renoncer résister

Des rares souvenirs que tu conserves de ton éducation catholique cette petite phrase, énoncée par le curé du village dans la salle de catéchisme à propos des sentiers escarpés en regard des autoroutes. Comme si toute ta vie à venir trouve soudain un sens en la retrouvant ce matin dans le labyrinthe de la mémoire. Et tu ne sais toujours pas s’il s’agit d’intuition ou de prémonition, d’ailleurs il y a de grandes chances que tu ignores ces mots car à cette époque tu n’es qu’un enfant. Le fait est que cette phrase est comme une rouille qui ronge encore ton cœur plus de cinquante années plus tard. A rapprocher de ta résistance à pénétrer dans l’œuvre de Léon Bloy dans ta jeunesse en raison de l’excès de pathos et de radicalité, d’intégrisme dont elle te paraît truffée. Pourtant c’est la même volonté de renoncement au fameux bien-être, au confort, dans lequel tu te reconnais, la même intransigeance de fond quant à ces lâchetés ces faiblesses que nourrissent tout compromis tout négoce. La même vénération pour la souffrance et la douleur. Tu confonds même parfois la morgue de Bloy avec celle de Marcel Moreau. Tu décèles en toi cette même attirance et répulsion quant à la langue utilisée par chacun pour exprimer leur résistance à ce pseudo bien-être établi comme mot d’ordre. Et cette répulsion ne provient que de ta modestie mal placée. Modestie qui aujourd’hui te paraît être sans doute la pire dérive provoquée par cet enseignement catholique. Une faiblesse contre toute attente. Une tiédeur écoeurante. Et sans doute que si tu pousses encore un peu plus loin la réflexion cette modestie est désormais ce qui remplace l’ennui de ton enfance de ton adolescence, d’une grande partie de ta vie d’adulte. C’est le joug avec lequel on attache les bœufs ou les chiens. C’est à dire que l’excès d’orgueil d’autrefois auquel tu t’obstines à renoncer à un moment de ta vie, tu en ignores la fonction première. Tu abdiques en t’engouffrant comme tout à chacun dans le mot d’ordre de la modestie. Alors qu’au contraire aller jusqu’au bout de cet orgueil est l’exigence première, c’est à dire ce fameux petit sentier si ardu à arpenter. Ce qui est ardu est intime pour tout à chacun selon ses faiblesses ou facilités, ses propres velléités. Renoncer à la modestie demande autre chose que du courage, qui est un mot englobant tout un monde de morale. Alors que ton intégrité exige au contraire de maintenir la flamme vivante. Que cette flamme provienne de quelque combustible que ce soit n’est d’aucune importance au final. Tout ce qui compte c’est d’ouvrir les yeux, de contempler cette obscurité dans laquelle tu te déplaces encore à tâtons, par manque de foi en ta propre flamme. Quant à cette jalousie envers Bloy ou Moreau regarde-là aussi bien en face. Ce sont les braises presque éteintes de ton vieil orgueil. Et tu peux souffler sur elles pour retrouver ton feu. Non plus en te comparant comme le font les gamins mais en avançant encore un pas après l’autre résolument. Car si tu n’acceptes pas, toi, de posséder ton juste talent qui donc l’acceptera. Et quand bien même l’accepte t’on à ta place le doute encore subsiste à chaque fois. Et n’imagine surtout pas de t’appuyer sur la dérision ou l’ironie, ces biais, ces bifurcations, ces tentations. Renonce et résiste à ta façon.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}