Grappiller

Bien sûr il y a grappe mais ne pas oublier piller. Grappiller des grains de raisin, grappiller du savoir. Une dépendance à la saison dans les deux cas. Et tant que c’est pour se nourrir rien à y redire. L’intention claire de vivre ou de survivre. Mais si c’est pour le pouvoir, l’apparence, et le gouffre qui les fonde, pas d’intérêt. Plutôt explorer le manque, essayer d’amadouer la faim, l’avidité. Renoncer à l’immédiateté permanente. Recréer le temps et les saisons, une lenteur. S’ extraire d’une illusion en s’engouffrant dans une autre. Peut-être et pourquoi pas. Tenir le doute à l’œil aussi. Le passage alors est indiqué par une forme inédite de la lassitude. Quand elle surgit, traverse le champs de vision, attire l’attention. Céder à cette lassitude. Ne pas hésiter à la suivre. Passer d’une desolation à une autre ainsi, tant que l’idée, le fantasme d’abondance persiste. Recommencer autant de fois que nécessaire jusqu’à l’oubli des mots désolation et abondance. C’est tardivement que l’on parvient au statut quo. Un état d’avant. Avant que tout ne nous emporte. L’état dans lequel nous sommes vraiment, avant la naissance, après la mort. Encore une fois une tentative d’explication d’un événement mythique. Ces quelques coups de fusil tirés par la fenêtre de la cuisine. Ces merles noirs baignant dans le sang rouge sur la neige blanche. Cette rage qui possédait soudain mon père quand il apercevait des grappilleurs dans le jardin. Cette faiblesse qui de lui se sera jetée sur moi comme un virus. Pour la comprendre, l’accepter, et retrouver le statut quo, épouser tous les rôles. Être à la fois le jardin, les derniers fruits, l’oiseau, le fusil, le manque, le miroir.

Post-scriptum

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener