Le bouddha rieur sur le téléviseur
Il ne m’appartient pas. Il appartient à la maison. À mon père. Je le mets dans le coffre de la Dacia, parmi les restes de ce que je n’ai pas pu jeter.
Je referme la maison derrière moi. C’est fini.
Sur la route, dans le rétroviseur, une tête : il se marre. Épaules rondes, graisse en plis, pommettes luisantes. Un bâton, un balluchon. Il ressemble à Diogène. Moi, pas.
La nuit, l’autoroute, Melun derrière. Je roule, il rit.
Un cube blanc, étagère premier prix. Dix ans qu’il est là. En silence, mais pas tout à fait. Il prend la poussière, avale les années, persiste.
De temps en temps, je le regarde. Il me regarde aussi.
Puis un matin, j’ai dit : il faut s’en débarrasser.
Trois photos. Une annonce. « Vend Bouddha rieur, zen, acajou synthétique. Bon état. 5 euros. »
Rien.
Puis rien encore.
Parfois, en cherchant autre chose, je tombe sur lui. Son image, son rire coincé entre une table basse et un vélo d’appartement. Il est toujours là, suspendu.
C’est rassurant, d’une certaine manière.
Noël dernier, mon beau-fils l’a pris. Il l’a remis à un acheteur. Un type de la région parisienne.
Depuis, un vide sur le cube blanc. Je le regarde. Il ne me regarde plus.
Parfois, un pincement au cœur. Rien d’autre.
Je me demande si c’est ce pincement qui me relie encore à quelque chose. Si ce n’est pas ça, le dernier fil.
J’ai toujours été du côté des perdants, des loosers. Je ne crois pas que ce soit un choix. Peut-être que c’est plus simple de se détacher quand on n’a jamais rien possédé.
Mais parfois, la nuit, une image : un Bouddha en plastique, imitation bois, faux sourire vrai mystère.
Il ricane.
Il dit : rien n’a d’importance.
Ou bien c’est moi qui me le dis, pour voir si ça marche.
Mais ça ne marche pas. Pas encore.
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