La pesanteur est venue, elle était grasse,
plantureuse, avec une langue
reliée à toutes les évacuations.
Les égouts et les dégouts.
Mais je ne suis pas parti.
J’ai tourné la chaise
pour placer mes bras croisés sous mon menton.
J’ai regardé la pesanteur danser.
Elle allait et venait à petits pas tout droit sortie d’un Botero.
Sous le regard de l’autre que j’étais, la pesanteur a prit ses aises.
Et j’ai découvert qu’elle avait un peu de tout et même de l’humour.
Et puis j’ai aperçu la légèreté.
Et je me suis mis bêtement à comparer.
Sa taille fine, ses traits graciles,
son élégance naturelle et sa simplicité.
Sous des dehors sophistiqués.
Je me suis mis à hésiter.
Entre le profond et le superficiel
Entre le noir et le blanc
entre le vulgaire et le grossier.
Entre la baise et la tendresse.
J’ai mis mon doigt un peu partout
pour gouter l’acide et le sucré
Pour choisir ce que je préférais.
Au final je ne sais toujours pas laquelle je préfère.
Je crois qu’elles sont toutes deux ambivalentes et solidaires
comme deux moitiés disjointes
la nuit et le jour
seul l’œil ouvert qui ne cille plus
peut reconstituer leur unité.
illustration : Suzanne et les vieillards, 1609-1610, Pierre Paul Rubens
(Madrid, Académie des Beaux-Arts de San Fernando)