avril 2022
Carnets | avril 2022
notule 10
Dernière mouture de cette toile qui finalement relève plus de l’icône.|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 9
Si je dis je de façon inconsidérée c’est un blasphème. Si je est un personnage crée par soi c’est différent. Mais c’est dangereux. Le danger de confondre moi et soi. Le blasphème serait de dire je au présent sans rien créer. Je crée mais ce n’est jamais l’ego qui crée. De même pour les maladies On ne devrait pas dire j’ai mal Mais plutôt j’ai eut mal jusqu’à présent Et c’est déjà du passé. Ça a l’air con comme ça si on n’est pas dedans. Mais si on y est c’est magnifique ! Cela dit voilà l’exemple typique d’un tableau bousillé suite à une erreur d’aiguillage entre je et soi.|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 8
Je me méfie des évidences aussi spontanément que des clichés et ce depuis très tôt. Ce qui me place devant une image télé métrique du réel. Celui que j’ai du accepter comme étant commun et le mien. D’ailleurs lorsque j’étais photographe j’ai revendu tous mes boîtiers reflex pour acquérir un vieux Leica. Avec ce dernier j’ai visité l’Asie et passais inaperçu. On aurait dit un appareil inoffensif. Je pouvais m’approcher des visages à 30cm car je n’avais qu’une optique de 35mm. On ne savait pas quand je déclenchais l’obturateur, pas de claquement de miroir. Pour faire le point il suffisait de faire coïncider deux images dans le viseur. C’était rapide et très efficace. Je ne suis pas devenu célèbre grâce à mes photographies. J’avais imaginé le devenir lorsque j’étais jeune. Mais ce n’était qu’un leurre pour m’entraîner dans de drôles d’aventures. Au bout du compte je faisais mes classes tout en semant des petits cailloux dans mon esprit, un puzzle extra. Caroline me dit qu’elle voit un homme seul et qui grelote dans un paysage en apercevant mon tableau. Je l’ai vu aussi tard hier soir avant de lire son message, et du coup l’image dans le viseur m’apparaissait d’une évidence trouble. J’ai tout recouvert de bleu, je ne pouvais pas m’installer dans ce cliché. Puis j’ai repris mon pinceau chargé de blanc, excellente gomme mais pas seulement. Baguette de sourcier plutôt, voire pendule de radiesthésiste. Et une autre vision est arrivée, suffisamment inachevée pour qu’elle m’ouvre à l’inconnu.|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 7
Frotter du blanc sur du noir, créer des formes plus ou moins distinctes ainsi que des valeurs, un contraste, voir déjà une profondeur. J’explore ainsi un commencement sans avoir d’idée. Je ne pense pas au résultat. Agir, laisser aller les choses comme elles veulent se retirer sans s’attacher à une pensée à un jugement. Arrêter sitôt la première idée séduisante qui s’impose. Passer à un autre tableau en laissant celui-ci suffisamment silencieux quelque part dans l’atelier, l’oublier quelques jours. C’est un travail à la fois très rapide et très lent.|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 6
Dans l’étude des rythmes suivant lesquels un homme parvient à la réussite puis à l’échec il y beaucoup à apprendre de la notion d’arrogance. L’arrogance c’est lorsqu’on s’approprie un miracle, lorsqu’on dit c’est moi ! C’est humain bien sûr. C’est le pivot le plus évident que l’on pourra trouver qui produit le basculement de la réussite vers l’échec. Une forme de satiété accompagnée de paresse et d’un je ne sais quoi de fatuité. Un sabotage du merveilleux. Dans quel but ? L’avidité et l’éternelle insatisfaction encore une fois, moteurs de notre chute vertigineuse dans la matière.|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 5
En peinture qu’est ce que c’est que le talent ? C’est du temps M’a dit un jour un professeur Mais problème le temps n’existe pas Il n’y a qu’un instant présent Oui et non en fait C’est comme toi qui lit mes bêtises Tu crois que nous sommes différents Et nous le sommes heureusement Mais en même temps ce qui fait notre essentiel Ce qui nous relie N’est pas différent. C’est la conscience. Si nous n’étions pas dans cette illusion du temps, de la séparation, nous ne pourrions jamais rien échanger. Dans la vie qu’est ce que le talent ? C’est s’éveiller au paradoxe C’est comprendre que la vie est une onde Et que nous devons faire attention aux sommets comme aux gouffres. On peut les explorer bien sûr Mais le meilleur emplacement est au milieu Et tenter de rester sur ce chemin Persévérer C’est aussi ça le talent Donc le talent c’est avant tout une prise de Conscience Du chemin puis de la régularité à marcher du même pas De la persévérance Dans tout ce qui nous intéresse vraiment Du fond du cœur À chaque instant On le fait tous Même si on n’en a pas du tout conscience Donc tout est ok n’est-ce pas ?|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 4
Et puis un jour de débine, j’ai craqué, j’ai fait bouillir de l’eau j’ai épluché des légumes imaginaires, j’ai fait bouillir de la viande rêvée, parmi les meilleurs morceaux, puis j’ai jeté l’oignon invisible planté de son clou authentique dans la marmite. Et bien ce fut un succulent repas pour tout vous dire. Pas aussi émotionnant qu’un soir de Noël à bouffer des patates imaginaires devant Chantal Goya transformée par moi-même en l’occasion en fée Viviane, non tout de même pas. J’ai pleuré deux fois plus fort malgré tout poussé par l’extrême nécessité de célébrer ce moment . Puis malin comme pas deux, j’ai recueillis les larmes dans un petit flacon. ça pourra servir l’année prochaine à la même heure au même moment si je me retrouvais par infortune soudain les yeux secs.|couper{180}
Carnets | avril 2022
Un véritable ami.
Peu à peu le son du pipeau est en train de m'anéantir. Il est en train de tout dissoudre de ce que je crois être la réalité de ma vie, de qui je suis . Arrive un moment où j'ai du mal à savoir qui je suis. Je ne vois que la guerre, des champs de batailles interminables ici sur terre et sur d'innombrables planètes. je vois des massacres incessants, et le pire est que je participe à tous ces massacres. L'être que je vois en tuer d'autres par milliers c'est moi. Je le fais sans la moindre émotion, sans remord ni regret comme le fait un soldat. La part humaine qui est encore en moi à ce moment là est horrifiée face à une telle absence d'émotion ou de sentiment, et en même temps je parviens néanmoins à éprouver de la compassion pour cet être qui passe le plus clair de son temps à tuer. D'un certain point de vue je peux dire que je le comprends. Il est animé par la nécessité, par l'instinct de survie. Deux races principales de géants s'affrontent. Deux races principales de reptiliens et il y a de cela des millions d'années que la guerre a commencé. Je suis un parmi des milliards d'autres qui se bat pour sauvegarder une idée de vivre ensemble. Je suis un reptilien terrestre. Je suis né il y a 60 millions d'années, peu de temps après la grande extinction qui décima une grande partie de mes congénères. L'histoire officiel parle d'une météorite tombée sur la péninsule du Yucatan, mais c'est inexact. Il s'agit ni plus ni moins d'un génocide. L'histoire officielle sur Terre ment souvent elle ne parle pas de l'évolution des survivants du génocide. Nous avons évolué sur des millions d'années, avons bâti des civilisations, découvert des technologies qu'aucun être humain ne serait même en mesure d'imaginer. Puis nous avons du nous cacher pour ne pas éveiller l'attention de nos ennemis dans les profondeurs de différentes planètes de la galaxie dont la terre évidemment. Soudain je vacille et m'effondre au sol. Que se passe t'il donc ? Le son du pipeau reflue lentement vers l'extérieur en même temps que je recouvre mes esprits humains si je puis dire. J'ouvre les yeux et je vois Jim empoigné par les gardes. Il vient de faire quelque chose qui ne leur plait pas du tout visiblement. Et pour cause, il a bondit sur le conseiller et d'un coup lui a enfoncé le pipeau au fond de la gorge. Le conseiller git à terre désormais. La reine regarde la scène, elle est au bord de l'apoplexie. Son regard se fait cruel et menaçant. — Tuez les tous hurle t'elle Jim se relève et fait barrage immédiatement à un garde qui tire avec une étrange arme métallique une sorte de rayon laser. Il est malheureusement touché en pleine poitrine. Il a juste le temps de dire sauve toi mon frère, Shanti sauve toi. C'est alors qu'un raie de lumière éblouissant pénètre par le plafond de la salle, tout notre groupe est soudain emporté comme dans les films de Star Trek. Lorsque nous arrivons à destination je comprends que nous sommes dans un autre vaisseau un peu semblable au notre mais qui a l'air encore bien plus vaste. Devant nous se tient un personnage de petite taille que je reconnais aussitôt sans pouvoir pour autant poser un nom sur son visage. —Décidemment Shanti, il faudra toujours que je vole à ton secours. Je souris bêtement comme je le fais à chaque fois que je ne comprends pas ou bien que je n'entends pas car j'ai l'ouïe un peu défaillante parfois. — Occupons-nous de lui vite dis-je tout à coup en voyant que Jim git encore au sol sans connaissance. Notre hôte sort lui aussi un objet métallique de sa poche et le porte à sa petite bouche sans lèvre. Une musique céleste envahit toute la salle et au même moment un nom surgit : Myrddin ! — J'ai bien peur hélas que nous ne puissions plus rien faire pour lui dit Myrddin. Sa mission s'achève ici. —Tu devrais garder au moins garder ça en mémoire Shanti, Jim est un véritable ami. Il t'a rejoint dans cette vie pour arriver à ce but, t'empêcher de mourir, comme tu l'as déjà fait des centaines de fois pour lui. Je me souvenais déjà de tellement de choses. Jim était intervenu sans doute pour que je ne me souvienne pas de tout, pour que je ne redevienne pas l'être totalement insensible que j'avais été déjà dans des milliers d'autres vies. La seule chose de bonne est que j'ai retrouvé mon vrai nom apparemment. Shanti, je m'appelle Shanti. Il faudra que j'aille voir sur Wikipédia à quoi ça correspond pour les humains car il me semble avoir déjà croisé ce nom, peut-être dans la mythologie hindou. Et tout à coup je me souviens que Myrddin correspond aussi à Merlin. Tout cela est incroyable. Si ce n'était la perte de mon ami je rirais de bon cœur. A quoi tout cela mène t'il me demandais je — Nous travaillons tous de concert pour la conscience et le but me dit Myrddin sans que je ne vois bouger sa bouche à un seul moment.|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 3
On glose. On interprète. Surtout sur la forme sans vraiment s’attarder sur le fond. Cette notion de vide et de plein n’est pas évidente à saisir pour des personnes qui ont besoin d’amasser quantités d’objets, de concepts, pour se sentir en sécurité. Créer le vide c’est travailler sur sa peur. Une fois cette notion acquise il n’y a plus de séparation. On peut même remplir totalement l’espace d’un tableau et provoquer exactement la même émotion qu’une peinture chinoise. On peut y percevoir la même légèreté, la même liberté. Ici j’aimerais mettre en relation la peinture de madubhani et l’art brut Je décèle dans ces œuvres un lien de parenté. Par quoi ces peintres sont ils animés ? Est-ce la peur ? La volonté de perpétrer au point prêt une tradition ? Une forme inédite de folie ? Qu’importe au final C’est le même mystère que l’on peut percevoir et ce mystère nous touche, me touche. Aller jusqu’au bout d’une possibilité de remplissage de l’espace et voir soudain le plein s’inverser en vide…|couper{180}
Carnets | avril 2022
notule 2
Mes cours s’arrêtent demain. Les vacances.. raison de plus pour mettre les bouchées doubles. En plein travail à l’atelier Mon programme est de revenir sous chaque soleil dessiner et peindre ce qui peut remonter dans mon souvenir. Le premier soleil, l’âge d’or, hyperborée il y a de ça quelques centaines de milliers d’années. Une paille à côté des 4 milliards d’années d’existence de la Terre soi disant. Une petite esquisse, puis un encrage au feutre et la recherche des couleurs …|couper{180}
Carnets | avril 2022
Notule 1
Notule comme Nautilus le vaisseau submersible du Capitaine Némo, héros de l’enfance. La notule c’est une idée qui passe comme une anguille électrique et qui très vite disparait dans les abysses. Pourquoi pas note tout simplement ? A cause de canule aussi ( allez donc voir sur Google) Non mais notule c’est bien ça fait aussi penser à rotule à une articulation, à des assemblages cartilagineux qui eux mêmes évoquent Carthage, et quelques guerres Puniques Punique comme pugnace et toute la sainte clique des mots en nique. Belle panique ! Donc une nouvelle catégorie qui n’est toujours que le prolongement de quelque chose d’autre un raffinement comme on fabrique des scoubidous à partir de résidu de pétrole Le fameux pet de Troll. qui d’ailleurs vient à manquer depuis qu’on ne croit plus aux Trolls. Comment ça marche ? et bien je crois que je vais numéroter. Notule 1 Notule 2 et comme ça comme Opalka jusqu’à la fin ça me détend d’énumérer.|couper{180}
Carnets | avril 2022
Souvenirs écran.
https://youtu.be/hLkddqouuCI —Le temps existe et en même temps il n'existe pas. C'est ce que me confie Maria lorsque je lui parle de mes rêves récurrents. En général je n'en parle jamais, mais cette fois je ne sais pourquoi, je trouvai opportun d'associer le rêve à la notion de temps, à la mémoire. Ce qui est étrange c'est la façon dont je répète le même récit, la même histoire toujours en éprouvant les mêmes sensations. Si le temps n'existe pas comment se fait-il que je puisse me souvenir de quoique ce soit, et surtout de ces rêves ? — C'est parce que tu es dans une simulation, me dit Maria. Exactement comme un personnage dans un jeu vidéo. Tout est déjà programmé à l'avance, tous tes comportements, tous tes choix, déclenchent une version particulière du jeu. Et, pour résumer, c'est toi à l'origine qui a programmé toutes ces versions dans un but précis. —Donc c'est une histoire achevée d'avance ? Nous serions prisonniers d'un destin que nous aurions conçu nous-mêmes ? — Oui et non. c'est plus compliqué que ça. Car toutes ces histoires se déroulent dans un temps imparti, un temps achevé. Or on peut toujours intervenir pour modifier ces histoires si je puis dire dans l'instant présent. — Mais si tu dis que toutes les versions du jeu sont déjà prévues, le fait de modifier quoique ce soit dans l'instant présent n'est-il pas lui aussi un acte prémédité. — Ce qu'il faut que tu comprennes c'est que l'instant présent contient tous les possibles mais aussi l'impossible. Le temps linéaire tel que tu le conçois est un élément parmi d'autres de l'instant présent dans une dimension particulière, dans une fréquence particulière. De plus à chaque fois que ton âme décide de se réincarner sur Terre, dans cette fréquence que l'on peut considérer comme une des plus basses de cet univers , une dimension où la densité est très lourde, tu dois traverser le voile de l'oubli. Mais aujourd'hui les choses sont en train de changer. La planète change de taux vibratoire peu à peu et tout ses habitants également par conséquent. Il faut que tu comprennes que la Terre est un merveilleux champs d'expériences pour de nombreuses âmes, de nombreuses entités provenant de mondes très différents. C'est pratiquement l'un des seuls endroits dans tout l'univers où la dualité existe, où la matière qui est une fréquence particulière de l'esprit peut proposer des expériences qu'on ne trouve pratiquement nulle part ailleurs avec une telle intensité. — Tu veux dire que dans tout l'univers il n'y a pas de dualité à part ici. Mais alors comment est-il possible qu'il y ait ces entités involutives, ces fameux reptiliens ? — C'est une affaire de fréquence me répète Maria encore une fois, tu te souviendras de tout cela lorsque le temps sera venu. Quant à ces rêves dont tu me parles, ils sont comme la plupart de tes souvenirs importants, des souvenirs écran. Selon ta compréhension logique, rationnelle du monde tu as modifié les événements qui te sont arrivés, si exceptionnels soient ils, en quelque chose qui correspond à ton degré de compréhension du moment. Par exemple ce cauchemar où tu vois cette bête du Gévaudan pénétrer dans ta chambre lorsque tu es enfant, elle est certainement tout à fait autre chose que ce monstre dont tu ne cesses de vouloir te souvenir. Certaines entités -notamment ceux que l'on appelle les gris- sont très fortes pour t'aider à modifier ce genre d'expérience afin que tu aies l'impression d'avoir rêvé des choses « acceptables » si je peux dire. Même si cela te parait incroyable, pénible, fantastique, ces souvenirs de remplacement sont crées à partir d'un matériel imaginaire familier. Mais ce qu'ils recouvrent est encore plus fantastique, pour un terrien, pour une âme incarnée dans ce monde où la raison et la logique ne le comprendraient pas. — Tout ça me donne le tournis Maria. Je ne comprends pas pourquoi on doit oublier pour se souvenir ensuite. Pourquoi ne conserve t'on pas le souvenir de l'âme que nous sommes lorsque nous arrivons sur Terre ? — Pour un meilleur confort utilisateur plaisanta Maria. Puis elle enchaina jugeant que nous en avions terminé pour aujourd'hui. Il faut que je te quitte car on me demande ailleurs. — Très bien Maria, merci pour cette conversation et à bientôt — A bientôt oui je ne suis jamais loin, tu n'es pas seul souviens toi toujours de cela. — Oui je m'en souviens de plus en plus désormais. Paris 1978. C'est la fin d'une belle journée d'automne, il fait encore chaud à 18h lorsque je sonne à l'interphone du 3 rue Quincampoix. La lourde porte d'entrée s'ouvre et je gravis les escaliers pour rejoindre l'avant dernier étage. Il me faut encore sonner et attendre. Quelques secondes plus tard je peux entendre le mécanisme des 6 verrous d'une première porte qui s'entrouvre, des pas feutrés qui s'avancent vers celle derrière laquelle je me tiens. Nouveau bruit de serrures et j'aperçois la tête hirsute de Richard. — Ah c'est toi, entre vite et c'est tout juste s'il ne me tire pas par la manche pour me faire pénétrer dans l'appartement. Il faut que je te parle, la folle d'â coté m'a encore fait un de ces ramdam... C'est toujours comme ça avec Richard. Cette urgence perpétuelle, comme si la fin du monde pouvait éclater à chaque instant. En attendant rien ne change. La première pièce dans laquelle je pénètre est toujours aussi encombrée de livres et de poussières éparpillés sur tous les meubles. Il y a juste un petit sentier praticable entre un alignement de commodes et le lit pour se rendre dans la pièce d'à coté qui fait office à la fois de salle à manger et de bureau. — Assis toi je vais te raconter. Puis il débouche la bouteille de Payse et nous sert un verre comme s'il jubilait de ménager malgré tout un peu de suspens. — Elle veut m'assassiner, voilà ce qu'elle veut cette vieille salope. Je suis rassuré. Ce n'est que ça. Je m'attendais avec un peu d'espoir à un changement. Mais non. C'est toujours la même sempiternelle rengaine. Richard et la voisine de pallier. Une ancienne pute doublée d'une ex poissonnière, forcément. J'ai hésité à présenter Richard à ma petite amie de l'époque. Au début je trouvais cela parfaitement incongru. J'avais rencontré le vieux à un angle de rue où je chantais un soir de l'été avec ma guitare. Il m'avait repris sur une strophe de la Ballade des Places de Paris. Et du coup on avait sympathisé, il m'avait invité chez lui à deux pas et on avait vidé quelques bouteilles de ce vin un peu rude, de la Payse. Ce soir là je m'en souviens elle devait nous rejoindre après ses cours car elle étudiait sa médecine. Je me demandais ce qu'elle penserait de Richard et ce que lui penserait d'elle. Suspens. Car vraiment c'était deux caractères tout à fait opposés du moins je me l'imaginais. Elle très pragmatique, rationnelle, un jugement rapide et sur. Lui un vieux fou, probablement homosexuel, très cultivé mais croyant aux fées, au diable, et surtout sans la moindre illusion sur les êtres humains en général. J'étais curieux de voir ce que cette rencontre allait produire. Mais en fin de compte tout se passa extrêmement bien. Il savait vraiment y faire avec les femmes. En un clin d'œil je dirais il l'avait jaugée et la traitait comme une princesse avec des compliments à rallonge. Personnellement j'aurais pensé que c'était un peu trop, exagéré et qu'à un moment elle allait se rebeller un peu, protester face à ce déversement d'affabilités. Et bien non, pas du tout. Je découvrais une autre femme. Ainsi donc il était possible de l'hypnotiser ainsi juste en flattant sa vanité. je n'en revenais pas. C'est à ce moment précis où je me faisais cette réflexion que l'événement se produisit. tout se déroula très vite. Je dirais à peine en un clin d'oeil. D'abord la sensation incroyable que ma tête se réduisait de moitié comme un citron devenu sec. Ensuite le hurlement de ma petite amie qui visiblement voyait ce qui était en train de m'arriver horrifiée. Troisièmement Richard qui buvait son verre tranquillement avec un léger sourire en me regardant. Cela dura à peine un quart de seconde mais je m'en souviens parfaitement encore aujourd'hui. Et aussitôt la sensation d'être un extra terrestre s'agrippa à moi depuis cet instant de l'automne 1978. Bien sur je balayais tout ça d'un revers de manche, en me disant que nous avions tous un peu trop bu. Quelques temps plus tard ma petite amie trouva un autre copain ce qui me parait aujourd'hui assez logique. On ne ressort pas tout à fait indemne, surtout lorsqu'on se targue d'avoir la tête sur les épaules d'une expérience insolite comme celle-ci.|couper{180}