vocabulaire

avoir du vocabulaire, avoir de quoi, ce n’est pas la même chose qu’être au fait des mots, explorer à chaque instant toutes leurs significations, au sens propre comme au figuré. Être dans le mot comme dans une embarcation en pleine mer, par tout temps que ceux-ci soient calmes ou agités.
Ainsi le mot "vocabulaire"peut-il donner du fil à tordre sans même y penser vraiment, créer des gènes, des prétentions, des extravagances comme des excès de scrupules. L’obsession du vocabulaire revient parfois par bouffées ou averses. A ces moments là, relever le col de la veste, ne pas se laisser effrayer ni distraire, continuer son chemin, faire avec ce que l’on a. Ce qui n’empêche pas de rester curieux envers les inconnus, de visiter les dictionnaires.
Absorber un nouveau mot exige un minimum de circonspection, ne pas décider trop vite qu’il nous appartient, mais tenter de remonter son âge, comprendre son étymologie, sa raison d’être, sa constitution en premier lieu. Le prononcer en pensée, à voix basse, puis un peu plus fort, pour écouter s’il nous va comme peut aller une chaussure au pied. Si c’est douloureux, bizarre, décalé, ne pas essayer de modifier ses pieds, de faire semblant d’avoir l’air, demander une autre taille, une autre paire, un autre modèle, peut-être moins "chic" mais plus confortable, s’y retrouver pour poursuivre la marche.
Amasser du vocabulaire comme on amasse une fortune, puis tenir chaque pièce, chaque billet, chaque nombre aligné en colonne dans une indifférence à terme parce qu’on n’a pas produit d’effort pour les obtenir autre que celui de les récolter. procure une forme d’ennui, un enfermement, un quant à soi. C’est de ce lieu circulaire que fusent les jugements comme autant de barricades pour sécuriser l’endroit. Ceux qui n’ont pas autant de vocabulaire, de panache, de fortune, deviennent les gueux dont nous tirerons notre sentiment de richesse, et toute la tristesse qui va bien avec.
Plus jeune on s’invente parfois des super pouvoirs. Par exemple celui de déceler les mots qui ne conviennent pas dans une bouche. On s’invente tellement de choses quand on est jeune, très peu survivent avec le temps, et c’est de tous ces cadavres, ces fantômes que tire sa substance une forme, de plus en plus rigide sans même qu’on s’en rende compte, que l’on nomme par bravade, la sérénité.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}