Frontières et paliers

Brutal, violent désir. On le sent si physiquement monter en soi. Qu’il veut s’accaparer quelque chose dans l’air ambiant pour s’affirmer plus encore. Gloutonnerie du désir, signe de l’insatiable. Invente sans cesse une urgence pour tenter de parvenir à s’apaiser, se satisfaire, mourir. Puis repu, retombe dans son néant. Dans sa défaite. Mercure du désir. Vif-argent. Volatil. Attendrait-on qu’il gravisse ne serait- ce qu’un échelon. Qu’il parvienne aux reins, à l’abdomen. La patience nécessaire à la moindre élévation. Le sentir présent, encore vrombissant, mais ne pas s’arrêter en chemin. Tenter l’ascension vers les poumons, le sternum, le sentir s’écouler de bas en haut jusqu’à la gorge, le thymus et l’hypophyse. Puis atteindre le siège des nerfs. Électrique. Eh bien évidemment ça ne s’arrête pas là. La calotte crânienne effectue des soubresauts et s’envole. Vers quoi vers qui, le désir nous emporte-t-il alors. Peu importe de le savoir si l’on parvient un jour jusque-là. Entre chaque palier pourtant une sensation de soulagement, presque d’extase. Mais, pas tout à fait net, pas tout à fait flou non plus. On sent bien que le courant peut s’inverser, qu’il est alternatif. Que la lumière peut aussi bien s’allumer, revenir l’obscurité.

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Comme

Comme la mer qui cavale vers le mont Saint-Michel comme si elle allait lui faire sa fête, l'engloutir tout entier en deux coups les gros. L'air du temps me rattrape et je me mettrais bien à courir comme un dératé dans l'espoir de trouver une hauteur. En vain. C'est comme Waterloo morne plaine dans le coin. Encore pire depuis qu'il fait beau. Le soleil ne rend pas le monde plus beau il nous aveugle c'est tout. Pire je courre mais je fais du sur-place. La poisse comme le sable, la poisse comme les sables mouvants. Et la mer monte bon sang comme elle monte vite et je m'enfonce lentement. Comme un ange passe en tutu qui joue de la trompette mais mal. La fausse note m'excite me fait dresser les poils. Ta gueule l'ange je dis et ça m'extrait d'un coup des sables. Me v'la qui lévite. Comme par enchantement. L'ange se marre. Genre t'inquiète j'ai toujours raison, le con. Que t'aies la foi ou pas n'a aucune espèce d'importance. Comment on en est arrivé là ? Aucune idée j'ai juste dit comme au début et puis ensuite j'ai laissé filé pour arriver à la fin.|couper{180}

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technique mixte 70x70 cm

mai 2023 technique mixte 70x70 cm mai 2023|couper{180}

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La ramener

Il la ramenait sans arrêt. Pour un oui, un non. Sans qu’on ne lui demande quoi que ce soit. Pour passer le temps je l’imaginais aux toilettes pendant qu’il la ramenait. Son gros cul posé sur la lunette. Ou encore accroupi la tête rouge en train de pousser dans des turques. Il pouvait la ramener tant qu’il voulait. Je pouvais même le regarder dans le blanc des yeux sans ciller cependant . Il y avait même en chœur tout un raffut de sons foireux qui appuyait les images mentales. Quand il avait terminé, il disait — alors t’en pense quoi ? C’est un sale con n’est-ce pas, ou encore une belle salope tu trouve tu pas ? J’en pensais rien bien sûr, je le laissais avec sa question en suspens. Puis je me dépêchais de prétexter une course urgente avant que ça ne lui reprenne, qu’il la ramène encore sur un autre sujet. En gros toujours le même. Lui aux prises avec les dangers infinis du monde extérieur peuplé d’idiots, d’idiotes écervelées. Je me tirais au même moment où il commençait à entrouvrir la bouche de nouveau le laissant là planté comme un poisson en train d'étouffer C'était un miroir qui devait au moins faire sept mètre de long et qui faisait face au bar. Un jour qu'il la ramenait j'ai chopé un tabouret et je l'ai envoyé valdinguer dans le miroir. Il ne l'a plus ramené, c'était fini.|couper{180}

La ramener