La vision du premier printemps.

Fresque de 90 mètres et son auteur David Hockney.

Clara referma son livre et se rendit à la fenêtre. Ce matin-là, la clarté du jour pénétrait de manière différente dans la pièce et faisait reculer la pénombre. Elle en fut un instant étonnée puis, pour en avoir le cœur net, elle se couvrit d’un châle et sortit au jardin. Là soudain, elle vit que le printemps était arrivé. Quelque chose dans l’air, dans la flagrance, dans la couleur, une chose semblable certainement, mais qui empruntait chacun de ses sens dans une sorte d’urgence comme pour le répéter. Et, à 95 ans, Clara éprouva cette sensation peu ordinaire de sentir comme jamais auparavant que le printemps était arrivé, ou qu’elle-même était arrivée à avoir une disponibilité d’esprit suffisamment nette pour l’accueillir.

Le paysage se déployant au-delà du jardin comme le jardin ressemblait à l’un de ces rouleaux chinois dans lequel le spectateur n’est pas tenu de rester immobile. Elle pouvait sans faire un pas se déplacer dans le paysage dans son ensemble. Elle n’était plus tenue par l’obligation monoculaire d’un seul point de vue. Toute la perspective s’était modifiée et ce qu’elle constatait, c’est qu’elle pouvait enfin prendre le temps de regarder et de voir ce paysage. Peut-être en raison de ce confinement qui l’avait obligé à rester enfermée chez elle de si longs jours.

Elle resta là à contempler le printemps un long moment. Puis, elle eut envie d’aérer la maison. Ouvrir toutes les fenêtres pour renouveler l’air, que cette nouvelle sensation demeure chez elle, et y demeure autant que puissent demeurer les choses quand on atteint un âge certain.

Post-scriptum

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener