informe et forme

lire, écrire un journal, c’est côtoyer au quotidien ces deux notions d’informe et de forme. On ne sait d’où viennent les mots, ceux que l’on lit, que l’on écrit. Il est plus simple de penser qu’ils proviennent d’un lieu, d’un espace vagues, sans limite ni géolocalisation précises, sans temporalité définie, et qu’une action (lire, écrire) les extraira, leur conférera une forme visible alors que l’instant précèdent ils n’en possédaient pas. Ils n’étaient que pensée, rêve, angoisse, buée, vapeur, gaz. autant de termes proches du volatil, de la metamorphose.

Bien sûr c’est la même chose de prendre un pinceau et de tracer quelque chose sur une surface. Et que ce soit via une idée ou rien c’est pareil à mon avis. D’ailleurs pour y être attentif il est fréquent que ce qui surgit prenne le pas sur "tout" ce que l’on peut avoir imaginé, fomenté, calculé en amont. Ce "tout" miniature, minuscule, humain, devient comme suspect puis erroné. Cependant que simultanément il semble important qu’il doive passer par le sas du "rien" qu’il ne soit plus que ce "rien" probablement aussi erroné que ce "tout" dont on l’affublait l’instant auparavant. Il faut que ces deux notions d’une même chose en soi-même effectue cet aller retour en tout et rien que ces deux mots s’effondrent en chœur lorsque surgit la forme quelle qu’elle soit

Ensuite il est possible que l’on soit médusé par ce qu’on lit écrit dit ou peint. Il est possible que cette forme face à laquelle on se tient nous plonge tout à coup dans une hypnose - comme on peut être hypnotisé en passant devant une vitre, un miroir qui renverrait ce que l’on pense être via sa propre image, ce fantasme. Mieux vaut en être averti le plus tôt possible au cours d’une vie. car on prendra plus vite ce réflexe, cette habitude de traverser cette illusion physiquement en effectuant quelques pas en arrière, en détournant le regard, en brandissant un sourire poli, en allant chercher le pain, ou prendre un bol d’air.

Puis revenir ã cet instant névralgique qui aura provoqué en même temps cette hypnose comme ce repli.

C’est là que naissent le geste, l’acte, et au final cette forme. Forme sur quoi il faudra se pencher pour tenter de saisir ce qu’elle veut dire, pour saisir non pas une chose cartésienne, logique, mais le souffle, l’haleine, la présence d’une chose, d’un être, indéfinissables.

Enfin, comme pour une peinture parvenir ã s’arrêter net, ã retenir sa main pour laisser l’indéfinissable suffisamment visible une fois qu’on l’a débusqué.

Se retirer. Revenir à l’informe, patienter.

Deux petites huiles sur papier format A4 réalisées sur un coin de table hier soir

Post-scriptum

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Pour continuer

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

Comme

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

technique mixte 70x70 cm

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener