Magasin du bonheur, soldes

Ce qui est vendu comme étant le bonheur. Le produit bonheur. Possède-tu suffisamment d’argent, de volonté, de naïveté, d’obscénité pour acquérir ce qui est présenté sur les présentoirs comme pur bonheur. Jamais assez. Tu as mis au point de nombreux mécanismes pour t’en éloigner. Pour fuir les têtes de gondoles, les promotions, les prix sacrifiés. Toute la publicité incessante qui te martèle l’injonction d’être enfin heureux, riche, confortablement installé, parvenu au sommet, belle maison, belle épouse, beaux enfants, beau job, admirable montre bracelet, cuir naturel maroquineries rutilantes, légumes bio, fruits calibrés, mobile dernier cri, casque audio anti-bruit,
Ce qui est vendu comme étant le bonheur te fait peur. Comment peut-on tomber si bas, être capable de tant d’abjection pour se faire une place au soleil. Au détriment, au détritus, à la destruction de ce que l’on t’a aussi vendu dans une autre boutique autrefois comme l’humanité, l’âme.
Deux représentants de commerce s’affrontent dans une métaphysique de possession qu’on le veuille ou non.
Ceux qui ne jurent que par les biens, ceux qui ne jurent que par l’ascèse, la frugalité, la tempérance. Catholiques et protestants.

Y a t’il autre chose ?

Le mal et le bien sont-ils tellement implantés dans les ruelles qu’il ne puisse plus y avoir de place pour autre chose ? Mac Donald contre Burger King, malheur à qui voudrait enrayer la fabrique des frites congelées.

Par exemple un magasin qui ne vend rien, un magasin sans enseigne, un magasin sans devanture, ni néon, un magasin qui n’a pas de porte, pas de rideau, un magasin qui ne serait pas plus qu’un passage dans lequel on s’engouffre pour en ressortir un peu plus loin dans un autre quartier, une autre rue, un magasin comme un lieu de passage, un magasin que l’on traverse sans y penser. Il n’y a pas de rayon, pas de promotion, pas de produit, et cependant quand on en sort on n’est plus le même qu’au moment où on y est entré. pénétrer dans ce magasin nous a totalement changé. Un magasin comme un passage qui modifie le point de vue sur le bonheur et le malheur.

Assez proche d’une boutique de pompes funèbres sans tout le décorum, sans les mines contrites, sans la poignée de main à l’issue de la signature du bon de commande, sans je vous présente toutes mes condoléances.
Un magasin comme une boutique de pompes funèbres, une boutique de caisses dans lesquelles on s’allonge, dans lesquelles tout loisir de s’allonger dans une caisse est permis, on peut même bénéficier de ce service gratis, du couvercle que l’on cloue pour une immersion parfaite avec le choix de la musique qui ira avec.

Ou encore un livre dans lequel tout doucement jour après jour on s’enfermerait seul, un livre comme un passage, un livre un peu comme un grand magasin, un livre à l’image de nos grands magasins, mais sans aucun produit, juste des signes à écrire ou à lire, juste à se laisser surprendre par des signes qu’on écrit des signes que l’on lit. De plus un livre qui n’apprendrait rien à celle ou à celui qui l’écrit pas plus qu’à celui ou celle qui le lit. Un livre qu’on lit comme on traverse un paysage, à la ville, à la campagne, un livre comme un lieu de passage, dans lequel on ne serait pas emmerdé par l’idée d’être sage ou pas sage, par le bien et le mal, par le fric qui nous manque pour en être, pour participer. Un livre dans lequel on s’allongerait, auteur et lecteur, dans des caisses virtuelles, le regard tourné vers l’intérieur, vers le néant de l’intérieur sans ciller.

Se bousculerait-on ici le jour des soldes ?

Post-scriptum

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Pour continuer

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

Comme

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener