Exposition de peintures.
Deux de mes élèves ont décidé de se lancer. Elles veulent exposer leurs tableaux dans une chapelle tout près d’ici dont les lieux ont été aménagés pour recevoir des artistes. J’adore cette idée car elle procure une direction, un sens au travail réalisé et à venir. Mais une fois l’emballement, l’excitation passée il reste à mettre en œuvre un tel projet. J’ai envie ce matin de faire une sorte d’inventaire des ressources nécessaires pour les aider à mener leur projet à bien.
Exposition Pieuré de Salaise sur Sanne Patrick Blanchon 2019 il n’y avait pas de cimaise et bien sur pas question de faire des trous dans les murs. J’ai donc choisi de placer quelques œuvres dans des niches existantes en tirant partie de l’architecture des lieux. Dans certains cas il faut encore plus penser au respect des lieux, que votre exposition les respecte et si possible les sublime !
La préparation de l’exposition
La préparation est sans doute l’étape la plus importante du processus. vous verrez que si vous vous êtes préparés sérieusement tout sera nettement plus simple une fois le jour j.
Imaginez quelques instants dans quel état d’esprit vous allez vous trouver.
Au début c’est assez vague, on vous a dit oui, une date a été décidée en générale éloignée dans le temps. Cela ressemble à une sorte de rêve, c’est assez vague.
Je n’ose à peine vous parler de mes toutes premières expositions... Je n’étais pas encore classé dans la catégorie peintre professionnel à cette époque heureusement. Car lorsque j’y repense j’ai froid dans le dos. Etant un spécialiste de la procrastination en tous genres j’avais l’habitude de tout préparer à la hâte la veille des expos. Ce qui ensuite se soldait pas des difficultés innombrables évidemment, parmi lesquelles l’obligation de faire des aller retour pour aller chercher ce que j’avais pu oublier. Ou bien de me rendre dans des grandes surfaces de bricolage pour acheter de la ficelle, des agrafes et je ne sais quoi encore...
On apprend bien par ses échecs et par la fatigue surtout de les reproduire. Au bout d’un moment il m’est apparu évident que la préparation devait se faire le plus soigneusement possible. Et c’est aussi à partir de cette prise de conscience que ma carrière de peintre a décollé.
Prévoir n’est pas facile si vous n’avez jamais exposé, si vous n’avez pas d’expérience. On ne sait pas vraiment quel genre de difficulté pratique nous risquons de rencontrer. Prévoyez donc une mallette dans laquelle vous pourrez mettre une agrafeuse ( le mieux serait qu’elle soit électrique, mais ce n’est pas obligé) des agrafes ( attention, celles qui vont bien avec votre agrafeuse, dans la précipitation il m’est arrivé plusieurs fois de me tromper de type d’agrafes et d’être bien embêté au moment où il fallait recharger l’agrafeuse.) Un rouleau de scotche large et un fin, de la ficelle, des cartes de visite, des feutres de couleur, des pastilles de couleur, un couteau suisse ( important si vous oubliez le tire bouchon pour le vernissage ). Une pince coupante, un tournevis plat et cruciforme, (parfois il faut bricoler sur place une cimaise mal accrochée , ou encore dévisser un spot qui ne fonctionne pas.)
Titre de l’exposition et cohérence des œuvres exposées.
Beaucoup de lieux d’exposition demandent un titre, cela leur sert à l’insertion des informations dans un calendrier d’évènements par exemple, parfois aussi le titre est placé sur une affiche que les organisateurs fabriquent avec un de vos visuels. D’autres fois ils vous demanderont de fabriquer vous mêmes cette affiche.
En tous cas il est rare qu’on ne vous demande pas ce fameux titre que vous aller chercher un bon moment parfois en buvant force thé ou café, parfois en vous demandant ce que vous êtes allés faire dans cette galère.
C’est tout à fait normal dans le cadre des activités de loisir amateur dont fait partie la peinture. La plupart du temps une œuvre est un tableau, et vous n’avez peut-être pas l’habitude de travailler en série, de développer un thème.
Néanmoins de quoi parle t’on vraiment lorsqu’on évoque la nécessité d’un titre ?
De cohérence bien sur et c’est aussi là que les difficultés deviennent le plus aigues assez souvent.
Il y a plusieurs façon de faire apparaitre une cohérence dans votre travail. Et c’est aussi une source de découvertes insoupçonnées car généralement ce n’est pas une question que se posent les "amateurs".
La cohérence par rapport à un thème.
Depuis que vous peignez vous avez peut-être réalisé de nombreux tableaux sur un thème, que ce soit le paysage, la ville, les personnages, des natures mortes etc. Il est assez simple alors de trouver un endroit où vous alignerez toutes ces œuvres sur un seul thème pour choisir vos meilleures pièces celles dont vous êtes le plus satisfaits.
Si vous participez à une exposition collective il ne s’agit pas de tout emporter, on ne vous permettra pas de tout accrocher et cela fera de la manutention pour rien.
Renseignez vous au préalable sur le nombre d’œuvres requis, sur les formats autorisés, ne venez pas par exemple avec des toiles de 1m sur 1.50m si vous n’avez qu’un mètre carré ou deux pour exposer.
Prévoyez toujours cependant une œuvre ou deux de plus que ce que l’on vous demandera. Il arrive aussi qu’une sélection s’effectue sur place et que certains tableaux se trouvent rejetés par les organisateurs.
Vous avez donc décidé d’un choix de tableaux 5 ou 6. Parfait ! Vous avez fait la plus grande part du boulot.
La cohérence par le format.
Un peu plus compliquée mais pas irréalisable. Admettons que vos gouts vous portent à l’éclectisme. Un jour un paysage un autre la nature morte, un autre encore un personnage... vous aurez du mal à trouver une cohérence par le sujet, le thème.
Mais si vous avez l’habitude de réaliser toujours le même type de format celui ci peut être une sorte de fil conducteur en dernier recours. Pensez y. Cela vous donnera peut-être aussi des pistes à l’avenir notamment sur cette notion de format.
La cohérence par la couleur.
Si vous pratiquez l’abstraction il peut être intéressant de classer votre sélection par couleur. Y a t’il dans votre choix plus de couleurs chaudes ? de froides ? Cela peut être une bonne piste aussi pour faire un choix ?
La cohérence par la technique.
Peut-être ne pratiquez vous qu’une seule technique, l’aquarelle par exemple, ou la peinture à l’huile, dans ce cas pas de soucis. Mais si vous naviguez d’une technique à l’autre cela peut être plus difficile de trouver une cohérence surtout si vous n’avez pas non plus trouvé de theme.
On voit souvent ce genre de difficulté chez les peintres amateurs qui pratiquent l’abstraction.
Dans ce cas choisissez des œuvres réalisées avec une seule technique et vous verrez que ça fonctionne bien le plus souvent.
On peut aussi mixer tous ces conseils et trouver ainsi sa propre manière de rendre les quelques œuvres que vous aller choisir cohérentes.
La sélection des œuvres
Pour choisir vos œuvres à exposer quels seront à votre avis les critères ?
Elles peuvent toutes être magnifiques individuellement et ne pas fonctionner ensemble. Ce n’est donc pas forcément la beauté, celle que d’ailleurs vous serez au début le ou la seule à leur attribuer qui fabriquera la fameuse harmonie, ou cohérence.
Ce qu’il faut penser c’est le dialogue des œuvres entre elles, comment parvenez vous à les faire communiquer ensemble afin qu’aucune ne prenne trop ou pas assez le pas sur les autres. Pour que le spectateur considère l’ensemble de vos œuvres accrochées que cette harmonie soit évidente et qu’elle le touche.
Souvent dans ce travail de sélection je me suis aperçu que certains tableaux dont je n’étais que moyennement satisfait se transformaient lorsqu’ils étaient associés à d’autres et même se démarquaient de l’idée première que je m’en était fait.
Comment marquer alors le plus de points ?
Comme j’en ai parlé dans le paragraphe précédent je dirais que c’est un mixte. Vous serez le premier étonné par votre sélection alors soyez attentif à ce qui vous traverse à ce moment là. Si vous êtes vraiment satisfait de votre choix vous aurez fait le boulot, vous n’aurez rien à vous reprocher. Le pire étant toujours ce doute en ce qui me concerne de n’avoir pas suffisamment pris de précautions au préalable, une fois que je suis certain de mes choix je ne crains plus grand chose y compris les critiques éventuelles.
A la limite cette sélection bien menée est déjà un succès que nous devriez savourer pleinement.
Le succès est d’ailleurs tellement aléatoire lorsqu’on présente son travail qu’il ne vaut mieux pas trop s’y attarder soit par l’excitation que cette pensée procure soit par la peur qu’elle ne soit qu’échec et déception.
Faites le job de votre mieux, soyez vraiment satisfait de vos choix et vous verrez que vous aborderez l’exposition bien plus tranquillement.
De plus tout ce que vous allez découvrir sur vous même en recherchant cette fameuse cohérence vous permettra de pouvoir mieux parler de vos peintures. Parce que vous vous serez questionnés vous serez prêts à mieux affronter les questions des visiteurs.
Les lieux.
Je ne connais pas les lieux personnellement mais je crois que c’est une bonne idée de visiter ceux-ci lorsqu’on désire exposer. Cela permet d’imaginer combien de tableaux pourront être accrochés. Apparemment il y a plusieurs salles il conviendrait aussi de trouver un chemin pour le visiteur qui l’emmène d’un point à l’autre de l’exposition. Cela signifie qu’il faut réfléchir à une organisation, une cohérence de l’ensemble.
Les systèmes d’accrochage
Quel est le type de système d’accrochage que les lieux proposent ? y a t’il des cimaises ? de l’éclairage en quantité suffisante ? Ce qui entrainera de bien penser aux systèmes d’accrochage des tableaux.
A bannir en général le clou ou la vis plantée dans le milieu d’une baguette de châssis, trop de difficultés ensuite pour placer les œuvres de niveau. Il suffit parfois d’un millimètre d’erreur pour qu’on ne puisse accrocher correctement et que l’on doive alors faire appel à des stratégies fumeuses de bricolo, Genre cette horrible pate jaune que l’on colle au dos du châssis et sur la surface de certains murs d’expo. Hors de question de s’habituer à ce genre de pratique sous peine de se faire houspiller par les propriétaires des lieux en question.
La bonne pratique d’accrochage
Le meilleur système consiste à placer une cordelette accrochée par deux points de fixations de chaque coté du châssis. Il sera bien plus facile ainsi de les accrocher correctement.
Même si on se place dans une catégorie de peintre amateur on se démarquera rapidement en pratiquant ainsi.
Pour plus d’informations sur les systèmes d’accrochage
https://www.artistics.com/fr/comment-accrocher-un-tableau-nos-conseils Les systèmes d’accrochage
Les documents à prévoir
Chaque œuvre doit être signée de façon visible par son auteur. On peut aussi inscrire quelques informations au dos de la toile comme le titre, l’année de réalisation et pourquoi pas la technique utilisée ( acrylique, huile, etc) Les professionnels ajoutent souvent un certificat d’authenticité réduit. Pour les amateurs ce n’est pas obligé bien sur mais imaginez que votre travail plaise et que vous fassiez des ventes ? Parfois tout commence comme ça, par une expo, on rencontre le succès et c’est une bonne idée de le prévoir. on pourrait même se demander si se lancer dans les bonnes pratiques ne le fait pas venir plus rapidement...
A coté de chaque tableau accroché on peut aussi prévoir une étiquette où seront inscrits le titre de l’œuvre, l’année de réalisation, la technique utilisée et les dimensions. Pour les prix on peut aussi les rajouter sur l’étiquette, les avis sont partagés sur cette pratique. Et certains lieux d’exposition ne l’autorisent pas.
Le mieux alors est de prévoir une liste numérotée où l’on retrouvera le nom du tableau, ses dimensions, la technique et le prix. Celle ci sera imprimée en plusieurs exemplaires, mieux : plastifiée de même que les étiquettes, et à disposition des visiteurs. L’avantage de la plastification des documents est un gain de temps précieux. Une fois votre exposition terminée vous rangez tout dans une pochette une boite prévue à cette effet et vous aurez moins de travail pour la fois suivante si vous devez déplacer la même expo.
Le vernissage.
ça y est tout est en place il ne reste plus qu’à recevoir les visiteurs pour la première fois. C’est une sensation étrange dans laquelle se mélangent la peur et l’excitation. On se sent en vie c’est génial !
Pour recevoir correctement vos premiers visiteurs vous avez la possibilité de leur donner une date de vernissage... celle ci figurera dans tous les documents qui seront utilisés comme support de communication.
Je ne vais pas vous faire le liste de ce que vous devez acheter comme boissons chips ou cacahuètes.
Par contre je vais vous parler de l’état d’esprit qui fonctionne le mieux lorsque vous y serez.
Ne restez pas en retrait, allez vers les gens et recevez les comme si vous étiez le propriétaire des lieux et eux vos invités. Accordez leur de l’attention, comment ont ils prit connaissance de l’expo ? D’où viennent t’ils ? Si ce sont des gens qui viennent de loin posez leur des questions sur les raisons de leur visite, sont ils venus spécialement pour l’expo ou bien est ce par hasard qu’ils ont découvert celle ci ?
Vous ne pouvez pas savoir les bénéfices immenses que l’on peut tirer de ces quelques préambules qui ne consistent au final qu’à s’intéresser à l’autre avant même de commencer à parler de vos tableaux.
Cela s’appelle l’empathie et c’est aussi un outil que vous devriez emporter dans votre mallette.
Le fait de rencontrer des personnes qui vous parleront de ce qu’elles éprouvent à la vue de votre peinture c’est cela le principal. Ne pensez pas aux ventes, n’allez surtout pas vers les autres avec cette optique. Soyez débarrassés de cela, ça vous rendra bien plus détendu, ouvert et vous verrez que vous passerez un moment agréable.
Cependant ayez un petit carnet ou prévoyez un livre d’or afin de demander aux visiteurs leurs adresses email, c’est un excellent réflexe à mettre en place même en temps qu’amateur.
Imaginez que vous fassiez une nouvelle expo quelques mois plus tard, qu’est ce qui peut vous empêcher d’inviter à nouveaux ces personnes pour les convier à voir l’évolution de votre travail ? Rien bien sur à part le fait de n’avoir pas leurs coordonnées pour le faire.
Voilà je ne pense pas avoir oublié beaucoup de choses quant à la préparation de cette exposition que mes deux élèves vont réaliser. Il n’y a plus qu’à comme on dit.
Si vous aussi être amateur et que vous désirez exposer vos œuvres j’espère que ce petit article vous aidera. N’hésitez pas à commenter et à rajouter au besoin des questions je me ferai un plaisir d’essayer d’y répondre.
Pour continuer
Carnets | mai 2021
L’histoire
Je crois que nous vivons un temps qui veut se débarrasser de l'histoire par la profusion des histoires. Il y a tellement d'histoires désormais et sur tous les tons, qu'il y a de brins d'herbe dans une prairie. On n'y voit que du vert et on dit voilà en gros l'histoire. Voilà comment on pense l'histoire globalement. Ce n'est peut-être pas une intention consciente. Bien sur l'histoire est toujours plus ou moins manipulée par le pouvoir, par la politique, tout comme nos propres histoires nos histoires personnelles lorsqu'on s'appuie sur celles ci afin de tenter de prouver qui nous sommes. On peut tenter de le prouver au monde comme à nous mêmes d'ailleurs, je pense qu'il s'agit d'un levier pour tenter de s'extraire de quelque chose qui nous effraie. On raconte l'histoire, on raconte des histoires parce que parler est cette tentative d'exister face à l'irrémédiable. Ce qui est désolant c'est que l'on transforme ce miracle en boue la plupart du temps. Je pensais à tous ces films de science fiction qui commencent bien et dont le scénario devient de plus en plus poussif en son milieu pour finir lamentablement la plupart du temps. C'est qu'il s'agit d'une sorte de décalque, on suit un squelette de récit établit, le même toujours avec quasi les mêmes ingrédients. Je parle de la science fiction mais on peut prendre aujourd'hui tous les genres c'est pareil. L'idée générale est de produire des histoires en plus grand nombre pour alimenter les plate formes d'un contenu aussi plat que possible. Hormis quelques exceptions évidemment. Il semble que la boue ne soit d'ailleurs là en excès qu'à la façon d'un écrin qui servirait à distinguer ce qui tente de s'en échapper. Une exagération de saleté pour mettre l'accent sur le propre. Un peu comme le jeu des 7 erreurs de ce magazine télé. Avons nous besoin de l'histoire, des histoires ? bien sur que oui cela n'est pas à remettre en question, seuls les immortels peuvent se passer d'histoire. Ils peuvent aussi se passer de penser, d'aimer, de créer. Peut-être que l'histoire est une façon de tenter de régler le problème d'Œdipe, cette admiration et cette haine inconsciente la plupart du temps que nous trimballons de génération en génération via les histoires afin de ne pas l'oublier. Comme si cette émotion nous était nécessaire, comme si dépourvue de celle ci nous ne serions plus que des robots des zombies. Une admiration haine du père. Que ce soit un Dieu , un demi dieu, une star, un homme peu importe dans le fond. C'est bien ce mouvement je t'aime je te hais qui est à la source de l'histoire, de toutes les histoires parce que tout simplement ce mouvement d'attirance répulsion est à l'origine de notre univers. C'est sans doute ce qu'on appelle l'amour, cette colle ce ciment qui fait que la matière soit solide, que les histoires, l'histoire toute entière puisse tenir debout. Ou pas. Et il est inquiétant de voir que de plus en plus ces histoires ne sont plus construites avec cette colle ce ciment mais avec des procédés narratifs hollywoodiens eux mêmes chipés à l'ancien Testament qui lui les aura encore piqués à l'épopée de Gilgamesh. C'est à dire qu'on se trouve désormais face à une Histoire dont ne nous intéresse que le squelette mais pas la substance.|couper{180}
Carnets | mai 2021
La modernité
Une phrase de Rimbaud reste logée quelque part dans le bidonville de la mémoire. Le fameux "Il faut être résolument moderne". Dans la cabane recouverte de tôle ondulée juste à coté il y a Barthes, Roland Barthes qui tout doucement se désagrège au soleil de Mai en murmurant un je m'en fous pas mal de la modernité, c'est à dire que cette idée me laisse indifférent. Et puis Chirac qui renchérit en disant ça m'en touche une sans faire bouger l'autre. C'est qu'elle en aura mené par le bout du nez cette fameuse modernité... il n'y a qu'à regarder autour de soi, visiblement ce n'est toujours pas terminé. Et en même temps on sent bien une fatigue. Le nombre des trainards semble augmenter. Je veux dire ceux qui n'arrivent plus à courir après elle tout simplement parce que l'envie, les raisons leur manquent. C'est peut-être un effet de l'âge. Il parait que lorsqu'on vieillit on devient de plus en plus conservateur. Peut-être devient plus lucide sur tous les trompes couillons. Derrière le fard de la modernité au bout du compte que découvre t'on sinon une vieille dame qui fait ce qu'elle peut pour ne pas sombrer dans la décrépitude totale. Est ce que cette antiquité poussiéreuse est cette fameuse modernité ? je n'ose pas être malpoli en parlant du fondement de notre société Est ce l'ennui et son effroyable répétition le carburant de ses mille et une fantaisies ? Est ce parce que l'abondance considérée comme la vertu sur laquelle semble s'appuyer encore notre idée d'économie nous rend indécrottables en matière de changement de diversité de nouveauté ? Nous allons abondamment vous faire économiser, trier électriquement... La modernité ressemble à un vieux tapin mon petit chou et ça ne présage rien de bon pour l'avenir. Car pas de doute que tôt ou tard on utilisera sa déchéance pour prôner une idée toute neuve d'éternité, de solidité, de fiabilité et de fidélité et pour finir de propreté. Tôt ou tard c'est visiblement presque déjà demain. Ce ras le bol du zapping, de cette cohérence artificielle bâtie sur l'incohérence absolue en dit déjà long sur le désir de changement en train de germer dans des cervelles abreuvées, irriguées par des poncifs qui sont d'ailleurs comme autant de produits installés en tête de gondole dans le supermarché des idées de notre temps. Soyons écolos roulons électrique sur le dos de certaines peuplades dont la jeunesse vive s'éteint tragiquement à extraire du lithium pour nos batteries. Ou encore des métaux précieux pour nos indispensables smartphones. Cette civilisation de masse l'est vraiment , à la masse. Le discernement tire sa révérence en même temps que la vieille modernité. On ne voit plus que du veau du bovin de l'ovin un peu partout sans compter sur le cochon qui se débite à tous va et pour peu cher. Et des bergers invisibles tout là haut dans des tours de verre dont les chiens sont les flics debout sur les chars de ce défilé foutraque. Le carnaval perpétuel et désolant d'une pensée politiquement et moralement correcte, une érosion bizarre fabrique le désert sur lequel on vend du mirage de l'oasis et pas mal de bombes pour égayer divertir détourner l'attention. Cette fatigue éprouvée pour la surprise, la nouveauté dissimule à peine une faim, une avidité pour le retour au linéaire, à l'ordre. Une fatigue doublée d'un énervement et de jugements à l'emporte pièce. L'étranger comme l'étrangeté deviennent saugrenus puis assez rapidement dangereux et hostiles. La singularité ne fait même plus sourire elle révulse quand on ne fait pas tout pour ne pas la voir, la rendre banale autant dire invisible. Mais qu'est ce qui fait que la modernité a remporté un tel succès du 18 ème siècle à nos jours ? Qu'elle a tant fait tourner le monde dans tous les sens comme dans une lessiveuse ? Je dis le 18 ème parce que c'est à partir de cette époque qu'on a tenté de la mettre vraiment en mots. Il est probable qu'elle vienne de bien plus loin, de la Renaissance Italienne. Et cette dernière n'est qu'une resucée d'un phénomène qui prend sa source à l'origine même de notre humanité. Je veux dire n'est ce pas résolument moderne de descendre des arbres pour aller se balader dans la savane et devenir la proie de toutes les bestioles affamées qui trainent sur cette terre ? Il y a du pour et du contre toujours. Le mieux serait de se tenir au milieu de ne pas montrer d'avis trop tranché , signe d'extrémiste évidemment honni de nos jours pourrait t'on encore penser mais non. Justement le milieu aussi semble être devenu aussi une position intenable. Il faut trancher citoyen ça commence comme ça et ce n'est pas bien nouveau. On croit juste que c'est moderne parce qu'on nous le vend ainsi. Question d'emballage, de marketing rien que du copywriting. D'ailleurs on peut bien nous vendre tout et son contraire nous nous en fichons bien le seul truc qui nous intéresse désormais c'est de ne pas crever trop vite, de ne pas souffrir trop, d'être tranquille , pas malade si possible, de ne pas être dérangé par n'importe qui n'importe quoi Essayer de remettre un peu d'ordre dans sa tête, dans sa maison, dans son jardin ce n'est déjà pas une sinécure alors s'il vous plait madame la modernité eut égard à votre grand âge et au fait que malgré tant de vicissitudes vous soyez encore admirablement bien conservée, amusez nous dans le poste à l'heure du café si vous voulez, mais pour le reste faites nous donc pas suer. Ces arguments évidemment en valent d'autres que d'aucuns ne tarderont pas à élargir bien au delà des murs du jardin, de la maison. Cette mondialisation effrayante qui peut d'un coup faire surgir dans la salle à manger un pygmée, un aborigène, un breton et même un portugais désormais ! Trop c'est trop ! On nous revendra la France aux Français à rire larigot sur tous les tons et en argot. Vous verrez ce que je dis si c'est pas vrai. Peut-être que dans le fond c'est juste une façon d'exorciser et rien de plus je veux parler bien sur de mon texte matinal . Je nous le souhaite autant que je nous plains.|couper{180}
Carnets | mai 2021
Exigence
Derrière toutes tes prières l'exigence se traine prête à bondir pour un oui pour un non pas d'issue. Je sais que tu as essayé de la piquer l'euthanasier, l'amadouer, la ligoter l'entortiller, la soudoyer, l'hypnotiser, la saouler, la renverser, la bourrer, la tromper, la baiser, l'endormir, l'assouvir, la saisir, la retenir, la bousculer, l'agiter, la secouer En vain. Chez toi l'exigence est ce moyeu d'où sourd la lumière et l'ombre j'en connais chaque rayon de ce beau paon qui fait la roue en criant Léon par ci Léon par là Tu n'as pas assez fait ceci tu as beaucoup trop fait cela. Je te regarde et je me tais Tu restes encore si belle malgré toutes les années malgré les rides et les crevasses ta peau fripée tes cheveux filasses. Mon bel élan d'amour. Quand je te regarde j'ai toujours 20 ans. Et je dis merde au temps qui passe merde à l'éternité merde à la mort je débouche une bouteille et nous trinquons en nous dégottant des bourrades jouant des coudes les arpions en éventail. Est ce que tu m'aimes Est ce que je t'aime ? En sommes nous toujours là ? Sommes nous en dessous ou en deçà ? On doit bien avoir exploré tout le kamasutra... ne sommes nous pas repus ? allongés en sueur sur de beaux draps on attend on prie et c'est toujours toi qui la première décide exige de remettre ça. Moi c'est bien connu je ne suis qu'un malgré moi.|couper{180}


