Déplacement ( revisite 06 , atelier d’écriture)

Un ciel bas, un chemin bordé de talus gras, un fossé avec des gargouillis, des haies pour arrêter le vent, le pas lourd d’une vache qui rejoint l’ombre d’un chêne puis s’y vautre, l’écho d’un coucou qui se répercute, des éboulis de petits cailloux sous la semelle de la chaussure, dominante verte du paysage, collines et halliers de ronces , fruits bleutés, un poids oppressant sur la poitrine qui voudrait hurler. Et puis ce sifflement qui jaillit des lèvres pour accompagner l’instant, une improvisation.

Un peu plus loin le chemin s’arrête net, passe une route goudronnée, qu’on emprunte à droite. Autres clôtures, talus, fossés, haies, palis tordus. Le bruit est différent, le bruit des pas sur la chaussée, et on peut voir un peu plus loin l’horizon de la route qui tourne là-bas sur la droite derrière l’if. De part et d’autres de la départementale, la terre retournée, une terre grasse, terre de sienne et ombre, avec quelques rehauts d’ocre et de vert, de grosses mottes laissées par les lames d’une machine agricole. Dans le ciel une buse effectue des cercles dans une odeur électrique des plages de silence, entrecoupées de bruits furtifs dans les taillis. Marcher jusqu’au bout, jusqu’au tournant de la route, trouver la perpendiculaire ensuite pour ne pas rebrousser chemin, fuir l’ennui plus loin.

Une ferme, un aboiement de chien, un tintement de clochettes , quelqu’un tape sur du métal dans la grange, on passe vite devant, sans regarder, on regarde droit devant le bout de cette nouvelle route, le nouveau point fixe, un nouveau tournant. S’en approcher, y arriver, tourner encore à droite plus loin, tourner en rond comme ça à angle droit pour ne pas trop voir qu’on tourne en rond ainsi chaque jour des vacances, emprunter divers itinéraires, s’illusionner ; on ne peut pas vraiment ici se perdre. D’ailleurs les toits reviennent, archi connus, le hameau, le début du même chemin par quoi on est parti. Miracle et déception de revenir à la maison.

Post-scriptum

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener