Coule œuvre

Installation de la fibre hier. L’un des deux types a sorti une mèche d’un mètre de long pour percer le mur de la rue. Je voulais voir ça de plus près et ai ouvert la porte d’entrée. Un serpent vert se tenait juste devant moi, il m’a fait face un instant, autant surpris que je l’étais je crois. Cela a duré quelques secondes, sa petite tête dressée et son corps ramassé en méandres prêt à l’attaque ou à la défense tel un ressort. Puis il a filé sur la chaussée en zigzagant élégamment, sans se presser , a traversé la rue pour s’introduire sous la porte d’entrée des voisins d’en face. Pas longtemps, il ressort et voici qu’il s’enfile dans un trou du trottoir, je vois encore la queue disparaître puis plus rien. Tellement surpris que je n’ai pas eu le réflexe de prendre une photo. Le technicien en a pris une, tellement surpris lui aussi. Mais je n’ai pas pensé à lui demander qu’il me l’envoie.
Ce que ça fait d’imaginer un serpent dans ses murs. Probablement dans le boîtier du compteur à gaz. Et en même temps j’imagine le technicien qui vient relever le compteur et qui tombe là-dessus. Peut-être qu’il ne parviendra pas à lire la consommation de gaz. Qu’il s’enfuira. qu’on ne paiera plus jamais le gaz que notre domicile sera effacé des listes... Faut pas rêver non plus. Et après tout il ne s’agit que d’une couleuvre. La couleuvre du gaz. Une de plus. Ou vieux serpent de mer.
Ce que ça fait d’imaginer un serpent dans ses murs quand même. Peut-être y en a t’il plusieurs, un nid. Merde pourquoi ma maison. Pourquoi moi.
Je suis allé voir ce que ça signifie comme symbole car le malaise reste tenace. Comme quoi on à beau faire vouloir être raisonnable, rationnel, et prendre les choses avec humour. On reste quand même à vouloir s’accrocher à quelque chose quand ça sort des sentiers battus.
Je préfère penser à une mue qu’à quoique ce soit d’autre. Une nouvelle peau. Ça ne serait pas du luxe.

Avaler des couleuvres est une chose mais les abriter chez soi… Retour à l’envoyeur.

Travaillé tôt ce matin sur un texte qui ne donne rien. Sur l’exercice de la semaine, les images glissées cassées, tourné autour de l’école communale, le chemin pour s’y rendre, pour en revenir. Les saisons qui passent et ce chemin interminable qui les traverse. L’école où l’on n’apprend pas grand chose de ce qui importe vraiment. Punitions et récompenses, information plus que formation, et ruse plus qu’intelligence. Le cœur n’a pas sa place ici. La notion de par cœur, une foutaise.

C’est à l’école aussi que l’on pourrait être attentif aux tempéraments des enfants, parvenir à les discerner et ainsi apprendre à rêver aux mélancoliques, à inciter à l’action les flegmatiques, et ainsi de suite. Mais évidemment Hippocrate n’est pas au programme. L’école ne forme pas elle déforme, le nivèlement par l’incomplétude.

Trouvé une lecture des vies minuscules de Pierre Michon en audio, mais André Marcon lit la première histoire celle de Dufourneau au pas de course presque sans respirer, ce qui m’amène au bord de l’asphyxie. La désolation des livres audio parfois. Je verrai pour les deux autres histoires sur la route tout à l’heure, ce sont d’autres acteurs.
En même temps les phrases de Michon ne sont pas données, il faut parfois s’y reprendre à plusieurs fois pour les lire d’affilée.

Un serpent c’est un peu comme une phrase ou vice versa. Ça peut être sinueux, se ramasser sur soi, bondir et mordre. Une phrase venimeuse. Un serpent admirablement bien ponctué de petites tâches sombres sur fond vert.

Coule œuvre.
Cool œuvre.
Imprécation pour que ça vienne un de ces quatre jeudi.

Carnets | mai 2023

Disparitions

Je relis de vieux articles, pas fameux. Tout en bas, une ou deux personnes semblent s’y être arrêtées. Je clique sur leur avatar, curieux de voir ce qu’ils font sur WordPress. Et je tombe sur : L’auteur a effacé son site. Évidemment, ça m’embarque dans les allées d’un vieux cimetière, peut-être celui du Père Lachaise. Il y a les tombes célèbres, les visites obligées. Mais ce que je garde en mémoire, c’est l’émotion particulière face à une sépulture anonyme. Une dalle fendue, un nom presque effacé. Parfois, juste une nuance de terre signale qu’un corps repose là. Voir un site “effacé par son auteur” provoque un trouble semblable. Je pense à septembre, au blog que je n’ai plus envie de renouveler. Trop cher pour ma modeste bourse. Comment quitter la table avec élégance ? J’ai tout sauvegardé, au cas où WordPress décide de tout effacer à l’échéance. Peut-être que je remettrai tout en ligne ailleurs, chez un hébergeur plus abordable. Ou peut-être qu’il faut accepter de tourner la dernière page, pour pouvoir en ouvrir une autre. Ou peut-être que je ne toucherai à rien. Et je verrai bien ce qui se passe. C’est plutôt ça, mon style : faire avec.|couper{180}

Carnets | mai 2023

31052023

Une chose est importante quand on veut raconter des histoires, c'est de ne pas perdre le fil de celle-ci. Tous les menteurs savent le risque de se couper ainsi qu'il est d'usage d'employer ce mot. Mais si l'on utilise ce risque comme ressort de l'histoire, que se passe t'il ? Admettons un écrivain qui perd la mémoire de son histoire, qui du jour au lendemain ne se souvienne plus du nom de ses personnages, de leurs biographies fictives et qui passe son temps à tout modifier... non par malice bien sûr, mais parce qu'il ne peut faire autrement désormais. Comme en peinture le doute et l'hésitation provoqueraient un flop à coup sur. Donc c'est en assumant totalement cette perte de mémoire, en y allant à fond que ça risque d'être vraiment attrayant. En tous cas au moins pour celui qui écrira cette histoire. A part ça je suis passé à la clinique hier, quelques coups de laser dans chaque œil et un éblouissement fameux à la sortie. Heureusement, mon épouse m'a prêté ses lunettes de soleil. Il y avait un protocole à suivre avant l'opération que j'ai complètement zappé évidemment. Il fallait prendre une série de gouttes quelques jours avant et je fus penaud d'avouer au toubib que j'avais fait l'impasse. A un moment j'ai cru qu'il allait reporter le RDV au moins suivant. Mais non, restez là je reviens, il m'a flanqué des gouttes à lui dans chaque œil j'ai eu l'impression de passer un portail. tout est devenu supersensible, y compris les défaillances d'un spot du plafond que je n'avais pas remarquées auparavant. Ensuite une vingtaine de minutes d'attente pour laisser le temps à la pupille de se dilater et hop. Aucune douleur. Juste des éblouissements répétés. Fixez mon oreille gauche me disait le toubib... je ne voyais rien du tout, il fallait inventer, estimer une distance, une tête, une oreille et fixer l'œil sur cette création parfaitement imaginaire. "— juste un peu plus bas si vous pouviez" ajoutait-il parfois.|couper{180}

Autofiction et Introspection

Carnets | mai 2023

Assemblage

Lire avec attention, mais en conservant du recul. Noter au fur et à mesure des groupes de mots qui paraissent déjà vus, bizarres, plats, comiques, illogiques. Et les mettre les uns derrière les autres à la queue leu leu. voir ensuite ce que ça fait. Grand mythe fondateur. Symbole de vie. Puissance magique. Dispensateur de bienfaits. Œuvre d'art comme telle. Savez-vous que. A travers. Vous apprendrez. Découvrez le lien. Découvrez enfin. Comment [...] pour mieux. Enregistrez ce produit. Partagez votre achat avec vos amis. A défaut de prétendre. Pour aller vers le réel. Les obstacles auxquels il se heurte. Dans le cadre de. Son vrai titre. Le garant du système. Conduire une politique. Représenter l'institution. A double-titre. Un organe de presse. Nombreux déplacements. Le côté professionnel. Inciter les citoyens. Lire la presse écrite. Corriger les inégalités. Un regard collectif. Nous ferons le nécessaire. Dans ce style qui le définit si bien. Un récit passionnant. Dont on ignore encore tant de choses. Accablé de chagrin. Il s'est retiré dans la solitude. Il commença à se dire qu'une nouvelle vie était possible. Retrouvant ses reflexes. Une tragique pollution. Protéger des malversations. En laissant courir les rumeurs. Une malédiction pèserait sur la ville. Une réalité objective. Commentaire autorisé et décryptage. Si l'on doit caractériser. Un angle mort. Un policier abat un jeune homme. Toute une population. Le contrôle au facies. Positiver le négatif. C'est une simple bavure. Un plan social. Une affaire de mœurs. La légitime défense. la tyrannie du politiquement correct. Un lynchage médiatique. Un quartier sensible. Coller à son époque. Des instances de médiation. La voix de son maître.|couper{180}

Autofiction et Introspection