Chercheur d’or

La question, la grande, la principale n’était certainement pas de trouver la bonne pelle, ni la bonne pioche, pas même le bon tamis, malgré leurs qualités indéniables que tout le monde ou à peu près louait chez le marchand du coin, toutes ces choses ne servaient à rien. La question c’était l’emplacement, et à quelle hauteur de la rivière il y aurait le plus de chance de tomber sur le filon.

Déjà de nombreux lots avaient été raflés en à peine quelques jours, j’avais trainé le long de la route et la première chose que je fis en arrivant en ville fut d’aller directement voir les lots restants.

Willoughby, allait fermer lorsque je descendais de cheval, je le hélai en le suppliant d’attendre encore un peu, mais rien n’y fit.

— Repasse demain matin à la première heure gamin, la nuit porte conseil.

Et comme j’avais utilisé tout l’argent qu’il me restait pour effectuer cette expédition depuis Frisco vers Dawson City dans le Yukon, je me décidais à ressortir de la ville de retourner vers la forêt proche. Je formais le projet d’y établir mon campement pour la nuit.

Le gouvernement canadien avait imposé à tout prospecteur d’emporter de la nourriture pour une année, mais j’avais déjà beaucoup perdu dans le périple, et il ne me restait plus guère que quelques conserves et le matériel nécessaire pour démarrer une nouvelle prospection. C’était la règle du jeu, tous les pauvres gens que nous étions ne loupions pas une occasion pour s’entredévorer, se dépouiller. Une fois le port de Skagway derrière soi la chaîne côtière au sud-Est de l’Alaska s’élevant devant nous comme une ultime épreuve à traverser, il ne restait plus grand chose d’humanité à chacun d’entre nous. Enfin après le col de Whyte il fallait dévaler la montagne en suivant la rivière. Si on avait survécu à la faim et aux intempéries, on pouvait reprendre espoir. Et cet espoir n’avait plus qu’un nom c’était l’or, trouver de l’or et revenir à la maison les poches pleines. Ceux qui n’avaient pas assez de concentration crevaient en chemin. La plupart n’avaient d’ailleurs comme moi plus grand chose à perdre. Le risque était de penser qu’arriver à Dawson City, les choses finiraient pas s’arranger.

Je longeais la rivière Klondike encore à peu près sur un mile et trouvais un endroit suffisamment reculé afin de pouvoir dormir enfin. C’était le début de l’été 1896 si ma mémoire est bonne au moment où je relate les faits. Dawson City était encore une petite ville bâtie dans la hâte et dans la fièvre, il n’y avait pas vraiment d’autre loi que celle du plus fort. Personnellement ce n’était pas sur ce terrain que j’éprouvais l’envie d’en découdre, non pas que je n’eus autant de sauvagerie à cette époque que n’importe qui d’autre, non ce n’était pas cela. Je fuyais quelque chose comme tout à chacun je crois, mais personnellement j’incluais mes contemporains en général dans ce "quelque chose". J’avais à peine 18 ans mais les misères m’en donnaient désormais facilement plus de 25.

En posant ma tête sur ma selle je fermais les yeux et tentai d’imaginer un éventuel retour. Cependant je n’en eu pas le temps ; la torpeur m’assaillit comme une amante et m’emporta vers les limbes sans rêve.

Lorsque j’ouvrais les yeux au matin le spectacle des lieux s’offrant à la lumière me remit aussitôt d’aplomb. Je remballais mes affaires, remontais à cheval et m’en retournais tranquillement vers la ville.

Willoughby avait déjà ouvert, il se tenait devant la porte de son bureau, une cahute plantée parmi les premières habitations de la ville.

— t’as survécu à la nuit t’es bon pour le service alors gamin, amène toi on va voir ce qui reste.

Le lot qu’il me concéda était à plusieurs miles d’ici. Tu ne seras pas dérangé par les voisins, vu qu’ils ont été retrouvés gelés, durs comme comme du bois cet hiver, ajouta t’il avec un air désabusé.

Je n’avais rien à redire à ça non plus, je remontais à cheval et le saluais sommairement avant de tourner la bride et de m’éloigner à nouveau vers la rivière Klondyke. Il faisait un temps splendide, la fatigue s’était évanouie, j’allais forcément trouver de l’or c’était sur, toute ma volonté était tendue vers cet unique but.

Bien qu’en y repensant à présent cet or était encore extrêmement abstrait, je pouvais imaginer sa couleur, son poids éventuel en faisant un petit effort mais sa nature m’échappait totalement tout comme l’usage que j’allais pouvoir en faire.

Des années plus tard lorsque j’y repense, lorsque je me revois traverser toutes ces épreuves je me dis que je ne pouvais pas faire autrement que ce que j’ai fait. Personne d’autre que moi n’aurait pu m’enseigner ce que j’ai compris de toute cette aventure aujourd’hui., D’ailleurs nombreuses et nombreux furent ceux qui ont tenté de me mettre en garde, je ne les ai jamais crus. Je n’ai jamais trouvé l’or que j’imaginais bien sur. Je ne l’imaginais pas assez fortement je crois. L’or ne fut jamais qu’un prétexte valant n’importe quel autre.

La seule chose que je sais c’est que je ne me suis pas appauvri, bien au contraire. Les épreuves, les obstacles, la misère, la fatalité, j’ai traversé tout cela grâce à l’illusion que je me formais vis à vis de l’or, de la richesse en général. Une fois cette illusion évanouie je me souviens qu’enfin j’ai entendu parfaitement le battement d’aile d’un aigle passant haut dans le ciel, j’ai entendu le chant profond de la rivière Klondike qui dévalait des montagnes pour s’ébattre dans la vallée plus bas. J’ai vraiment entendu tout cela, comprenez vous, et cela je le crois encore dur comme fer, vaut bien tout l’or du monde.

Post-scriptum

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener