La forêt tient lieu de repli : odeur d’humus, écorce humide, lisière où la parole cesse et le souffle trouve sa cadence ; les lacs tiennent lieu d’écoute, surface lisse qui ne rend rien et pourtant garde tout. Le vélo trace une ligne pour se tenir vivant — non pas fuir, tenir au bord ; non pas héroïsme, l’allongement de la distance jusqu’à épuiser le nom ; chaque jour un peu plus, la route gagne sur la pièce. Ce qui serre revient, mais autrement : la colère n’est pas un cri, c’est un dépôt, une densité ; non pas un choc, une nappe qui monte, régulière, exacte. On voudrait disparaître, on reste ; on voudrait rester, mais autrement : pédaler jusqu’à n’être plus que jambes, souffle, goudron, et que la tête décroche, à peine tenue par la visière. L’envie de fuir et l’envie d’être là se tiennent ensemble — non pas contraires, tenons d’une même plaie ; le paysage accepte tout et ne répond de rien : les troncs se succèdent, la chaîne claque, un chien aboie sans insister. La haine gonfle, oui, mais non pas pour détruire : pour écarter, pour tenir l’aveu à distance ; on croit à la réparation, on reconduit ; on croit à la justice, on compte ; on compte, on compte encore, et l’on apprend que les nombres n’ouvrent pas. L’amour n’est pas cela ; ce n’est pas l’effort, ni l’excuse, ni la dette payée de plus ; ce n’est pas comprendre — c’est laisser être sans redresser. Alors on s’arrête au bord du lac : le vent plisse à peine la surface, la roue tourne encore dans le vide, et le cercle demeure privé de centre.
La lisière
Pour continuer
fictions
tant mieux
Il a dit une chose neuve : Tant mieux si le prix du chocolat augmente, personne n'en achètera et ça leur restera sur les bras. Puis un autre a dit : T'as raison et ça leur rapportera moins de TVA. Puis tout le monde a rebu un coup et c'était comme avant.|couper{180}
fictions
épuiser quelque chose
Lui avait l'air fin une fois qu'il avait déclaré : il faut épuiser quelque chose. Le simple fait de l'avoir dit l'avait comme qui dirait totalement épuisé|couper{180}
fictions
tous des chiens
Enfin, celui-là est arrivé avec son gros bonnet sur le crâne et il a dit que nous étions tous devenus des chiens. tous, des chiens sans âme ! L'autre à cet instant a voulu la ramener. Genre : ah oui ? et comment sais-tu que les chiens n'ont pas d'âme ? Mais le gros avec son bonnet avait un regard si féroce que la conversation s'est tout de suite arrétée là. Il manquait quelque chose à la scène et je ne savais pas dire quoi.|couper{180}