Les temps sont en train de changer.
Réveil de bonne heure avec arrière gout de splif. Une remontée bizarre puisque cela fait bien 25 ans que je ne touche plus à rien. Est-ce qu’on peut avoir des hallucinations aussi de ce coté là… ? bizarre bizarre et cette chanson qui tourne en boucle pour accompagner l’odeur de cannabis comme il se doit :
“The Times They Are A-Changin" de Bob.
Les temps sont en train de changer.
Est ce le temps qui change ou bien les êtres ?, on pourrait se poser la question.
Si j’avais du temps à perdre comme on dilapide un héritage.
Mais non j’ai un tas de choses "à faire", il faudrait que je m’y mette de toute urgence. Et c’est justement à cause de ça que je m’installe devant mon clavier pour écrire ma bafouille matinale.
C’est toujours comme ça, l’urgence crée la résistance.
Sans urgence, sans menace, personnellement je ne ferais probablement pas grand chose en dehors des clous. Je crois que je vivrais "au ralenti" comme une marmotte sous la neige.
Le danger m’oppresse et en même temps m’inspire.
Et évidemment tout cela influe terriblement sur la perception du temps, cela donne même parfois l’impression de le contrôler.
Mais je n’ai pas envie de contrôler le temps pas plus que d’être contrôlé par celui-ci.
Alors si les temps doivent vraiment changer c’est justement sur la perception que nous en avons, pas vraiment sur quoi que ce soit d’autre.
Je pense à tout ça en triant des photos de mes tableaux, ce qui me plonge dans une multiplicité de moments justement à chaque fois.
Ces tableaux peints à différents moments de ma vie, je leur trouve une unité désormais alors qu’auparavant je cherchais cette notion d’unité à l’extérieur de moi-même.
C’est à dire que je ne me posais pas la question vraiment de savoir ce que pouvait représenter cette unité pour moi. Je faisais confiance à la notion d’unité collective comme on faisait confiance à un médecin qui diagnostique un cancer.
vous savez suivant le médecin les chances de s’en sortir peuvent varier de 1 à 600... c’est dire comment on nous a pris et comment on nous prend encore pour des couillons.
Rien qu’un exemple, ma mère, son généraliste lui avait dit d’avaler du charbon car elle se plaignait de flatulences à répétitions. Cela a duré quelques années comme ça jusqu’à ce que finalement elle ose aller voir un autre toubib qui lui n’a pas lésiné sur les examens. Au final on lui a diagnostiqué un cancer du colon au stade 4. Autant dire qu’elle n’avait plus la moindre chance d’en sortir indemne.
Au delà de la colère on peut réfléchir sur cette confiance aveugle que l’on accorde aux mots comme à certains experts. C’est en cela que les temps sont en train de changer aussi je crois.
Grâce à internet notamment.
Attention je ne parle pas des réseaux sociaux et des mille et un avis de tout à chacun sur une pandémie. Non je parle d’un accès libre à un savoir véritable.
Doctissimo, Wikipédia pour ne citer qu’eux voilà ce qui va probablement provoquer des changements, qui les provoque déjà. L’ordre des médecins, comme tous les ordres du même acabit, c’est à dire les lobbies n’ont plus qu’à bien se tenir.
internet, c’est le dernier bastion de la démocratie. N’importe qui peut accéder au savoir désormais quasiment gratuitement, n’importe qui peut prendre la parole et s’exprimer, donner son avis. Tout le monde est au même niveau sur internet. Tu peux dire que ce restaurant est dégueulasse dans un avis, que le pain de cette boulangerie est fabuleux, tu peux dire que ce médecin est un charlatan ou qu’il est excellent. Ton avis compte au même titre que n’importe quel compte d’entreprise.
A condition de savoir comment faire évidemment, mais cela aussi s’apprend gratuitement.
En France par contre donner son avis c’est souvent dire que ça ne va pas si on remarque bien.
Parfois je me dis que je suis pareil, je vois les choses en noir, en négatif, mais ce n’est pas moi seul c’est toute la population française je crois qui adore se baigner dans la fange des critiques. On doit avoir ça dans le sang comme un cancer qui nous ronge petit à petit.
Du coup c’est ainsi qu’on a inventé le minitel tandis que les autres pariaient sur internet.... Parce que des ingénieurs avaient eu une idée de génie, des experts en qui on faisait une confiance aveugle.
3615 Domina évidemment y avait de quoi casser 3 pattes à un canard.
Du coup on a pris un peu de retard à force de se regarder le nombril évidemment.
Je suis descendu me resservir une tasse de café, machinalement je mets la radio.... Bla bla bla les élections, le chômage, il faut créer des emplois, l’écologie va tous nous sauver et caetera.
Le boniment des camelots de la foire d’empoigne.
Je ne crois plus vraiment à l’emploi. Je crois qu’il va y en avoir de moins en moins des emplois. Quelqu’un a déjà inventé l’aqueduc qui mettra un terme au métier de porteur d’eau. Comme Uber met un terme à la profession de chauffeur de taxi. C’est comme ça c’est la vie.
Les temps sont en train de changer. Les mentalités avec. Cela a toujours été ainsi et on pousse des cris d’orfraie à chaque fois.
ça doit venir du cerveau pas de doute, tu sais , le truc qui existe entre les deux oreilles et qui ne sert à rien pour la plupart des gens parce qu’ils l’ont remplacé par l’habitude, la routine, le train train.
Lorsque ça déraille ça fait mal. Tôle froissée, pleurs d’enfants, sans compter la clameur des camelots qui se fait d’autant plus forte que le silence après l’accident est insupportable.
Pour continuer
Carnets | octobre 2021
La plaie de vouloir plaire
Ce type était littéralement sanguinolent. Un écorché vif tout à fait conforme à ces moulages de la chapelle de Sansevero réalisés par Giuseppe Salerno, qui soulèvent les tripes. Et tout cela provenait, une fois l’embrouillamini des prétextes, des raisons et des fausses pistes dépassé, de son obsession de vouloir plaire. Même lorsqu’il se trouvait seul, il ne parvenait pas à échapper à cette malédiction logée au plus profond de lui-même. C’était encore pire qu’un sacerdoce. Un truc congénital, une maladie immune sur laquelle la science n’avait dédaigné se pencher, vu l’immense préjudice économique que sa résolution ne manquerait pas d’apporter. Car, dans le fond, cette affection, ainsi que la nomme le corps médical, peut se développer en tout un chacun sans prévenir et prendre des formes bénignes, généralement sans véritable gravité. Mais chez ce type elle était parvenue au dernier stade d’un cancer, par pure négligence, ou plutôt par cette étrange volonté qui oblige les autruches, en cas de peur soudaine, à se plonger la tête dans le sable. C’est donc ainsi qu’il se présenta devant moi, un jeudi, lorsque je donnais encore des cours ce jour-là, lorsque mon affaire était encore florissante et que l’on venait de tous les environs et même d’un peu plus loin pour profiter de mon enseignement du dessin et de la peinture. La crise ayant déjà fait des ravages, j’avais remisé mes prétentions, baissé les prix et ouvert mes portes au tout-venant. C’en était terminé des patientes sélections que j’effectuais afin de choisir parmi la cohorte des quidams de tout acabit qui affluait qui, parmi eux, mériteraient de s’asseoir dans mon atelier avec pour seul objectif qu’ils puissent en tirer du profit. J’éliminais les touristes, les prétentieux, les vaniteux, les fâcheux, parmi lesquels un grand nombre de ménagères entre 50 et 65 ans qui espéraient venir ici trouver non point un véritable enseignement artistique, mais un moment de détente, quelque chose d’amusant susceptible de tromper leur ennui, tentant de masquer plus ou moins convenablement leur vide qu’elles ne cherchaient qu’à combler d’un tas d’objets hétéroclites. Il y avait aussi quelques bonshommes perdus, cherchant vaguement à s’exprimer tout en étant poussés par le dégoût de s’inscrire sur des sites de rencontres en ligne, fatigués de la masturbation, la cervelle embrumée par leur mémoire adolescente à laquelle, vainement, dans la débine généralisée du monde, ils tentaient encore de s’accrocher. Je prenais un plaisir non dissimulé à foutre tout ce petit monde dehors, à leur dire : non, ce ne sera pas pour vous, désolé, ici c’est uniquement pour apprendre le dessin et la peinture, vous savez, vous risqueriez de vous ennuyer, c’est pour votre bien que je vous dis non, bonne journée ! Et le pire c’est que plus je refusais de monde, plus il se pressait à ma porte. Bref, les temps avaient donc changé et j’avais dû mettre de l’eau dans mon vin, et comme ce blasphème ne suffisait encore pas, j’avais réduit le montant de mes émoluments, j’étais au bord de proposer des cartes-cadeaux d’abonnement. C’est pour dire le marasme où nous nous étions progressivement enfoncés sans même nous en rendre compte. Du coup, veuillez excuser la digression, j’avais oublié ce pauvre type devant la porte. Bonjour, c’est pour quoi ? je demande. C’est pour apprendre la peinture. Très bien, et dans quel but ? Parce que je suis tout seul depuis je ne sais plus combien de temps et que je voudrais bien faire quelque chose de mes dix doigts qui puisse plaire au monde. Ce qui me permettrait, je l’imagine, d’exister, de ne plus être cet ectoplasme que je ne cesse d’apercevoir dans toutes les vitrines de la ville. On ne fait pas de peinture ici pour plaire, je réponds. Vous vous êtes gourré d’adresse, mon petit bonhomme. Il se mit à faire une drôle de moue, comme dans les films de science-fiction où l’on voit soudain un homme normal, ou une femme, se transformer en bestiole intergalactique avec des tentacules et des antennes qui lui sortent de partout. J’ai juste eu le temps de lui claquer la porte au nez en gueulant : merde, mon vieux, allez donc vous faire soigner avant qu’il ne m’explose au visage. Derrière la porte, qui n’était pas encore blindée avec six points de sécurité à cette époque, je pus encore l’entendre geindre : s’il vous plaît, je ne sais pas quoi faire pour vous plaire, aidez-moi. Il y eut quelques raclements de ce que j’imaginais être des griffes sur le panneau de bois puis sur le mur extérieur. Enfin tout fut silencieux. J’allumai une clope en revenant vers l’atelier en éprouvant un soulagement immense, le même probablement que peut éprouver un type qui vient de dire merde à son patron. Puis la journée s’étendit comme une immensité, un horizon sans borne devant moi.|couper{180}
Carnets | octobre 2021
L’art refuge, l’art ouverture.
7 milliards et demi d’individus et toutes les difficultés du monde pour accorder la chorale. Alors oui, l’art peut être un refuge pour s’éloigner un instant de la cacophonie générale, mais il peut être aussi, après cela, un diapason pour parfaire sa propre écoute et découvrir, sous l’apparent chaos, une harmonie poignante, souvent insupportable. Car ne vaut-il pas mieux travailler sur ce qui nous appartient vraiment plutôt que sur une vague impression que produit un mot ? Sans doute cette approche s’effectue-t-elle en deux temps pour celui qui veut exprimer la présence. Le refuge, le repli sur soi en quête de justesse en énumérant tous les couacs dans l’espoir de redresser le gouvernail. Le fantasme de parvenir à la note claire, à la justesse, au pur écho. L’exploration des reflets à la surface de l’eau à un point si extrême qu’on ait envie de se confondre en eux. Narcisse plongeant dans sa propre image ou dans l’image d’un monde créé à sa propre image, ce qui revient au même. Se coupant à jamais ainsi de l’autre. Ou bien, au contraire, s’extirper du reflet, regagner la rive et s’y hisser, puis se remettre debout et ouvrir grands les bras pour accueillir l’autre. C’est ainsi, sans doute, qu’après la retraite forcée, dans l’espérance des grâces des refuges, des salvations personnelles, on finit par comprendre l’égarement, ce puits sans fond que propose le refuge, et que l’on désire s’en éloigner. Avec un enthousiasme de chercheur d’or, bien souvent, comme quelqu’un qui aurait enfin été éclairé vers une « bonne direction », vers le profit à tirer d’une quelconque destination lui faisant miroiter encore cette inflation du moi. Il faut bien en passer encore par là avant de trébucher encore et encore, de se tapir sous une pierre, dans une caverne, sous un pont, pour remettre un peu d’ordre dans ses idées, jusqu’à comprendre que ce serait encore mieux si on n’en avait pas, d’idées. Reste le mystère de l’autre, insoluble par cette voie labyrinthique, par ce jeu de l’oie. Si la peinture, si l’art en général, ne permet pas d’être ouvert à l’autre, de lui offrir un lieu et un temps de repos, d’amitié, d’intelligence à partager gratuitement, peut-être alors vaut-il mieux se lancer dans la confection de pâté en croûte, de terrines, de bons plats à partager avec force blagues et autres saillies et billevesées sans importance. C’est cette sorte de magie que j’attends de l’art désormais. Non pas que, par sa fréquentation, je m’élève vers le génie pour imaginer naïvement m’y hisser à mon tour, mais tout le contraire : pour rencontrer des femmes et des hommes les plus « abordables » du monde. Abordables comme des îles en plein milieu des cités, abordables comme des armistices au beau milieu de la guerre. On nous a trop dupés et on s’est dupé tout seul par habitude de penser l’art comme appartenant à ce génie-là, celui de la rareté, de l’habileté et de la performance. Le génie créé par une élite qui ne cesse depuis des lustres de se mirer en celui-ci. On parle d’une nouvelle renaissance désormais, d’une Renaissance « sauvage ». Et sans doute en faudra-t-il un peu de la sauvagerie pour s’extirper du narcissisme afin de rejoindre le monde. D’ailleurs, pas seulement le monde des hommes, mais le monde en tant que terra incognita. Un monde que nul ne connaît encore. Un monde à créer tout simplement par l’art de se dire bonjour, comment vas-tu, de quoi pouvons-nous discuter ensemble sans nous étriper ? Si l’art ne sert pas à cela, à vivre ensemble entre nous, à vivre au monde tranquillement sans le détruire par peur ou par profit, je me demande bien à quoi il peut bien servir…|couper{180}
Carnets | octobre 2021
Nouvelle exposition dans le Haut-Jura
Du 30/10/2021 au 28/11/2021 exposition de peintures au Caveau des artistes à Saint-Claude (office de Tourisme) fermé le dimanche Exposition Patrick Blanchon au caveau des artistes de Saint-Claude, Jura|couper{180}