Coherence

La différence te saute aux yeux sitôt que tu aperçois quelqu’un qui veut être cohérent alors qu’il ne l’est pas. C’est pour ainsi dire un sixième sens que tu as développé depuis l’enfance. Autrefois percevoir cette différence t’effrayait. c’est sans doute pour cette raison que tu faisais ces rêves de personnages masqués qui, lorsqu’ils les retiraient devant toi, ne laissaient plus voir alors que des corps décapités. Effroyable comme sensation. De véritables cauchemars. Puis l’effroi s’est peu à peu déplacé dans la réalité de tous les jours. Cependant que ce sont plus des somnambules que tu vois désormais. Des gens qui dorment et qui semblent animés par des programmes qui tournent en boucle, des batch qui leur imposent de temps à autre de parler tout haut de cohérence comme pour mieux encore enfoncer ce concept dans leur vie de somnambule. Ce qui fait toujours le même drôle d’effet. Ce n’est plus aussi effrayant qu’autrefois évidemment et parfois tu te dis que c’est presque dommage. Car l’effroi possédait des propriétés sans doute plus motivantes que la drôlerie. L’effroi te faisait ruer dans les brancards , déployer maintes ruses, et au bout du compte elle te prodiguait la sensation d’être un peu plus malin que tous ces écervelés obsédés par cette emprise qu’avait sur eux cette obligation de cohérence. Jusqu’au jour où tu t’es retrouvé seul à naviguer dans l’incohérence générale. Tu as acheté des manuels de cohérence que tu as lus en long en large et en travers pour essayer d’en saisir la substance mais tu n’as jamais acquis la même célérité que celle des programmes informatiques. Et comme la médiocrité t’es insupportable tu as fini par abandonner ce projet comme tant d’autres du même acabit.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}