mai 2021
Carnets | mai 2021
Éphémère effet mer
Quelqu’un a crée une statue de sable et puis s’en est allé Et c’est à cet instant où je passai Que l’éphémère et l’effet mer Se sont retrouvés. Œuvre éphémère|couper{180}
Carnets | mai 2021
Voir la mer
Des années sans voir la mer et un soir la voici Elle n’a pas changé|couper{180}
Carnets | mai 2021
Lourd et léger
La pesanteur est venue, elle était grasse, plantureuse, avec une langue reliée à toutes les évacuations. Les égouts et les dégouts. Mais je ne suis pas parti. J'ai tourné la chaise pour placer mes bras croisés sous mon menton. J'ai regardé la pesanteur danser. Elle allait et venait à petits pas tout droit sortie d'un Botero. Sous le regard de l'autre que j'étais, la pesanteur a prit ses aises. Et j'ai découvert qu'elle avait un peu de tout et même de l'humour. Et puis j'ai aperçu la légèreté. Et je me suis mis bêtement à comparer. Sa taille fine, ses traits graciles, son élégance naturelle et sa simplicité. Sous des dehors sophistiqués. Je me suis mis à hésiter. Entre le profond et le superficiel Entre le noir et le blanc entre le vulgaire et le grossier. Entre la baise et la tendresse. J'ai mis mon doigt un peu partout pour gouter l'acide et le sucré Pour choisir ce que je préférais. Au final je ne sais toujours pas laquelle je préfère. Je crois qu'elles sont toutes deux ambivalentes et solidaires comme deux moitiés disjointes la nuit et le jour seul l'œil ouvert qui ne cille plus peut reconstituer leur unité. illustration : Suzanne et les vieillards, 1609-1610, Pierre Paul Rubens (Madrid, Académie des Beaux-Arts de San Fernando)|couper{180}
Carnets | mai 2021
Divers tissements
Se divertir, se distraire, se recréer à tout bout de champs, une fuite éperdue hors de soi vers rien. Un rien pauvre appauvrissant en diable le plus vertueux de tous les saints. Parce que saint n'est plus mode autant que bœuf et le mouton est roi. Tous les chantres bêlants le diront haut et fort et le rabâcheront. Héritage empoisonné d'une oisiveté princière où de beaux messieurs et de gentes dames rivalisaient d'esprit jusqu'à plus soif tarissant ainsi tout l'important d'avant, le réduisant à une peau de zob, de chagrin. Le 18ème et les lumières n'ont rien éclairé d'autre que la misère qui les entourait pour s'en gausser, se rehausser, se distinguer. Par contraste exister. Le bel esprit primesautier, la légèreté, l'agilité, Un pansement sur une jambe de bois. On nous a tant fait croire à la gloire, à l'esprit, aux belles lettres, à la philosophie et à la science, à grands coups de slogans de rediffusions de tubes, de classiques et de bouquins de poche, qu'au bout du compte par lassitude, par habitude, forcément on y a cru. Ne me dites pas que tout cela n'était pas prévu. Et le loisir fut brandi soudain, le nouveau crucifix, avec tous ses pèlerinages, ses génuflexions, ses embouteillages lors des congés payés. Derrière le front populaire quelle intelligence fomentait de toutes neuves entourloupettes ? Le progrès aussi oh la la le progrès comme un bon vieux veau gras tirant ahanant le char de la modernité. Quel carnaval ces petits malins nous auront encore inventé là. Car dans le fond rien n'a bien changé depuis le fin fond des âges. Que du ressassé, de la resucée, rien de neuf n'est vraiment inventé. Il y a toujours des riches et des pauvres, des forts et des faibles, des braves et des pleutres, et des cocus par monceaux. Divertir pour attirer l'attention. Pour capturer l'attention afin qu'elle n'aille pas batifoler dans les fourrés, dans les chemins pas balisés. Divertir pour canaliser l'idiotie. Cette enfantine part de nous mêmes toujours prompte à se laisser berner et séduire par innocence par naïveté ou par paresse ou par fatigue. Les déceptions s'accroissent d'autant qu'on espère toujours de plus en plus. Et fabriquer de l'espérance et du rêve c'est un sacré métier. Qui se fait payer fort cher. Ce sont toujours les mêmes princes primesautiers en apparence qui tiennent les cordons de la bourse. Des présentateurs télé et des acteurs et des artistes nominés qui vont flatter l'Etat ventripotent. Comme à Versailles autrefois la cour se reflétaient dans la longue série de miroirs pendant qu'au delà toute la France peinait afin de rendre plus transparent le verre, plus fastueuse la belle image et quel culot d'avoir pour le jardin débauché Lenôtre. Même ça on nous l'a dérobé. Et des impôts et des taxes et maintenant audio visuelle... Non rien n'a vraiment changé depuis la taille et la gabelle. Ce sont toujours l'avidité et le pouvoir qui tiennent les rennes de ce traineau qui s'enfonce de plus en plus vers l'incurable. Se divertir ne vaut que si de prime abord on est bien averti. Des tenants et des aboutissants de la farce et du folklore. Se divertir comme on boit comme on baise, comme on s'oublie, comme on s'annule à petit feu pas seulement par ennui mais par absence. Absence d'être absence de sens face à l'hégémonie de l'avoir et de paraitre. illustration:Ernst Ludwig Kirchner, Autoportrait en soldat (huile sur toile, 1915)|couper{180}
Carnets | mai 2021
Réussir rater
Hier encore grande discussion sur le fait de réussir, de rater un tableau. Certains jettent, ne veulent plus voir, ont honte. C'est à la mesure de l'exigence, de l'orgueil aussi. Souvent réussir est un cliché, c'est reconnaitre dans un travail celui d'un ou plusieurs qui rassure et réconforte. Encombrement. Il me semble avec l'âge que j'apprends une discipline insoupçonnée. Celle de pratiquer le ski sur piste noire. Je n'ai skié qu'une seule fois dans toute mon existence. Vers 8 ans et ça c'est mal terminé. Je n'ai pas obtenu d'étoile, mais une douleur au coccyx de plusieurs jours. Je n'ai jamais réitéré pour diverses raisons. Economiques essentiellement. Je m'aperçois que la peinture répond à un désir et à une frustration sans doute aussi de skieur. Il faut slalomer entre ces notions de réussite et de ratage sans relâche sinon gare à la chute. J'ai un nouveau travail sur le chevalet, j'ai fait une petite vidéo que j'ai postée sur mon compte instagram Le premier commentaire que je lis est une observation sur ma "maitrise". Drôle comment on peut se trouver à des années lumières entre peintres parfois sur le sens d'un simple mot. La maitrise c'est justement cette adversité contre laquelle lutter, slalomer pour ne pas s'étaler en dextérité froide, en habileté camouflant des béances. Slalomer j'aime bien, je prends plaisir c'est toujours ça l'étoile à suivre.|couper{180}
Carnets | mai 2021
La rareté
La rareté est une fille de rien qui cache ses trésors sous des haillons c'est pour ça sans doute ce mépris cet intérêt pour les souillons De la part des prétentieux des parvenus, des imbus, des perdus. tous se fabriquent des idées de ciel clair, de transparence des nues D'esclaves agitant des feuilles de palme, au dessus de leur front brûlant De nichons en pomme, en poire, tout un marché bourré de chalands. Et des culs oblongs, en forme de fusée pour sidérer le temps. La rareté s'ignore et c'est dans le bel oubli qu'elle court les pieds nus. Légère de sa jeunesse folle, ivre d'un rien, dans l'ombre des fortifs. Certains l'appâtent au fric, au miel, tandis que d'autres tendent du rosbeef. Elle leur sourit trois petits tours et puis encore s'enfuit ça les agace ça les énerve, elle laisse derrière elle la ruine et l'ennui. C'est qu'ils savent au fond d'eux mêmes ce qu'ils lui doivent. Ils l'ont abandonnée un jour en voulant faire le zouave Devenir plus ceci plus cela ce temps perdu en sens inverse. C'est qu'il se souviennent en la voyant, d'illusions ils se bercent. Mettre la main dessus la dévorer toute crue, l'achever jusqu'au bout. Pour être enfin tranquille sans regret sans remords troulala itou. Ceux là ils s'imaginent que ça ramènera le sel, à la vie le vieux bon gout. Illustration Albertine Ralenti, fille de rien|couper{180}