Implacablement bleu
Gas Edward Hooper
Dans le premier paragraphe de la première page de Pas d’orchidées pour miss Blandish. René Raymond, alias James Hadley Chase colle un adverbe. A moins que ce ne soit son traducteur mais pas des moindres puisque qu’il s’agit de Marcel Duhamel le créateur de la Série Noire chez Gallimard. Cependant après réflexion eut-il écrit le ciel était bleu au lieu d’implacablement bleu, il est clair que l’effet est différent. Donc cette histoire de foutre en l’air tous les adverbes Ils ( René, Marcel, les deux ) s’en tamponnent le coquillard allègrement. Et du coup je lui, leur donne raison. Il y a ainsi des règles qu’un écrivain doit se faire un point d’honneur à contourner, à faire sauter - essentiellement pour le plaisir de les contourner, de commettre un petit attentat. C’est aussi une façon d’imposer sa voix, son grain, ne serait-ce qu’à soi-même en priorité. Ensuite se souvenir que ce bouquin fut écrit en six week-end à la fin de l’été 1938 , que ce fut son premier livre, que celui-ci fit un tabac. Deux millions d’exemplaire s’il vous plaît... Il fut même remanié plus tard par l’auteur ( 1962) car il estima qu’il ne correspondait plus à l’esprit du temps, ce qui est un gage de conscience professionnelle comme d’intelligence éditoriale. Ça ne veut pas dire que l’on peut user des adverbes pour se mettre en avant, se distinguer, se faire remarquer. Bien qu’aujourd’hui on insiste tellement sur la modération en tout que l’on aurait bien envie d’exagérer rien que pour contredire, moquer certains slogans.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}