des fréquentations

Dans ce mot, fréquentation, il y aurait à la fois fréquence et tentation. À la fois une sorte de mouvement qui serait presque immédiatement stoppé par une peur irrationnelle. Celle d’être pris dans ce mouvement et de ne pas pouvoir m’en dépêtrer ensuite. C’est la raison que je trouve comme Picasso trouve en non cherche, à mon peu de fréquentations. Mon côté ours. Je ne cherche pas la compagnie. Mais je sais la trouver si j’en éprouve la nécessité, le besoin. Souvent par la fréquentation des livres, et en échangeant quelques commentaires sur le net. Il y a aussi la fréquentation de mon épouse et de ma chatte, mise à part cela pas grand chose d’autre. Je ne me souviens plus de l’auteur de ce propos qui déclare que nous sommes la résultante des cinq personnes que nous fréquentons régulièrement. Il y a du vrai probablement. Quand je fréquentais des prostituées, que j’écoutais leurs propos avec mon camarade Richard qui leur tirait les tarots, j’éprouvais bien plus souvent qu’aujourd’hui l’envie de me rendre à l’église, de me faire pardonner de je ne sais quel péché commis. Quand je fréquentais des imprimeurs j’étais obnubilé par l’importance des repères, par l’opacité des encres, le poisseux, et les vieux murs. Quand je fréquentais uniquement les bouquins, j’étais voué du matin au soir au hasard des découvertes dans les multiples bibliothèques où je me rendais. Quand je fréquentais des cons j’étais con, etc etc. Ce propos est finalement pertinent. Choisir ses fréquentations peut-être d’une importance capitale. A condition que cette importance soit calibrée par un but à atteindre ce qui me manqua régulièrement. Et puis je m’imagine mal me dire je vais fréquenter un tel pour avoir une chance d’arriver à cela. C’est l’homme que je suis que j’ai toujours été. Et cette vision ne fut pas une sinécure. Car si j’observe attentivement, froidement les comportements désormais je peux comprendre que je suis non seulement un ours mais aussi un idéaliste indecrottable. Je suis le genre d’homme capable d’envoyer un message et à livrer le fond de ma pensée ou de mon cœur sans même mesurer les conséquences que cela peut produire sur autrui. Et ensuite je suis tout autant capable de m’étonner de ne pas recevoir de réponse. Quoique désormais je trouve beaucoup plus de plaisir à envoyer des messages que d’en recevoir. C’est un fait. Enfin je comprends aussi qu’une bonne partie du mystère revêtant toute « réussite » ne tient guère que dans un seul mot : le réseau. Un réseau que l’on commencerait à construire jeune et qui s’étofferait au fur et à mesure des années. Un réseau à qui l’on enverrait aussi les « bons » messages. Pas n’importe quelle pensée qui vous traverse l’esprit. Bref tout un art auquel il est nécessaire de s’exercer une vie entière. Jamais je n’ai désiré entretenir de réseau. J’ai traversé la vie allant de sphères en sphères et je n’ai pratiquement jamais conservé de liens avec les personnes rencontrées. Sans doute est-ce dû à cette sensation permanente de n’être que de passage ici-bas. Et aussi le poids de l’exil, tout un héritage qui m’a appris qu’un jour ou l’autre il est possible de devoir tout perdre pour se reconstruire dans un ailleurs. Que l’on n’a pas la possibilité de rester lié sinon par une nostalgie absolument létale à tout ce que l’on a cru être ou avoir, comme aux personnes nous entourant dans une existence qu’on ne retrouvera jamais plus. Vivre ainsi sur le fil comme un moineau voilà ce qui est inscrit dans mon ADN. Vouloir le changer, le modifier serait remettre en question tout l’effort de mes ancêtres, ne plus vouloir appartenir à cette famille imaginaire, changer totalement de film. Il en résulte une atmosphère, sorte d’aura attachée à qui je suis peu engageante pour la plupart des gens que je croise. Les gens sentent ça plus qu’ils ne peuvent vraiment l’expliquer. On ne cherche donc pas non plus à me fréquenter principalement en raison de cette aura. Cette carapace que j’ai mise en place plus ou moins consciemment comme d’autres passent leurs temps à tisser des réseaux. Possible qu’en tant qu’artiste je sois handicapé par cette réticence concernant le mot fréquentations. Mais chaque fois que j’ai essayé quelle déception, toujours eut l’impression d’être hors jeu. C’est le bon mot car tout cela finalement n’est qu’un jeu. Et moi j’aime jouer de moins en moins avec le temps.

Post-scriptum

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

Comme

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener