Nos amies les bêtes

Il y avait cette émission, la vie des animaux ou nos amies les bêtes, je ne suis plus sûr du titre. Je la regardais quand j’étais gamin. C’était du voyeurisme en quelque sorte. Et puis l’anthropocentrisme sans que je ne connaisse le mot à l’époque me procurait une excitation trouble. Et J’aimais cette sensation portée par la voix de Frédéric Rossif. Il y avait un non-dit magistral bien que je ne connusse pas non plus ce terme à l’époque. Mais je parvenais tout de même à détecter son essence. La famille réunie autour du téléviseur noir et blanc, les bêtes, le petit écran et la voix radiophonique de Frédéric Rossif. On s’attendrissait forcément sur l’œil humide d’un castor filmé en gros plan, et maman ne loupait pas de commenter avec des sous-entendus que je ne comprenais pas, l’animal qui construit sa maison avec sa queue. Elle en riait toute seule. Papa ne la regardait même pas, il devait être plongé dans ses pensées sur sa propre vie. Je ne crois pas qu’il fut attentif vraiment à ce genre d’émission. Anthropocentrique il l’avait toujours été de nature, il n’y avait qu’à écouter comme il parlait à la chienne, aux oiseaux pour comprendre qu’il interprétait tout ce qui rampe vole ou cavale d’un point de vue humain. Humain dans ce qui l’arrangeait que ce le fusse. Car envers les humains qui l’entouraient et nous par conséquent il ne fut jamais tendre, je crois qu’il préférait les animaux au bout du compte. Il interprétait leur langues leurs comportements comme une réalité dont on sentait bien le regret enfantin. Mais pas question cependant de le contredire, d’exprimer une réserve sur sa traduction. Il se braquait, entrait dans une colère soudaine, démesurée et que nous ne comprenions pas , qui nous effrayait mon frère ma mère et moi, nous tétanisait. Ma mère lui faisait front de temps à autre mais à quel prix. une énergie colossale lui devait être nécessaire. Mon frère se planquait derrière son enfance, il était mon cadet et on avait fini par le considérer comme un handicapé mental ce qui l’arrangeait assez bien. Et moi je me vengeais régulièrement de tout ce que je subissais par un statut de cancre patiemment élaboré dès les classes maternelles, et aussi en prenant un malin plaisir à emmêler les fils de ses cannes à pêche, de flanquer le feu au poulailler, à fuguer, à m’esquinter par tous les moyens possibles et imaginables. Je n’ai jamais sur ce point manqué d’imagination. Et bien sur nous nous aimions, c’était obligé. Et lorsqu’on voulait trouver des excuses à tout à chacun on se souvenait de la voix radiophonique de Frédéric Rossif, ça venait comme ça presque comme un réflexe, on pouvait s’excuser ainsi les uns les autres comme si on évoquait la vie des bêtes, cette sorte de paradis où les castors n’ont besoin que de leurs queues pour construire des foyers.

Post-scriptum

haut

Pour continuer

import

Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

Comme

import

technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

technique mixte 70x70 cm

import

La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener