Du lanternois à l’antipodien en passant par l’utopien

Quand Panurge réclame la charité devant Pantagruel ravi, il la réclame en quatorze langues dont trois imaginaires - le lanternois, l’utopien et le langage des antipodes- C’est dire déjà à quel point Panurge éprouve à la fois l’ universalité du concept de charité et sent gausse gentiment. C’est cette gentillesse qui rapproche les deux compères certainement. Mettre autant d’effort et de fantaisie pour atteindre au but n’est pas banal et si à première vue on peut en rire ce qui se dissimule sous cette réaction première crée une émotion, un espoir. Que le personnage de Panurge rassemble en un seul caractère tout ce qu’il peut y avoir eu de roublardise de ruse, de méchanceté chez l’homme aussi loin qu’on puisse l’imaginer, et de comprendre qu’à travers lui c’est l’ignorance, la peur qui se fraie un chemin vers la connaissance, c’est à dire en fait la bonne façon d’ aborder l’instant présent, est un baume.
Le lanternois et l’antipodien sont des langages hybrides chers à Rabelais qui créait de nombreux néologismes à son époque en utilisant sa connaissance du latin et du grec notamment, mais aussi de l’arabe, de l’hébreu, et certainement bien d’autres langues encore. Nombre de ces néologismes sont entrés dans la langue de tous les jours désormais mais il serait trop long ici d’en faire la liste.
De l’utopien personnellement je ne sais que fort peu de choses, sans doute parce qu’il ne s’écrit pas, qu’on n’en trouve par suite que peu de traces ; il n’est que paroles prononcées en l’air dans un moment qui se sera évanoui pour laisser place à d’autres.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}