10.Détail 1-35327
L’un des Détails de Roman Opalka, dont chacun constitue une partie de l’œuvre OPALKA 1965 / 1 - ∞ Archiver le présent
La seule chose vraiment importante dans la vie ce n’est pas de vouloir faire quelque chose pour devenir quelqu’un, mais de se souvenir pourquoi nous avons décidé de naitre plutôt que de résider dans l’inexistence d’une conscience en route vers un rêve d’infini qui ne peut se réaliser, qui ne se réalisera jamais.
Maria est une femme mure à la peau douce mais son cœur est de diamant. Elle ne me fait aucune concession et j’aime ça. Car si moi je ne sais pas encore qui je suis elle le sait quant à elle bien avant que je ne vienne dans ce monde. Elle connait mon futur, mes forces, mes faiblesses et elle sait aussi que la seule façon d’obtenir ma confiance vraiment passe par le don total de soi.
Elle sait aussi à quel point je me leurre quant à la notion de confiance , de don et du Soi que je ne cesse de confondre encore avec moi.
— Viens me dit-elle je veux te faire connaitre quelqu’un. Et c’est ainsi qu’elle me conduit à la galerie Yvon Lambert à Paris, où je me retrouve devant les toiles du peintre Roman Opalka qui à priori ne me parlent pas.
— Regarde voici un homme qui est venu parmi nous avec un but dont il est parvenu à se souvenir.
Je me sens mal à l’aise car je ne vois que des nombres plus ou moins gris et ça ne me parle vraiment pas. Je ne comprends rien de ce que Maria essaie de me dire.
D’ailleurs je lui dis : Pourquoi m’as tu amené là je trouve ces toiles vraiment trop moches, sortons d’ici allons nous balader, boire un verre à la terrasse d’un café, il fait si beau profitons-en.
Mais Maria ne l’entend pas ainsi. Elle a toujours un but précis et s’amuse de me voir à chaque fois m’esquiver.
— Tu ne peux pas perdre autant de temps que tu le fais, cesse donc de te réfugier dans l’hédonisme, d’ailleurs regarde-toi dans la glace, tu as l’air de quoi ?
Et soudain j’aperçois mon reflet dans un des miroirs qu’elle m’indique et je vois un type que je ne reconnais pas. Nous sommes arrivés en 2010 et j’ai cinquante ans alors qu’un instant auparavant je n’étais qu’un jeune homme.
Maria pourtant est toujours Maria, elle n’a pas changé d’un iota. On dirait que le temps ne laisse plus aucune trace sur son beau visage.
Je suis pris de panique, je suffoque en observant le visage du type que je suis devenu à la surface du miroir. Je crois que je vais tourner de l’œil.
Maria en profite pour m’entrainer vers un siège, elle s’assoit près de moi et me raconte l’histoire de ce peintre, Roman Opalka.
Il fait aussi partie de l’équipe au sol me dit-elle c’est ton frère. Il va bientôt achever sa mission, et ce que tu peux voir sur ces tableaux n’est qu’une toute petite partie de tout ce qu’il a accompli.
Je ne comprends toujours pas. Je demande alors à Maria de m’expliquer la raison de ces nombres qui s’enchainent ainsi dans des valeurs de gris différents. Pourquoi faire ce genre de chose c’est totalement inutile, et ce n’est même pas beau à proprement parler.
— Je comprends ta trouille me dit Maria. Et tu sais Roman aussi a eu peur, il a même du se rendre à l’hôpital une fois qu’il a compris dans quel projet il allait devoir s’engager pour le restant de sa vie dans cette dimension. Son cœur s’est affolé. Mais il a tenu bon exactement comme toi tu le feras.
Au moment où elle achevait sa phrase je sentis qu’une présence hostile avait envahi la grande salle d’exposition. J’eus un flash dans lequel je voyais la verrière au plafond voler en éclat et des formes sombres gigantesques descendre à une rapidité hallucinante.
— cours me dit Maria il ne faut pas qu’ils nous voient ensemble.
Je m’exécute. Mais au moment d’atteindre la porte je me retourne pour voir si Maria me suit, je ne vois plus rien. La pièce est vide, la verrière au plafond est intacte. Seuls les grandes toiles du peintre Opalka sont là, silencieuses comme si elles étaient depuis toujours dans l’attente de mon attention.
Alors malgré mon cœur qui bat la chamade, malgré toute l’incompréhension de la scène que je viens de traverser je retourne m’asseoir pour mieux les regarder à nouveau.
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}