Les talents courent les rues
Je chipe le mot à Raymond Carver, un de mes auteurs fétiches. Tout ça pour parler du génie évidemment, à ne pas confondre avec le talent. Car le talent répond à des critères d’habileté alors que le génie explore le ridicule comme s’il s’agissait d’un filon de diamants.
Je pense à ces choses alors que je suis de permanence dans mon expo de Sablons, guère sollicité par les très rares visiteurs, qui d’ailleurs sont plutôt des adhérents de la médiathèque dont je partage les locaux.
Je pense à cette période où je photographiais un peu tout et n’importe quoi, des poteaux des troncs d’arbres, les sols de tout acabit, les murs, et l’écoulement des caniveaux entre autres. Des photographies qui bien qu’en noir et blanc et de très belle facture sur papier baryté de chez Agfa ou Ilford étaient proprement imbitables pour les rares proches à qui j’avais osé les exhiber, justement par crainte du ridicule.
Et aujourd’hui je tombe sur ce nouvel exercice d’écriture qui prend comme inspiration les sols justement, et je découvre le travail de l’artiste plasticien Regis Perray. Un gars capable de nettoyer son atelier 7 à huit heures par jour sans utiliser de produit chimique en plus. Un type qui aime tellement balayer qui a dépoussiéré une route entière menant à la pyramide de Gizeh en Égypte. Tout ça pour faire des photos avant pendant après et les exposer.
Alors ridicule ou génial ? Ce sera à chacun d’y réfléchir.
Mais tout de même à une époque où on ne touche plus terre m’est avis que cet artiste met tout en œuvre pour attirer notre attention sur quelque chose qui lui semble important et souvent tristement ridicule pour la plupart d’entre nous : le sol sans lequel on ne peut pas tenir debout ni avancer !
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}