Fin de partie

L’intuition n’a pas que du bon. Le fait de n’être pas surpris par une réponse fournie à une question posée, sachant déjà ce qu’elle pourrait être et le constater, noir sur blanc, un dimanche soir par e-mail reçu. Quelques lignes à peine. Le recours à la formule administrative, prévu lui aussi si je puis dire. Évidemment que l’on ne va pas te payer les 80 euros d’une prime de transport à laquelle tu n’as pas droit puisque, durant ces deux mois d’été, tu n’es pas venu dispenser de cours à la MJC. On pourrait avoir des problèmes en cas de contrôle. Cette dernière phrase surtout. Que toi, tu aies eu des problèmes en ne recevant pas sur ton compte en banque ces sommes pourtant prévues, nous nous en tamponnons allègrement le coquillart.

Ça n’a pas mis longtemps pour faire un tour. Aussi sec, j’ai répondu que dans ce cas, j’étais au regret de ne pas pouvoir continuer. Veuillez agréer ma démission et tout le tutti. Tout à fait calmement. Tellement.

Et, ce n’est pas comme si j’étais en colère, choqué par quoi que ce soit. A bien me souvenir de cette histoire d’indemnité de déplacement. Une astuce comptable pour ne pas avoir à inscrire la somme sur laquelle nous nous étions cependant mis d’accord en septembre dernier. J’en avais déjà imaginé les conséquences probables par la suite. Une amputation claire et nette de ces salaires durant l’été. Alors que sur les périodes de congés plus courtes, ils n’avaient sans doute pas osé. « En cas de contrôle, on pourrait avoir des problèmes » sûrement oui, un contrôle de ma part surtout, disons en période de fin d’année dernière vers Noël durant les vacances scolaires. Mais, ils n’ont pas osé, c’était trop proche de l’embauche. Alors que là plus facile sans doute, plus profitable en matière comptable. On vous le met bien profond et devant le fait accompli, à vous de jouer.

30 euros net de l’heure, c’est pourtant tout ce sur quoi nous nous étions mis d’accord. Oralement. Eh bien, ils ne pouvaient pas. Ainsi, il fallait inventer une combine pour faire passer la pilule. Notamment se préserver du quand dira-t-on que les autres professeurs ne sachent plutôt pas ce tarif exorbitant.

Particulièrement ceux qui sont là depuis des lustres bénévoles. Vous ne vous rendez pas compte.

Le bénévolat, je pourrais écrire un recueil entier. Sur les vertus du scoutisme aussi. Mais pas d’humeur maintenant vraiment. Et, le pire, le plus saugrenu, c’est que je passerai pour un orgueilleux, un capitaliste. 30 euros net de l’heure. N’importe quoi. J’imagine donc que la démission les soulagera forcément autant que moi.

Ensuite absorber le choc, étudier son impact sur la géométrie de la semaine, du mois. Se dire que récupérer 240 euros à vrai dire pour conserver l’assiette ce n’est peut-être pas si compliqué que ça. Ouvrir un nouveau créneau à l’atelier pour des cours, par exemple, trouver seulement cinq élèves nouveaux. Mieux encore se mettre au travail, ne pas rouvrir de créneau. Fabriquer enfin ces cours numériques et nourrir cette page Patreon que j’ai ouvert depuis désormais une éternité.

Une fois de plus se mettre en danger suite à une injustice éprouvée et qui fait réagir cette fierté, cet orgueil, c’est loin d’être une première fois. Et, en réalité, il est même grisant de retrouver cela, à 63 ans, un petit coup de jeune, cela remet d’aplomb la bête.

Post-scriptum

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Pour continuer

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

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mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener