L’échelle

Encore cette question, pourquoi les anges ont-ils besoin d’une échelle. Et puis d’un seul coup tu penses à un vieux transistor, le genre de ceux qui ont presque totalement disparus et où l’on devait manuellement tourner un bouton pour changer de station. L’aspect matériel de ce bouton sans lequel on resterait prisonnier, figé toujours d’une seule station. L’échelle s’approche peu à peu de ce bouton. C’est un clavier. Et les anges sont les sephiroth, qui en tant qu’énergies créatrices ne peuvent rien sans la présence d’une matière, des "touches" et des lettres associées à celles-ci. Ensuite que ces énergies aillent puiser dans une notion de bas et de haut, de lumière ou d’ombre, de joie ou de tristesse peut désorienter. De même que te désoriente le changement de fréquence, de sujet, de tous tes textes écrits dans l’urgence de ces nuits ces petits matins. Cette urgence à passer d’un niveau l’autre d’une échelle personnelle pour écrire, pour laisser libre cours à ces énergies qui, si tu te le faisais pas, te détruiraient, t’anéantiraient probablement. Pourtant tu es resté 17 ans sans écrire une seule ligne, as tu été anéanti pour autant ? non bien sûr. Tu as juste perdu la mémoire de tout ce que tu as pu faire durant ces années. Tu as juste vécu une vie de somnambule. Mais n’était-il pas voulu que tu t’absentes ainsi si longtemps. Il fallait que tu abandonnes quelque chose, et quand tu y penses c’est justement la prétention de n’avoir pas besoin de bouton ni d’échelle ni de clavier pour te manifester. Une prétention que tu auras confondu avec la modestie, la discrétion, le renoncement.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}