02 janvier 2022

Les fêtes, ça ne me dit rien, pas plus que les enterrements. Il ne reste que ce dimanche à passer. Traverser tout ça sans trop s’attarder, essayer d’éviter les paquets de confettis, même si ici, à Sète, on n’en voit pas beaucoup. La connexion internet est aussi mauvaise que mon humeur pour cette période. Je publie peu, je commente peu. Et le temps est gris. J’ai plaisanté en disant qu’on devrait porter plainte contre la météo — l’an dernier encore, ils nous promettaient du soleil à en attraper des coups de chaud. Mais bon, il en faut plus pour qu’on s’arrête. On a fini par marcher. On a marché longtemps, dans un air chargé de brouillard et de froid. On est arrivés au cimetière Le Py. Le cimetière des pauvres. Avant, c’était là qu’on enterrait les gens sans famille, pour libérer les fosses communes. Maintenant, les promoteurs se battent pour chaque mètre carré du bord de mer. On s’est arrêtés devant la tombe de Georges Brassens. Je me dis souvent que j’ai eu avec lui une sorte de relation père-fils. En regardant les noms autour de sa tombe, je me suis senti bizarre, un peu étourdi. Il y avait le nom d’une de mes ex, gravé en lettres dorées. J’ai allumé une cigarette. En quelques secondes, je nous ai revus tous les trois : le poète, elle, et moi, si l’on peut dire ça comme ça. J’ai eu un pincement au cœur. Une fois de plus, j’étais celui qui restait sur le carreau. Et puis la brume s’est dissipée. Je me suis senti léger, comme si je me débarrassais d’un poids qui traînait là depuis longtemps, sans que je m’en rende compte. J’ai réalisé que je ne pouvais plus en vouloir à personne. Juste à moi-même et à mon imagination débordante. Je me suis dit : « Voilà, enfin, c’est fini. » Je savais que ça ne m’apporterait pas de joie. Juste une paix étrange, comme celle qu’on ressent en sortant du boulot, après s’être fait virer.
Sinon, fait divers pas loin de là :
Ça a commencé le soir du 31 décembre. Une rave s’est installée quelque part au-dessus de la carrière, entre Villeveyrac, Loupian, et Poussan. On dit qu’il y avait entre 1 500 et 2 000 jeunes sur le site, venus à pied par les chemins qui traversent les vignes. Deux semi-remorques avaient été montés là-haut avec tout le matériel de sonorisation, et ça n’a pas pris longtemps pour que des camions, des camping-cars, et toutes sortes de véhicules s’y entassent. Des voisins décrivent une foule "très jeune. Beaucoup de mineurs. Des Français, mais aussi des Italiens, des Espagnols." Certains disaient même en voir qui rentraient à pied le long de la route, un peu à l’aveugle, avec le brouillard. "Ça nous inquiétait", disaient-ils. Le maire de Villeveyrac, Christophe Morgo, n’était pas vraiment surpris. Il a déjà vu ça. "Pour les déchets, on verra lundi", a-t-il dit, en soupirant. Ce qui l’agace, c’est aussi l’endroit où ils se sont installés. "Ce sont des terres communales, des terres qu’on avait replantées avec des nectarifères et des mellifères pour les abeilles." Il ajoute, presque soulagé : "Heureusement, le berger qui vient ici n’était pas encore arrivé !" En 2021, pas moins de 36 raves avaient eu lieu ici, dans ce coin de l’Hérault. Celle-là, c’est la première de 2022. Le maire a déjà porté plainte. Photos, vidéos, plaques d’immatriculation : tout a été pris en main par la gendarmerie. Morgo dit qu’il en appelle depuis des années aux pouvoirs publics pour trouver une solution, mais jusque-là, rien n’a vraiment changé. Les gendarmes sont là, postés aux trois entrées du site pour contrôler les véhicules. Le groupe avait d’abord tenté de s’installer sur le parking d’une zone commerciale à Saint-Jean-de-Védas, mais les gendarmes les ont suivis jusque tard dans la soirée, jusqu’à 22 heures. Après cet épisode de cache-cache, la rave s’est finalement installée. Les nuisances sont énormes. Le son traverse les collines et résonne jusque dans les villages voisins : Balaruc, Loupian, Poussan, et même Frontignan.