La vie à Sonora

A Sonora tout est fait pour convaincre le voyageur de passage d’y rester. Et si , en outre, admettons qu’il se soit fait , par avance et grâce à l’imagination, une idée assez précise de la ville, cette dernière comme si elle avait eut le pouvoir de lire dans les pensées, les rêves les plus fous, les manifestait soudain dans chaque rue, chaque place, chaque impasse. A noter également que Sonora, pour un être totalement dépourvu d’imagination, n’eut été rien d’autre qu’une ville comme tant d’autres, une ville en perpétuelle métamorphose ; et dont l’intention, par exemple un plan mûrit d’urbanisme, de vivre ensemble et qui eut été concerté entre les habitants et les hauts dignitaires de la cite , était de toute évidence inexistant. La politique que l’on pouvait découvrir avec assez peu d’effort de réflexion était que tout simplement Sonora désirait seulement plaire à tout le monde et sans doute rien de plus. D’ailleurs le même voyageur dépourvu de rêverie découvrait assez vite les fissures entre les immeubles, les ordures qui s’entassaient dans des recoins peu accessibles aux touristes, et comme dans toutes les villes du monde, s’il tendait l’oreille, les cris et les pleurs d’enfants et de femmes que d’indignes personnages passaient le plus clair de leur temps à maltraiter tout à coup devenaient cruellement audibles. La difficulté ensuite pour tout voyageur , en tous cas le mien, est toujours de trouver le bon équilibre entre l’imagination et la lucidité ; étant donné qu’aucun de ces deux points de vue ne soit à privilégier par rapport à l’autre. Le temps qui s’écoula entre une ville imaginaire que je m’étais inventée et la véritable Sonora, ne dépassa que quelques heures tout au plus pour dire toute la vérité. Puis très vite le réflexe me vint à nouveau de penser m’être trompé de ville ; certainement n’étais-je pas encore parvenu à la véritable, l’unique Sonora. Et c’est exactement ainsi que je parvins à réunir les lambeaux de ma déception pour confectionner presque aussitôt une ville toute neuve encore intacte et à laquelle je donnais bien sûr de nouveau , le nom de Sonora.

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

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mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener