Notule 96
Photo de Trace Hudson sur Pexels.com
Ecrire aussi est une initiation. Comme crier ou prêcher dans le désert. Il faut en passer par là probablement, c’est à dire faire le tour complet d’une montagne plutôt que d’imaginer en atteindre le sommet. Même si maintes fois l’obsession d’un sommet à atteindre nous assaille.
Abandonner quelque chose à chaque tour de piste. Comme l’auguste Auguste qui chute en déclenchant le rire et les observations automatiques de Monsieur Loyal.
Et une fois les rotations accomplies ne conserver que l’idée d’un cercle et d’une absence qui dessine ce cercle. Et dont la perfection parfaite ne tient qu’à la perfection de cette absence.
Et ce divertissement dans lequel on s’engouffre volontiers par ignorance obligée. Etre l’obligé d’une ignorance, et constater l’étendue d’une dette qu’on ne peut rembourser. Une dette qui ne demande d’ailleurs pas à être remboursée.
Ce divertissement du savoir, de la technique, des milles et unes stratégies et astuces que l’on place comme des petits cailloux pour ne pas s’oublier en chemin jusqu’à parvenir au dégout salvateur enfin.
Enfin le dégout de l’artifice, vous voyez bien.
On le renifle à cent mètres et les yeux clos, c’est encore une étape à franchir à n’en pas douter.
La compassion n’est pas bien loin. Ce qui ne veut pas dire new-age, ni gourou, ni ascendant, à moins de vouloir encore explorer la descente et la montée jusqu’à la panne d’ascenseur.
La compassion s’en fout royalement puisqu’elle sait qu’à terme elle gagnera. Qu’il n’y a pas d’autre possibilité de choix pour arrêter de crier comme de prêcher et de s’inventer sans relâche des déserts.
De la compassion pour soi-même par ricochet. Un présent qu’on n’espérait même plus tant la difficulté de recevoir avait été engloutie par l’ivresse du don mal adressé.
L’écriture est aussi proche de la danse soufie, elle nous enseigne par étapes successives tout ce qui ne fonctionne pas, tout ce qui est mensonge, illusion, à coté de la plaque. L’écriture est une maitresse implacable qui nous amène à une vérité tout aussi implacable : Ce besoin essentiel du désert et du silence quand, au bout du compte les cris, les hurlements, pas plus que les prêches n’ont plus aucune raison d’être sinon de nous emporter vers l’égarement final.
L’égarement de la fin, où ne subsiste rien pour s’accrocher, pour se raccrocher tranquillement, comme un vêtement à un porte manteau.
Post-scriptum
hautPour continuer
import
Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
import
technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
import
La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}