Nuit blanche
A minuit je me réveille et en prime je pète la forme. Un café, deux cafés et hop je vais barbouiller deux trois choses dans l’atelier pour me mettre en jambes. Et puis je me souviens que quelqu’un a posté un commentaire sur Facebook à propos de ce livre que j’avais publié l’année passée.
Mais vous comprenez je ne commande rien sur Amazone. Je n’aime pas Amazone, je conchie Amazone.. ( bon là c’est moi qui brode un peu... )
Du coup je me suis dit que j’allais m’attaquer à une montagne, la remise en forme de mon site d’artiste que j’ai laissé pourrir consciencieusement depuis des mois, et qu’en plus j’allais créer une page spécifique sur laquelle mes milliers de "fanas" amazonophobes pourraient enfin jouir de l’acquisition de cet œuf plus vraiment très frais du jour... excusez du peu.
Mieux vaut tard que jamais. C’est ma devise.
Donc après avoir sué, tempêté, râlé ça y est c’est fait.
En espérant que tout fonctionne, mais bien sur vous me direz si vous vous y collez.
D’ailleurs je suis en train de préparer un second tome qui devrait sortir durant cet été. Peut-être que je ferai même des promos ... arf rien que d’y penser ça me met déjà les poils.
Bonne journée !
Pour continuer
Carnets | avril 2021
Prendre le temps
Encore une réflexion de Michel Butor que je rumine depuis quelques jours et qui correspond tout à coup à une clef permettant d'ouvrir une issue à l'aporie des jours qui filent et qui semblent m'échapper continuellement. Prendre le temps d'écrire ou peindre c'est ,en gros, tout ce que j'ai mis en place pour contrer la fuite du temps. Pour lutter contre cette obsession d'anéantissement toujours présente, de plus en plus présente. Autrefois c'était le sexe. Mais d'une façon totalement inconsciente, irraisonnée, irraisonnable. Comme un engloutissement désordonné à grands renforts de sensations et d'ébats et qui à son terme laisse un vide semblable à tout ce que l'on peut imaginer du néant. Une défaite de l'intellect au profit de la pulsion. Cet élan vers cet autre anonyme. Dont la nécessité d'anonymat me permettait de devenir anonyme en quelque sorte à moi-même. Tout en mettant le doigt sur cette "vérité" d'être bien plus soi dans cet anonymat que travesti dans une identité. Un élan vers l'indifférencié qui à chaque fois était déçu, fabriquant contre mon grès la différence, me la révélant en creux. Le grain d'une peau, la cartographie d'une odeur, la sensation désagréable d'une caresse trop adroite, une chevelure rêche, une vulve trop large, des signes avant coureurs du dépérissement de la chair, vergetures, tâche de vieillesse , rides et ridules, une fois passées toute la littérature fumeuse et sentimentaliste que je pouvais m'inventer pour traverser les dégouts de façon héroïque, tombaient en quenouille quand je me retrouvais seul dans les rues à marcher vers mes gourbis. C'était survivre sur la fréquence de urgence, épouser la courbe de la course du temps, passer avec celle ci sous le niveau de l'amer pour m'enfoncer dans les ténèbres de la perte totale d'identité, dans le refus d'identité. Vers la mort ni plus ni moins. Chercher avidement en vain la fameuse voie étroite. Jamais avant d'atteindre la cinquantaine l'écriture ou la peinture ne m'ont apporté ce que m'offrait le sexe. Cette gravité tragique qui accompagnait celui ci, malgré tout l'humour que je pouvais parvenir à déployer dans la séduction, était cette lourde charge que je m'accrochais au cou pour me lancer du haut de tous les sens, vers un fleuve sombre charriant toutes les souillures de la ville. Un Gange personnel, entouré de brasier sur lequel flotte toujours une odeur de chair brûlée. Cette sensation d'être tout à coup en retard lorsque je me suis réveillé soudain au mois de janvier de cette année là, me foudroya. Comme dans la chanson de Brel : on se croit mèche on n'est que suif. Ce n'est qu'à partir de ce constat d'avoir perdu mon temps, de m'être fait floué, que je me suis demandé comment prendre mon temps. Ce n'est qu'à partir de là que j'ai aussi pris conscience que peindre est une façon de recréer quelque chose d'oublié, où qu'on n'a pas su voir ni comprendre. Et ce malgré toutes les informations, tous les mots d'ordre transmis par la famille l'école, l'église l'armée, l'entreprise. Ce n'est qu'en expérimentant moi même ce paradoxe que j'ai pu poser des couleurs et des lignes dessus, puis parallèlement peu à peu, laisser les mots les phrases remonter du centre de la terre comme ces pierres qui se métamorphosent du grossier vers le précieux. On sait pertinemment tout cela depuis toujours. Je n'inventerai rien en l'écrivant une fois de plus. On sait tout un tas de choses au fond de nous, mais leur utilité ne nous sert de rien tant que le temps n'est pas venu, voilà aussi ce que j'ai découvert en toute modestie. D'ailleurs cette découverte il se pourrait bien que je puisse la nommer modestie tout simplement. Prendre le temps c'est devenir modeste. Cela n'a l'air de rien évidemment quand on réside dans une idée d'importance, il faut du temps pour en saisir toute la subtilité. Ca s'éprouve comme la fadeur d'une soupe, la morue mal dessalée, et la douceur exagérée d'un loukoum. Huile sur papier 15x15 Avril 2021 Patrick Blanchon|couper{180}
Carnets | avril 2021
Cheval
Mon premier meilleur ami, et sans doute l'unique c'est un cheval. Et curieusement lorsque je pense à la sincérité, à celle que l'on croit nécessaire, obligatoire pour écrire Je revois encore mon cheval Il est noir comme celui de Zorro Et son nom c'est le mensonge. Sauf que je ne l'ai pas peint en noir à menteur, menteur et demi. illustration dessin Patrick Blanchon Avril 2021|couper{180}
Carnets | avril 2021
Pêle-mêle
il ne faut pas que je le perde de vue. Comme d'habitude je ne prépare rien je laisse venir ce qui vient au moment où j'écris, et le coq se rue sur l'âne et vice versa. Cela me fait penser à ce mot : pêle-mêle. Le désordre complet d'après ce qu'en disent les dictionnaires. Et également un cadre destiné à recevoir plusieurs photographies. Un désordre et un cadre en même temps. Bizarre...Mais peut-on en attendre plus de n'importe quelle définition ? Je m'aperçois que j'ai une sorte de rêverie récurrente concernant l'ordre. Un espace presque vide d' où j'imagine que la quiétude pourrait surgir comme un joli diable de sa boite. Et en même temps à chaque fois que j'ai habité de tels espaces je n'ai jamais pu y juguler l'angoisse qu'ils me procuraient. A 30 ans j'ai raté de nombreuses fois l'occasion de me pencher sur ce paradoxe. Je me souviens notamment d'un immense atelier que l'on m'avait prêté gracieusement durant quelques mois à Clignancourt. Tout y était si merveilleux, murs peints en blanc, grande verrière donnant sur les toits, lumière pénétrant à flot dans la grande pièce... je n'ai jamais pu me résoudre à y travailler tranquillement. Au lieu de ça je me réfugiais dans une petite alcôve qui mesurait 5 m2 pour écrire sur mes foutus carnets. Et j'y écrivais des choses sans intérêt , des chroniques ayant pour principal sujet ma poitrine oppressée ma bite ou mon nombril. De temps à autre un croquis, une petite aquarelle vite faite. Et au bout du compte quand la tension parvenait au paroxisme je me ruais vers la porte, dévalait l'escalier de bois menant à la cour, me hâtais encore d'aller ouvrir le lourd portail donnant sur la rue et je disparaissais dans l'errance et dans la marche. Des kilomètres et des kilomètres à me fuir. Fuir comme on dégueule. Je crois que l'ordre m'était d'autant insupportable qu'il m'apparaissait comme la première marche à gravir d'un escalier qui me mènerait inéluctablement vers la réussite ou à la gloire. C'était quelque chose d'entendu depuis le début, dès mes premiers vagissements de préma. Réussite ou gloire comme des revanches en héritage. Enfin un but qui aurait l'apparence d'un but mais qui, dans la réalité ne serait rien d'autre qu'un résidu de miel au fond d'une tasse dans laquelle un insecte se débat en vain pour s'en extraire. Cependant je n'arrivais pas à discerner ce mouvement de va et vient entre ordre et désordre, ce mécanisme que j'avais finalement mis en place depuis des années. L'ordre ce n'est pas l'ordre tel qu'on a voulu le faire entrer dans ma cervelle, ça je n'ai jamais vraiment pu m'en satisfaire et donc y adhérer. Cet ordre là je devais en avoir une vision déformée par la douleur, l'espoir et la déception que je devais traverser systématiquement pour tenter d'y parvenir. Mon dieu tout ces efforts pour découvrir le vain... la fatalité ou le destin.. Cet ordre n'était ni plus ni moins qu'une redite d'un événement dont nul ne parlait jamais. Un viol, un saccage que l'on tente de dissimuler derrière une apparente propreté, quelque chose d'harmonieux d'autant plus effrayant, puis presque simultanément pathétique que cette harmonie. Cette harmonie semble s'être vidée de tout l'essentiel. Une harmonie froide sans vie. Le désordre à bien y réfléchir récupérait cette idée de vigueur, il la recyclait, la transmutait. Le plus souvent en ennui d'ailleurs. En une relation fixe avec le monde. Une fixité comme issue du regard de la Gorgone qui te transforme en bloc de béton. Et par dessus le marché armé le béton. Ou plus modestement un boulet. Et c'est en boulet que je traversais la ville, une pierre qui roule a rolling stone créant ainsi cette fameuse impulsion propre à la cinétique, nécessaire au mouvement. Il n'y avait que ce mouvement d'important, le mouvement du corps pour se sentir vivant. Le reste, les pensées, les émotions c'était accessoire totalement, je crois que j'en doutais perpétuellement à un point qu'il m'était facile d'en changer à ma guise comme on s'empare d'outils, de couteaux de boucher pour découper la viande. Pour découper la réalité et le temps, la tailler en pièce. Un besoin de désordre, d'ennui, de mouvement, un refuge finalement contre cet ordre accepté tacitement par tous et qui me renvoyait cette image d'inaptitude chronique à y participer de bon cœur. Une impuissance que je me dissimulais ou contre laquelle je luttais inconsciemment en incarnant le désordre le plus flamboyant. Mon intelligence du monde fonctionne par association. Il n'y a rien de logique en apparence là dedans. Une dispersion tellement évidente, tellement obsessionnelle finalement qu'elle ressemble exactement à celle d'une ménagère qui du matin au soir briquerait sa baraque juste pour se défouler et ne pas se pendre. C'est en cela que je pense que l'ordre, le désordre, ce fameux pêle-mêle, sont souvent des mots employés machinalement par la plupart des personnes qui ne voient pas plus loin que le bout de leurs chaussures. Ils n'ont pas fait 10 mètres dans mes mocassins. Ce qui évidemment me rend responsable mais plus coupable. Responsable totalement cette fois et si j'ose dire "en pleine conscience" d'accepter cette chance d'être ce que je suis. C'est à dire cet apparent pêle-mêle. Ce cadre que l'on accroche à un mur de sa cervelle avec deux trois instantanés permettant d'identifier quelque chose pour, le plus souvent et seulement, se rassurer d'avoir été et pourquoi pas d'être encore, d'être toujours. Non je ne te laisse pas tomber Alcofribas. J'ai juste appris un peu plus de choses sur la patience et l'écoute. J'attends que tu ressortes de ton trou ou que tu redescendes de ton cerisier, de ta tonnelle. Tiens j'ai apporté un bout de réglisse, je vais l'éplucher tranquillement en attendant, et à la fin je le laisserai sur le muret si le cœur t'en dit... il fait bon, l'air s'est réchauffé, les oiseaux commencent juste à se réveiller, pas de raison pour que ce ne soit pas une bonne journée. Ah oui j'ai fait fait quelques peintures il faut que je les mette comme on laisse des miettes sur le chemin avant de comprendre que les cailloux c'est mieux. les premières images sont des détails des tableaux qui suivent|couper{180}