symbole lémurien

Ta résistance à l’engouement actuel envers le développement personnel comment te l’expliques-tu, sinon par cette apparente facilité, due à des formules, des mantras à ressasser, les œillères grâce auxquelles il serait indispensable de se réfugier dans une pensée positive, ce qui te paraît aussitôt erroné sans que tu n’en comprennes au début la raison. Sans doute pour avoir toi aussi traversé ces formations, étudié les rouages, les trucs, les combines, tout un artisanat de la manipulation à des fins décevantes. Vouloir être heureux notamment tu te demandes encore ce que cela signifie sinon imaginer toujours un ailleurs pour ne pas regarder en face une réalité bien plus complexe que seulement basée sur la joie le bonheur ou la tristesse la désespérance. Une réalité amputée, une réalité réduite à une binarité insupportable. Cela demande un effort incroyable quand tu y repenses aujourd’hui de parvenir à s’extraire de cette binarité. L’effort nécessaire pour voir ces deux aspects confondus et être soudain, grace justement à ce mélange, cette confusion, ce chaos apparent, être en mesure d’en extraire une fréquence une couleur un son. Aussi quand tu tombes sur cette vidéo de Luc Bodin, attiré par la miniature qui représente ce vieux symbole lémurien, tu hésites. Tu te dis quelle soupe va t’il donc servir en prenant appui sur l’imaginaire, quelle manipulation encore derrière les apparences. Tu visionnes la vidéo qui ne t’explique pas grand chose que tu ne saches déjà. Puis tu passes sur une toile que tu as apprêtée quelques jours avant. Tu fermes les yeux, tu vides toutes tes pensées et tu laisses venir ce qui doit venir. Quelques heures plus tard tu reçois un mail étrange, une vidéo qui évoque le parcours d’un kyné non- voyant avec en pièce jointe son bouquin Etre, Énergie, Fréquences. Il s’agit de Jean-Claude Biraud que tu ne connais pas. Il te faut à peine deux heures pour avaler le bouquin. Surprise de constater les mêmes émotions éprouvées autrefois qu’à la lecture de Castaneda. Mais présentées cette fois d’une façon scientifique, raisonnable, argumentée avec preuves à l’appui. Ce qui te scotche n’est pas tant le contenu de ce livre cependant, par intuition le seul fait que tu comprennes tout immédiatement est déjà étonnant en soi mais ce n’est pas cela l’information que tu en retireras. C’est la ténacité de l’homme poussé par sa curiosité, son désir de comprendre, par une attention à certaines choses dont nul à part lui n’est en mesure d’établir des passerelles, des liens et de les présenter ainsi surtout. Et aussi une grande leçon d’humilité car il n’hésite à aucun moment à s’adresser aux autres, à des personnes travaillant chacune dans une spécialité, au risque de se faire traiter d’hurluberlu ce qui n’arrive en fait jamais. C’est exactement cette partie manquante que tu relèves soudain dans ton parcours, le fait de ne jamais oser t’adresser aux autres, de persister quelque soient les difficultés nombreuses rencontrées à rester seul, à creuser dans cette solitude qui t’a toujours parue essentielle, incontournable. Bien sûr tu as lu des milliers de livres, bien sûr tu as rencontré des milliers de personnes, mais tu n’as jamais osé parler de tes recherches, tu n’as jamais chercher à les confronter, à les valider ou invalider. Tu regardes ton tableau ce matin, tu peux y retrouver la croix lémurienne, mais déformée par des forces étranges, comme par une volonté encore vivace de fabriquer tes propres symboles tels que tes filtres les adaptent à partir d’une réalité établie, une réalité qu’on ne serait impunément remettre en question. Puis le soir lecture des derniers cahiers de Kafka, cette histoire de bûcherons joyeux qui reste en suspens, des paragraphes qui soudain s’achèvent par un parce que. Et pour parachever l’ensemble la lecture de deux ou trois witz, de Biro, quelques velléités d’identification avec le personnage du bouffon que tu laisses tomber car le sommeil t’emporte.
Quelques minutes plus tard tu relis et cette coïncidence, l’homonymie entre Biraud et Biro, ADAM BIRO, l’auteur du dictionnaire amoureux de l’humour juif.
janvier 2023 huile sur toile 80x80
Post-scriptum
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Comme
Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}
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technique mixte 70x70 cm
mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}
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La ramener
Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}