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Notule 72
Être peintre c’est comme être con. Ça ne s’apprend pas vraiment, c’est inné. Certains s’évertuent à vouloir à tout prix le devenir… c’est toute l’histoire d’une compétence que je vous narre ici. D’abord on ne sait pas qu’on est peintre On se dit faut que j’apprenne. Des années … Et puis à la fin on le fait sans y penser. La compétence inconsciente comme machin qui fait de la prose sans le savoir. Donc on part d’une compétence inconscience pour arriver à une autre Sacré tour de manège !|couper{180}
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Notule 71
https://videopress.com/v/hZuvKpU4?resizeToParent=true&cover=true&autoPlay=true&loop=true&playsinline=true&preloadContent=metadata&useAverageColor=true Etude de labyrinthe, Stage de peinture « Je ne me dis pas artiste, je ne me dis pas poète, mais je me sens artiste, je me sens poète parfois. Je me sens paysan. Je me sens traceur de piste, guide. Je me sens dompteur. Je me sens prêtre. Je me sens voyageur. Et je me sens surtout le spectateur d’une pièce ou tous les hommes et tout ce qui existe sur la terre, jouent un rôle. Je me sens soldat qui doit lutter pour la paix. Je me sens tout. » Lettre de Gaston Chaissac à Raymond Queneau, mars 1946. Cette différence entre dire et sentir échappera à beaucoup. C'est la raison pour laquelle parfois le silence vaut mieux. Surtout en ce moment où règne une telle confusion. N'a t'elle pas toujours régné ? Peut-être que la clarté n'est qu'une prise de conscience personnelle, individuelle. Une sorte d'illumination dont le partage, malgré l'espoir qu'on y place-un espoir de quoi d'ailleurs ?- est le dernier lien qu'on entretient avec le groupe. Peut-être que cet espoir nous l'inventons de toutes pièces pour ne pas être "résolument seul " pour toujours". Ce qui est encore une illusion bien sûr. D'autres sont déjà passés et d'autres passeront encore dans les mêmes sillons. Vouloir être compris comme reconnu ou aimé est encore un enfantillage. Toujours cette emboitement de poupées russes pour tomber à la fin sur notre petitesse, notre immense vulnérabilité, celle là même qu'on ne veut jamais voir. Elle est immense et c'est de cette immensité du fragile pourtant que la vraie force seule peut venir. Cette béance là ne peut être un mensonge tout à fait, on le sent bien. La révolte peut-elle mentir ? Et tous les mensonges qui lui servaient jadis de garde-fou, de remparts, de frontières paraissent vains sans que pour autant on ne puisse s'en défaire tout à fait. Vivre dans une béance traversée par la lumière et l'ombre que l'on s'invente encore, comme le clignement d'œil, comme on descend en rappel une falaise sécurisé par la corde et le mousqueton. Il y a trente ou quarante ans ces mots retrouvés sur lesquels je retombe encore. "L'avenir sera l'anonymat" Toujours d'accord avec ça. C'est pourquoi il faut écrire tous les matins aussi, pour épuiser quelque chose, illusion, espoir, orgueil, énergie de la Kundalini mal placée, va savoir. Et tout autour des personnes prennent grand soin de frapper sur des tambours pour que Zeus ne s'en mêle pas. Pour couvrir les pleurs les cris les vagissements. Une naissance qui n'en finit pas. Et vient encore cette drôle d'idée, une éclaircie : celle de naître à l'impersonnel. Comme une ruse probablement pour berner encore et toujours le foutu cyclope.|couper{180}
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Notule 70
Labyrinthe au crayon Seulement 15 minutes. Ensuite il faudra s’enfouir dans la journée de stage, se tourner entièrement vers l’autre, s’oublier. Tout en maintenant cette vigilance, celle de l’indien qui marche pieds nus dans la forêt. Ne rien fixer trop longtemps, naviguer tout en gardant le cap. C’est la même conscience, se le répéter comme un mantra. Le savoir, la connaissance, tout comme l’ignorance ne sont que les acteurs obligés de cette conscience qui joue sans cesse à s’oublier pour mieux se retrouver. Le thème du jour est une évidence puisqu’il s’agit d’étudier l’art du labyrinthe.|couper{180}
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Notule 69
Karel Appel peinture L’issue est t’elle possible en s’engageant tout entier dans le dionysiaque ? Possible, encore faut-il saisir la profondeur de ce terme. Peindre avec sa bite n’honore pas vraiment le principe. Tout au contraire il le ridiculise, et les dieux n’ont jamais éprouvé une bien haute bienveillance pour l’inutile. Le dionysiaque c’est certainement tout autre chose qu’une banale histoire de cul, si homérique fut-elle. Il y a l’ivresse, la transe, avant toute chose et le sexe n’est pas un moyen plus utile que la danse ou la pratique du tambourin pour y accéder. La peinture peut mener à la transe. Pour certains elle doit mener à celle-ci et rien d’autre. Il est très séduisant d’y croire. Sauf que la transe que savons nous réellement de ce qu’elle est ? Peut-être que la techno ou la dance est une tentative pour la recréer dans notre monde tombé bien bas dans la matière. Pour canaliser un besoin naturel dans des lieux identifiables, pour que tout ne se transforme pas en “rêve party” incontrôlable Mais on voit bien comment la parole politique peut tout autant donner cet espoir dionysiaque, assez brièvement avant de retomber en quenouille sitôt que les “affaires” et les “responsabilités” sont obtenues. Dans un cas il s’agit de contrôle ou d’échapper au contrôle et dans l’autre de gaver des fois à la bouillie dans laquelle les promesses, les mensonges, l’espoir d’un âge d’or sont savamment dosées dans un but électoral. Mais la transe ce n’est pas ça non plus. Ce n’est sûrement pas une enculade pas plus qu’un tube de Vaseline. La transe c’est cette énergie dont Apollon veut nous priver pour rester Apollon. Et ce n’est pas non plus une rêverie europeocentrée qui voudrait s’accaparer le primitivisme pour redonner du jus aux bourses, à rendre soudain solides les couilles molles. On voit bien à quel point l’inspiration peut manquer aujourd’hui, ce vide inouï que rien ne semble vouloir combler en peinture notamment pour un regard acéré autant que désespéré. Donc le dionysiaque, la transe, le cul comme une sorte de pas sage obligé. Oui mais dans quel but ? Quelle intention véritable ? Si ce n’est trop souvent encore, hélas que pour s’arrêter sans savoir se maîtriser ni se contenir au profit ? Et donc aussi pour s’engager dans une démarche la plus juste possible vis à vis de ce mystère intact c’est au contraire de ce que l’on peut penser en marchant sur des œufs, en expérimentant un certain degrés de discipline ou d’ascèse qu’on peut entrevoir un peu plus précisément le sentier qui s’enfonce dans la bonne grotte. Et puis l’erreur aussi est comprise comme toutes les illusions, que ce soient par vrais et faux dégoûts, par le bavardage intempestif et les silencieuses joies, l’important est de persévérer, de percer pour voir, ou plutôt pour s’aveugler proprement.|couper{180}
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Notule 68
Que viennent chercher les gens dans un cours de peinture ? Le savent-ils vraiment ? Et de plus cela a t’il une importance ? Souvent ils commencent avec une idée plus ou moins précise de ce qu’ils veulent puis ils se heurtent à différents obstacles assez rapidement. Est-ce que savoir ce que l’on veut est un moteur véritable dans ce domaine comme dans tous les autres ? Souvent on ne voit que l’arbre qui cache la forêt. Tentons de lister ces arbres sur lesquels le regard s’aveugle. La recherche de preuve Vouloir se prouver quelque chose à soi-même. Je vais peindre des tableaux parce que ça fait un moment que ça me titille mais jusque là j’hésitais, je ne parvenais pas à passer à l’acte. Je ne suis pas plus bête qu’un autre et peut-être même ai je du talent qui sait ? Donc la question serait pourquoi vouloir se prouver quelque chose ? Et cette question en soulèverait encore plusieurs probablement. On pourrait alors découvrir qu’il s’agit de trouver une sorte de remède, de solution à différents maux qui remontent souvent à l’enfance comme par exemple Un sentiment d’inférioritéUn manque de confiance en soiUne envie de s’exprimer qui a été contrariéeLe sentiment qu’il en faut toujours plus pour être accepté ou aiméFaire de jolis tableaux Vouloir faire du beau en peinture ce serait en premier lieu vouloir l’être soi-même et montrer ensuite cette beauté au monde. Problème, la beauté ne se mange pas en salade. Interrogez 1000 personnes chacune vous donneront une définition plus ou moins convenue de ce qu’est la beauté. Convenue car elles iront chercher dans un fond de phrases toutes faites pour s’exprimer à ce sujet. Réfléchir à une définition personnelle de la beauté n’est pas une chose simple. Souvent d’ailleurs c’est tellement difficile de poser des mots sur celle-ci qu’on n’en parle pas. Notre relation véritable à la beauté est une sensation, une émotion personnelle que nous définissons quand nous le sommes obligés par des clichés. De plus cette sensation, cette émotion peut très bien se transformer le long de notre ligne de temps. Ce que nous trouvions beau à 7 ans n’est sans doute plus la même chose tout à fait à 20, 40, 60 ans et plus. Ce qui pourrait nous mettre la puce à l’oreille sur l’éternelle modernité de ce que nous nommons la beauté. Accepter alors de ne pas avoir d’idée arrêtée sur ce qu’est le beau et le laid lorsqu’on pénètre dans un cours de peinture serait une sorte de préliminaire correct. Il faudrait trouver une formule et l’inscrire au-dessus de la porte comme un avertissement. Tout ce que tu crois savoir sur le beau et le laid, oublie le. Devenir artiste La plupart des gens pensent qu’on devient artiste alors que c’est faux. Nous le sommes tous dès le début, et puis nous l’oublions selon les priorités que nous choisissons parfois contraints et forcés pour construire notre vie. À cet oubli s’ajoute un paquet de mensonges plus ou moins conscients qui nous renforcera dans l’opinion de ne pas avoir de talent et donc d’en acquérir à l’extérieur. C’est comme cela que l’on mûrit le projet de devenir artiste, et que par ce postulat même ce projet ne tient pas. On ne peut pas être autre chose que ce que l’on est. S’en suit souvent de la tristesse, de la colère, de l’amertume et puis le temps si on n’y prend pas garde nous amène au deuil. Ce qui n’est pas une mauvaise chose. Encore faut-il comprendre que ça ne remet pas en cause que nous sommes des artistes ou pas. Cela permet simplement modestement surtout de changer de point de vue sur ce que l’on place derrière le terme d’artiste. Et surtout tout ce que l’art comme la plus belle fille du monde ne peut donner. Bien des gens ont encore une vision poétique, archaïque , romantique du statut d’artiste. La médiatisation de ce statut n’arrange rien à l’affaire car nous sommes bombardés continuellement d’images flamboyantes de personnages souvent totalement imaginaires. C’est à dire utilisés à dessein par une élite intellectuelle et financière pour perpétrer ses valeurs. Pour cette élite, pas de demie mesure, un artiste est célèbre et ses œuvres se vendent à prix d’or. Tous les autres ne sont que des amateurs ou des artistes ratés. Je force le trait mais si on réfléchit au principe même du marché de l’art c’est un peu ça tout de même. Le statut fiscal n’arrange pas la situation. Il faut se déclarer à l’URSSAF du Limousin en tant qu’artiste pour obtenir un numéro de siret. N’importe qui peut effectuer la démarche et éprouver la confusion entre le statut obtenu et les privilèges souhaités. Se détendre et participer à une activité avec d’autres Dans ce monde où le virtuel prend tellement de place, décider de prendre des cours de peinture est une manière de retrouver un peu de réalité, un peu de chaleur humaine, de se confronter aux autres ou bien relativiser qui l’on est. Encore une fois tout dépend des intentions véritables qui se dissimulent derrière les prétextes que l’on se donne. L’art a souvent bon dos pour tenter de régler des carences de toutes sortes, affectives, sexuelles, puisqu’il faut dire les choses. J’ai même de bons amis freudiens qui me reprendraient s’ils me lisaient en déclarant : surtout sexuelles les carences. Évidemment il ne s’agit pas du premier degrés. Je n’ai encore jamais participé ni même assisté à une partouze générale durant les cours que je dispense. Je me demande parfois si ça ne décoincerait pas certaines personnes. Mais je ne le dis pas évidemment. La peinture est proche à mon avis du tantrisme. Cette énergie qui prend naissance au niveau du trou du cul et ne cherche qu’à rejoindre l’ouverture au sommet du crâne, est souvent gaspillée en vain. Mais on peut tout à fait suivre son parcours en notant les méandres du pinceau au fur et à mesure des jours, des semaines, des années de pratique assidue. Quand la justesse du tableau surgit c’est grosse modo aussi jouissif qu’un orgasme. Et en tant que vieux peintre j’ai aujourd’hui tendance à dire que c’est mille fois plus. Mais vous n’êtes pas obligés d’y croire ou de l’espérer. De tous les prétextes que l’on peut se donner pour rejoindre un cours de peinture prendre du plaisir, se détendre, partager avec les autres sans y accorder une gravité excessive est sans doute le meilleurs de tous. Le plus honnête. Car souvent en suivant cet emboîtement de questions susceptibles de mieux cerner les tenants et aboutissants d’un acte il n’y en a qu’un qui soit à la fois juste comme utile à tous comme à soi même. Élargir sa conscience du monde, améliorer la vision de ce qui nous entoure est l’acte créatif par excellence. J’ai beau chercher depuis des années je n’en vois aucun autre qui ne soit qu’illusion et vanité.|couper{180}
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Notule 67
Asger Jorn Droit d’aigle Moins c’est compréhensible mieux c’est. De toutes façons chacun ira de sa propre interprétation comme d’habitude. Et puis quelle fatigue, le sourire a creusé de telles rides… des pattes d’oies ou plutôt les empreintes d’un mammouth laineux dans un atelier rupestre de colifichets en coquillages. Pour un peu je me flanquerais tout nu pour aller me frotter contre la toile et donner des coups de cul et d’autre… mais ce sera toujours un cri muet. On ne sait pas si ça chante hurle pleure ou crie. Ça échappe au relief, à la cartographie, une ignorance totale de toute géographie. Des années à vouloir comprendre jusqu’à ce que ça choisisse enfin de renoncer. Ça ne s’explique pas voilà tout, c’est raide. Ça marche en parallèle sans jamais qu’on le croise. Et sitôt qu’on a une impression familière on peut être sur d’être à côté. Mais ça se comprend qu’on puisse peindre avec du sang du vomis de la merde. Rien de plus personnel au bout du compte. Et ça ne relève vraiment pas le personnel c’est une certitude. Mais bon les domestiques ne sont plus ce qu’ils étaient non plus. Il faut faire avec ou sans, comme on peut surtout. Et puis j’ai vu les dégâts très jeune, maître jacques au Musée du Louvre. Des cabinets bouchés en pagaille par des tampons hygiéniques et fortuitement de maquillage. Et à côté de ça le Pierrot Gilles de Watteau stoïque, avec moi comme âne dans l’angle en bas à gauche. Cet œil larmoyant mon Dieu ! Une longue vérification sans plus.|couper{180}
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Notule 66
Christian Dotremont et Asger Jorn “ un visage suffit à nier le miroir” Tenir la sauvagerie en laisse. Comme une vieille chienne ou une petite salope, la laisser. L’observer, un tantinet voyeur, quand elle hume renifle ou lèche. Voir le sens à l’œuvre sans mouffetter. Puis emprunter je ne sais quel conduit ou drain, se le planter de sang froid dans une veine. Sentir le fluide remonter jusqu’à l’aorte. Écouter les dégâts que tout ça produit, spasmes et tremblements. Mais tenir toujours. Se créer un vaisseau à la dure. Tenter de donner du talon ensuite pour faire décoller tout ça dans une légèreté de plume. Sans y penser. Lâcher du lest. L’effroi provoqué par cette sauvagerie, vivace, tentant. Le voir diminuer avec l’altitude. Créer encore. A partir des vastes champs de terre grasse on parvient à scruter de petits mouchoirs de poche. Essuyer ensuite ses larmes de crocodile. —Vous n’avez pas le droit de dire chienne et salope, biffez ! Rigolade ! —C’est justement pour ça que je le prends il faut appeler une chatte une chatte , ne stoppez pas la chute ! pas plus que les efforts d’ascension merde ! Ils sont tous repartis sauf elle. C’est pas demain la veille que nous romprons ce lien. Il en va tout autant de l’hiver que de l’été, les intersaisons ont des contours plus flous. Je les relègue à l’arrière plan pour le besoin du tableau. La sauvagerie en laisse. Il y en aura pour tout le monde, poussez pas. Et puis ici on ne pratique pas non plus la folie des soldes. Pas besoin de vous ruer ni vers l’entrée ni la sortie. Ici les sentiments, l’émotion ont un goût d’hostie. Je veux parler du carton bouilli. Il n’y a rien à vendre qui ne soit pas aussitôt affiché hors de prix. Ici y a que le cœur étranger dans son pays de vaches.|couper{180}
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Notule 65
Ce dont je me souviens de toi ce n'est pas toi. C'est une occasion que j'ai laissée passer comme une rivière en retenant le bouchon de s'égarer trop loin de son rivage. Je n'ai péché ainsi que du menu fretin dans l'ombre grasse des acacias sans souffrir trop de leurs épines. Ce dont je me souviens de toi ce n'est pas toi et ce n'est pas moi non plus. pourquoi je m'en souviens alors ? A cause du chant du coq s'il faut un lien encore.|couper{180}
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Notule 64
Peine à jouir. C'est le terme que l'on donne à ceux qui ne sont jamais satisfaits, qui ne peuvent afficher sur leur visage ce contentement béat provoqué par le plus petit achèvement, sans qu'aussitôt la peur du vertige les étreigne. Le renoncement à manger du fruit remonte à loin désormais. Dans la coupe ils pourrissent. Un peu moins depuis que je suis marié, et que j'avale des litres de compotes. Sous forme de purée, de jus et de salades l'ingestion s'effectue sans accroc. Sans oublier une dentition pourrie qui s'oppose à toute envie de mordre, de croquer, de déchiqueter. Une carence entretenue pour maintenir l'équilibre probablement aussi. Une astuce de vieux sioux. Ne pas trop jouir, surtout pas. Et dans le même temps ne pas lâcher la purée du regard. Se souvenir des vieilles coutumes Inuites. Et ce dégout des fêtes ! j'ai beau me raisonner rien n'y fait, ça ne vient pas de là. Mais d'ailleurs plus profondément dans la faille de vivre. Cet ailleurs qui m'attirait tant autrefois avant que je n'y renonce. Pour essayer de me faire à l'ici, en vain évidemment. Ni tout à fait dans l'ailleurs ni tout à fait dans l'ici. Dans un entre deux, un no man's land. Peine à jouir parce qu'une fois que c'est fait que reste t'il franchement ? Rien sinon la répétition. La fatigante répétition et la nécessité de l'oubli pour s'extraire de la fatigue. Quelqu'un m'a dit que j'étais un ingrat, que je ne savais pas recevoir. Et que tout ce que je donnais je ne le donnais qu'à la manière des poulpes ou des pieuvres sous forme de nuage d'encre, en me carapatant ensuite à toute vitesse. Plusieurs m'ont dit et donc c'est à partir de ces dits qu'on vit aussi. Entre une valeur perçue et une valeur imaginaire. C'est pour cela que je n'accorde pas vraiment de valeur à la valeur en général. Que je ne la place pas au "bon endroit". Que tout ce que je dis est tellement "déplacé" pour la plupart de ceux à qui je le dis. C'est que lorsqu'on est écrivain on ne l'est pas qu'à une table de travail, on l'est h24 comme disent les mômes. Quand on a enfin compris qu'on ne parlait pas pour quelqu'un en particulier pas plus que pour tout le monde non plus. Encore une fois où va se nicher l'entre deux ? Profite de cette occasion, profite du moment, des carpe diem comme des pancartes publicitaires partout, des mots d'ordre et des slogans qui envahissent la cervelle, la colonise et la contraigne. Saprophyte voyez le dictionnaire, ce n'est pas vraiment jojo. C'est même dégoutant autant que la fête. Donc, on me ridiculise facilement et je me laisse faire facilement aussi. Sinon pas de lien. On me dit grognon, ronchon, jamais content dans les pires cas. C'est moi seul qui me traite tout seul de peine à jouir finalement. Parce qu'un fois qu'on a jouit il ne se passe plus grand chose qui soit à la hauteur de ce jouir. On se fatigue même du souvenir de ce jouir qui ne cesse de murmurer -recommence, encore et encore, plus loin, plus profond, plus fort. Il y a un lapin avec des piles dans le cul qui traverse mon esprit à ces moments là, vous voyez... Les meilleurs piles du monde, increvables. Wonder full. Ce qui est totalement absurde dans cette époque où tout tombe en quenouille, où la terre se craquelle, se déchire, par soif comme par manque d'eau. Lars Von Trier devrait s'abonner à mon blog, ça relèverait probablement l'aspect tragique de ses films d'un zest d'humour. Quitte à expérimenter la fin de tout il faut savoir aussi en jouir, pas trop, juste ce qu'il faut évidemment. Et pour ça se donner un peu de peine, ne pas gaspiller toute son énergie à se demander comment en obtenir toujours un peu plus. Peine à jouir c'est aussi se donner cette peine de ne pas jouir inconsidérément de cette futilité d'être comme de ne pas être.|couper{180}
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Notule 63
Que veux tu faire dans la vie ? Combien de réunions de famille finissent ainsi en eau de boudin suite à cette question posée par un oncle, une tante, un cousin germain, maure, voire même espagnol ? C'est la question qui tue. Elle possède la propriété magique de réduire en poudre tous les bons moments précédents et même ceux à venir, bref : tous les moments que nous fumes ou serions susceptibles de partager avec la personne qui nous la pose. Cette question possède pour propriété majeure d'exalter l'angoisse et personnellement de me renvoyer à une solitude ontologique. Mais que dire lorsque c'est un monsieur en costume cravate au crâne dégarni qui nous la pose lors du fameux entretien d'orientation qui s'effectue à la fin du collège ? Est-ce qu'à 14 ou 15 ans nous pouvons répondre sans hurler, calmement à cette question ? Que veux tu faire dans la vie ? Quelles études tout d'abord ? Comment ? Tu n'as jamais mis les pieds au CIO le fameux centre d'information et d'orientation... Et j'ai une question jeune homme, te masturbes-tu tous les jours ou presque, une à deux fois par semaine, ou moins que ça ? D'ailleurs connais tu seulement ce mot là ? Possible que l'on soit traumatisé à jamais à la fois par cette impossibilité de se projeter dans l'avenir que par cette question qui réactualise systématiquement cette faille. Possible que cette question nous ramène comme entre deux gendarmes à la réalité commune alors que nous étions lovés dans l'éternité et la solitude d'un présent, tout entier perdu dans sa jouissance. Et que soudain la culpabilité nous tombe dessus avec la question, cette torture. Possible que le jouir du moment en pâtit à mort. Possible que l'implémentation du temps comme la nécessité de l'accorder à un travail, à une fonction dans la collectivité ajoute encore cet effroi, celui là même qui, sans tout cela, serait probablement difficile à nommer. Possible que tout ramène à cet unique effroi dissimulé tout au fond de cette cohorte de poupées russes stressées : La certitude certaine que tout doive irrémédiablement s'achever un de ces quatre. Donc en attendant que tu crèves que veux tu faire de la vie ? voilà comment on peut entendre la question , c'est à dire de façon tellement inappropriée à la fois de la part de l'émetteur que du récepteur. Pour autant certains ne semblent pas connaitre cette angoisse. Ils répondent du tac au tac. Et je n'ai jamais su, suite à cette observation s'ils étaient de parfaits imbéciles, téléguidés par un lavage de cerveau social ou familial, ou bien si c'était moi l'andouille prisonnier de mes doutes perpétuels sur à peu près tout et rien. Même encore aujourd'hui que je suis plus près de la fin il m'arrive de me reposer tout seul cette question. Qu'est ce que je veux faire du reste de ma vie ? Mais désormais je sais que c'est juste une manière de se masturber, peut-être plus paresseuse, peut-être plus désespérée aussi que toutes les autres déjà expérimentées. Oui quand tout va trop bien, quand ça ronronne, ça ne peut pas aller, ça n'est pas possible et il convient donc réveiller une difficulté d'être, une peur de l'achèvement et surtout de repeindre ce vieux fantasme d'être un Phoenix increvable. Que veux tu faire dans la vie ? C'est le petit verre de rhum qu'on avale au fond des tranchées et qui nous abruti avant de partir à l'assaut des chimères, et de remplir sa bouche de terre. Que veux tu faire dans la vie ? Qui doit on tuer massacrer violer pour parvenir à y répondre sans rire comme un dément ?|couper{180}
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Notule 62
Le handicap est le mot utilisé par les gens normaux pour s'enfermer dans un norme où ils se trouvent relativement bien installés, confortablement, un peu comme dans de la merde. Ainsi ils se sentent "bien" si on peut dire. Cette femme handicapée soit disant, réalise des choses exceptionnelles en dessin, la plupart du temps à l'aide de feutres, de stylos bille. La répétition est son langage et il est inépuisable. Personnellement et dans ce cas là, celui du dessin, de la peinture, je verrais un avantage pour beaucoup de personnes à être handicapées de cette façon. https://videopress.com/v/kj1TsjaS?resizeToParent=true&cover=true&preloadContent=metadata&useAverageColor=true|couper{180}
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Notule 61
Que la violence du désir soit tellement forte, irrépressible, qu'on puisse soudain l'observer quand elle s'envole ainsi dans l'air comme un tourbillon de feuilles qui n'en finit pas. Et maintenir néanmoins la quiétude. Rester baba face à cela et ce même en partage, encore en paix profondément. L'intenable enfin tenu. Il en faut des pesées pour connaitre le scrupule comme l'art d'équilibrer les fléaux. Et s'en aller son chemin sans la tristesse à ses cotés.|couper{180}