Loup

Une immense toile raconte tout. Elle est au grenier. Je ne peux la transporter dans les expositions je ne possède pas de véhicule assez grand.

Je l’ai nommée le voyage des loups, c’est une toile du genre monochrome , légèrement beige ou terre de sienne par endroit. Au début j’étais parti avec une idée de steppe, une steppe qui s’étend à l’infini, format portrait, avec des zones de relief que l’on devine, des montagnes très lointaines, toujours quelque chose qui semble barrer une partie de l’horizon dans de nombreux tableaux.

Au bout du compte la steppe a presque totalement disparue. Il ne reste que tous les obstacles qui se seront interposés pour ne plus la voir. Ces obstacles souvent immenses eux aussi sur ma route. Tellement permanents, peut-être que leur fonction d’ailleurs et de m’empêcher de voir cet horizon, de ne me concentrer toujours que sur eux ces obstacles. Dans ce but de ne jamais voir le moindre horizon. Ce combat pour tenter de rejoindre l’horizon toujours perdu d’avance, on le sait et on y va malgré tout, parce qu’il faut cette idée pour avancer, c’est tout.

Etions nous nombreux à courir ensemble,

de moins en moins au fur et à mesure du temps.

Puis, à la fin quelque chose est seul.

Le vieux loup doit partir quand ses forces l’abandonnent, il quitte la horde pour s’en aller mourir dans l’écart.

Peut-être que ce n’est plus le voyage des loups dans ce cas, c’est le voyage du loup. Ce qu’il traverse encore de paysage pour atteindre la fin du voyage.

En fait il a eut deux toiles sur le même sujet, la plus grande est au grenier, la seconde a été recouverte et j’ai peint un autre tableau par dessus faute de toile. Heureusement j’ai eu la présence d’esprit de les photographier.

Il y a donc eut un constat à un moment donné, des gestes volontaires ou non, ou des indices, des signes provenant du dehors - mais qu’est-ce que le dehors sinon une invention du dedans et vice versa… indiquant que je ne devais pas exposer tout ça.

Peut-être trouvé-je cela prémonitoire et c’est pour cette raison qu’inconsciemment j’ai du tout faire pour pas qu’on ne la voit

Je me souviens de l’énergie avec laquelle j’ai peint ces deux tableaux simultanément , dans une transe avec très peu de moyens. Je dansais en peignant. j’étais un loup qui dansait avec les loups. Puis les choses sont ce qu’elles sont. Je suis désormais un vieux loup qui sort du paysage, paysage qui ne fut constitué je crois que pour mieux le cerner, comprendre la prison, s’en évader.

je suis un vieux loup sans horizon ou débarrassé de l’obsession de l’horizon.

Et je me fiche des prémonitions elles sont aussi semblables que tous les horizons.

Post-scriptum

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Pour continuer

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

Comme

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

technique mixte 70x70 cm

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener