Février 2025
1er février — M. m’a tendu un bout de papier à la fin du cours. Deux adresses, des numéros, et ce mot en capitales : POSSEDÉE. Je l’ai glissé dans ma poche. Ce matin, il a disparu. J’aurais pu le noter ailleurs. Je ne l’ai pas fait. J’ai bien peur que ce soit volontaire. Je dors par morceaux, deux heures tout au plus. Cette nuit, j’étais graphiste pour un groupe de jazz. Une affiche parfaite. Disparue. Comme si quelque chose, à l’intérieur, décidait que rien ne devait rester. Hier soir, avec les R., nous avons compté les Alzheimer autour de nous. Un bon paquet. À chaque nouveau nom, je me suis retenu de me toucher le front. Et puis cette pensée : Alzheimer a peut-être aussi ses bons côtés. J’ai gardé ça pour moi. Alors je pense à partir. Prendre un sac tube. Ne rien dire. Mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui, une part de tarte aux pommes. Quelques pages de Léviathan. Ne pas disparaître tout de suite.
2 février — Visionné Le Journal du regard de Pierre Ménard. Redécouvre la ville telle que je l’ai laissée depuis 1990. Le texte lu me rappelle la perte de mes carnets Clairefontaine. La vérité est que je ne peux me passer des autres et que je ne peux en même temps aller vers eux. Pour quoi faire ? Pour quoi dire ? J’ai repensé à la rue Custine. Si je devais choisir un lieu qui caractérise l’impermanence, l’intemporel, ce serait celui-ci. Ses platanes — à moins que ce ne fussent des tilleuls. Et voilà comment on revient au présent : par le doute.
3 février — Tout ne sera pas égal. Il y aura du long et du court, du gras et du maigre. Ce matin, j’ai envie. Ma colère se transforme. Ma peur change de masque. Mon désespoir a les fesses qui tombent. J’ai envie. Je fais un feu. Recouvrir de rouge des toiles. Un temps de souffle de pigment. Un temps d’aurochs et de gel. De grands gestes. Comme on dit au revoir, adieu, à jamais. Le héros foire. Tout ce qu’il y avait d’héroïque débande, tombe en quenouille. Il faut le vivre une fois. Ensuite, le monde se prend en grande pitié. La honte pour l’espèce.
5 février — Il faut raconter ses cauchemars à voix haute. Elle m’avait dit ça. Profiter. Le mot résonnait partout. Ça me rappelle saprophyte. Qui tire les substances des matières en décomposition. Tu es un point entre deux points. La faux te fauche la faute. Ensuite, rame sur la façon d’organiser du CSS pour t’apercevoir que ça ne sert à rien. Que l’organisation n’est qu’un leurre. Elle disait raconte-moi. Puis elle tournait les talons. Mes cauchemars se transformaient. Ils devenaient des envies honteuses. Ce n’étaient pas mes envies. C’étaient des envies de tout le monde, pour en dissimuler d’autres encore plus effrayantes. Elle a dit tu as le diable dans la peau. Et je l’ai crue. C’est pour ça que je tue la toile. À coups de ciseaux. À coups de cutter. Hier soir, j’ai vu un film de Chantal Akerman. Et peut-être que j’ai tout retrouvé. Les bruits. L’organisation. Les pièces. On allume. On éteint. La routine est un parapet.
6 février — Le mot articule me fait pouffer. Puis abattis s’amène avec sa tête de comptable. Numérote tes abattis. Un océan d’eau dans le crâne, voilà. Ça me botterait. Moi qui ai toujours eu des velléités de pêcheur au harpon ou de baleine blanche. Hier, j’ai soulevé un loup. J’étais en train de relire Le Horla quand j’ai repensé à La Ville sans nom. Figure-toi que L. ait lu Le Horla et s’en soit inspiré. Le dibbouk a sorti un vieux mouchoir sale. "Adieu raison, vaches et cochons !"
7 février — Peu dormi. Feuilleté Je m’en vais d’Echenoz. M. disait : "Il faut de la maturité pour vouloir écrire." Peut-être est-ce moins une question de maturité que d’usure. Un degré de fatigue. Comme si écrire était un exercice d’épuisement nécessaire. Ma vie ne fut qu’un éternel brouillon. Il est 4h32 et toujours pas envie de dormir. Cette fatigue atténue la brutalité du monde. Je ne dors pas pour me fatiguer, afin de me créer un scaphandre pour ne pas trop être endommagé par l’irradiation de la journée. Je suis peu satisfait de mes textes. Jamais satisfait. Honte et à quoi bon, voilà la tête de l’adversaire.
8 février — Des fois, j’ai honte, des fois non. Ça dépend de la résonance du monde. Si j’entends les oiseaux, oui. Si j’entends le camion-poubelle, non. La honte ne dépend pas que de moi. Honteux n’est pas un état stable, mais volatile. Il faut attendre parfois des mois pour que certaines hontes se transforment en trésor. Passé une sale journée. Maux de gorge, nez coulant. Travail à l’encre de Chine le matin, collages l’après-midi. Et toujours ces phrases : ça ne ressemble à rien, je ne sais pas où je vais. La honte vient aussi du fait de se rendre compte que l’on n’est pas seul à éprouver les mêmes hontes. Nos hontes sont nos mânes, nos lares, nos lémures, nos génies tout autant.
9 février — Davos, janvier 2025. La neige qui tombe sur les costumes Armani pendant que Trump prête serment. Dans leurs salons feutrés, les élites se chient dessus. "L’âge d’or commence maintenant", qu’il gueule. Et pendant que les pontes s’étouffent avec leurs petits fours, il balance ses mesures comme des uppercuts. Le plus dingue : tout part en vrille en même temps. Les élites qui flippent, Trump qui joue au mégalo, l’Europe qui fait semblant d’avoir une colonne vertébrale. Peut-être que c’est ça qu’il nous fallait : que tout parte vraiment en couille pour qu’on arrête de faire semblant.
10 février — Arrêtons-nous sur cette faculté qu’a la langue d’être "ductile". Cette malléabilité opère sans jamais rompre le fil du sens. La langue ductile épouse les mouvements intérieurs de l’âme. Cet effort, cette tension vers la justesse permet au texte d’échapper au soliloque stérile. Ce 10 février, il pleut. Février a une tête de TGV qui fonce vers Mars. Hier, B. et D. étaient là. Soixante-dix-huit et soixante-dix-neuf ans. Conversation floue : maladies, difficultés à se mouvoir. Comme si l’on glissait vers une fadeur indistincte. J’ai tenté une relance sur la question du paradis. Le silence fut sans appel. Puis le rouleau de PQ s’est achevé. J’étais déjà ailleurs. Effaré de n’avoir pas fait plus tôt le lien entre l’homoncule d’Echenoz et mon Dibbouk.
12 février — Visionné le replay d’un Zoom. Me suis vite rendu compte que je m’y ennuyais. Ai eu honte de m’y ennuyer. Tout groupe normalement constitué a besoin d’un ennemi. Tout comme moi, je fais de tout groupe un ennemi. Principe ontologique. Ce que je rejette furieusement, c’est l’envie de participer à n’importe quel groupe. À bien y réfléchir, c’est plus affaire de pudeur. L’écriture est vraiment mon lieu. Je ne devrais jamais plus avoir à en sortir.
13 février — Cette nuit, rêve érotique. D’abord doux. Puis une sensation étrange. Comme si on me l’accordait par charité, en compensation d’une fin imminente. Voilà le fin mot : je réfléchissais trop parce que je ne faisais pas assez l’amour. C’est là que j’ai repoussé la succube. Elle avait le visage de P. Mais au moment où j’ai compris l’arnaque, elle a pris aussi la voix de P. Cette voix insupportable. Tout s’est éclairé : depuis toujours, tout était dans la voix. La voix ne ment pas. Après tout, ça remonte à plus de quarante ans. Il serait temps que je me lâche la grappe.
14 février — Relectures des carnets à l’occasion de la création des digests. "Les années Covid". Tu n’arrives pas à souffrir en chœur. Tu te réjouis au lieu de te plaindre, et vice versa. Tu as beaucoup parlé de peinture. Plus qu’avant. Assez vite trop. Relectures, qu’en dire. C’est appliqué, c’est constant, c’est habité. Mais à force d’habiter, ça se meuble trop. Trop d’introspection, trop de ressassement. Et puis, ce goût du flou. À force de décrire des lieux qui changent, il n’y a plus de point d’ancrage. Il manque quelque chose : un accident, une cassure. Parfois, il faudrait que ça explose au lieu de s’effriter lentement.
15 février — [RÉCIT] Réduction. Ce qui tombe. Ce qui reste. 109 à 7. Peut-être 6. Mais 7. Parce que 7. Une idée de peu. Ce qui survit. Le nom change. Le texte et la faille. Un écho d’avant. Écrire ici. Juste écrire. L’écriture suit le carnet. Elle hésite. Elle s’arrête. Elle reprend. Comme l’eau. Jamais directe. Toujours en travers. Reçu ce matin un texte. Beckett. Pour finir encore. On ne tue que le mensonge. Après il reste une feuille. Fine. Cigarette. Une brèche. Existe-t-elle ? La porte ? Les portes sont des leurres. On tourne en nous-mêmes. Un labyrinthe sans fin. Marcher. Fixer un point. L’arbre. Ou rien. Recommencer. Insister. Le corps fixe. Devant la fenêtre. Même heure. Tout tremble. De partout. Presque rien. Mais tout. Lente respiration. Frémissement continu. Les yeux s’ouvrent. Se ferment. Fixer l’arbre. Le hêtre. Ombre qui insiste. Comme si tout devait disparaître. Mais non. Rien ne s’en va. C’est autre chose qui bouge. En nous. Un vide qui occupe tout. Une main suspendue dans l’air, une question sans réponse. Le jour tombe. Le noir monte. Le silence surtout. Tout en suspens. Tout tremblement. Un dernier frémissement. Puis plus rien.
16 février — Rêve. Inondation dans une cave. Je descends. Le fracas de l’eau. Une silhouette bouge au fond sous un néon intermittent. Un chien qui remue la queue. Totalement incongru. Si je ne crois plus en mes rêves, il me faut cesser de prendre mes cauchemars au sérieux. Le lendemain, réception des petits-enfants à Perrache. J’ai mal aux dents surtout. Ça me fait voir le monde encore plus laid. Une fois la famille reconstituée, nous regagnons le parking. Le soir, je tente de me raccrocher aux Grandes Blondes d’Echenoz, mais l’effort est vain. Je sombre dans le sommeil. Et me retrouve dans cette cave, face à un chien qui remue la queue.
17 février — C’était il y a quarante ans. On traversait Le Péage-de-Roussillon. Personne ne s’arrêtait ici par plaisir. Une traversée obligatoire. On se promettait que jamais on ne s’arrêterait là. Et pourtant. Aujourd’hui, on y vit. On prend une rue, puis une autre, et quelque chose cloche. Les rues ne sont pas tout à fait les mêmes que la veille. Leur alignement semble un peu déplacé. La pharmacie était de l’autre côté de la place, non ? Les habitants empruntent les rues avec cette aisance de ceux qui ont accepté que les lieux ne se laissent pas capturer facilement. Quarante ans plus tôt, on en sortait avec soulagement. Aujourd’hui, on y habite. Et peut-être qu’un jour, on tentera d’en partir, sans garantie de vraiment y parvenir.
19 février — Il pense que c’est fini. Une douleur tenace — une dent — l’empêche de penser correctement. Il résiste, encore. Pendant ce temps, le monde s’effondre. Une dystopie de série B qui s’écrit en temps réel. La douleur de la dent ramène tout à une échelle plus proche. Un micro-drama dans un macro-chaos. Il n’ira pas chez le dentiste. Pas encore. Il reste là, dans cet entre-deux parfait. Et pourtant, il écrit. C’est sa seule concession au mouvement. Une lucidité terrifiante certains jours, apaisante d’autres. Pas guéri, pas fichu, pas sauvé. Juste là. Quelques heures plus tard : Dans ces cas-là, la sagesse impose de se rendre chez le dentiste. De base, il suffit de s’y rendre pour ne plus savoir quelle dent fait mal. La douleur se dérobe au moment où elle devient soignable. "Bon, je vois plusieurs caries. Mais avant, un petit détartrage." Non, il ne veut pas de ce "petit". Il veut l’anesthésie, tout de suite. "Vous êtes sûr ?" Il l’est.
21 février — [RÉCIT] Un amour du passé qui hante. Mais quelque chose cloche. Sommes-nous hantés par l’attente de l’amour plus que par l’amour lui-même ? Peut-être est-ce cette promesse qui obsède davantage que les êtres aimés. L’été s’annonce immobile. G.-p. attend à la gare. Première nuit. Le tic-tac de l’horloge. L’été sera long. Les journées s’étirent. Après-midis à retrouver P. près de la mare. Puis un jour, B. apparaît. Mais ce n’est pas elle qui bouleversera cet été. Ce sera N., sa sœur aînée. Un soir de pluie, toute de blanc vêtue. Tout en elle semble hors de portée. Chaque soir, rendez-vous tacite derrière la barrière. Des marches sur les sentiers. Des mains s’approchant sans jamais se toucher. Puis l’été s’achève. Une adresse échangée. Puis des lettres quotidiennes. L’hiver passe. L’été revient. Le voyage entrepris seul. Huit kilomètres sous le soleil, valise à la main. Sur le chemin, la maison de N. apparaît. Dans la cour, un homme. Une étreinte. Demi-tour. Les lettres restent longtemps dans une boîte, jusqu’au jour où elles sont brûlées. L’amour s’est transformé. À la relecture des années plus tard : l’attente de l’amour n’est-elle pas plus précieuse que l’amour lui-même ?
22 février — Coincé entre dystopie et utopie, écrire quelque chose qui ne serait pas complètement idiot. La bêtise devient un vecteur. On s’accroche à la bêtise comme à une fusée. Mais on s’enfonce dans les profondeurs de la fosse des Mariannes. La blague tombe à l’eau au plus profond de l’eau. Les maux de dents repartent. S’il n’y avait pas d’être humain, le monde existerait tel qu’il est, sans bien ni mal. Le dégoût monte. Non pas le dégoût de l’autre, mais le dégoût de soi. Peut-être est-ce là la seule forme de transcendance possible : un ricanement étouffé dans l’abîme. Nous ne nous envolons pas, nous coulons avec une certaine grâce.
23 février — Puis il arriva que je me mette à lui imaginer des peurs. Comme si tout un pan du vocabulaire au sujet de la peur s’était évanoui. Nous vivions désormais dans un monde sans peur. Même la peur, on nous l’avait volée. Admettons que X ait eu peur, un jour, au siècle dernier. L’invisible, l’inéluctable, l’abandon. Admettons que l’invisible ne soit plus vraiment une valeur sûre. Peut-être logé dans des mots tout neufs : complot, fake news, État profond, Davos. On comprend ce lien entre la peur et le désir dans l’imaginaire des bibliothèques. La peur de l’immensité d’une bibliothèque et l’inéluctable : on ne pourra jamais tout lire. L’universalisme aussi est un mot caduque. De toutes les peurs qui auront disparu, l’abandon seul subsiste encore. Les mots me manquent cruellement pour les exprimer.
26 février — Hier soir, panne d’ordinateur. Ubuntu en emergency mode. Problème de format. J’ai bien galéré, et pour finir, j’y suis arrivé. Le mardi reste un jour mystérieux. Je suis seul jusqu’à 16h. J’oscille entre écriture et lecture. Hier, j’ai suivi David Camus dans Autour de Lovecraft. Et soudain, une angoisse. Si ce récit était une fiction ? Si ce personnage n’existait pas ? J’ai compris que j’étais absolument capable de balader le lecteur sur des pages sans aucun scrupule. La pensée m’a tenu en éveil jusqu’à une heure avancée. À la fin, je me suis moqué de ma candeur enfantine. Je l’ai même saluée. Elle m’a semblé précieuse. Ce qui relance la question : qu’est-ce que je fais de ma vie ? Qui suis-je ? Suis-je le personnage d’un rêve que je ne parviens pas à rêver moi-même ? En plissant les yeux j’arrive à lire le titre d’un livre : "Critique dans un souterrain" de René Girard. Le désir et sa nécessité triangulaire soudain me reviennent, et tout l’effroi ancien. Puis je regarde l’homme qui dort. Empathie soudaine. Et la petite phrase de D.C. à propos de HPL : "Il y a de l’amour."
27 février — On pourrait croire que les choses continuent comme avant. Mais avant quoi ? Aucun mal à garer la Dacia ce matin. Les gens sont partis en vacances. Mes dents me lancent toujours, mais je tiens bon. Nous croisons G., une de mes élèves. Malaise mutuel. Ce qui est étrange, c’est qu’on ne la croisera plus du tout. Comme si elle s’était volatilisée. Au retour, le rituel : ranger les provisions. Je n’ai pas faim. On a parlé des vacances d’été. Incapable de me souvenir où. Ce manque d’intérêt me préoccupe. À la fin, S. comprend que je ne l’écoute plus. Silence. Je ne me souviens plus comment la dispute a commencé. À un moment, S. a lâché que je n’étais plus là depuis des mois. Qu’elle avait la sensation de vivre seule. J’ai joué l’offusqué. Puis je me suis tu. Elle avait raison. Ma vie a défilé en accéléré. Toutes les scènes reliées par un fil commun : j’étais absorbé dans l’écriture. Discussion close.
28 février — Je me suis réveillé avec cette phrase : Ce qui est proche se doit de rester loin. Vers 2h. Un Doliprane effervescent. Puis relecture des Montagnes hallucinées. Puis Le Procès. K. Il doit y avoir un lien entre HPL et Kafka. Ces personnages contraints de dire alors qu’ils préféreraient se taire. Comme K., figé devant le portail de la Justice. Ce portail, il l’a créé lui-même. Son rôle, c’est de ne pas pouvoir passer. L’absurde d’hier paraît aujourd’hui plus réel que jamais. J’ai toujours pensé que nous étions les créateurs de tout ce que nous traversons. Que nous ne sommes que des histrions sur une fresque gigantesque. Un couloir d’hôpital. Sous terre. Des centaines de corps nus. Les camps. Mais quelque chose cloche. Les corps sont luisants, pleins, presque gras. Je ne sais pas si c’est un rêve ou un souvenir. La douleur est une foreuse de conscience. Avoir mal est une chose. Entretenir ce mal en est une autre. Était-ce ce jour où je suis resté allongé sur le carrelage froid après une trempe ? Détaché totalement de cet ensemble bourreau/victime qui ne faisait plus qu’un. On revisite la chute et l’on s’aperçoit que tout ne tombe pas au même rythme. Un témoin silencieux observe l’ensemble. Ce racisme que tant de gens reprochent à Lovecraft me fait penser à un rêve récurrent. Un géant terrassé par des créatures affreuses. Leur langage était la pire torture. C’était du mépris. Je comprenais que ces créatures existaient parce que je les inventais. Elles étaient les sentinelles d’un territoire inconnu. Elles m’accompagnaient dans cette tâche absurde : explorer l’illusion magistrale que je m’étais inventée afin d’essayer, chichement, de m’incarner dans ce monde.