
Couché tard, levé tôt, sans y voir d’héroïsme. Lecture rapide, pain acheté. Printemps dans l’air, tiédeur approximative. À l’intersection d’un parfum de lilas et de gaz d’échappement, l’idée vague d’une odeur naturelle du monde. Mais existe-t-elle vraiment, cette odeur ? L’hypothèse reste suspendue, comme les particules fines en suspension.
Pas de correspondance, pas de commentaires – ou alors, en mode bouffon, comedia dell’arte version réseau social, le masque comme dernier recours. Repli stratégique et farouche, donc. Retour de F., toujours aussi elliptique. Une phrase, une seule, qui donne envie de la décortiquer pendant des heures pour en extraire du sens – avant de lâcher prise. Tout comprendre n’est pas obligatoire. Faire le boulot et se taire : telle pourrait être la devise non officielle de l’époque.
Apprendre ? Oui, non, peut-être. Si c’est pour devenir prof, tout le monde peut. Mais qui veut encore vraiment apprendre ? Et pourquoi ? Le seuil, cette zone de clarté trouble, revient hanter l’angle de vue. Peut-être une réponse vivante à toute question abstraite. Avancer, donc. Progresser dans un livre comme on avance dans une rue qu’on ne connaît pas. Ne pas chercher midi à quatorze heures. Faire l’oie.
Halcyon Ridge, île secrète ou fiction mal ficelée ? Enquête floue, opacité intrigante. Trop d’infos tue le mystère, ou le confirme. À voir. (Rubrique lectures).
Article de Diakritik sur "qu’est-ce qu’aimer" chez les écrivains". Intéressant. Suite de celui sur P.V., suite attendue, comme une nouvelle saison d’une série sentimentale.
Passage sur Liminaire de P.M article sur Artemisia Gentileschi à l’occasion d’une exposition au Musée Jacquemart André très troublé par la photographie au rayon X de Kathleen Gilje
Grande question : une histoire peut-elle être vécue sans devenir récit ? Longtemps, j’ai vécu mes histoires comme des récits dont je n’étais qu’un figurant vaguement principal. C’était rassurant. Et puis j’avais ce sentiment un peu idiot mais utile d’être un personnage au courant de sa nature fictive, ce qui me donnait un avantage. Peut-être.
Aujourd’hui, nous sommes tous des personnages, jetables comme des gobelets compostables. Les auteurs, eux, s’ils existent, rient sans doute doucement depuis leur banquet céleste, hydromel à la main, regard tendre sur notre agitation.
Dis-moi quel personnage tu fabriques, je te dirai quel genre d’auteur tu es.
Le rebondissement comme problème narratif. Les trente-six situations dramatiques ? Lassantes. Franchir le seuil, c’est aussi laisser tomber cette vieille mécanique. Avancer à tâtons. Homère, s’il a existé, devait déjà le savoir. Beethoven aussi, dans ses silences.
Illustration : Kathleen Gilje : Suzanne et les vieillards au rayon X- Musée national des femmes artistes