Tous paraissent croire à la solennité de la situation. Un enterrement, difficile de faire autrement. Pourtant, à mesure que les souvenirs s’échangent, quelque chose grince. L’éloge devient inventaire.

– Il détestait les asperges, ça je peux vous le dire.
– Ah non, c’était les endives.
– Oui, enfin, il n’aimait pas grand-chose.

Un silence. Quelqu’un renifle. Difficile à dire si c’est d’émotion ou d’agacement.

– Il avait un rire franc.
– Plutôt bruyant.
– Un rire d’otarie.

Nouveau silence, plus long. Quelques sourires étouffés. On se racle la gorge.

– Un brave type, quand même.
– Oui.
– Il nous manquera.

Puis ils baissent la tête, remettent un peu d’ordre dans leur sérieux, et fixent à nouveau le cercueil.
Le plus étonnant de l’affaire fut le fou-rire qui emporta la veuve bien malgré elle.