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de n’importe quoi à quelque chose
Étape 1 N'importe quoi - huile sur toile réalisée en 10 minutes chrono .Format 70x70 cm On me demande un thème pour intervenir dans une nouvelle association. Du coup je propose ce titre sibyllin. C'est risqué. Mais qui ne risque rien n'a rien. Surtout que ce n'est pas si facile qu'on l'imagine de faire n'importe quoi.|couper{180}
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se souvenir des règles
Dans son article "lois de la narration policière" en 1933 dans le quotidien argentin La Nacion Jorge Luis Bieges énonce quelques règles, 19 précisément à propos du polar peut-être est-il intéressant de les noter et de vérifier si je m'en écarte involontairement. Ou si volontairement j'ai au contraire une excellente raison pour ne pas en vouloir en tenir compte. A noter aussi selon les propos de l'auteur que ces conventions ne visent pas à élucider les difficultés mais plutôt à les imposer. peu de personnages mais très bien définis en revanche. La téméraire infraction à cette loi est responsable de la confusion et de l’ennui fastidieux de tous les films policiers. »uMettre toutes les cartes sur la table. Ne pas planquer une carte importante dans sa manche que l'on sortira par magie au dernier moment. Le lecteur ainsi aura tout le nécessaire pour trouver lui-même la réponse à sa plus grande satisfaction. Se méfier de l'utilisation souvent abusive de particules de cendres que découvre Holmes dans le dos du lecteur. Encore plus rédhibitoire, faire surgir un total inconnu comme coupable.avarice ou économie de moyens... utiliser les éléments déjà trouvés pour configurer le ressort de l'histoire, ne pas multiplier ses éléments à l'infini, se méfier du don d'ubiquité. La solution doit être claire et nette et pouvoir se déduire des ressources déjà mis en jeu. Il s'agit simplement de les réorganiser d'une autre façon pour le solution devienne évidence.insister plus sur le comment que sur le qui. Autrement dit pas la peine à chercher un nom de personnage qui claque on s'en fout, ce qui compte c'est le nouvel ordre logique que l'on découvre à partir de ces ressources restreintes et qui tout à coup confère au récit une nouvelle clarté .la mort comme une ouverture au jeu d'échec. Pas la peine d'en faire des tonnes, de fournir des descriptions morbides avec force d'hémoglobine de couinements de hurlements. Laissons cela aux américains qui adorent l'exagération et les pieds dans le plat. Se souvenir plutôt de cette phrase « Les pompes de la mort n’ont pas leur place dans la narration policière dont les muses glaciales sont l’hygiène, l’imposture et l’ordre ». On notera une transgression toutefois dans le Noël d'Hercule Poirotd'Agatha Christie qui pour relever un défi utilisé le cri terrifiant, le sang qui coule abondamment , la scène brutale du meurtre comme clés a l'élucidation du récit.Nécessite et merveilleux de la solution. Ce qui signifie en même temps une seule réponse possible, mais qui surprendra totalement le lecteur, l'émerveillera... ( émerveiller doit dater d'une époque lointaine 1933, c'est très lointain) De ces règles je n'ai pris la peine de n'en relever que les 6 plus importantes. Suivent ensuite des considérations mineures par rapport aux précédents. -le dédain du risque physique... pas besoin de cascades. Le véritable récit policier repousse – ai-je besoin de le préciser – avec le même dédain les risques physiques et la justice distributive. Il fait abstraction, avec sérénité, des cachots, des escaliers secrets, des remords, de la voltige, des barbes postiches, de l’escrime, des chauves-souris, de Charles Baudelaire et même du hasard. ( sur ce point dommage pour moi j'aime bien voir surgir Charles Baudelaire à tous les coins de rue) -Renoncer aux jugements et considérations moraux sauf si c'est pour promouvoir une nouvelle législation et que l'on sera payé dans ce but expressément ( si possible d'avance ) Le hasard ne sert qu'à l'auteur, il ne doit pas servir ou tromper trop abusivement le lecteur. Autrement dit se souvenir que la crédulité de celui-ci est extensible jusqu'à ce que l'élastique pète. Personne n'aime sentir sa culotte tomber sur ses genoux. Nul intérêt non plus de s'étendre sur la vie privée de l'enquêteur tout le monde sait qu'il ou elle est divorcé et amoueux(se) de l acteur(trice) principal(e). voilà, yapluka imprimer ça et le coller sur le mur ; puis le lire pour tenter le plus souvent possible de le contredire évidemment .|couper{180}
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la seconde partie du Quichotte
Miguel Cervantes, je l'imagine écrire dans la fougue toute la première partie du Quichotte. Puis il se relit. C'est de cette relecture que naîtra l'amertume et la seconde partie de l'œuvre. Non parce qu'elle n'est pas un chef d'œuvre. Mais parce qu'il a creusé si loin dans la dent qu'il a découvert le nerf, que la trouvaille résoudra l'homme en poudre au bout de la douleur. Ensuite le vent balaye les rues, de nouveaux homoncules poussent dans l'humus, et tout recommence à la fois de la même façon et en même temps différemment. L'apparence nous sauve en même temps qu'elle nous tue les uns après les autres.|couper{180}
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l’horrible et le merveilleux
Le merveilleux, sa fonction, sa nature, me fit douter très tôt. Bien que je n'ai pu poser des mots sur mes doutes à l'époque. Les contes de fée m'attiraient. J'ai du en lire des dizaines en boucles dans l'enfance. Ils me faisaient pénétrer dans un univers simple, la magie n'était rien d'autre qu'un outil pour aider à construire cette simplicité. Mais je n'aurais pu avoir un tel élan vers le merveilleux sans l'horrible que je traversais au quotidien. Un père colérique et violent, une mère inconsistante, un chien qui ne faisait la fête que pour obtenir des croquettes, une institutrice mal baisée qui déversait sa frustration sur nos charmantes têtes blondes, un instituteur qui prenait plaisir à nous taper sur les doigts avec une règle en fer, j'ai baigné dans cette violence toute mon enfance et les rares moment d'apaisement que je trouvais c'était dans ces livres, ces contes de fée que je lisais à la lampe de poche au fond de mon lit. Le héros finissait toujours par s'en sortir, et par un phénomène mystérieux de capillarité l'espoir que je puisse aussi m'en sortir renaissait régulièrement du plus profond de mon désespoir. Je crois que sans ces lectures j'aurais pu encore plus mal tourner que je ne l'ai fait. J'aurais même pu me pendre ou me jeter du haut du pont qui relie La Grâce ce quartier où nous habitions du bourg de Vallon en sully. mais la morale ou une certaine forme de sagesse populaire, ancestrale que j'avalais comme une pilule contre les parasites émiettée dans une assiette d'épinards me sauva, du moins provisoirement. Peut-être qu'à la fin je me suis réfugié à ce point dans les contes que je finis par adopter leur point de vue totalement. Que quelques soient les écueils les épreuves rencontrées et à cette époque elles étaient légion, tout finirait bien. Happy end comme on dit désormais. Ce que je ne savais pas c'est que l'on développe cette capacité à s'évader dans le merveilleux qu'à fortiori on baigne dans l'horreur. C'est très équilibré, au scrupule ou soupçon près. Ainsi ceux qui vivent des vies normales n'ont pas cette propension à vouloir s'en inventer d'autres. Ils sont normaux et ils ne songent pas un seul instant à s'écarter de cette norme. J'en ai souvent été étonné, mais plus souvent encore meurtri. Je découvrais la différence provenant de l'éducation, de la situation sociale, d'une chaîne interminable de conséquences à la fois historiques économiques' et sociales, ensemble de paramètres qu'un gamin ne peut qu'ignoré par définition. Mais qui constitue néanmoins un obstacle parfaitement réel, solide, suffisant pour se casser le nez. Walt Disney n'était pas encore ce pourri qui fricotait avec les nazis, on pouvait pénétrer dans ses films en toute innocence. Cette innocence qui nourrit les perversions les plus crasses de ce type d'individus et toute la clique de ses semblables. Le merveilleux de Walt Disney m'est devenu insupportable à voir et je ne dis rien quand je vois mes petits enfants regarder un de ses films à la télévision,. Ils ne seraient pas en mesure de le comprendre bien sûr. Sans oublier que mon épouse me tomberait dessus en déclarant que je vois tout en noir. La notion de l'horrible et du merveilleux sépare les êtres suivant leurs relations à ces deux mots, à l'histoire qu'ils auront bâtie grâce ou à cause d'eux. Parfois il n'est pas rare que l'on me dise que j'ai trop d'imagination, on me l'a toujours dit d'ailleurs, et au bout du bout le doute m'est venu, j'ai aussi fini par l'accepter ou le croire aussi. C'est que cette solitude dans laquelle m'aura placé ma propre expérience ne peut se dire directement et à voix haute et j'ai passé ma vie entière à tenter de trouver des subterfuges pour tenter de dire cette expérience tout simplement parce qu'elle est insupportable. C'est cependant un poids beaucoup trop lourd pour d'autres épaules que les miennes je l'ai compris aussi désormais. On ne peut pas transmettre ainsi les choses ; qu'elles appartiennent au domaine de l'horrible comme du merveilleux, il faut passer par des médiations.|couper{180}
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Bulle
N'importe qui, n'importe quoi peut être un maître à condition que l'on se place dans la situation d'être élève. Hier j'ouvre Twitter et je tombe sur le fil d'actualité. Une chose me gêne presque aussitôt c'est de voir toujours les mêmes publications, les mêmes personnes, le même contenu avec peu de variation. Me vient l'image d'un bocal dans lequel nage un poisson rouge. Un petit bocal, un gros poisson qui tente de nager mais se heurte aux parois de verre.Un poisson rouge qui devient cinglé quand il comprend qu'il se tient enfermé dans un bocal exigu. Une bulle. Comme l'expression chacun dans sa bulle. Bien sur les spécialistes des réseaux le savent, nous fabriquons nous-mêmes cette bulle. Il suffit de liker un compte voire de s'attarder quelques instants sur son contenu pour que l'algorithme comprenne que nous sommes attirés et qu'il ne cesse ensuite de nous représenter tous les contenus postés par tel ou tel compte ; ou des contenus se rapprochant de celui-ci. A terme ce sont nos élans, notre intérêt, nos actions sous forme de clic, de like, de commentaires qui constituent cette prison qu'est le fil d'actualité. Pourtant j'ai bien tenté d'épurer au début, de ne pas m'abonner par exemple à trop de comptes traitant de sujets variés. Je me suis cantonné à la littérature et à la peinture. En privilégiant surtout la littérature. Et donc j'ai les mêmes personnes qui tournent en boucle sans relâche sur ce fil d'actualité. Un éditeur grognon qui incite à lire les bouquins qu'il traduit ou publie. Un poète qui alterne caviardages et phrases stylées pour nourrir un Hashtag. François Bon et ses vidéos d'une minute où il invente des morceaux de biographie d'écrivains, quelques participants à l'atelier d'écriture dirigé par lui, Et puis quelques autres encore éditeurs, écrivains, littérateurs, blogueurs comme Thierry Crouzet, Arnaud Maisetti etc. Ces derniers jours j'ai perdu le contrôle en m'abonnant à un groupe d'artistes qui tente de vendre des NFT, aussi suis-je envahi par ces bidules désormais qui tournent eux-aussi en boucle dans ce fil d'actualité. Bref la même chose exactement que j'avais déjà constaté sur Facebook, sur Instagram et même ici sur Wordpress. On ne reste jamais que dans ce que l'on a soi-disant choisi de voir. Ce qui provoque chez moi une angoisse. Et cette angoisse m'entraîne souvent à vouloir fermer les écoutilles, à ne plus vouloir me connecter à quoique ce soit. Je dois donc faire cet effort de me connecter en dépassant cette angoisse comme cette certitude de toujours tomber sur la même chose cette bulle cette prison. Ensuite je me dis que c'est un point de vue personnel lié à une histoire personnelle. Je repense encore à ce rêve que je faisais vers l'âge de 4 ou 5 ans après que nous ayons déménagés de Paris pour La Grave. Ce cauchemar affligeant dans lequel je me retrouvais terrassé au sol par une multitude de gnomes affreux et grimaçants. A ce moment là je leur disais que je savais que j'étais dans un rêve et que je pouvais me réveiller quand je le désirais. Et effectivement quand la situation devenait trop pénible, ennuyeuse surtout, je me réveillais, me tournais sur le côté opposé et me rendormais pour visiter d'autres rêves plus attrayants. Il y a un lien entre ce rêve et ce que je constate aujourd'hui vis à vis des algorithmes. impression d'être poursuivi, cloué au sol, ligoté par des boucles de programmes invisibles mais que je peux interpréter ou traduire comme étant ces gnomes affreux et grimaçants. Maintenant pourquoi un tel point de vue... pourquoi une telle angoisse... il s'est forcément passé autre chose avant qui aura déclenché tout cela, pour que j'adopte ce point de vue et pas un autre. Du coup sueur, malaise, j'ai déjà fumé cinq cigarettes à la suite avant de me mettre au boulot ce matin. l'effroi m'atterre totalement de penser que ce point de vue est une construction purement imaginaire, qu'à l'extérieur de moi n'existe aucun ennemi, que tout vient de ma putain d'imagination qui sécrète sans relâche un nuage d'encre et de folie pour tenter de panser une plaie sur laquelle je ne peux jamais poser le doigt.|couper{180}
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notes sur l’égarement.
L'idée d'un roman ne peut être précise, tout comme l'idée d'une peinture, je pense à cela après avoir écrit ces deux textes ce matin. C'est une réflexion qui remonte à loin je crois, dès la petite enfance. Il suffit de remplacer le mot roman par journée, par avenir, par amour. Ce refus de précision comme le dégoût pour tout plan préalable. C'était sans doute puéril, ce l'est toujours, mais au delà de ce jugement hâtif pour tenter de rejoindre une norme, je sens qu'il y a autre chose que de la puérilité. que cette puérilité n'est qu'un mot facile pour n'indiquer qu'une surface. Une bille d'argile dont on ne voit jamais que sa rotondité et quelques imperfections parce qu'on l'aura utilisée tant de fois qu'elle s'abîme avec le temps. A l'intérieur de cette bille il y a quelque chose de très précieux, c'est précieux en raison de la matière même dont elle est constituée, cet argile, cette matière que l'on trouve partout et dont on fabrique des pots des vases des réceptacles en tout genre. Mais je ne vois pas un vase, je vois une bille. C'est à dire quelque chose que le temps, les intempéries auront poussée à prendre la forme d'une sphère pour se survivre, pour résister à sa propre idée de disparition. Ou pour la retarder le plus longtemps possible. Une matière chose, un corps, s'est mis en boule et n'offre plus aux regards que courbes et texture lisse. Avec peu de traces de défauts mais un minimum tout de même, suffisant pour passer inaperçu. Et je dis puérilité avec toutes les bouches, les voix du monde. Alors qu'il s'agit au contraire d'une sagesse fondamentale de la matière. Une bille d'argile ne peut-elle pas être un amour, une journée, une vie, un roman... La puérilité vue ainsi certainement aussi. L'égarement d'un mot vers un autre est-il un hasard. Et si je laisse tomber tout but toute idée préconçue de roman, d'histoire, que vais-je encore découvrir... Tout ce qui serait écarté comme cette bille qui s'écarte de plus en plus, qui continue de rouler au sol en filant droit son chemin, jusqu'à toute bifurcation qu'elle rencontrera.|couper{180}
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ce qu’ils regardent
huile sur toile 100x100 2023 Séisme, incendie, guerre , manif et moi je peins des têtes dans mon atelier, je voudrais faire comme si la vie continuait, parce que je crois qu'elle continue qu'elle ne peut s'arrêter. Je peins des têtes avec des grands yeux ouverts mais je ne sais pas ce qu'ils regardent, Je n'arrive pas à le savoir, et je crois que ce n'est pas important ce qu'ils regardent, ça me regarde de ne pas vouloir le savoir.|couper{180}
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patauger au bord de l’histoire.
N'en sommes nous pas tous là, nous ne cessons de patauger au bord de l'Histoire. Que celle-ci soit notre propre histoire, l'histoire d'une époque passée ou actuelle, l'histoire nécessaire à un roman, une nouvelle. Et que l'on cherche ou pas à en comprendre les tenants et aboutissants nous barbotons. C'est à dire que nous ne nous décidons pas à naviguer réellement vers le grand large. Peut-être parce que l'on sent aussitôt que c'en sera alors définitivement fini de nous, qu'une fois que nous appartiendrons de façon volontaire à une histoire qu'elle quelle soit elle nous avalera , conduira vers un dénouement, une sorte de trou du cul monstrueux qui nous rejettera comme excrément ou engrais. une fin qui est toujours toujours la même et qui se confond avec notre mort. Ainsi l'histoire nous attire comme une sirène dans les histoires d'Homére par ses chants poignants mais nous savons très bien que si nous n'y succombons nous n'aurons aucune chance de retrouver Ithaque. Donc patauger ou barboter cela peut être une ruse pour approcher de façon imperceptible, concentrique un vortex en se laissant toujours une possibilité d'y échapper. C'est humain.|couper{180}
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Opacité
Ce dont on est conscient est entouré de parois opaques, et c'est de cette opacité que la conscience naît et tente de se survivre sinon de progresser. Cette opacité est une nécessité de la conscience comme la conscience est le fantasme de toute opacité. Opacité et conscience sont ainsi liées comme des jumeaux. Il est déraisonnable de vouloir que l'une prenne le dessus sur l'autre. Plus la conscience progresse, plus l'opacité devient opaque, ainsi sont les choses. S'il existe un Dieu il est certainement constitué ainsi : opaque et conscient à la fois depuis toujours et à jamais. Peut-être est-il seulement ce souhait de l'esprit humain, le souhait d'un espace, d'un lieu sans aucune frontière. Cet endroit qui nous installe dans son envers à notre échelle et où ce qui nous apparaît absurde et contraire est rêvé, transmuté, pour ne plus faire qu'un. En attendant la réponse définitive à cette question nous n'avons que notre conscience pour tenter de résoudre du mieux que nous le pouvons, et à condition que nous en ayons le désir, des opacités à notre mesure. Comme par exemple finir le mois alors qu'il vient à peine de commencer. Je me suis branché sur James Ellroy toute la journée d'hier pendant que je peignais. Lui aussi considérais l'opacité, de l'histoire américaine et plus particulièrement celle de sa ville, Los Angeles. Il réécrivait celle-ci à l'appui de nombreux documents qu'il ne cessait jamais d'étudier de ruminer, jusqu'à ce qu'il puisse les faire entrer par un moyen ou un autre dans ses histoires. Il serait absurde de considérer les romans d'Ellroy comme des livres historiques, ce sont vraiment des romans c'est à dire que tout y est inventé, mais si bien que l'on peut parfois éprouver un doute, et l'on serait tenté croire que c'est la réalité. Notamment quand il met en scène de vraies personnes comme les Kennedy. Il les peint de façon si crédible à l'appui de la documentation étudiée qu'ils peuvent être réels ou faire douter de ce que nous croyons être réel. Un bel exercice où il joue avec l'opacité et la transparence, la lucidité ou la conscience, tout en les renvoyant au bout du compte dos à dos. Par contre son leitmotiv sur la redemption confère à l'ensemble de son travail un aspect naïf inattendu quand on se souvient de la lucidité avec quoi ses personnages, l'histoire comme cadre à l'histoire, sont décrits. Une autre manie est à la,fois de se tenir à des phrases simples sujet verbe complément et en même temps cette profusion de vocabulaire incroyable qu'il va pêcher dans de nombreux domaines y compris son affection prononcée pour les abréviations, les sigles. En fin de compte Ellroy est un sale petit morveux d'une intelligence insupportable. Probablement insupportable au point qu'il veuille la ruiner avec sa connerie de rédemption. Encore ce double effet opacité conscience, ou intelligence - connerie. Pourquoi aurais-je l'obligation de dire que je m'y reconnais.|couper{180}
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Bâcler le boulot
Est-ce que je peux ralentir le temps, le langage ce flux de mots si j'ai la sensation d'en être le prisonnier plus ou moins conscient et consentant et qui accepte son statut de prisonnier, car c'est un statut, le seul possible. J'éprouve toujours cette sensation désagréable de bâcler tout ce que je fais. Comme si bâcler était une tentative pour dépasser la fulgurance. Pour essayer en vain toujours d'en tenir les rennes, la diriger un pauvre instant. En vain et peut-être qu'il faut que ce soit vain justement. Pour pouvoir me dire sans relâche recommence. La vanité est ce moteur du recommencement. Sans elle je plongerais dans l'achèvement. C'est pourquoi j'ai toujours ce vecteur paradoxal, bâcler pour achever plus vite que l'achèvement véritable. tenter de battre tout achèvement de vitesse. Autrefois c'était la même sensation avec l'alcool, avec le sexe, c'est encore le cas avec le tabac. Une urgence pour vaincre une urgence. Une course effrénée comme un souvenir de la toute première cavalcade dans l'utérus pour atteindre absolument l'ovaire, pour crever en tant que simple spermatozoide effaré d'être déjà si seul dans la course à la vie à la mort. Et cet autre souvenir lié au moment enfin où l'ovaire m' accueille salut champion tu as gagné le droit de disparaître pour que la chimie organique utilise tes cellules tes molécules pour fabriquer autre chose, ce fœtus. La suite ne serait alors qu'une répétition, on aurait simplement plus de temps en apparence pour se rendre compte. Il serait même demandé de suivre des protocoles, des règles, de mesurer son pas pour parvenir au trou, à un autre ovaire encore, devenir encore un matériau utilisé par l'univers pour créer de nouveaux monstres et ainsi de suite ad vitam aeternam , amen. Bâcler ce serait tenter de dire un peu quelque chose, s'opposer, ou dire bon aller ça suffit qu'on en finisse c'est vraiment trop chiant ce film dont on connaît déjà la fin. Bâcler ce serait comme une caricature de ce que tout le monde s'oblige justement à ne pas faire pour ne pas crever.|couper{180}
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histoires
huile sur toile 70x70 cm disponible à la vente. l'histoire. Pourquoi je bute sur ce mot comme sur le mot sujet ou le mot thème. Parfois j'essaie de changer de mot, intrigue, démarche, ça ne donne pas grand chose de mieux. Certains mots ont le pouvoir de paralyser. L'exhortation qui se dissimule sous ces mots. Et dont le but est d'obtenir une garantie que l'on écrit ou peint vraiment quelque chose et non rien. Ai-je envie de raconter des histoires. Ce que signifie vraiment cette action, ce boulot. C'est avant tout mentir. Tu racontes des histoires est cette expression entendue en boucle dans l'enfance. Cela signifie que ce que tu racontes c'est n'importe quoi, ça ne tient pas debout, c'est débile, d'aucune importance, peanuts. Voilà peut-être le noeud du problème avec le mot histoire et qui continue à me poursuivre 63 ans après. Comme si, à chaque fois que j'ai l'intention de raconter une histoire , je me heurte à mon insignifiance fondamentale, que toute histoire ne peut qu'être que du vent, une connerie. Que nul n'y croira, et. au bout du bout même pas moi puisque j'ai été vérolé par ce programme, que j'en suis conscient. Maintenant si je prends les choses depuis un autre point de vue , les histoires que les autres ne cessent de raconter, aux autres, à eux-memes, est-ce que je les prends par réflexivité par dessus la jambe. Du fait qu'on ne prenne pas les miennes au sérieux. Possible. Simple réflexe. Souvent inconscient. Toutes les histoires se ressemblent à peu de choses près. C'est la forme, la façon de les raconter, qui déclenche un intérêt ou pas. L'histoire est également un lieu, un espace dans lesquels une lutte sans merci s'effectue et dont le but est de vouloir gagner en crédibilité sur ce que l'on nomme la,réalité , à défaut d'épater qui que ce soit, d'intéresser l'autre. Vouloir faire son intéressant est aussi une phrase qui remonte à loin. Mais pourquoi voulais-je me rendre interessant en racontant des inepties, se sera t'on posé cette question, pas vraiment, au bout de quelques répétitions, ce comportement singulier ne doit plus l'être, il faut lui coller une étiquette pour être tranquille, pour que la vie ou le spectacle continue. Tu es menteur voilà. Raconter une histoire, un mensonge, à bien y réfléchir posséde cette fonction de vouloir résister à l'inéluctable, c'est à dire la gifle, l'insulte, l'humiliation. Cette peur d'être battu ou puni toujours présente à chaque instant de la journée. Et pour essayer de reculer ce moment je racontais des histoires, comme je m'en racontais aussi à moi-même. Sont-ce les mêmes, non, mais leur fonction est identique, c'est à dire créer un espace où exister parce qu'ailleurs je n'ai pas d'identité véritable. s'inventer des histoires pour ne plus voir cette réalité de n'avoir aucune existence, de n'être qu'un vide, voilà le type de réalité que j'ai dû regarder en face avant de détourner le regard pour survivre sans doute. Et aussi cette difficulté pour continuer à dire le mot parents au lieu de bourreaux ou gros cons. Ce qui n'est pas tout à fait la même chose mais qui revient au même, puisque le doute ne cesse plus de s'interposer dans la relation. Est-ce que ce sont des monstres ou bien de parfaits imbeciles. Est-ce que je suis une victime idiote ou bien un gamin plus intelligent que ces deux adultes. Est-ce sans danger de briser ce tabou. J'ai toujours oscillé entre ces deux pôles dans à peu près toutes les situations de ma vie. Que ce soit dans le travail, dans mes relations sentimentales, dans la peinture et bien sûr dans l'écriture. Ce doute est toujours présent et je pense qu'il m'accompagnera dans la tombe. Quand j'entends la plupart des gens me dire il faut avoir confiance en toi après tout cela, je comprends surtout qu'ils veulent que je choisisse un personnage et que je m'y tienne, surtout pour que ça les arrange, qu'ils puissent compter sur moi en même temps qu'ils m'ont deja affublé du chiffre zéro. Toujours eu cette impression que rajouter un 0 à une unite c'était bien plus symbolique que de trouver une astuce pour dépasser le chiffre 9. Maintenant voilà entend-je , on compte autrement, il y a le 1 et le zéro. Bien sûr zero ne peut être que toi. ensuite on te remplacera par 9 chiffres pour parvenir à 20, et ainsi de suite jusqu'à la saint Glinglin. Tu n'auras donc qu'une existence éphémère, avant d'être remplacé par tous ces chiffres, Mais il faut que l'on puisse compter sur toi. C'est à dire t'ensevelir systématiquement sous des chiffres. L'écriture pourrait être considérée aussi comme du chiffre. Dans ce cas écrire c'est continuer à faire ce job que l'on m'a attribué, continuer à m'ensevelir proprement en essayant d' y mettre les formes. Parfois j'y arrive d'autres fois non. Faire exploser la forme voilà un désir qui n'est pas innocent et qui dépasse la notion d'histoire, ou qui se heurte à elle tout simplement. Ai-je vraiment fait le tour de ma difficulté avec l'histoire. Je n'ai pour l' instant qu' énoncé des faits tels que je les ai perçus. Est ce que ces faits mis bout à bout constituent une histoire, probablement. Cette histoire c'est la mienne et je ne peux que la considérer anecdotique.Elle n'ajoute ni ne retranche rien au monde. C'est une histoire vaine, un lieu vain extirpé d'un espace vide. Mais par quoi, sinon le langage seulement. Les mots surgissent , s'ajoutent à d'autres, sans but, sans raison autre que d'écrire encore un nouveau texte et rien de plus. hier achèvement d'une toile qui était en suspens depuis quelques mois, comme je m'y suis pris, juste trouver le bon bleu légèrement violacé pour unir les formes disparates.|couper{180}
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Le double voyage #04 | parlons étapes
d'après une idée de François Bon, atelier d'écriture , et un ouvrage commun Carol Dunlop et Julio Cortázar Les Autonautes de la cosmoroute A moins d'être tenu par le temps comme un chien en laisse, et de ne pas pouvoir pisser, car sans arrêt les contingences financières prennent le pas sur les biologiques, prendre le temps de faire une halte, de respirer est souhaitable dans tout voyage. Je dirais même dans toute activité humaine. Il n'y a que les robots qui semblent ne pas en faire, mais même eux suivent des routines informatiques collées les unes au bout d'autres et ces points de colle ne sont rien d'autre que des étapes si on y réfléchit. Rien n'est jamais continu dans ce bas-monde, tout n'est que diastole et systole. entre les deux , un vide, un suspens, une étape . Je me souviens de cette année 1983 oú l 'hiver fut très rude à tout point de vue. D'abord parce j'avais démissionné de ce boulot de vendeur de bagnoles en porte en porte. j'avais remis les clefs de la Fuego flambant neuve que le patron m'avait confiée pour aller faire bisquer tous les prolos des cités entre Boissy Saint Léger et Brunoy. Grand secteur . dans lequel j'officiais, spécialisé dans le porte à porte. Déjà en matière d'étape, j'en connaissais un rayon. Des journées truffées de noms de rues, des numéros de bâtiments d'étages , de portes , des noms de toutes origines rédigés , fidèles comme j'entendais ou lisais en prononçant à haute voix par phonème ou onomatopées tout cela noircissait les pages de mon agenda en moleskine noir grand format. La veille je prenais rendez- vous par l'entremise de madame pour rencontrer monsieur l'après midi parfois mais souvent le soir . Je rencontrais une porte fermée, et il fallait décaler de façon habile une nouvelle visite pour économiser énergie, temps et carburant , la vente c'est cela, une affaire de ténacité, de patience et d'entregent sans oublier un peu de jugeote. A cette époque chaque journée était comme un voyage, on savait à quelle heure on partait, en principe 7h du matin, mais le retour était aussi incertain qu'un bulletin météo. On pouvait même être surpris de rentrer de bonne heure si on s'était bien défendu question timing. Il y eut ainsi des jours miraculeux où je remportais la vente d'une R20 au cinquième à 19h puis de cavaler derechef au septième et refourguer une Twingo à 20h. c'est ce que j'appelais "tôt" à cette époque. Des journées jackpot dirait- t'on ? Non. Ce n'était pas de la chance, c'était le timing, le fruit d'une sacrée organisation menée étape par étape , voilà tout. De la jugeotte. Le matin était alloué à la prospection de nouveaux clients ou la visite de réguliers, on ne se mettait pas en tête de vendre le matin, pas du tout. On prenait des notes,des numéros de téléphone , on exposait des faits, des documentations techniques, on exhibait et remettait prospectus et carte de visite puis on goûtait toutes sortes de breuvages, thé, café, chocolat chaud ; parfois accompagné de petits gâteaux. Les ménagères qui m' accueillaient étaient plutôt aimables , elles semblaient même contentes de discuter le bout de gras. On ne parlait voiture qu'en préambule, juste pour avoir une raison, un prétexte d'entrer. Il n'était pas rare qu'on en vienne à des sujets plus terre à terre, comme par exemple la perte de boulot du mari, les enfants qui étaient intenables , "Dieu merci il y a l'école" , un feuilleton policier que la dame ou son mari appréciait, les soucis de santé de tout acabit, la délinquance, la peur, la drogue, les bris de glaces, les vols. les odeurs de pisse dans les cages d'escalier. Les sujets pouvaient s'étendre à l'infini mais, je ne passais jamais plus d'une heure maxi par appartement. Il faut un minimum de cadre à tout. Durant la conversation je cochais mentalement des cases pour savoir s'il serait pertinent de revenir ou de laisser tomber en attendant, pour les pauvres bougres, des jours meilleurs. La journée du vendeur en porte à porte est un voyage. Avec de nombreuses étapes toutes plus étonnantes les unes que les autres. Il serait ardu de toutes vouloir les décrire d'ailleurs. Notamment celles du début d'après-midi quand la somnolence nous guette , on aurait envie d'aller se garer quelque part loin des cités, dans un bois, près d' un champ de colza et de piquer un roupillon, ou celles qui arrivent autour de cinq à sept quand la concupiscence , l'ennui, la lubricité s'y mettent. De ces étapes il me reste des souvenirs de papier peint, de moquette, d'odeur de proutt de chien, du ragoût qui bout dans la cambuse , tout cela mélangé à des odeurs de parfum bon marché ; des photographies en noir et blanc et en couleur pour agrémenter le vide d'un mur ou d'une vie, la tête d'un petit chien sur une commode avec son faux marbre qui dit toujours "oui oui" comme ceux que l'on met sur la plage arrière d'une berline ; des tâches de moisissures qui attaquent les plafonds, des odeurs de javel dans les hall d'immeuble, des crampes dans les mollets quand les ascenseurs tombent en panne, et quelques moments de tendresse d'amitié, de complicité comme des fleurs de lotus surnageant toute cette merde ambiante. J'étais mal à l'aise de gagner ma vie sur le dos de ces gens. Pourtant j'étais un bon vendeur, on me l'a souvent dit. Mais quelque chose m'empêcha. Une tristesse je crois. Bref c'est comme ça que je suis arrivé à la fin de cette expérience, un voyage avec beaucoup d'étapes, un calvaire même certains jours et dont je n'ai pas fait grand chose à par me le ruminer de temps à autre, en aparté. Comme tous les autres voyages. 2. Donc c'est l'hiver 83 au vingtième siècle et on me prête cette 2CV poussive pour faire Paris- Avignon parce que ma petite amie a trouvé un boulot la- bas, on ne pouvait plus payer le loyer de la Bastille et, du coup, j'avais réuni quelques affaires que j'avais flanquées dans le coffre. Puis j'avais tiré le plus que je pouvais à la banque avant d'être interdit bancaire et roule ma poule. Pour économiser je n'avais pas pris l'autoroute mais la RN7. Par contre pas possible de mettre le chauffage ce qui fait que du côté de Péage de Roussillon vers 22 h au bord de la cryogenisation j'ai opté pour l'autoroute à Chanas, mon plan était de rouler jusqu'à trouver une station service , de boire un petit café, de rester au chaud quelques minutes le temps de me réchauffer puis de repartir. Il y a de nombreuses aires d'autoroute entre Chanas et Avignon et certaines ne comportent pas de lieu de vie pour se réchauffer, juste un parking où des gros- culs viennent se garer pour roupiller, et des gogues. Ces aires là, je les évitais. Parfois je me demandais si j'allais tenir le coup d'une station à l'autre car elles sont éloignées d'une cinquantaine de kilomètres en moyenne. c50 bornes interminables Je me souviens que pour me donner du cœur au ventre je pensais à jacques London, à ses bouquins sur le Grand-Nord, au courage des chiens et des hommes pour affronter le blizzard et la nuit. Je rigolais quand même de conduire cette putain de 2CV sans chauffage. Le genre de truc qui n'arrive qu'à toi je me disais... c'est à l'antépénultième étape que j'ai rencontré un type qui faisait le plein à côté de moi, il caille vachement que je dis tout haut en me frottant les mains pendant que l' essence dévale dans le réservoir. Problème de chauffage il dit , j'acquiesce. Il s'amène , ouvre le capot avant, bouge un truc et il dit c'est normal que t'as pas de chauffage t'es en position été. J'ai eut l'air con mais j'étais joyeux en même temps. J'ai tout de même pris le temps de boire un petit café à la station. Tellement content et crevé aussi que je me suis arrêté à toutes les stations qui restaient jusqu'en Avignon. Le chauffage m'avait tellement réchauffé que désormais il fallait que je lutte contre l'endormissement.|couper{180}