Défi et spectacle
Confusion de visages. P.Blanchon 2022
Il faut bien faire quelque chose. Produire. Et trouver un certain nombre d’astuces pour se motiver. Le défi comme source de motivation. Ne fonctionne jamais mieux que lorsqu’il est proféré publiquement. Très difficile de se lancer un défi à soi-même, sans passer par une médiation de la foule. Cela fait partie du spectacle. Puisque désormais il est à supposer qu’un défi lancé de soi-même à soi-même n’est qu’une version individualisée, une portion fractale de ce spectacle. En prendre conscience. Puis trouver la parade. Jouer avec les codes. Se lancer des défis inutiles. Des défis qui ne produisent que le simple mécanisme dissimulé sous le mot. Se donner en spectacle comme on se jette dans la gueule du loup, dans la fosse aux lions, mais on ne projette dans tout cela qu’un personnage, un fantôme, un mort. Les mâchoires muées par l’avidité claquent dans le vide, n’ont rien à se mettre sous la dent. Parvenir ainsi, par le défi à rendre étrange le défi lui-même et le spectacle qu’il produit. Cela passe la plupart du temps par le ridicule, le risible, le grotesque, le monstrueux, c’est à dire quelque chose de presque semblable au spectacle, mais dont on ne peut cependant pas ajuster correctement, irréfutablement les contours.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}