Rêve
Inondation dans une cave, mais pas celle de la maison. Une cave inconnue. Je descends l’escalier qui y mène. Le fracas de l’eau résonne dans un recoin que je ne vois pas. Certainement une canalisation qui a lâché, me dis-je dans mon rêve. Pour le savoir, il faut tourner à gauche : le bruit vient de la gauche. Rien de politique, me dis-je avec ironie.
Je m’apprête à rire de ma blague idiote quand un frisson avant-coureur me cloue sur place. Plus on en est conscient, plus il nous prend, nous glace. À la fin, on est raide. Ça y est, je suis figé d’effroi.
C’est alors qu’une silhouette bouge au fond de la cave et s’avance sous un néon intermittent. Et là, qu’est-ce que je vois ? Un bas rouge qui remue la queue. Totalement incongru. Aussitôt, je me dis – toujours en dormant à poings fermés – que si je ne crois plus en mes rêves, il me faut aussi cesser de prendre mes cauchemars au sérieux.
Le lendemain, la réalité n’a pas l’air plus limpide. Nous sommes allés réceptionner les petits-enfants à Perrache. Les employés de Junior SNCF vident d’abord la voiture des bagages qu’ils entassent sur le quai. « Si vous reconnaissez les bagages de vos enfants, allez-y », disent-ils. Ce qui semble le comble de l’absurde pour la dame qui trépigne à côté de nous. « Enchantée, je vous présente mon mari, avocat au barreau », en profite-t-elle pour placer.
Et de papoter avec S. de l’effondrement de tout.
Moi, non. Je m’en fous. Je trouve un siège libre et m’assois, observant cette grappe d’individus excédés pour pas grand-chose. J’ai mal aux dents surtout, et ça m’accapare. Ça me fait voir le monde encore plus laid qu’il ne l’est. Ce qui n’est pas peu dire. Surtout vers 18 h sur le quai d’une gare, alors que la nuit tombe en hiver.
Enfin, une fois la famille reconstituée, les bagages récupérés, nous regagnons l’obscurité des parkings, place des Archives. Ce qui, soit dit en passant, me réconcilie momentanément avec ces expéditions vers la gare de Perrache : l’accès au parking souterrain est devenu d’une déconcertante facilité. Surtout pour repartir.
On est derechef sur le quai, et on file, avec en fond sonore le concert des chamailleries habituelles sur la plage arrière. C’est toujours agaçant, mais c’est moins pénible et moins long que de s’extraire de la Part-Dieu.
Ce qui nous entraîne vers 19h30 déjà, puis vers la soupe, puis vers le salon, puis, au bout du compte, assez rapidement vers le lit. Je tente vainement de me raccrocher aux Grandes Blondes d’Echenoz, mais l’effort est vain. Je sombre dans le sommeil.
Et me retrouve au beau milieu de cette cave, face à un chien qui remue la queue.