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Peindre un oignon

Peinture INDAR DRANCOURT Rien d’extraordinaire dans l’idée de peindre un oignon. D’ailleurs pourquoi le sujet serait-il extraordinaire. Le sujet est un oignon, il pourrait être tout autre chose ça ne changerait rien. J’ai fait l’expérience avec un radis, une tomate, un chou vert, de l’ail, je n’ai pas vraiment senti une différence fondamentale dans tout ça. Ce qu’on pourrait trouver de commun à toutes ces choses c’est qu’elles se mangent. C’est qu’elles appartiennent à l’univers de la cuisine, de la nourriture, on peut les apprécier diversement. Par le gout. Car bien sûr certains aiment les oignons tandis que d’autres les aiment moins mais là n’est pas le sujet. Pour peindre un oignon il vous faut un oignon. Si vous n’en avez pas vous serez tentés d’aller en trouver grâce à un moteur de recherches. Mais ils ne se mangent pas…j'insiste sur ce point qu'ils ne sont pas réels, donc préférez, si vous êtes décides, l'êtes-vous, pour trouver l'oignon, un marché un supermarché une épicerie de quartier. Il vous faudra l’acheter ou le voler. Il m’est déjà arrivé de voler un oignon pour le peindre. Mais je ne pense pas que cela change grand chose non plus au sujet. Là où je désire attirer aussi votre attention c’est que vous n’êtes pas les premiers à vouloir peindre un oignon, d’autres s’y sont déjà collés avec plus ou moins de réussite ou de bonheur. Peindre un oignon est une chose assez banale à priori dans une vie de peintre. Et d’ailleurs c’est si banal que de nombreuses personnes qui veulent apprendre à peindre, ceux qui débutent, ne pensent pas immédiatement à ce genre de sujet. Peindre un oignon ne les fait pas rêver. C’est une question importante qui est soulevée : faut-il rêver pour peindre, un oignon ou autre chose. Je ne le crois pas non plus. Au contraire il vaut mieux être éveillé et qui plus est avoir les yeux bien ouverts. Les yeux bien en face des trous comme disait Rembrandt à ses élèves ( avait-il lui le temps d'avoir des élèves). Plus vous peindrez des choses que vous considérez affreusement banal, mieux vous peindrez. Peignez les sans chichi, sans fioritures, sans sentiment. Peignez un putain d'oignon en la bouclant si possible. Est-ce possible. A vous de voir. Image mise en avant Peinture de Jacques Truphémus.|couper{180}

Peindre un oignon

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Peindre dans la zone de la vérité.

PSD 111 Bram Van Velde Le geste de peindre s’il ne provient pas de cette zone d’où l’on sent qu’on approche une vérité, ce geste s’annule de lui-même dans un bavardage, une succession de pensées, c’est un geste qui n’a plus de force, plus de vie. Il peut donner le change aux badauds, on peut même gagner sa vie avec de tels gestes, mais ce n’est pas le geste de peindre. C’est autre chose qui participe plus du spectacle commun. Sans doute est-ce mieux de renoncer à ce type de geste spectaculaire quoiqu’il en coûte. Sans doute le geste juste nous en sera t’il « reconnaissant », on peut s’imaginer, mais peut-être, c’est presque certain, n’est-ce pas le bon mot, un geste comme celui là ne se soucie pas des mots. Se tenir face à la surface de la toile et se taire complètement. Si le geste en sort tant mieux, s’il n’en sort rien, pas grave. Revenir à nouveau et refaire. C’est peut-être grâce à cette ténacité de revenir en silence devant elle que la toile soudain s’ouvre. Et en s’ouvrant quelque chose de nous s’ouvre également. Un geste en peinture c’est comme une floraison soudaine. et il n’y a pas une cause, un responsable, c’est un concours de circonstances que le peintre cherche à reproduire comme il le peut, souvent mal d’ailleurs, mal pour ce que lui le peintre en pense, mais dans cette zone de vérité il n’y a ni mal ni bien, il y a juste le moment où la fleur s’ouvre ou pas. Il en va aussi d’un tas de gestes. Ou qui ressemble à ce type de geste. La lecture par exemple, nécessite le même type de lieu et d’espace, le même silence, si trop de choses s’agitent la lecture en est brouillée, ce qu’on en retire faussé. Autant refermer le livre. Aller marcher.|couper{180}

Peindre dans la zone de la vérité.

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La notion d’œuvre, le silo.

Le « Schweisser » (Le Soudeur) d’Yves Carrey, qui ne voit rien venir Comment se constitue en soi l'idée d'une œuvre ? Ce n'est surement pas un livre, pas un tableau, pas une seule pièce. Ce ne peut plus être aussi simple et naïf. C'est une réflexion qui ne s'effectue pas en amont de l'action non plus. Peut-être est-ce une liquidation. Une liquidation de soi-même avant toute autre chose. Cette intuition je l'avais eue très tôt mais elle était sans doute encore incompréhensible, vers 1980 déjà, vivre faussement était une véritable hantise. Toutes ces choses dans lesquelles on devait pénétrer comme on enfile un gant qui est trop grand ou trop étroit. Autant qu'il me souvienne, je pourrais même remonter à l'enfance, même constat. Une force s'oppose au mensonge. A ce que l'être spontanément considère être un mensonge. Le doute s'installe quand on constate que tout le monde vit dans ce mensonge et le nomme réalité, ou vérité, ou n'importe quoi qui permette de réunir le monde justement, selon une idée de justice dont on pourrait discuter, si les gens face à soi, justement, appréciaient d'en discuter, ce qu'ils refusent la plupart du temps. Cette surdité ce mutisme sont difficiles à comprendre, à accepter en tant que fait. Mais ce sont des faits, on ne discute pas les faits, et alors deux solutions s'offrent, soit de l'accepter comme une donnée incontournable de la réalité commune, soit de chercher à entendre, à écouter ce que tout le monde refuse d'entendre et d'écouter. Non pas pour en tirer un profit, un pouvoir, ce ne serait qu'une intention de surface, mais bien plus pour essayer de trouver de l'ordre dans le chaos, le mensonge, le silence qui nous choquent naturellement. Une œuvre alors, ce serait un puzzle immense qui débuterait dès le début. Tous les morceaux sont éparpillés dans le temps et l'espace et il convient de les retrouver en les considérant non comme des faits exceptionnels, des qualités voire des défauts, ni de les classer à la va-vite dans un genre, ou par thématique de façon à en finir momentanément avec le trouble que provoque leur réalité. Tout compte dans cette notion d'œuvre , non pour mettre en avant une personnalité, mais plutôt pour la réduire à néant. Pour la liquider. Ce serait cela le point de vue de l'auteur, de l'artiste et il le ferait durant une partie plus ou moins longue en toute inconscience. Comme si la force qui pousse à créer nécessitait toute la place, comme si elle désirait remplir peu à peu le vide que provoque les découvertes successives, laborieuses du créateur vis à vis de son propre vide. Un animal monstrueux qui dévore le vide à la vitesse de l'éclair. On pourrait l'appeler écriture, peinture, évidemment on pourrait l'appeler le diable ou tout autre chose qui vous passe par la tête. Il faut prendre conscience en premier lieu de ce vide que nous appelons je ou nous. Et évidemment c'est extrêmement difficile de l'accepter, de l'affronter, de lui donner son nom exact. Comment témoigner d'une telle aventure, pourquoi d'ailleurs vouloir en témoigner, peut-être justement parce qu'il y a quelque chose d'inhumain à chercher la liquidation alors que tout autour le monde entier tente d'accumuler. Inhumain dans le sens anormal. Ce qui offre un éclairage de cette norme dont on se tient à l'écart volontairement ou pas et qui au fur et à mesure que cet écart se creuse semble nous rapprocher de quelque chose qu'on pourrait nommer son fondement. Qui au bout du compte est à mon sens émouvant, émouvant tant cette norme est souvent dérisoire, pathétique. Et qui m'installe aussi dans la colère dans la rage lorsque souvent je comprends qu'on utilise cette norme pour exploiter, apeurer, contraindre, gouverner, et toujours pour un profit qui lui me semble parfaitement inhumain. voici donc un texte qui sort du vide, comme il peut, avec maladresse de plus en plus souvent. Cette fameuse maladresse, encore un écart à maintenir coute que coute. Il serait dangereux cependant de ne s'appuyer que sur celle-ci. Considérer que ce ne sont là que des brouillons, des notes, des billets sans véritable importance, que ce n'est pas l'œuvre, serait une erreur aussi. Cette histoire de l'œuvre à venir qui reste toujours plus ou moins collée au tympan, à l'oreille intérieure, elle ne sert sans doute qu'à cela, à produire des brouillons sans relâche qui seront sans doute plus intéressants qu'un livre digne de ce nom ou une peinture digne de ce nom. C'est une manière de non peindre, non écrire dont on ne peut plus à un certain moment ignorer la raison d'être. C'est parce qu'elle liquide, cette manière justement ; toute idée de norme inscrite jusqu'au fin fond de nous-même concernant le mot œuvre. Tout est là épars, dans un désordre entretenu farouchement depuis des années, textes, dessins, tableaux, esquisses et ébauches, c'est tout cela l'œuvre que je l'accepte ou pas me concernant, que j'en sois heureux ou pas, cela n'importe pas non plus. La liquidation doit bien aller jusqu'à cette notion de franchise profonde. Comprendre que l'on n'agit toujours que pour communauté et non pour un individu qu'on ne connait d'ailleurs pas, qu'on ne connaitra jamais, un mort du nom de John Doe, un genre de soldat inconnu. Le terme de silo dans plusieurs textes lus ces derniers jours, sa persistance, me fait revenir sur le silo de mon enfance, un silo à blé dans lequel nous jouions un camarade et moi. C'était le lieu de l'effroi et de la joie en même temps. Pour nous empêcher d'aller nager dans le grain et de nous y noyer le meunier avait inventé une histoire de monstre, un énorme crocodile qui vivait dans les profondeurs de ces montagnes molles et qui pouvait à tout moment nous attraper une jambe, un bras pour le dévorer. Cela rehaussait d'autant l'excitation et le plaisir du jeu. Ma vie toute entière ressemble en tous points à ce silo. J'imagine qu'il en est de même pour n'importe qui franchissant la soixantaine, rien d'original là-dedans. L'idée de matérialiser ce silo paradoxalement dans un lieu numérique me taraude depuis que je suis tombé à la renverse en découvrant l'immense profondeur, ses zones d'ombres, ses clartés aussi, le site du TIERSLVRE de François Bon. Je suis même allé par curiosité jusqu'à installer le même script sur un serveur local afin de comprendre comment le paramétrer. C'est que construire un site, doit avoir un lien avec ce fameux silo certainement. Il y a une âpreté salutaire, à utiliser un script que l'on ne connait pas, d'en découvrir progressivement tous les rouages, les possibilités, avec en plus un accès immédiat à une réalité indiscutable si je puis dire car soit le site fonctionne soit il ne fonctionne pas voilà tout. Ensuite le fait d'être dans l'obligation de créer des rubriques et au moins un article par rubrique afin de mettre en ligne le site oblige à être circonspect, à ne pas s'emballer imprudemment vers une mise en page qui deviendra vite incontrôlable, cf ce blog où je continue à écrire. Un nouveau script pour une nouvelle organisation afin d'établir un silo pour conserver le grain, le protéger de la pluie et des vents, tandis que le meunier continuerait tranquillement sa propre liquidation. L'idée est drôle, un peu ridicule surement c'est pour ça surement que je m'en vais l'adopter.|couper{180}

La notion d'œuvre, le silo.

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Accrobranche, Bram Van Velde, Beckett, Heineken

Long trajet en voiture pour conduire les petits enfants à l’accrobranche de Peyrins. Hier nous avions fait le trajet pour rien car il pleuvait. Peu dormi durant la nuit. Mon épouse prend le volant et je mets les écouteurs pour écouter un entretien avec le peintre Bram Van Velde relaté par Charles Juliet. Je m’assoupis en les accompagnant vers Beckett. Puis l’arrivée sur les lieux. Parcours 1 à 5 complétés. Pique nique frugal, hot-dog à vomir. Ballade ensuite à Pont d’Isère pour retrouver des amis. D’autres enfants sont là, tout le monde à la piscine. Puis quelques conversations. Et à la fin le goût de la bière, une Heineken. Impression d’avoir peint comme un fou toute cette journée. L’envie affleure. Il faut encore attendre.|couper{180}

Accrobranche, Bram Van Velde, Beckett, Heineken

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Le truc et la méthode

Le truc c’est quoi, ce peut être ce que l'on voudra, peindre un tableau, écrire un bouquin, partir dans les iles Kerguelen, vouloir séduire la plus belle fille du monde, devenir roi des Emanglons, aller chercher son pain à l'autre bout de la ville, éplucher une pomme, lire tout Balzac, devenir un crack en maths, redécouvrir l'Arche perdue, apprendre le sanskrit. La liste serait encore longue mais trop fastidieuse à écrire ou à lire. Et d'ailleurs comme on l'a dit peu importe le truc. Le truc n'est pas grand chose, ou beaucoup de choses, selon le point de vue, selon l'idée que l'on s'en fera. En revanche une chose est certaine, c'est qu'il est bien plus difficile d'obtenir ce truc en se livrant totalement au hasard qu'avec une bonne méthode. Cela fait des millénaires que la quête de n'importe quel truc ne se fait plus au hasard, que les méthodes pullulent, parfois bonnes, parfois moins bonnes, d'autres fois encore absolument nulles et qui toutes se vantent de pouvoir vous mener au truc sans faillir. Le cent pour cent de réussite est souvent un argument décisif. C'est à dire que si vous lisez cette phrase sur l'emballage d'une méthode : cent pour cent de réussite, pour obtenir votre permis de conduire, par exemple, il ne vous viendrait pas à l'esprit de douter l'obtenir, si vous l'acheter cette méthode. Surtout si comme de plus en plus il se doit est ajouté le fameux :ou remboursé. Il est donc possible de créer une méthode pour tous les trucs. C’est plus cette méthode qui est intéressante, bien plus que n’importe quel truc. Parlons encore une fois du truc et ensuite basta. On ne parlera plus que de méthode. On fait tous des trucs. C’est un fait. Les faisons-nous bien, peut-être pas. Parfois nous les faisons bien, d’autre fois moins. pour quelle raisons, parce que nous n’avons pas de méthode ou alors notre méthode n’est pas bonne ne donne pas le résultat attendu. Ce qui n’empêche pas de la refaire, toujours la même, on espère qu’un jour ça marchera, on est têtu. Une bonne méthode est une méthode qui conduit au bon résultat, c’est à dire le truc, enfin le truc, hourra le truc ! C’est humain de vouloir faire un truc comme si on pensait être le premier, le seul, l’unique. Rien d'anormal à cela. Surtout chez les personnes seules, peu enclines à converser avec les autres. Les personnes qui sont parvenues par des chemins obscurs à préférer la solitude plutôt que la foule, ou tout simplement l’Autre. Ces personnes là sont tout à fait à leur aise pour inventer de nouveaux trucs surtout lorsqu'elles sont seules. L’erreur bien souvent, est que l’on pense être seul à faire un tel truc, et qu' il n’en faut pas beaucoup pour qu’on pense l’avoir inventé. Voici l’erreur. Et aussi comment un truc original à première vue devient banal sitôt qu’on passe à un regard autre, ou encore des regards qui ne sont pas étonnés, pas attirés, pas intéressés de revoir un truc qu’ils connaissent déjà. Pour pallier l’erreur, se renseigner un minimum sur le truc, c'est un postulat de base. Non pour se dire oh non zut c’est déjà fait j’abandonne, non, mais plutôt pour se dire comme c’est merveilleux que d’autres parlent de ce truc. Qu’en disent ils, comment font-ils, comment s’y prennent-ils. Cela demande deux choses, d’une part de l’humilité, et d’autre part de l’attention. Avec ces deux qualités on en obtient assez facilement une troisième sans effort. Le respect. Le respect pour toutes ces personnes qui se sont regroupées consciemment ou pas autour du même truc que nous. Et ce peut-être aussi bien géographiquement, qu’au cours des âges. Rendez-vous compte. Établir ainsi une liste de toutes ces personnes qui évoquent à des degrés plus ou moins pertinents le truc, voici un préambule utile. On pourrait faire un tour du truc et se demander ensuite s’ils n’ont pas oublié quelque chose. Ou encore s’ils n’ont rien oublié, se demander si une partie ne pourrait pas être développée, voire développée complètement différemment. Une chose aussi qui devrait faire partie du préambule de la méthode pour parvenir à un truc, c'est l'élaboration patiente d'une série de questions concernant notre envie de posséder le truc. Ce qu'on résumera par l'intention. Trouver l'intention n'est pas facile, on se voile souvent la face sur le pourquoi et le comment, mais le pourquoi parfois, si on l'examinait scrupuleusement, pourrait nous éviter bien des peines par la suite concernant le comment. Imaginez que vous vous mettiez en quête d'un truc dont à la fin vous vous rendez compte qu'il vous est parfaitement inutile... que c'est un truc de plus qui ne sert strictement à rien, sauf à vous avoir aidé à passer le temps. Ce qui n'est pas tout à fait rien tout de même mais n'entrons pas dans les digressions philosophiques. Surtout pas. Mais aussi une règle est importante. Ne pas se fatiguer inutilement. Préparer un plan avec des étapes, suffisamment souple tout de même pour laisser une petite chance au hasard qui fait si bien les choses quand on le respecte. Donc la prochaine fois, si je pense moi-même à faire un plan pour parler du plan, nous développerons un peu plus le sujet. Faire un plan utile pour obtenir un truc. Cela promet d'être véritablement passionnant, vous pourriez d'ors et déjà vous en réjouir d'avance, comme si déjà vous aviez dans la paume de votre main un petit morceau de votre truc déjà là.|couper{180}

Le truc et la méthode

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Extrait de Paris France

« Et voici venir de nouveau août et septembre, et de nouveau il y a crise et de nouveau les fermiers, les paisibles fermiers, parlent de la vie telle qu’elle est. L’un des plus paisibles me disait l’autre jour, nous croyions, pas nous, mais tout le monde croyait que c’était les rois qui étaient ambitieux, qui étaient avides et qui apportaient la misère aux gens qui n’avaient pas les moyens de leur résister. Mais à présent, eh bien la démocratie nous a montré que ce qui nuit ce sont les grosses têtes. Toutes les grosses têtes sont avides d’argent et de pouvoir, elles sont ambitieuses, c’est pour cela qu’elles sont parvenues à être de grosses têtes. De sorte qu’elles sont à la tête du gouvernement et il en résulte la misère. On parle de couper la tête des grosses têtes, mais maintenant nous savons qu’il viendra d’autres grosses têtes et qu’elles seront semblables aux premières.Il secoua tristement la tête et retourna à sa moisson.Continuer ne sert donc à rien, sauf pour les étés qui se suivent l’un l’autre et les modes qui accompagnent les saisons. » Extrait de Paris France Gertrude Stein|couper{180}

Extrait de Paris France

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La régularité n’est pas tout.

Quand le ridicule devient une évidence il y a toujours un moment où cette évidence replonge. La vie est un genre de cétacé qui a autant besoin de s'ébaubir d'air que d' abyssales apnées. La régularité est le leitmotiv depuis 2018. Genre de mat auquel on demande à tout l'équipage de nous ligoter pour accéder au rocher des sirènes. Orgueil évidemment que de vouloir remonter à la source du langage, à l'incohérence magistrale qui fonde tout langage. Mais la répétition, l'habitude, la régularité de pratiquer le chant des sirènes, de les voir chaque matin se jeter du haut de leurs rochers, fatigue énormément, et surtout replonge l'être dans son bain d'ennui congénital. Il faut du temps pour lutter contre les béquilles que l'on se donne. Pour avancer. Pour saisir que le rythme de la régularité est un rythme mineur enfoui dans un rythme beaucoup plus vaste dans lequel l'inaction est reine. Le rien faire dit aussi non agir cher aux bouddhistes n'est pas aisé à comprendre. On ne saurait l'attaquer de front sinon justement avec orgueil et vanité. Autant dire l'échec déjà compris dans la démarche frontale. Il faut sentir le vent de l'inaction se lever en soi et ne pas si opposer. Ainsi on pourrait contrebalancer la régularité par des périodes d'inactivités afin de créer un équilibre vraiment digne de ce nom. Ce ne sont pas des vacances, pas des congés, ce n'est même pas une simple pause. C'est un retour volontaire au trouble, à la boue, à la confusion. C'est à partir de là qu'on peut seulement établir une différence utile entre la lumière et l'ombre, non pas en tant qu'opposés mais associés. Ces périodes d'inaction comment les décrire. Elles ne se voient pas, elles ne sont pas visibles, peu démonstratives, c'est une tâche de fond. On continue sur la fréquence de la régularité mais on sent que quelque chose est en train de lâcher peu à peu, le cœur n'y est déjà plus, le sexe non plus, le désir en général tourne à vide. Ce ne sont que signes avant coureurs, que prémisses. Cependant on continue malgré tout. Peut-être qu'avec un peu plus d'honnêteté, un peu plus de courage, beaucoup moins de vanité ou d'orgueil, on pourrait s'arrêter plus vite et s'enfoncer aussitôt dans le trouble sitôt qu'il nait. Il me semble que la durée de celui-ci est directement lié à la manière dont on l'aborde. Il s'agit bel et bien d'une compétence que l'on peut acquérir comme n'importe quelle autre. C'est passer d'une inconscience à la conscience en deux mots. Saisir intuitivement que la régularité est un leurre, conscientiser cette perception, créer ensuite un système, puis l'expérimenter. Cela prend bien une vie voire plusieurs.|couper{180}

La régularité n'est pas tout.

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Peinture et écriture deux espèces d’espaces.

Ernest PIGNON-ERNEST, Épidémies, Naples, sérigraphie, 1988-1995 Entre les notes le silence qui permet la musique. Entre les espaces le vide qui est aussi un espace. Tout n'est-il pas que de l'espace. D'espèces différentes. Et cette différence à quoi sera-t-elle due sinon à l'importance qu'on confère à ces espaces. Une importance liée au besoin nécessairement. Et les besoins changent avec le temps. D'ailleurs il faut être pauvre, une fois au moins, pour comprendre le besoin. Etre dans le besoin, jusqu'au cou. Réorganiser les priorités, le degré d'importance de chaque espace. Ou bien au contraire décloisonner totalement les parois virtuelles que nous installons par convention, faute de mieux , entre chacun de ces espaces, entre chacun de ces besoins, déboulonner la notion de priorité dans ce qu'elle ne correspond plus à ce que l'on éprouve ou ressent de l'espace, du besoin en général. Le va et vient entre deux espaces, mouvement de pendule entre la peinture et l'écriture. Comment l'ajuster pour enfin saisir à force de naviguer de l'une à l'autre, qu'il s'agit du même espace. Qu'il ne peut y avoir au bout du compte que cet espace commun. C'est à dire aucune cloison, aucun mur, aucune séparation. La peinture et l'écriture forteresse unique pour lutter contre quoi. A Aubervilliers 1990, oh le triste souvenir qui passe en habit noir, une bande de copains venait à l'appartement. Ils voulaient tous réussir dans quelque chose. L'un le cinéma, l'autre la photographie, un autre encore dans la vente de véhicules automobiles. Tous ces rêves étaient comme des espaces que nous mettions en commun dans de longues conversations dont seule l'intensité était importante le reste étant sans queue ni tête. L'important n'était pas la valeur de chacun, l'important n'était pas la véracité de leurs intentions, ni la probabilité de réussite ou d'échecs. L'important est souvent là où on ne s'y attend pas. Et toujours en méta position à contempler l'ensemble, je peux encore entendre leurs voix, je pourrais décrire les caractères de chacun tels qu'à l'époque je les dessinais déjà. Dans une solitude permanente, planqué derrière ma bonhommie et ma générosité de façade. Ils étaient une telle curiosité alors. Mais l'important n'est pas non plus cette curiosité. L'important est que déjà chacun parlait de sa solitude à haute voix en se projetant vers un but comme pour dire bon sang il faut un but sinon rien. Certains avaient plus de doutes que les autres. Des doutes sur la validité de ces buts et sur les raisons de les énoncer ainsi aux autres comme pour mieux s'en convaincre je suppose. Des années ont passé et jamais nous n'avons cherché à reprendre contact les uns avec les autres. Comme si tous étaient plus ou moins honteux ou méprisant envers cette période où la nécessité nous réunissait. Honteux, méprisant, déterminés à oublier. Sans doute à cause de l'illusion que l'on ne cesse d'entretenir de notre propre changement. Est-ce qu'on change vraiment ? Je ne le pense pas. En revanche des écailles tombent des yeux chaque année presque autant qu'en automne les feuilles tombent des arbres. Ce qui change c'est surtout la vision, on pense voir un peu plus clair au fur et à mesure où la presbytie, la myopie, l'astigmatisme arrivent à la rescousse de l'être pour qu'enfin il se retrouve qu'il se découvre, qu'il rejoigne l'os. Quand on ne dispose plus d'un capital qu'on pensait infini, on fait un peu plus attention à la façon dont on le dépense. Même la pauvreté est un capital, il faut le savoir. On voudrait tellement qu'il y ait de l'amour là où il n'y en a pas. Il n'y a guère que des contingences et on s'en offusque, voilà la raison souveraine de toutes ces billevesées qu'on nomme effrontément l'amour. Soudain si, pour une raison ou pour une autre, appelons ce genre de chose des raisons, quelque chose s'enraye, que le système de contingences s'écroule, alors apparaissent les vrais visages, encore que vrai et faux n'a pas vraiment d'importance dans cette affaire. Apparaissent des visages étrangers les uns aux autres. Et cette étrangeté entraine un trouble d'autant plus grand qu'on ne s'y attend pas. S'attendre au pire est une règle que j'ai eu depuis toujours, on n'est pas déçu de cette façon. Et quand le pire arrive ce n'est pas une victoire de la raison non plus, c'est un peu plus de lucidité et de tristesse, un vilain quai de gare sous la pluie la nuit, avant d'être emporté dans un train pour je ne sais où par la cruauté, l'humour, la nouveauté et forcément au bout cette étrange grâce qui ne nous loupe jamais et qui nous tombe dessus comme un manteau jeté par un saint quelconque du calendrier. Peindre et écrire ne forme qu'un seul espace mais par convention les séparer est l'usage. L'usage à quoi cela tient-il ? L'usage du monde, l'usage des choses, l'usage des êtres, l'usage de l'espace, tous ces usages dont je n'ai jamais su user en les traversant comme la lame d'un couteau de boucher traverse les chairs les muscles et fend les cartilages, les faisant choir dans la sciure les uns après les autres finement tranchés. Habile pinceau, habile plume, habile langue, habile jusqu'à en être dégouté. Mais parfaitement dégouté, ce qui n'est pas la même chose que dégouté en fuyant, en prenant les jambes à son cou, il faut être encore jeune pour pouvoir s'amuser d'un rien comme ça.|couper{180}

Peinture et écriture deux espèces d'espaces.

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Rêves d’espaces

Pallas Athéna , Klimt. Un rêve c'est peut-être ça, une façon de coller l'œil à la réalité, et de découvrir d'autres réalités si on reste ainsi un moment à regarder. Ce pouvoir de l'œil de tirer partie de l'extérieur pour tisser autant de réalités intérieures qu'on le souhaite ou le désire . Folie de la jeunesse certains disent. Et ils préviennent, longtemps à l'avance, dès le début. —Un jour tu verras que ce n'est pas comme ça. Etre vieux et se souvenir de ce genre de réflexion pousse l' angoisse. Et s'ils avaient raison. Et si tout l'héritage ne consistait que dans cette abdication prévue d'avance, programmée dans le un jour tu verras. Pourtant le rêve, cette intimité que l'on entretient la nuit, avec le monde semble si... vraie, juste, quel est le mot. Cependant on sent exactement dans le corps que plus on vieillit plus le réveil est difficile. Plus on vieillit moins on n'accorde d'importance à la réalité telle qu'on nous la présente. On n'en veut plus de cette réalité, elle ne nous sert à rien cette réalité. Alors on l'oublie. Alzheimer c'est peut-être ça. Une fatigue telle de la réalité serinée qu'on se sera seriné à soi-même. Et tout alors y passe, tous les espaces, tous les êtres, tous les souvenirs, tout est aspiré dans un vide. Le vide de l'oubli. Est-il si vide ou bien est-il occupé par des espaces que l'on ne peut plus partager, que l'on ne pense même plus à partager. Est-ce qu'on peut ainsi reprendre une image, appelons ça un souvenir, et accepter son aspect lacunaire. Tirer même partie de ses lacunes. Quelle image se présenterait spontanément ainsi en déclarant je suis une image incomplète et c'est une chance sache le que je le sois. Une chance pour toi si tu veux me peindre ou m'écrire. Alors qu'assez spontanément le reflexe serait de la laisser filer. Un rêve d'espaces aussi lié à ces images lacunaires, à leur incomplétude même qui forme un passage d'un espace à l'autre. Sous forme de paragraphes assez courts, n'ayant de lien visible les uns avec les autres que leur aspect lacunaire, que leur incomplétude. Ce qui aussitôt fait revenir à cet engouement de 2020-2021 pour les écrits de Jankélévitch, l'histoire de ces deux juifs qui s'interrogent chacun sur leurs destinations. Kiev. —Où donc vas-tu ? — A Kiev. — Tu as quelque chose à y faire ? — Non. En 1988 on m'avait demandé si j'accepterais de prêter quelques jours mes carnets. J'imagine que c'était pour les feuilleter. Impossible de les lire tous il y en avait une bonne quinzaine. L'ami photographe qui m'avait demandé ça était autiste Asperger. A l'époque je l'ignorais. L'eussé-je su cela n'aurait pas changé beaucoup de choses à notre relation. Nous vivions comme des rats, lui à Simplon pas loin un petit appartement, moi à Château-Rouge, petit hôtel avec confort pour une fois. Mais des cafards en veux tu en voilà. Il y avait une épicerie africaine juste en dessous. C'était la cause probable de la vermine avait déclaré la concierge. Je ne me souviens que de peu de choses. Mais ça je me souviens . Prêter mes carnets, c'était encore jouer à Ulysse, prendre le risque de tout perdre. Mais je sentais qu'il fallait le faire à cet instant. Et que m'avait il dit cet ami me les rendant ces carnets. Mais ça avait l'air de l'avoir enthousiasmé. Il allait faire pareil. Le fait de noter deux trois trucs au jour le jour l'avait ébloui, c'est le mot. C'est en lisant l'aspect apparemment décousu de mes petits paragraphes qu'il y voyait un lien avec la photographie. C'était flatteur. Mais pas que. C'était la perception de la vie qui nous entoure. On pouvait donner une forme au bordel. Et à l'occasion peut-être même un sens. Et à l'occasion comprendre que le bordel est un ordre incompris. Incompris par qui, par tout le monde certainement. Parce qu'on n'a pas le temps de s'occuper à trouver un sens au bordel quand on passe toute la sainte journée à le fabriquer. Voilà donc une image et un paragraphe. Avec des lacunes. Et c'est venu comme ça spontanément, sans réfléchir à un ordre quelconque des mots, des idées, c'est sorti du front tout armé comme Athéna voilà. Une incarnation de la sagesse armée de pied en cape. Et on comprend mieux aussi pourquoi il faut qu'elle soit armée quand on est vieux comme je me sens vieux. Pour pourfendre le détail pénible, les digressions qui ne servent qu'à s'embrouiller tout seul dans sa mémoire ou son oubli. Sa propre mémoire et son propre oubli. Et surtout s'y complaire parfois quand on rêvasse. Sauf que là il s'agit d'écrire ce n'est pas la même chose.|couper{180}

Rêves d'espaces

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Le monumental

Dessin d’enfant à l’atelier Agrandir un dessin d’enfant énormément, l’amener à l’échelle monumentale, dans le champs du spectacle. On verrait. Une connerie même monumentale en revanche reste une connerie.|couper{180}

Le monumental

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Le simple est trop simple.

Fabienne Verdier. Trop simple, ne pas en avoir peur. Proposer des exercices pour mettre en doute cette impression de trop simple. Dessiner un cercle, un simple trait… simple, mais bien sûr. À quelle distance du simple êtes vous vraiment ? Quel écart creusez-vous immédiatement dès que vous entendez, lorsque vous prononcez en vous ce mot… tout est dans cet écart, tout l’art d’aujourd’hui. Il suffit de remplacer simple par n’importe quel autre mot, de considérer l’écart, le on dit, la rumeur, puis de faire silence pour tenter d’écrire-agir sa propre définition.|couper{180}

Le simple est trop simple.

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Satiété

Combas Aller au bout d’un désir, d’une envie, d’une lubie est sans doute la meilleure façon de s’en débarrasser. Si l’on considère que le désir encombre. Si l’on découvre cette vulnérabilité en soi de ne pas posséder la patience nécessaire à entretenir celui-ci. Si on éprouve de façon insupportable son appel permanent, l’obsession, la hantise d’un tel désir. Si on détecte, imagine ou éprouve l’effroi du vide qu’est en train d’occuper ce désir. Même si on sait que le désir, celui-là précisément n’est rien d’autre qu’une des nombreuses têtes de l’hydre, et qu’il ne sert à rien de la couper, puisqu’aussitôt deux nouvelles têtes du monstre repousseront. A moins de cautériser la plaie béante à l’aide du feu. On ne peut y parvenir seul, même les héros se trouvent parfois démunis, et il faudra un geste de la Providence pour trouver l’allié pyromane, et tant qu’à faire, en adéquation avec le moment présent. Même sachant, aller jusqu’au bout, et à l’aide de la répétition, résumer la traque en un seul mot : la curiosité. Mot qui presque aussitôt rappelle en nous la faute, le péché, la culpabilité. Jusqu’à parvenir à la forme la plus authentique du dégoût, nommée paradoxalement la satiété. Un désolé je ne peux plus poli et distancié. C’est durant l’écoute d’une émission de France Culture, un entretien avec le peintre Claude Viallat, et concomitamment l’achèvement d’un marathon de 40 jours d’écriture quotidienne que le dégoût s’est transformé en satiété. Trop plein et trop vide se confondant l’un et l’autre. En résulte une incompréhension totale de la volonté d’éparpillement. Volonté si farouche si récurrente, si répétitive qu’on finit par la considérer comme un outil. Une chose nous appartenant, une identité. Le désir de s’éparpiller, présence de l’hydre et confusion totale avec celle-ci et soi sans même en prendre conscience. Pour bien enfoncer le clou le hasard des propositions de Youtube fait suivre une visite de l’atelier de Combas qui monologue complètement speed durant 30 minutes insupportables. Mais supportées par curiosité. Deux peintres, le même désir de peindre, mais deux approches fondamentalement différentes dont la mesure est leur approche du désir et du hasard. Peut-être une relation de pouvoir encore une fois. L’un s’en remet au hasard et l’étudie avec circonspection, l’autre semble possédé par celui-ci alors qu’il imagine le posséder. Deux egos qui abordent la peinture l’un par une intention la plus minimaliste qu’il peut, cette forme d’éponge ou de haricot chez Viallat et l’accumulation des formes, l’exagération formes et couleurs chez Combas. Deux façons apparemment différentes d’aborder le problème de l’espace. Les deux le remplissent cependant. Leur unique point commun s’il faut en trouver un. Leur travail et le mien, imbriqués. Facile de passer de l’un à l’autre techniquement en utilisant tout autant le hasard. Plus attiré en ce moment par celui de Viallat car plus aride. Moins séduisant. Le dégoût de la séduction, une satiété aussi finalement. . Illustration image mise en avant Claude Viallat|couper{180}

Satiété