraiment certain qu’il s’agisse vraiment du Grand Hasard horloger de l’Univers ou bien du petit hasard que tu fabriques continuellement \u00e0 ta propre sauce ?<\/p>\n

Il me fait peur Salvador. Il a des sorties impr\u00e9visibles qui me glacent le sang tout \u00e0 coup.<\/p>\n

On s’est rencontr\u00e9s sur le plateau de tournage de la pub pour le chocolat d’une grande marque. Il a \u00e9t\u00e9 un tr\u00e8s grand peintre, le meilleur de son temps ajoute t’il avec son accent rigolo.<\/p>\n

Au d\u00e9but je crois qu’il plaisante et qu’il faut tout prendre au 3\u00e8me degr\u00e9. C’est exactement l\u00e0 qu’est mon erreur. Quand Salvador Dali dit quelque chose c’est Dieu qui s’exprime par sa bouche. Et si tu n’as pas cette foi l\u00e0 tu ne peux rien comprendre, et surtout pas au fait de te retrouver ici sur ce plateau de tournage.<\/p>\n

C’est dur d’avoir la foi.<\/p>\n

Probablement parce qu’on ne peut pas le d\u00e9cider. Je veux dire on ne peut pas arriver ainsi un beau matin en se disant aller aujourd’hui je vais avoir la foi. Ca ne fonctionne pas du tout comme \u00e7a.<\/p>\n

—Agenouille-toi \u00e0 cot\u00e9 de moi et prions ensemble me dit-il.<\/p>\n

Je vois ses moustaches remonter de chaque cot\u00e9 de sa bouche comme s’il essayait de sourire. Mais Salvador Dali ne sourit pratiquement jamais, il laisse ses moustaches cr\u00e9er l’impression d’un sourire.<\/p>\n

— Petit homme il faut que tu t’empiffres de ce chocolat pos\u00e9 sur la table, que tu en avales une quantit\u00e9 incroyable, et l\u00e0 enfin tu subiras la vraie crise de foie. Le reste viendra tout seul comme \u00e7a doit venir.<\/p>\n

Puis la maquilleuse aide Salvador \u00e0 se relever et ils me laissent seul encore \u00e0 genoux, pas loin de la table o\u00f9 sont \u00e9tal\u00e9es les confiseries.<\/p>\n

Je regarde \u00e0 gauche, puis \u00e0 droite et je suis son conseil. Je m’enfile des chocolats \u00e0 la pelle. Tellement qu’il ne reste presque rien sur la table.<\/p>\n

Sur quoi le producteur passant justement l\u00e0 (par hasard) pousse des cris d’orfraie en me voyant avec du chocolat me d\u00e9goulinant sur le menton et plein les mains encore.<\/p>\n

Vir\u00e9, je suis vir\u00e9 s\u00e9ance tenante.<\/p>\n

C’est \u00e0 ce moment l\u00e0 que je croise le regard de Salvador dans la glace de maquillage. Ses moustaches dessinent un joli 11h11. Et il me fait un petit geste de la main sans se retourner.<\/p>\n

Je me retrouve dans la rue comme un idiot. J’avais tir\u00e9 plein de plans sur la com\u00e8te avec l’argent que j’allais gagner gr\u00e2ce \u00e0 mon r\u00f4le de figurant dans ce clip. Tout est d\u00e9sormais tomb\u00e9 \u00e0 l’eau.<\/p>\n

Grand-m\u00e8re est dans le grand-hall et m’attend. Elle est surprise de me voir d\u00e9j\u00e0 arriver.<\/p>\n

— c’est d\u00e9j\u00e0 fini elle dit en me souriant, alors \u00e7a y est te voil\u00e0 riche ? Puis elle voit les t\u00e2ches de chocolat sur la jolie veste qu’elle a achet\u00e9e pour l’occasion. Et elle se f\u00e2che avec une rapidit\u00e9 dont elle est coutumi\u00e8re du fait.<\/p>\n

Mais quel petit salaud je n’y crois pas, une veste toute neuve.<\/p>\n

L’apoth\u00e9ose ne tarde pas lorsque l’assistante de production qui me suit de pr\u00e8s sans doute pour \u00eatre certaine que je ne revienne pas lui confie mes m\u00e9faits.<\/p>\n

— Mais il a le diable dans la peau ce gamin hurle grand-m\u00e8re au beau milieu du grand hall.<\/p>\n

C’est toute l’histoire de ma vie. J’ai dix ans et j’ai d\u00e9j\u00e0 compris l’essentiel. Sauf que je passe mon temps \u00e0 vouloir l’oublier, car justement je n’ai que dix ans.<\/p>\n

Mais tout de m\u00eame je prends une d\u00e9cision importante ce jour l\u00e0. Je d\u00e9cide de ne plus faire de plan. Car tous les plans que j’ai toujours \u00e9chafaud\u00e9s jusque l\u00e0 ne m’attirent jamais rien de bon.<\/p>\n

En fait j’aper\u00e7ois \u00e0 chaque fois la possibilit\u00e9 qu’un miracle surgisse et plus je m’en rapproche plus je sens mon avidit\u00e9 grandir , comme une urgence dira t’on. Et bien sur au moment m\u00eame o\u00f9 je vais enfin pouvoir saisir la queue fine du miracle, celui-ci se carapate en rigolant.<\/p>\n

Et me laisse totalement pantois comme un bon gros nigaud que je pense toujours \u00eatre.<\/p>\n

Exactement pareil dans mes r\u00eaves. J’ai dix ans mais je fais beaucoup de r\u00eaves \u00e9rotiques. Des femmes splendides \u00e0 la poitrine affolante, des madones extr\u00eamement charnues dont j’imagine les nichons comme des sources lact\u00e9e intarissables. Et des culs prodigieux comme des v\u00e9nus pr\u00e9historiques. J’ai feuillet\u00e9 quantit\u00e9 de magazines et d’encyclop\u00e9dies rien que pour me crever les yeux avec de telles images.<\/p>\n

Mais toujours au sein m\u00eame du r\u00eave au moment de voir enfin la r\u00e9alit\u00e9 crue si je puis dire, tout s’\u00e9vanouit et je me retrouve comme un idiot dans la ti\u00e9deur des draps. Rien de bien diff\u00e9rent dans la vie de tous les jours finalement.<\/p>\n

C’est Pablo qui me donne la clef du probl\u00e8me des ann\u00e9es plus tard, durant un voyage semblable \u00e0 celui que nous effectuons une nouvelle fois ensemble aujourd’hui.<\/p>\n

Il a presque le m\u00eame accent que Salvador ce qui n’est pas \u00e9tonnant puisqu’ils sont fr\u00e8res. Ils me disent aussi que je suis leur fr\u00e8re mais bien sur je n’en crois pas un mot. D’ailleurs la preuve, lorsque je parle je n’ai pas d’accent.<\/p>\n

— Moi non plus m’avoue Pablo je ne fais pas de plan. Je ne cherche pas, je trouve !<\/p>\n

Et des seins et des culs j’en trouve quand je veux vois-tu ajoute t’il en clignant d’un \u0153il.<\/p>\n

Nous sommes en train de patienter dans la coursive du grand vaisseau qui nous emporte vers Orion, et j’en profite pour revenir \u00e0 certaines m\u00e9moires comme nous le faisons quasiment tous ici.<\/p>\n

C’est une sorte de processus de d\u00e9compression comme en connait le plongeur en apn\u00e9e. On ne peut pas arriver aux abords d’Orion sans s’\u00eatre un peu nettoy\u00e9 de n\u00f4tre ignorance crasse terrestre.<\/p>\n

Par un des hublots j’observe l’espace intersid\u00e9ral. D\u00e9j\u00e0 au loin je peux voir les trois \u00e9toiles qui constituent la ceinture du Chasseur<\/p>\n

Alnitak, Alnilam et Mintaka me font \u00e0 chaque fois exactement le m\u00eame effet que lorsque je suis sur terre que je reviens de voyage et que j’aper\u00e7ois le panneau familier d’une sortie d’autoroute.<\/p>\n

Mon regard remonte et j’aper\u00e7ois les \u00e9paules d’Orion, constitu\u00e9es par B\u00e9telgeuse l’\u00e9norme qui va bient\u00f4t exploser en super nova et Bellatrix plus fine.<\/p>\n

— Nous arriverons bient\u00f4t, pile \u00e0 temps pour la r\u00e9union me confie Maria qui est l\u00e0 tout pr\u00e8s de moi. Je tourne mon visage vers elle d\u00e9laissant l’orgueilleux Orion.<\/p>\n

—Ecoute les chiens nous reconnaissent de loin me dit-elle et je comprends qu’elle parle des deux chiens d’Osiris Orion dont le plus grand semble tenir dans sa gueule l’\u00e9toile la plus brillante de notre ciel : l’\u00e9toile Sirius.<\/p>\n

Je ne sais plus combien de fois j’ai d\u00e9j\u00e0 effectu\u00e9 ce voyage. Peu \u00e0 peu ce sentiment familier balaie tout de mon ancien oubli.<\/p>\n

Au moment o\u00f9 nous atterrissons , l’homme que j’ai cr\u00fb \u00eatre n’est plus. De m\u00eame que tous mes compagnons ne sont plus ceux que j’imaginais qu’ils \u00e9taient quelques instants encore auparavant.<\/p>\n

C’est l’unique plan\u00e8te connue pour son orbite circumternaire, sa rotation s’effectue autour de trois \u00e9toiles cependant que lorsqu’on regarde le ciel on n’en voit toujours que deux. Ce qui rend sa surface d\u00e9j\u00e0 extr\u00eamement lumineuse ainsi que les \u00eatres qui la peuplent. Ils sont nos fr\u00e8res dont je dois taire le nom pour le moment.<\/p>\n

Le danger est toujours l\u00e0, il ne cesse de nous accompagner, la vigilance est de mise, une fois que nous avons recouvr\u00e9 toute la m\u00e9moire de qui nous sommes nous r\u00e9apprenons aussi \u00e0 vivre avec cette certitude.<\/p>\n

Ceux que l’on nomme habituellement les dracos, les reptiliens sur la Terre poss\u00e8dent une puissance mentale extraordinaire. D’ailleurs ils nous pistent sans rel\u00e2che gr\u00e2ce \u00e0 certains implants qui sont log\u00e9s depuis la nuit des temps dans ce que nous appelons la partie reptilienne de notre cerveau.<\/p>\n

Ces implants sont destin\u00e9s \u00e0 cr\u00e9er et maintenir la peur de l’environnement, au d\u00e9but \u00e0 des fins purement pratiques pour que nous ne nous autod\u00e9truisions pas. C’est une sorte de soupape de s\u00e9curit\u00e9 si l’on veut pour maintenir une machine en bon ordre de marche.<\/p>\n

Grace \u00e0 la peur nous avons pu survivre dans un univers souvent hostile, puis une fois la plan\u00e8te terre totalement conquise, nous avons \u00e9t\u00e9 conduits \u00e0 retourner la peur contre nous-m\u00eames au profit de ceux qui sont toujours cach\u00e9s sous les apparences et qui gouvernent d\u00e9sormais tant de mondes.<\/p>\n

Presque au m\u00eame moment o\u00f9 nous touchons le sol une immense joie m’envahit, elle est si forte que j’ai du mal \u00e0 conserver l’\u00e9quilibre. Je titube un peu. Et ces signes aussi me redeviennent soudain familiers je sais que mon fr\u00e8re arcturien n’est pas loin. Benoit d’ailleurs me salue au m\u00eame moment que je pense \u00e0 lui.<\/p>\n

Et il m’appelle par mon vrai pr\u00e9nom que je ne donnerai pas ici pour des raisons de s\u00e9curit\u00e9 \u00e9videntes.<\/p>\n

Salvador Dali non plus ne se nomme pas ainsi. Pas plus que Pablo Picasso. Il n’y a que Maria qui reste toujours Maria.<\/p>\n

L’\u00e9quipe terrienne est presque l\u00e0 au grand complet arriv\u00e9e avec d’autres vaisseaux. Nous sommes des milliers, une arm\u00e9e vraisemblablement.<\/p>\n

De grandes choses doivent \u00eatre en train de se fomenter dans l’univers car je reconnais les visages de nombreux fr\u00e8res venus de mondes lointains.<\/p>\n

Une lueur au dessus de nos t\u00eates nous obligent tous \u00e0 la relever. Une lueur qui arrive de plus en plus rapidement et qui semble tout \u00e0 coup faire p\u00e2lir la lumi\u00e8re d\u00e9j\u00e0 extr\u00eamement forte qui nous entoure.<\/p>\n

Saint-Michel archange ne se d\u00e9place jamais sans raison. Et si quelqu’un peut avoir un plan dans cette galaxie, nul doute que \u00e7a ne peut-\u00eatre que lui.<\/p>\n

C’est exactement \u00e0 ce moment l\u00e0 que je m’aper\u00e7ois \u00e0 quel point j’ai foi en l’archange et que mon incarnation sur terre avec ses doutes, ses certitudes, se h\u00e9sitations continuelles ne sont l\u00e0 que pour mieux renforcer l’amour que j’\u00e9prouve pour cet \u00eatre.<\/p>\n

Je ne suis qu’une toute petite partie de lui. Un peu comme si j’\u00e9tais une simple cellule de mon propre corps. Mais j’\u00e9prouve un amour incroyable, j’ai envie de danser tout \u00e0 coup en \u00e9prouvant la vie qui m’anime tout comme elle anime le corps de mes fr\u00e8res et s\u0153urs, de Saint-Michel lui-m\u00eame.<\/p>\n

Je comprends ma r\u00e9ticence \u00e0 ne pas vouloir faire de plan au del\u00e0 de toutes les histoires que je me suis invent\u00e9es pour parvenir \u00e0 cette r\u00e9v\u00e9lation.<\/p>\n

Car le plan vient de l’ensemble du corps tout entier et de l’instant pr\u00e9sent. De la fa\u00e7on dont le corps tout entier d\u00e9cide d’agir au pr\u00e9sent. Et cette d\u00e9cision est toujours d’autant plus parfait qu’elle provient de Soi et non de « moi ».<\/p>", "content_text": "La n\u00e9buleuse d\u2019Orion sond\u00e9e en profondeur avec la cam\u00e9ra HAWK-1 du VLT, au Chili. \u00a9 ESO, H. Drass et al. \n\n\u2014 Tu ne jures que par le hasard me dit Salvador mais que sais-tu du hasard ?\n\nEs-tu vraiment certain qu'il s'agisse vraiment du Grand Hasard horloger de l'Univers ou bien du petit hasard que tu fabriques continuellement \u00e0 ta propre sauce ?\n\nIl me fait peur Salvador. Il a des sorties impr\u00e9visibles qui me glacent le sang tout \u00e0 coup. \n\nOn s'est rencontr\u00e9s sur le plateau de tournage de la pub pour le chocolat d'une grande marque. Il a \u00e9t\u00e9 un tr\u00e8s grand peintre, le meilleur de son temps ajoute t'il avec son accent rigolo.\n\nAu d\u00e9but je crois qu'il plaisante et qu'il faut tout prendre au 3\u00e8me degr\u00e9. C'est exactement l\u00e0 qu'est mon erreur. Quand Salvador Dali dit quelque chose c'est Dieu qui s'exprime par sa bouche. Et si tu n'as pas cette foi l\u00e0 tu ne peux rien comprendre, et surtout pas au fait de te retrouver ici sur ce plateau de tournage.\n\nC'est dur d'avoir la foi. \n\nProbablement parce qu'on ne peut pas le d\u00e9cider. Je veux dire on ne peut pas arriver ainsi un beau matin en se disant aller aujourd'hui je vais avoir la foi. Ca ne fonctionne pas du tout comme \u00e7a.\n\n\u2014Agenouille-toi \u00e0 cot\u00e9 de moi et prions ensemble me dit-il. \n\nJe vois ses moustaches remonter de chaque cot\u00e9 de sa bouche comme s'il essayait de sourire. Mais Salvador Dali ne sourit pratiquement jamais, il laisse ses moustaches cr\u00e9er l'impression d'un sourire.\n\n\u2014 Petit homme il faut que tu t'empiffres de ce chocolat pos\u00e9 sur la table, que tu en avales une quantit\u00e9 incroyable, et l\u00e0 enfin tu subiras la vraie crise de foie. Le reste viendra tout seul comme \u00e7a doit venir.\n\nPuis la maquilleuse aide Salvador \u00e0 se relever et ils me laissent seul encore \u00e0 genoux, pas loin de la table o\u00f9 sont \u00e9tal\u00e9es les confiseries.\n\nJe regarde \u00e0 gauche, puis \u00e0 droite et je suis son conseil. Je m'enfile des chocolats \u00e0 la pelle. Tellement qu'il ne reste presque rien sur la table.\n\nSur quoi le producteur passant justement l\u00e0 (par hasard) pousse des cris d'orfraie en me voyant avec du chocolat me d\u00e9goulinant sur le menton et plein les mains encore.\n\nVir\u00e9, je suis vir\u00e9 s\u00e9ance tenante.\n\nC'est \u00e0 ce moment l\u00e0 que je croise le regard de Salvador dans la glace de maquillage. Ses moustaches dessinent un joli 11h11. Et il me fait un petit geste de la main sans se retourner.\n\nJe me retrouve dans la rue comme un idiot. J'avais tir\u00e9 plein de plans sur la com\u00e8te avec l'argent que j'allais gagner gr\u00e2ce \u00e0 mon r\u00f4le de figurant dans ce clip. Tout est d\u00e9sormais tomb\u00e9 \u00e0 l'eau.\n\nGrand-m\u00e8re est dans le grand-hall et m'attend. Elle est surprise de me voir d\u00e9j\u00e0 arriver.\n\n\u2014 c'est d\u00e9j\u00e0 fini elle dit en me souriant, alors \u00e7a y est te voil\u00e0 riche ? Puis elle voit les t\u00e2ches de chocolat sur la jolie veste qu'elle a achet\u00e9e pour l'occasion. Et elle se f\u00e2che avec une rapidit\u00e9 dont elle est coutumi\u00e8re du fait.\n\nMais quel petit salaud je n'y crois pas, une veste toute neuve.\n\nL'apoth\u00e9ose ne tarde pas lorsque l'assistante de production qui me suit de pr\u00e8s sans doute pour \u00eatre certaine que je ne revienne pas lui confie mes m\u00e9faits.\n\n\u2014 Mais il a le diable dans la peau ce gamin hurle grand-m\u00e8re au beau milieu du grand hall. \n\nC'est toute l'histoire de ma vie. J'ai dix ans et j'ai d\u00e9j\u00e0 compris l'essentiel. Sauf que je passe mon temps \u00e0 vouloir l'oublier, car justement je n'ai que dix ans.\n\nMais tout de m\u00eame je prends une d\u00e9cision importante ce jour l\u00e0. Je d\u00e9cide de ne plus faire de plan. Car tous les plans que j'ai toujours \u00e9chafaud\u00e9s jusque l\u00e0 ne m'attirent jamais rien de bon. \n\nEn fait j'aper\u00e7ois \u00e0 chaque fois la possibilit\u00e9 qu'un miracle surgisse et plus je m'en rapproche plus je sens mon avidit\u00e9 grandir , comme une urgence dira t'on. Et bien sur au moment m\u00eame o\u00f9 je vais enfin pouvoir saisir la queue fine du miracle, celui-ci se carapate en rigolant.\n\nEt me laisse totalement pantois comme un bon gros nigaud que je pense toujours \u00eatre.\n\nExactement pareil dans mes r\u00eaves. J'ai dix ans mais je fais beaucoup de r\u00eaves \u00e9rotiques. Des femmes splendides \u00e0 la poitrine affolante, des madones extr\u00eamement charnues dont j'imagine les nichons comme des sources lact\u00e9e intarissables. Et des culs prodigieux comme des v\u00e9nus pr\u00e9historiques. J'ai feuillet\u00e9 quantit\u00e9 de magazines et d'encyclop\u00e9dies rien que pour me crever les yeux avec de telles images.\n\nMais toujours au sein m\u00eame du r\u00eave au moment de voir enfin la r\u00e9alit\u00e9 crue si je puis dire, tout s'\u00e9vanouit et je me retrouve comme un idiot dans la ti\u00e9deur des draps. Rien de bien diff\u00e9rent dans la vie de tous les jours finalement.\n\nC'est Pablo qui me donne la clef du probl\u00e8me des ann\u00e9es plus tard, durant un voyage semblable \u00e0 celui que nous effectuons une nouvelle fois ensemble aujourd'hui.\n\nIl a presque le m\u00eame accent que Salvador ce qui n'est pas \u00e9tonnant puisqu'ils sont fr\u00e8res. Ils me disent aussi que je suis leur fr\u00e8re mais bien sur je n'en crois pas un mot. D'ailleurs la preuve, lorsque je parle je n'ai pas d'accent.\n\n\u2014 Moi non plus m'avoue Pablo je ne fais pas de plan. Je ne cherche pas, je trouve !\n\nEt des seins et des culs j'en trouve quand je veux vois-tu ajoute t'il en clignant d'un \u0153il.\n\nNous sommes en train de patienter dans la coursive du grand vaisseau qui nous emporte vers Orion, et j'en profite pour revenir \u00e0 certaines m\u00e9moires comme nous le faisons quasiment tous ici.\n\nC'est une sorte de processus de d\u00e9compression comme en connait le plongeur en apn\u00e9e. On ne peut pas arriver aux abords d'Orion sans s'\u00eatre un peu nettoy\u00e9 de n\u00f4tre ignorance crasse terrestre. \n\nPar un des hublots j'observe l'espace intersid\u00e9ral. D\u00e9j\u00e0 au loin je peux voir les trois \u00e9toiles qui constituent la ceinture du Chasseur\n\nAlnitak, Alnilam et Mintaka me font \u00e0 chaque fois exactement le m\u00eame effet que lorsque je suis sur terre que je reviens de voyage et que j'aper\u00e7ois le panneau familier d'une sortie d'autoroute.\n\nMon regard remonte et j'aper\u00e7ois les \u00e9paules d'Orion, constitu\u00e9es par B\u00e9telgeuse l'\u00e9norme qui va bient\u00f4t exploser en super nova et Bellatrix plus fine.\n\n\u2014 Nous arriverons bient\u00f4t, pile \u00e0 temps pour la r\u00e9union me confie Maria qui est l\u00e0 tout pr\u00e8s de moi. Je tourne mon visage vers elle d\u00e9laissant l'orgueilleux Orion.\n\n\u2014Ecoute les chiens nous reconnaissent de loin me dit-elle et je comprends qu'elle parle des deux chiens d'Osiris Orion dont le plus grand semble tenir dans sa gueule l'\u00e9toile la plus brillante de notre ciel : l'\u00e9toile Sirius.\n\nJe ne sais plus combien de fois j'ai d\u00e9j\u00e0 effectu\u00e9 ce voyage. Peu \u00e0 peu ce sentiment familier balaie tout de mon ancien oubli.\n\nAu moment o\u00f9 nous atterrissons , l'homme que j'ai cr\u00fb \u00eatre n'est plus. De m\u00eame que tous mes compagnons ne sont plus ceux que j'imaginais qu'ils \u00e9taient quelques instants encore auparavant. \n\nC'est l'unique plan\u00e8te connue pour son orbite circumternaire, sa rotation s'effectue autour de trois \u00e9toiles cependant que lorsqu'on regarde le ciel on n'en voit toujours que deux. Ce qui rend sa surface d\u00e9j\u00e0 extr\u00eamement lumineuse ainsi que les \u00eatres qui la peuplent. Ils sont nos fr\u00e8res dont je dois taire le nom pour le moment.\n\nLe danger est toujours l\u00e0, il ne cesse de nous accompagner, la vigilance est de mise, une fois que nous avons recouvr\u00e9 toute la m\u00e9moire de qui nous sommes nous r\u00e9apprenons aussi \u00e0 vivre avec cette certitude.\n\nCeux que l'on nomme habituellement les dracos, les reptiliens sur la Terre poss\u00e8dent une puissance mentale extraordinaire. D'ailleurs ils nous pistent sans rel\u00e2che gr\u00e2ce \u00e0 certains implants qui sont log\u00e9s depuis la nuit des temps dans ce que nous appelons la partie reptilienne de notre cerveau.\n\nCes implants sont destin\u00e9s \u00e0 cr\u00e9er et maintenir la peur de l'environnement, au d\u00e9but \u00e0 des fins purement pratiques pour que nous ne nous autod\u00e9truisions pas. C'est une sorte de soupape de s\u00e9curit\u00e9 si l'on veut pour maintenir une machine en bon ordre de marche. \n\nGrace \u00e0 la peur nous avons pu survivre dans un univers souvent hostile, puis une fois la plan\u00e8te terre totalement conquise, nous avons \u00e9t\u00e9 conduits \u00e0 retourner la peur contre nous-m\u00eames au profit de ceux qui sont toujours cach\u00e9s sous les apparences et qui gouvernent d\u00e9sormais tant de mondes.\n\nPresque au m\u00eame moment o\u00f9 nous touchons le sol une immense joie m'envahit, elle est si forte que j'ai du mal \u00e0 conserver l'\u00e9quilibre. Je titube un peu. Et ces signes aussi me redeviennent soudain familiers je sais que mon fr\u00e8re arcturien n'est pas loin. Benoit d'ailleurs me salue au m\u00eame moment que je pense \u00e0 lui.\n\nEt il m'appelle par mon vrai pr\u00e9nom que je ne donnerai pas ici pour des raisons de s\u00e9curit\u00e9 \u00e9videntes.\n\nSalvador Dali non plus ne se nomme pas ainsi. Pas plus que Pablo Picasso. Il n'y a que Maria qui reste toujours Maria.\n\nL'\u00e9quipe terrienne est presque l\u00e0 au grand complet arriv\u00e9e avec d'autres vaisseaux. Nous sommes des milliers, une arm\u00e9e vraisemblablement.\n\nDe grandes choses doivent \u00eatre en train de se fomenter dans l'univers car je reconnais les visages de nombreux fr\u00e8res venus de mondes lointains. \n\nUne lueur au dessus de nos t\u00eates nous obligent tous \u00e0 la relever. Une lueur qui arrive de plus en plus rapidement et qui semble tout \u00e0 coup faire p\u00e2lir la lumi\u00e8re d\u00e9j\u00e0 extr\u00eamement forte qui nous entoure.\n\nSaint-Michel archange ne se d\u00e9place jamais sans raison. Et si quelqu'un peut avoir un plan dans cette galaxie, nul doute que \u00e7a ne peut-\u00eatre que lui.\n\nC'est exactement \u00e0 ce moment l\u00e0 que je m'aper\u00e7ois \u00e0 quel point j'ai foi en l'archange et que mon incarnation sur terre avec ses doutes, ses certitudes, se h\u00e9sitations continuelles ne sont l\u00e0 que pour mieux renforcer l'amour que j'\u00e9prouve pour cet \u00eatre.\n\nJe ne suis qu'une toute petite partie de lui. Un peu comme si j'\u00e9tais une simple cellule de mon propre corps. Mais j'\u00e9prouve un amour incroyable, j'ai envie de danser tout \u00e0 coup en \u00e9prouvant la vie qui m'anime tout comme elle anime le corps de mes fr\u00e8res et s\u0153urs, de Saint-Michel lui-m\u00eame.\n\nJe comprends ma r\u00e9ticence \u00e0 ne pas vouloir faire de plan au del\u00e0 de toutes les histoires que je me suis invent\u00e9es pour parvenir \u00e0 cette r\u00e9v\u00e9lation.\n\nCar le plan vient de l'ensemble du corps tout entier et de l'instant pr\u00e9sent. De la fa\u00e7on dont le corps tout entier d\u00e9cide d'agir au pr\u00e9sent. Et cette d\u00e9cision est toujours d'autant plus parfait qu'elle provient de Soi et non de \"moi\".", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/image-1pngw1024-8ac5c7ba.png?1761475506", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/1-avril-2022.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/1-avril-2022.html", "title": "1 avril 2022", "date_published": "2022-04-01T17:21:00Z", "date_modified": "2024-11-30T18:21:26Z", "author": {"name": "Patrick Blanchon"}, "content_html": "<\/span>

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Pourquoi y a-t-il quelque chose plut\u00f4t que rien ? Pourquoi l\u2019\u00eatre plut\u00f4t que le n\u00e9ant ? Ces questions me hantent. Aujourd\u2019hui, je suis au bord de l\u2019Oise. Le fleuve charrie un pass\u00e9 boueux, tandis que des d\u00e9chets, amass\u00e9s sur ses berges, me rappellent une v\u00e9rit\u00e9 brutale : tout ce qui vit finit par pourrir, se d\u00e9sagr\u00e9ger. Une naus\u00e9e soudaine m\u2019assaille, comme un coup port\u00e9 \u00e0 la partie reptilienne de mon cerveau. Ces attaques sont devenues plus fr\u00e9quentes \u00e0 mesure que j\u2019aff\u00fbte l\u2019art de me poser des questions. C\u2019est comme si je m\u2019approchais d\u2019une zone interdite, un sanctuaire cach\u00e9, une sorte de zone 51 enfouie dans les m\u00e9andres de mon esprit.<\/p>\n

Les gardiens de cette zone ne se montrent qu\u2019au dernier moment : surgissant de l\u2019ombre, ils d\u00e9ploient des queues tranchantes comme des lames de rasoir. Ce sont des monstres, invisibles et mena\u00e7ants, veillant sur mes pens\u00e9es profondes. Ces cr\u00e9atures, je les vois partout. Elles sont dans les eaux opaques de l\u2019Oise, dans l\u2019\u00e9cume sale qui recouvre ses rives. Elles se tiennent en embuscade, l\u00e0 o\u00f9, enfant, je croyais encore que la p\u00eache \u00e9tait un acte d\u2019innocence. Mais ici, dans ces flots huileux troubl\u00e9s par les p\u00e9niches, il n\u2019y a plus rien \u00e0 attraper. Si la vie existe sous cette surface, elle appartient \u00e0 des formes monstrueuses qui ne ressemblent en rien \u00e0 la simplicit\u00e9 des poissons de mon enfance.<\/p>\n

J\u2019ai l\u2019impression d\u2019avoir r\u00e9tr\u00e9ci depuis le d\u00e9m\u00e9nagement. Les rep\u00e8res trac\u00e9s au crayon sur le chambranle d\u2019une porte contredisent pourtant cette impression. Mais quelque chose de moi s\u2019efface. Je ne poss\u00e8de plus qu\u2019un souvenir vague, une braise mourante, fragile et m\u00e9canique. Elle contient les ruines d\u2019un infini que je suis condamn\u00e9 \u00e0 oublier.<\/p>\n

En cette ann\u00e9e 1969, personne ne parle encore de « la loi de l\u2019attraction ». Ce n\u2019est pas une mode, pas encore. Et pourtant, j\u2019ai rapidement compris que cette id\u00e9e — demander \u00e0 l\u2019univers et recevoir — n\u2019\u00e9tait qu\u2019un pi\u00e8ge. Chaque fois que j\u2019ai formul\u00e9 un d\u00e9sir, l\u2019univers a r\u00e9pondu, mais toujours avec des cons\u00e9quences inattendues, souvent cruelles. J\u2019ai \u00e9t\u00e9 riche, j\u2019ai \u00e9t\u00e9 pauvre, heureux, malheureux, tour \u00e0 tour et parfois simultan\u00e9ment. \u00c0 chaque demande, une pi\u00e8ce manquait : quelque chose d\u2019essentiel \u00e9chappait toujours.<\/p>\n

Je r\u00e9alise aujourd\u2019hui que ce n\u2019est pas l\u2019univers que je dois tenter de modifier, mais moi-m\u00eame.<\/p>\n

J\u2019ai neuf ans. Une canne \u00e0 p\u00eache dans une main, des bottes trou\u00e9es, et cette conviction simple qu\u2019un enfant peut attraper un poisson s\u2019il en a envie. Mais cette journ\u00e9e au bord de l\u2019Oise sera la derni\u00e8re o\u00f9 je renouvellerai ce d\u00e9sir. Je comprends soudain que je ne suis qu\u2019un petit point perdu dans un vaste ensemble. \u00c0 neuf ans, je pressens qu\u2019il me faudra traverser des enfers pour comprendre mes choix.<\/p>\n

L\u2019entr\u00e9e au coll\u00e8ge cette m\u00eame ann\u00e9e me confirme cette intuition. L\u2019homme marche sur la lune, et moi, je franchis le portail d\u2019une autre plan\u00e8te : le coll\u00e8ge. Je suis p\u00e9trifi\u00e9. Ma m\u00e8re me d\u00e9pose devant les grilles en me rassurant avec des phrases convenues : « \u00c7a va aller, tu es un grand. » Mais en v\u00e9rit\u00e9, elle est surtout press\u00e9e de repartir, car elle a mal gar\u00e9 sa 4L.<\/p>\n

J\u2019ai peur de dispara\u00eetre, de me liqu\u00e9fier en passant le seuil de cette prison d\u00e9guis\u00e9e en \u00e9cole. Alors, je r\u00e9cite un Notre P\u00e8re, en silence. C\u2019est ma bou\u00e9e. Encore aujourd\u2019hui, soixante ans plus tard, cette pri\u00e8re me revient quand je suffoque, quand je me sens r\u00e9duit \u00e0 une tache humide au sol.<\/p>\n

La professeure de math\u00e9matiques de cette \u00e9poque reste grav\u00e9e dans ma m\u00e9moire. Elle avait une mani\u00e8re \u00e9trange de s\u2019humecter les l\u00e8vres toutes les cinq minutes. \u00c7a me terrifiait. Sa gentillesse \u00e9tait factice, une fa\u00e7ade. Et puis, il y avait ce mot qu\u2019elle aimait tant utiliser : « ignobles ». Elle nous qualifiait ainsi, nous, enfants de neuf ans. Est-ce qu\u2019un adulte peut prononcer un tel mot sans une intention fondamentalement mauvaise ?<\/p>\n

\u00c9videmment, on se moquait d\u2019elle. D\u00e8s qu\u2019elle tournait le dos, nous r\u00e9p\u00e9tions en d\u00e9tachant bien les syllabes : « I-G-N-O-B-L-E-S ». Elle se retournait brusquement, sa langue pointant hors de sa bouche pour mouiller ses l\u00e8vres s\u00e8ches. Rires et tremblements.<\/p>\n

Cette femme, avec son r\u00f4le d\u2019antagoniste, a marqu\u00e9 mon film. Elle m\u2019a barr\u00e9 la route des math\u00e9matiques, mais peut-\u00eatre \u00e9tait-ce \u00e9crit dans le script de mon histoire.<\/p>\n

Des ann\u00e9es plus tard, alors que j\u2019avais seize ans, je l\u2019ai vue sous un jour diff\u00e9rent. Je chantais \u00e0 une f\u00eate, accompagn\u00e9 de ma guitare. Elle \u00e9tait assise au premier rang, entour\u00e9e de coll\u00e8gues. Ses l\u00e8vres n\u2019\u00e9taient plus s\u00e8ches, son visage semblait apais\u00e9. Un homme, peut-\u00eatre son mari, lui tenait la main. Ce d\u00e9tail m\u2019a \u00e9mu. Je l\u2019ai vue sourire. Et moi, j\u2019ai chant\u00e9 plus juste, comme si ce moment m\u2019avait lib\u00e9r\u00e9 d\u2019un poids.<\/p>\n

Les monstres de mon enfance, ces serpents gardiens, ne m\u2019ont jamais vraiment quitt\u00e9. Ils incarnent mes peurs, mes limites, mes \u00e9preuves. Pour amadouer l\u2019un d\u2019eux, j\u2019ai m\u00eame sacrifi\u00e9 la vie d\u2019un oiseau, un acte l\u00e2che que je regrette encore aujourd\u2019hui. Mais ce sacrifice m\u2019a permis de franchir une \u00e9tape : entrer dans un nouvel ordre, une guilde dont je suis devenu membre \u00e0 mon insu, comme tant d\u2019autres de ma g\u00e9n\u00e9ration.<\/p>\n

Je me souviens encore de Maria, cette femme myst\u00e9rieuse qui nous a donn\u00e9 notre mission. Sa voix \u00e9tait rauque, bris\u00e9e par la fum\u00e9e de ses cigarettes.<\/p>\n

— Vous \u00eates l\u2019\u00e9quipe au sol, mes ch\u00e9ris. Il n\u2019y aura pas de renforts. Selon les pr\u00e9ceptes intergalactiques de non-ing\u00e9rence, c\u2019est \u00e0 vous de jouer. Souvenez-vous de ceci : la n\u00e9cessit\u00e9 de l\u2019infini repose sur votre capacit\u00e9 \u00e0 le nourrir avec la flamme du fini.<\/p>\n

Nous avons r\u00e9p\u00e9t\u00e9 en ch\u0153ur le mantra sacr\u00e9 :
\n« Il n\u2019y a pas d\u2019infini, il n\u2019y a que la n\u00e9cessit\u00e9 de l\u2019infini que l\u2019on nourrit \u00e0 la flamme du fini. »<\/p>\n

Et depuis, je continue d\u2019avancer.<\/p>", "content_text": "Pourquoi y a-t-il quelque chose plut\u00f4t que rien ? Pourquoi l\u2019\u00eatre plut\u00f4t que le n\u00e9ant ? Ces questions me hantent. Aujourd\u2019hui, je suis au bord de l\u2019Oise. Le fleuve charrie un pass\u00e9 boueux, tandis que des d\u00e9chets, amass\u00e9s sur ses berges, me rappellent une v\u00e9rit\u00e9 brutale : tout ce qui vit finit par pourrir, se d\u00e9sagr\u00e9ger. Une naus\u00e9e soudaine m\u2019assaille, comme un coup port\u00e9 \u00e0 la partie reptilienne de mon cerveau. Ces attaques sont devenues plus fr\u00e9quentes \u00e0 mesure que j\u2019aff\u00fbte l\u2019art de me poser des questions. C\u2019est comme si je m\u2019approchais d\u2019une zone interdite, un sanctuaire cach\u00e9, une sorte de zone 51 enfouie dans les m\u00e9andres de mon esprit. Les gardiens de cette zone ne se montrent qu\u2019au dernier moment : surgissant de l\u2019ombre, ils d\u00e9ploient des queues tranchantes comme des lames de rasoir. Ce sont des monstres, invisibles et mena\u00e7ants, veillant sur mes pens\u00e9es profondes. Ces cr\u00e9atures, je les vois partout. Elles sont dans les eaux opaques de l\u2019Oise, dans l\u2019\u00e9cume sale qui recouvre ses rives. Elles se tiennent en embuscade, l\u00e0 o\u00f9, enfant, je croyais encore que la p\u00eache \u00e9tait un acte d\u2019innocence. Mais ici, dans ces flots huileux troubl\u00e9s par les p\u00e9niches, il n\u2019y a plus rien \u00e0 attraper. Si la vie existe sous cette surface, elle appartient \u00e0 des formes monstrueuses qui ne ressemblent en rien \u00e0 la simplicit\u00e9 des poissons de mon enfance. J\u2019ai l\u2019impression d\u2019avoir r\u00e9tr\u00e9ci depuis le d\u00e9m\u00e9nagement. Les rep\u00e8res trac\u00e9s au crayon sur le chambranle d\u2019une porte contredisent pourtant cette impression. Mais quelque chose de moi s\u2019efface. Je ne poss\u00e8de plus qu\u2019un souvenir vague, une braise mourante, fragile et m\u00e9canique. Elle contient les ruines d\u2019un infini que je suis condamn\u00e9 \u00e0 oublier. En cette ann\u00e9e 1969, personne ne parle encore de \u00ab la loi de l\u2019attraction \u00bb. Ce n\u2019est pas une mode, pas encore. Et pourtant, j\u2019ai rapidement compris que cette id\u00e9e \u2014 demander \u00e0 l\u2019univers et recevoir \u2014 n\u2019\u00e9tait qu\u2019un pi\u00e8ge. Chaque fois que j\u2019ai formul\u00e9 un d\u00e9sir, l\u2019univers a r\u00e9pondu, mais toujours avec des cons\u00e9quences inattendues, souvent cruelles. J\u2019ai \u00e9t\u00e9 riche, j\u2019ai \u00e9t\u00e9 pauvre, heureux, malheureux, tour \u00e0 tour et parfois simultan\u00e9ment. \u00c0 chaque demande, une pi\u00e8ce manquait : quelque chose d\u2019essentiel \u00e9chappait toujours. Je r\u00e9alise aujourd\u2019hui que ce n\u2019est pas l\u2019univers que je dois tenter de modifier, mais moi-m\u00eame. J\u2019ai neuf ans. Une canne \u00e0 p\u00eache dans une main, des bottes trou\u00e9es, et cette conviction simple qu\u2019un enfant peut attraper un poisson s\u2019il en a envie. Mais cette journ\u00e9e au bord de l\u2019Oise sera la derni\u00e8re o\u00f9 je renouvellerai ce d\u00e9sir. Je comprends soudain que je ne suis qu\u2019un petit point perdu dans un vaste ensemble. \u00c0 neuf ans, je pressens qu\u2019il me faudra traverser des enfers pour comprendre mes choix. L\u2019entr\u00e9e au coll\u00e8ge cette m\u00eame ann\u00e9e me confirme cette intuition. L\u2019homme marche sur la lune, et moi, je franchis le portail d\u2019une autre plan\u00e8te : le coll\u00e8ge. Je suis p\u00e9trifi\u00e9. Ma m\u00e8re me d\u00e9pose devant les grilles en me rassurant avec des phrases convenues : \u00ab \u00c7a va aller, tu es un grand. \u00bb Mais en v\u00e9rit\u00e9, elle est surtout press\u00e9e de repartir, car elle a mal gar\u00e9 sa 4L. J\u2019ai peur de dispara\u00eetre, de me liqu\u00e9fier en passant le seuil de cette prison d\u00e9guis\u00e9e en \u00e9cole. Alors, je r\u00e9cite un Notre P\u00e8re, en silence. C\u2019est ma bou\u00e9e. Encore aujourd\u2019hui, soixante ans plus tard, cette pri\u00e8re me revient quand je suffoque, quand je me sens r\u00e9duit \u00e0 une tache humide au sol. La professeure de math\u00e9matiques de cette \u00e9poque reste grav\u00e9e dans ma m\u00e9moire. Elle avait une mani\u00e8re \u00e9trange de s\u2019humecter les l\u00e8vres toutes les cinq minutes. \u00c7a me terrifiait. Sa gentillesse \u00e9tait factice, une fa\u00e7ade. Et puis, il y avait ce mot qu\u2019elle aimait tant utiliser : \u00ab ignobles \u00bb. Elle nous qualifiait ainsi, nous, enfants de neuf ans. Est-ce qu\u2019un adulte peut prononcer un tel mot sans une intention fondamentalement mauvaise ? \u00c9videmment, on se moquait d\u2019elle. D\u00e8s qu\u2019elle tournait le dos, nous r\u00e9p\u00e9tions en d\u00e9tachant bien les syllabes : \u00ab I-G-N-O-B-L-E-S \u00bb. Elle se retournait brusquement, sa langue pointant hors de sa bouche pour mouiller ses l\u00e8vres s\u00e8ches. Rires et tremblements. Cette femme, avec son r\u00f4le d\u2019antagoniste, a marqu\u00e9 mon film. Elle m\u2019a barr\u00e9 la route des math\u00e9matiques, mais peut-\u00eatre \u00e9tait-ce \u00e9crit dans le script de mon histoire. Des ann\u00e9es plus tard, alors que j\u2019avais seize ans, je l\u2019ai vue sous un jour diff\u00e9rent. Je chantais \u00e0 une f\u00eate, accompagn\u00e9 de ma guitare. Elle \u00e9tait assise au premier rang, entour\u00e9e de coll\u00e8gues. Ses l\u00e8vres n\u2019\u00e9taient plus s\u00e8ches, son visage semblait apais\u00e9. Un homme, peut-\u00eatre son mari, lui tenait la main. Ce d\u00e9tail m\u2019a \u00e9mu. Je l\u2019ai vue sourire. Et moi, j\u2019ai chant\u00e9 plus juste, comme si ce moment m\u2019avait lib\u00e9r\u00e9 d\u2019un poids. Les monstres de mon enfance, ces serpents gardiens, ne m\u2019ont jamais vraiment quitt\u00e9. Ils incarnent mes peurs, mes limites, mes \u00e9preuves. Pour amadouer l\u2019un d\u2019eux, j\u2019ai m\u00eame sacrifi\u00e9 la vie d\u2019un oiseau, un acte l\u00e2che que je regrette encore aujourd\u2019hui. Mais ce sacrifice m\u2019a permis de franchir une \u00e9tape : entrer dans un nouvel ordre, une guilde dont je suis devenu membre \u00e0 mon insu, comme tant d\u2019autres de ma g\u00e9n\u00e9ration. Je me souviens encore de Maria, cette femme myst\u00e9rieuse qui nous a donn\u00e9 notre mission. Sa voix \u00e9tait rauque, bris\u00e9e par la fum\u00e9e de ses cigarettes. \u2014 Vous \u00eates l\u2019\u00e9quipe au sol, mes ch\u00e9ris. Il n\u2019y aura pas de renforts. Selon les pr\u00e9ceptes intergalactiques de non-ing\u00e9rence, c\u2019est \u00e0 vous de jouer. Souvenez-vous de ceci : la n\u00e9cessit\u00e9 de l\u2019infini repose sur votre capacit\u00e9 \u00e0 le nourrir avec la flamme du fini. Nous avons r\u00e9p\u00e9t\u00e9 en ch\u0153ur le mantra sacr\u00e9 : \u00ab Il n\u2019y a pas d\u2019infini, il n\u2019y a que la n\u00e9cessit\u00e9 de l\u2019infini que l\u2019on nourrit \u00e0 la flamme du fini. \u00bb Et depuis, je continue d\u2019avancer.", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/img_20180629_064735-2.webp?1748065191", "tags": [] } ,{ "id": "https:\/\/ledibbouk.net\/au-bord-de-l-oise.html", "url": "https:\/\/ledibbouk.net\/au-bord-de-l-oise.html", "title": "Au bord de l'Oise", "date_published": "2022-03-31T23:56:36Z", "date_modified": "2025-06-20T22:49:54Z", "author": {"name": "Auteur"}, "content_html": "

Pourquoi y a-t-il quelque chose plut\u00f4t que rien ? De l’\u00eatre plut\u00f4t que du n\u00e9ant seulement ? Lorsque je prends conscience de ces questions, je suis au bord de l’Oise et je remarque que quantit\u00e9 de d\u00e9chets jonchent les berges du fleuve.<\/p>\n

J’en suis malade presque aussit\u00f4t. Une attaque de la partie reptilienne du ciboulot. D’ailleurs ces attaques sont de plus en plus fr\u00e9quentes au fur et \u00e0 mesure que je m’am\u00e9liore dans l’art de me poser des questions. Comme si j’atteignais une zone prot\u00e9g\u00e9e, une sorte de zone 51 du cylindre.<\/p>\n

Mieux gard\u00e9e que le palais de Buckingham.<\/p>\n

Les gardiens sont invisibles jusqu’au dernier moment, lorsqu’ils surgissent de n’importe o\u00f9 et soul\u00e8vent leurs gigantesques queues munies d’un os tranchant comme la lame d’un rasoir.<\/p>\n

J’essaie de p\u00eacher dans l’Oise comme je le faisais dans le Cher. En vain. Car bien que les eaux ici soient tout aussi boueuses, leur opacit\u00e9 huileuse, provenant des p\u00e9niches incessantes qui passent \u00e0 l’horizon, ne semble pas recouvrir la vie telle que je l’ai autrefois connue.<\/p>\n

S’il y a de la vie sous cette surface puante, elle doit appartenir \u00e0 des monstres hostiles semblables en tous points \u00e0 ceux qui me barrent l’acc\u00e8s \u00e0 toutes les m\u00e9moires sem\u00e9es par mon moi du futur.<\/p>\n

J’ai l’impression d’avoir encore r\u00e9tr\u00e9ci depuis le d\u00e9m\u00e9nagement, alors que les rep\u00e8res visuels que l’on marque au crayon sur le chambranle d’une porte paraissent contredire cette impression.<\/p>\n

Je ne poss\u00e8de plus que le fant\u00f4me d’un souvenir vague, une braise que je tente d’entretenir d\u00e9j\u00e0 trop m\u00e9caniquement, et qui contient les ruines d’un infini que j’oublie progressivement, que je dois probablement oublier.<\/p>\n

On ne parle pas encore de la loi de l’attraction en cette ann\u00e9e 1969. Ce n’est pas un ph\u00e9nom\u00e8ne \u00e0 la mode. Mais j’ai d\u00e9j\u00e0 tir\u00e9 un trait sur celle-ci en ayant explor\u00e9 en un clin d’\u0153il la plupart de ses biais.<\/p>\n

Pourquoi changer d’\u00e9go ou d’univers ? Car \u00e9videmment cette loi poss\u00e8de un second effet Kiss Cool, comme toute loi.<\/p>\n

\u00c0 chaque fois que j’ai voulu attirer quoi que ce soit en effectuant une demande \u00e0 l’univers, il a r\u00e9pondu \u00e0 ma demande. Sauf que la cons\u00e9quence de cette demande et de cette r\u00e9ponse implique bien autre chose qu’une simple satisfaction, souvent \u00e9ph\u00e9m\u00e8re d’ailleurs.<\/p>\n

J’ai \u00e9t\u00e9 immens\u00e9ment riche, j’ai \u00e9t\u00e9 immens\u00e9ment heureux, et pauvre et malheureux, \u00e0 la fois tour \u00e0 tour et simultan\u00e9ment. C’est-\u00e0-dire que tout ce qui ne r\u00e9pond pas au plan imagin\u00e9 par l’\u00eatre que je suis pour propulser l’avatar vers sa mission me passe syst\u00e9matiquement sous le nez.<\/p>\n

Sinon je ne peux plus maintenir l’illusion. Sinon l’avatar n’est plus le m\u00eame avatar ou le film n’est plus le m\u00eame film.<\/p>\n

Que puis-je vraiment modifier pour b\u00e9n\u00e9ficier \u00e0 nouveau de la magie qui s’\u00e9vanouit d\u00e9j\u00e0 peu \u00e0 peu ? Et dans quel but surtout ? Ai-je d’ailleurs un vrai but ?<\/p>\n

\u00c0 neuf ans, j’arrive ainsi avec ma canne \u00e0 p\u00eache sur les berges du fleuve noir, et c’est la derni\u00e8re fois de mon enfance que je renouvelle le d\u00e9sir d’attraper des petits poissons dans les vastes profondeurs.<\/p>\n

Je comprends soudain que j’ai d\u00e9j\u00e0 choisi quelque chose une bonne fois pour toutes et qu’il me faudra traverser l’enfer, rien de moins, pour parvenir \u00e0 comprendre mon choix. Et que ma seule issue, s’il y en a une possible, ce n’est pas de changer mon univers, mais de me changer moi.<\/p>\n

Pour devenir qui ou quoi, je ne le sais pas. Rien n’est l\u00e0 pour me guider a priori. Je viens de me perdre dans l’espace et le temps.<\/p>\n

L’entr\u00e9e au coll\u00e8ge est un jour effrayant. La m\u00eame ann\u00e9e o\u00f9 l’homme marche sur la lune, je me retrouve \u00e0 la queue leu leu devant le grand portail qui s’ouvre soudain sur une incarc\u00e9ration vers laquelle les parents nous poussent gentiment, agac\u00e9s par nos peurs, notre appr\u00e9hension qu’ils dissimulent par des mimiques, des phrases consacr\u00e9es.<\/p>\n

-- \u00c7a va aller, tu es un grand, me dit ma m\u00e8re, en me laissant plant\u00e9 l\u00e0 car elle a mal gar\u00e9 sa 4L.<\/p>\n

J’ai l’impression que je vais me liqu\u00e9fier en passant le portail ; il ne va plus rien rester de moi qu’une tache humide au sol. Alors je r\u00e9cite le Notre P\u00e8re. C’est la seule chose que je peux faire quand rien ne va plus. Demander la protection de l’amour infini \u00e0 chaque fois que je suffoque, que je m’\u00e9teins comme si j’allais mourir.<\/p>\n

J’ai cette pr\u00e9sence d’esprit encore aujourd’hui, soixante ans apr\u00e8s mon entr\u00e9e en classe de sixi\u00e8me.<\/p>\n

Cette modestie me vient d’ailleurs. Elle est l\u00e0 depuis toujours je crois, bien que parfois je ne l’aie pas nomm\u00e9e ainsi. Il est arriv\u00e9 tellement de fois o\u00f9 j’ai confondu modestie et ignorance, modestie et b\u00eatise, modestie et na\u00efvet\u00e9, modestie et orgueil.<\/p>\n

Et par chance j’ai b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 des meilleurs professeurs dans les mati\u00e8res que je pr\u00e9f\u00e9rais, ce qui me permit de faire des progr\u00e8s en fran\u00e7ais et en anglais. Dans les langues surtout, et seulement maintenant que j’y repense.<\/p>\n

La professeure de math\u00e9matiques s’humecte les l\u00e8vres toutes les cinq minutes. Elle me flanque la p\u00e9toche, ce qui fait que je n’arrive pas \u00e0 me concentrer. De plus sa gentillesse est totalement factice, je le sens. Elle est capable d’utiliser soudain des mots d\u00e9sagr\u00e9ables pour qualifier qui nous sommes.<\/p>\n

J’ai retenu le mot ignoble par exemple. Est-ce que l’on peut dire un tel mot \u00e0 des gamins de neuf ans sans une intention fondamentalement mauvaise ?<\/p>\n

On se fout d’elle \u00e9videmment en l’imitant aussit\u00f4t qu’elle se retourne.<\/p>\n

I G N O B L E S<\/p>\n

On d\u00e9tache bien les lettres pour que l’effet soit maximum.<\/p>\n

Elle fait volte-face, et on voit sa langue sortir de sa bouche pour humecter ses l\u00e8vres s\u00e8ches.<\/p>\n

Rires et tremblements.<\/p>\n

Cette femme fait partie du film au m\u00eame titre que tous les personnages. Son r\u00f4le \u00e9tait sans doute de m’emp\u00eacher d’aimer les math\u00e9matiques. C’\u00e9tait le script et je l’ai de mon c\u00f4t\u00e9 ex\u00e9cut\u00e9 \u00e0 la lettre.<\/p>\n

Il m’arrive parfois de repenser \u00e0 elle. Notamment des ann\u00e9es plus tard apr\u00e8s ces \u00e9v\u00e9nements, j’avais seize ans d\u00e9sormais et je chantais \u00e0 l’occasion d’une f\u00eate en m’accompagnant de ma guitare.<\/p>\n

Elles \u00e9taient plusieurs parmi les professeurs que j’avais connus, assises devant moi au premier rang. Je les voyais \u00e9changer des propos vraisemblablement \u00e0 mon sujet tout en hochant la t\u00eate.<\/p>\n

Elle n’\u00e9tait plus la femme serpent, elle s’\u00e9tait adoucie, peut-\u00eatre avait-elle d\u00e9cid\u00e9 de devenir humaine elle aussi, \u00e0 moins que ce ne f\u00fbt ma propre m\u00e9tamorphose que je projetais sur l’\u00e9cran de mon propre cin\u00e9ma.<\/p>\n

Enfin le fait est qu’\u00e0 cet instant je la vis sourire, ses traits \u00e9taient apais\u00e9s, elle n’avait plus les l\u00e8vres s\u00e8ches, il y avait m\u00eame un homme pr\u00e8s d’elle qui lui tenait la main. \u00c7a m’a donn\u00e9 du c\u0153ur au ventre comme on dit, comme si soudain j’avais \u00e9t\u00e9 lib\u00e9r\u00e9 d’un sacr\u00e9 poids.<\/p>\n

J’ai chant\u00e9 probablement encore plus juste que jamais \u00e0 partir de cet instant-l\u00e0.<\/p>\n

J’avais travers\u00e9 d\u00e9j\u00e0 bien des cercles de l’enfer \u00e0 l’\u00e2ge de seize ans.<\/p>\n

J’avais sacrifi\u00e9 la vie d’un oiseau pour assouvir la soif du serpent, l’amadouer et ainsi, par cette preuve de l\u00e2chet\u00e9 av\u00e9r\u00e9e, j’avais su obtenir l’autorisation de p\u00e9n\u00e9trer, le c\u0153ur lourd, \u00e0 l’int\u00e9rieur de ses lignes.<\/p>\n

C’est ainsi que je fus recrut\u00e9 par la guilde comme agent double, comme tant d’autres jeunes gens de ma g\u00e9n\u00e9ration.<\/p>\n

On nous rappela alors notre mission.<\/p>\n

Je me souviens encore de la voix un peu \u00e9raill\u00e9e de cette femme qui allait devenir \u00e0 la fois ma s\u0153ur, ma compagne, mon amante : Maria. Elle fumait \u00e9norm\u00e9ment ce que je crus \u00eatre tout d’abord d’\u00e9normes joints de marijuana.<\/p>\n

-- Vous \u00eates l’\u00e9quipe au sol, mes ch\u00e9ris, il n’y aura pas de renforts, nous n’en avons pas les moyens selon les pr\u00e9ceptes intergalactiques de non-ing\u00e9rence.<\/p>\n

C’est \u00e0 vous de jouer d\u00e9sormais et souvenez-vous de la n\u00e9cessit\u00e9 de l’infini. C’est en achevant jusqu’\u00e0 la fin la mission que vous r\u00e9pondrez au mieux \u00e0 cette n\u00e9cessit\u00e9.<\/p>\n

Et tous en ch\u0153ur nous pronon\u00e7\u00e2mes alors le mantra sacr\u00e9 :<\/p>\n

« Il n’y a pas d’infini, il n’y a que la n\u00e9cessit\u00e9 de l’infini que l’on nourrit \u00e0 la flamme du fini. »<\/p>\n<\/span>

\n
\n\n \n\t\t<\/a>\n<\/figure>\n<\/div><\/span>", "content_text": " Pourquoi y a-t-il quelque chose plut\u00f4t que rien ? De l'\u00eatre plut\u00f4t que du n\u00e9ant seulement ? Lorsque je prends conscience de ces questions, je suis au bord de l'Oise et je remarque que quantit\u00e9 de d\u00e9chets jonchent les berges du fleuve. J'en suis malade presque aussit\u00f4t. Une attaque de la partie reptilienne du ciboulot. D'ailleurs ces attaques sont de plus en plus fr\u00e9quentes au fur et \u00e0 mesure que je m'am\u00e9liore dans l'art de me poser des questions. Comme si j'atteignais une zone prot\u00e9g\u00e9e, une sorte de zone 51 du cylindre. Mieux gard\u00e9e que le palais de Buckingham. Les gardiens sont invisibles jusqu'au dernier moment, lorsqu'ils surgissent de n'importe o\u00f9 et soul\u00e8vent leurs gigantesques queues munies d'un os tranchant comme la lame d'un rasoir. J'essaie de p\u00eacher dans l'Oise comme je le faisais dans le Cher. En vain. Car bien que les eaux ici soient tout aussi boueuses, leur opacit\u00e9 huileuse, provenant des p\u00e9niches incessantes qui passent \u00e0 l'horizon, ne semble pas recouvrir la vie telle que je l'ai autrefois connue. S'il y a de la vie sous cette surface puante, elle doit appartenir \u00e0 des monstres hostiles semblables en tous points \u00e0 ceux qui me barrent l'acc\u00e8s \u00e0 toutes les m\u00e9moires sem\u00e9es par mon moi du futur. J'ai l'impression d'avoir encore r\u00e9tr\u00e9ci depuis le d\u00e9m\u00e9nagement, alors que les rep\u00e8res visuels que l'on marque au crayon sur le chambranle d'une porte paraissent contredire cette impression. Je ne poss\u00e8de plus que le fant\u00f4me d'un souvenir vague, une braise que je tente d'entretenir d\u00e9j\u00e0 trop m\u00e9caniquement, et qui contient les ruines d'un infini que j'oublie progressivement, que je dois probablement oublier. On ne parle pas encore de la loi de l'attraction en cette ann\u00e9e 1969. Ce n'est pas un ph\u00e9nom\u00e8ne \u00e0 la mode. Mais j'ai d\u00e9j\u00e0 tir\u00e9 un trait sur celle-ci en ayant explor\u00e9 en un clin d'\u0153il la plupart de ses biais. Pourquoi changer d'\u00e9go ou d'univers ? Car \u00e9videmment cette loi poss\u00e8de un second effet Kiss Cool, comme toute loi. \u00c0 chaque fois que j'ai voulu attirer quoi que ce soit en effectuant une demande \u00e0 l'univers, il a r\u00e9pondu \u00e0 ma demande. Sauf que la cons\u00e9quence de cette demande et de cette r\u00e9ponse implique bien autre chose qu'une simple satisfaction, souvent \u00e9ph\u00e9m\u00e8re d'ailleurs. J'ai \u00e9t\u00e9 immens\u00e9ment riche, j'ai \u00e9t\u00e9 immens\u00e9ment heureux, et pauvre et malheureux, \u00e0 la fois tour \u00e0 tour et simultan\u00e9ment. C'est-\u00e0-dire que tout ce qui ne r\u00e9pond pas au plan imagin\u00e9 par l'\u00eatre que je suis pour propulser l'avatar vers sa mission me passe syst\u00e9matiquement sous le nez. Sinon je ne peux plus maintenir l'illusion. Sinon l'avatar n'est plus le m\u00eame avatar ou le film n'est plus le m\u00eame film. Que puis-je vraiment modifier pour b\u00e9n\u00e9ficier \u00e0 nouveau de la magie qui s'\u00e9vanouit d\u00e9j\u00e0 peu \u00e0 peu ? Et dans quel but surtout ? Ai-je d'ailleurs un vrai but ? \u00c0 neuf ans, j'arrive ainsi avec ma canne \u00e0 p\u00eache sur les berges du fleuve noir, et c'est la derni\u00e8re fois de mon enfance que je renouvelle le d\u00e9sir d'attraper des petits poissons dans les vastes profondeurs. Je comprends soudain que j'ai d\u00e9j\u00e0 choisi quelque chose une bonne fois pour toutes et qu'il me faudra traverser l'enfer, rien de moins, pour parvenir \u00e0 comprendre mon choix. Et que ma seule issue, s'il y en a une possible, ce n'est pas de changer mon univers, mais de me changer moi. Pour devenir qui ou quoi, je ne le sais pas. Rien n'est l\u00e0 pour me guider a priori. Je viens de me perdre dans l'espace et le temps. L'entr\u00e9e au coll\u00e8ge est un jour effrayant. La m\u00eame ann\u00e9e o\u00f9 l'homme marche sur la lune, je me retrouve \u00e0 la queue leu leu devant le grand portail qui s'ouvre soudain sur une incarc\u00e9ration vers laquelle les parents nous poussent gentiment, agac\u00e9s par nos peurs, notre appr\u00e9hension qu'ils dissimulent par des mimiques, des phrases consacr\u00e9es. \u2014 \u00c7a va aller, tu es un grand, me dit ma m\u00e8re, en me laissant plant\u00e9 l\u00e0 car elle a mal gar\u00e9 sa 4L. J'ai l'impression que je vais me liqu\u00e9fier en passant le portail ; il ne va plus rien rester de moi qu'une tache humide au sol. Alors je r\u00e9cite le Notre P\u00e8re. C'est la seule chose que je peux faire quand rien ne va plus. Demander la protection de l'amour infini \u00e0 chaque fois que je suffoque, que je m'\u00e9teins comme si j'allais mourir. J'ai cette pr\u00e9sence d'esprit encore aujourd'hui, soixante ans apr\u00e8s mon entr\u00e9e en classe de sixi\u00e8me. Cette modestie me vient d'ailleurs. Elle est l\u00e0 depuis toujours je crois, bien que parfois je ne l'aie pas nomm\u00e9e ainsi. Il est arriv\u00e9 tellement de fois o\u00f9 j'ai confondu modestie et ignorance, modestie et b\u00eatise, modestie et na\u00efvet\u00e9, modestie et orgueil. Et par chance j'ai b\u00e9n\u00e9fici\u00e9 des meilleurs professeurs dans les mati\u00e8res que je pr\u00e9f\u00e9rais, ce qui me permit de faire des progr\u00e8s en fran\u00e7ais et en anglais. Dans les langues surtout, et seulement maintenant que j'y repense. La professeure de math\u00e9matiques s'humecte les l\u00e8vres toutes les cinq minutes. Elle me flanque la p\u00e9toche, ce qui fait que je n'arrive pas \u00e0 me concentrer. De plus sa gentillesse est totalement factice, je le sens. Elle est capable d'utiliser soudain des mots d\u00e9sagr\u00e9ables pour qualifier qui nous sommes. J'ai retenu le mot ignoble par exemple. Est-ce que l'on peut dire un tel mot \u00e0 des gamins de neuf ans sans une intention fondamentalement mauvaise ? On se fout d'elle \u00e9videmment en l'imitant aussit\u00f4t qu'elle se retourne. I G N O B L E S On d\u00e9tache bien les lettres pour que l'effet soit maximum. Elle fait volte-face, et on voit sa langue sortir de sa bouche pour humecter ses l\u00e8vres s\u00e8ches. Rires et tremblements. Cette femme fait partie du film au m\u00eame titre que tous les personnages. Son r\u00f4le \u00e9tait sans doute de m'emp\u00eacher d'aimer les math\u00e9matiques. C'\u00e9tait le script et je l'ai de mon c\u00f4t\u00e9 ex\u00e9cut\u00e9 \u00e0 la lettre. Il m'arrive parfois de repenser \u00e0 elle. Notamment des ann\u00e9es plus tard apr\u00e8s ces \u00e9v\u00e9nements, j'avais seize ans d\u00e9sormais et je chantais \u00e0 l'occasion d'une f\u00eate en m'accompagnant de ma guitare. Elles \u00e9taient plusieurs parmi les professeurs que j'avais connus, assises devant moi au premier rang. Je les voyais \u00e9changer des propos vraisemblablement \u00e0 mon sujet tout en hochant la t\u00eate. Elle n'\u00e9tait plus la femme serpent, elle s'\u00e9tait adoucie, peut-\u00eatre avait-elle d\u00e9cid\u00e9 de devenir humaine elle aussi, \u00e0 moins que ce ne f\u00fbt ma propre m\u00e9tamorphose que je projetais sur l'\u00e9cran de mon propre cin\u00e9ma. Enfin le fait est qu'\u00e0 cet instant je la vis sourire, ses traits \u00e9taient apais\u00e9s, elle n'avait plus les l\u00e8vres s\u00e8ches, il y avait m\u00eame un homme pr\u00e8s d'elle qui lui tenait la main. \u00c7a m'a donn\u00e9 du c\u0153ur au ventre comme on dit, comme si soudain j'avais \u00e9t\u00e9 lib\u00e9r\u00e9 d'un sacr\u00e9 poids. J'ai chant\u00e9 probablement encore plus juste que jamais \u00e0 partir de cet instant-l\u00e0. J'avais travers\u00e9 d\u00e9j\u00e0 bien des cercles de l'enfer \u00e0 l'\u00e2ge de seize ans. J'avais sacrifi\u00e9 la vie d'un oiseau pour assouvir la soif du serpent, l'amadouer et ainsi, par cette preuve de l\u00e2chet\u00e9 av\u00e9r\u00e9e, j'avais su obtenir l'autorisation de p\u00e9n\u00e9trer, le c\u0153ur lourd, \u00e0 l'int\u00e9rieur de ses lignes. C'est ainsi que je fus recrut\u00e9 par la guilde comme agent double, comme tant d'autres jeunes gens de ma g\u00e9n\u00e9ration. On nous rappela alors notre mission. Je me souviens encore de la voix un peu \u00e9raill\u00e9e de cette femme qui allait devenir \u00e0 la fois ma s\u0153ur, ma compagne, mon amante : Maria. Elle fumait \u00e9norm\u00e9ment ce que je crus \u00eatre tout d'abord d'\u00e9normes joints de marijuana. \u2014 Vous \u00eates l'\u00e9quipe au sol, mes ch\u00e9ris, il n'y aura pas de renforts, nous n'en avons pas les moyens selon les pr\u00e9ceptes intergalactiques de non-ing\u00e9rence. C'est \u00e0 vous de jouer d\u00e9sormais et souvenez-vous de la n\u00e9cessit\u00e9 de l'infini. C'est en achevant jusqu'\u00e0 la fin la mission que vous r\u00e9pondrez au mieux \u00e0 cette n\u00e9cessit\u00e9. Et tous en ch\u0153ur nous pronon\u00e7\u00e2mes alors le mantra sacr\u00e9 : \u00ab Il n'y a pas d'infini, il n'y a que la n\u00e9cessit\u00e9 de l'infini que l'on nourrit \u00e0 la flamme du fini. \u00bb ", "image": "https:\/\/ledibbouk.net\/IMG\/logo\/cerveau-reptilien.webp?1750459794", "tags": [] } ] }