jour 1- Émergence
1. D’abord reconnaître ce qui fut connu sans y penser.
L’enfouissement.
La répétition des cycles.
L’oubli.
L’attente.
L’oubli de l’attente.
Mille espérances.
Mille diversions.
Se tenir devant un immense champ de tiges.
Jeunes pousses tremblantes, vacillantes.
Une infinité d’arrachements possibles.
2. Le croire et le savoir se dressent.
Montagnes.
Gouffres.
La fatigue s’en ressent déjà d’avance,
mais quand même y aller.
3. C’est dans l’horizontal, dans le méandre horizontal
en serpentant selon sa nature
sans la forcer
que l’apprentissage de l’inertie s’acquiert.
Immense victoire.
Mais silence.
4. L’étalement permet de sentir mieux la vibration,
d’en apprendre le souffle,
bientôt un autre seuil
entre celui qui sent et ce qui remue en tout
sera franchi.
Pulsation générale
dont on ne sortira pas indemne.
5. Enfin, ce moment plus ou moins long
recréer le mur
la paroi
mais autre.
Ce ne sera jamais plus
ce sera toujours pareil.
Mais on s’y fait.
Jour 2 – Contretemps
1.
Moment où l’on doute du moment, moment d’effroi, moment où jaillit la brûlure du premier ridicule, moment de colère moment de peine, sale moment à traverser
2.
Moment où l’ennui nous sauve du moment moment d’un point de vue, moment désespéré mais tenace moment du naufrage, des récifs, du phare et de la plage
3.
Moment où cohabite blanc et noir chaud et froid pour et contre, moment dilatation-repli
4.
Moment au centre de la terre, encore plus profond d’un moment à l’autre, le moment où l’on voit l’étendue de l’ennui dans ce même moment, avec des stalactites et stalagmites
5.
Concrétion monumentale du moment vers le haut vers le bas où s’épuise la verticale où le désir n’a plus que l’horizon pour reculer
Codicille en deux souffles
Voix pleine
(émergence du sujet dans la tension du moment)
Je ne veux plus chercher le moment comme expérience précieuse.
Ce moment est réel, mais il me blesse.
Il est là, et je veux juste en sortir.
Même le plus plat peut sauver du pire.
Je vis un moment de détresse, mais il est structuré.
Je peux le traverser, à défaut de le comprendre.
Je suis traversé par des forces contradictoires.
Je ne suis ni l’un ni l’autre.
Je suis l’espace entre.
Je suis instable, mais je ne tombe pas.
Je vois maintenant l’ennui comme une chose réelle.
Il est figé, formé, ancien.
Je ne peux pas le fuir, mais je peux m’y déplacer, doucement.
Il n’y a plus rien à espérer d’en haut ni à craindre d’en bas.
Le désir recule, lentement.
Il ne fuit pas.
Il s’étale.
Et moi avec lui.
Voix effacée
(désengagement progressif du sujet, vers la dilution)
Ne plus chercher le moment comme expérience précieuse.
Ce moment blesse.
Il est là, et rien ne le retient.
Même le plus plat peut sauver du pire.
Un moment structuré permet parfois la traversée.
Traversé par des forces contradictoires.
Ni l’un, ni l’autre.
L’espace entre.
Instable, mais sans chute.
L’ennui devient chose réelle.
Figé, formé, ancien.
Non fuyant, mais habitable à faible vitesse.
Rien à espérer d’en haut, rien à craindre d’en bas.
Le désir recule.
Il ne fuit pas.
Il s’étale.
Et quelque chose suit ce mouvement.
Jour 3- un moment pivot
Stop. Sang chair os nerfs et tendons stop !
le mot ment mais mieux beaucoup mieux que le moment de vérité.
le mot ment mais en mentant il dit vrai plus que le vrai.
Moment de retour au moment pour ce qu’il est : un moment entre deux gouffres.
Moment du souffle court.
Moment du cri réprimé.
Moment du silence qu’on roule entre ses dents.
Moment de la rage de dent qu’on traverse.
Moment étudiant la douleur vive de la rage dedans.
( puis moment plateau)
Moment d’apaisement.
Moment de victoire.
Moment de toute puissance.
Moment du hourra.
Moment où le dehors et le dedans enfin sont tenus à distance.
jour-4-Remanence
Moment suspendu.
Moment suspendu dans le suspendu.
Moment au bord du dernier élan.
Moment sans exigence.
Moment où la langue ne sait plus s’agencer mais continue d’être bouche.
Un moment n’a plus besoin d’être compris.
Un moment s’éprouve à rebours.
Un moment redescend les escaliers de la parole.
Un moment glisse sous la peau des mots.
Un moment cherche une place dans l’espace qu’il défait.
Moment d’absence non vide.
Moment pas encore souvenir.
Moment qui insiste, mais bas.
Moment de rien, mais à part.
Moment en-deçà du moment.
Moment qui s’endort en soi.
Moment bercé par son propre balancement.
Moment sans nom qui a eu tant de noms.
Moment qui n’est plus un moment.
Mais qui reste.
Jour -5- Moments sans suite
Moment du mot trop net.
Moment sans souffle.
Moment sans vacillement.
Moment machine.
Moment relu, non pour comprendre,
mais pour y trouver ce qui manque.
Rien.
Moment qu’aucune voix ne rattrape.
Moment réduit à sa surface.
Moment qu’on ouvre et qui expose.
Moment trop nu pour être partagé.
Moment qui se referme.
Non par sagesse,
par instinct
Moment muré.
Moment sans suite.
Moment du mot trop net.
Moment sans souffle.
Moment sans vacillement.
Moment machine.
Moment relu, non pour comprendre,
mais pour y trouver ce qui manque.
Rien.
Moment qu’aucune voix ne rattrape.
Moment réduit à sa surface.
Moment qu’on ouvre et qui expose.
Moment trop nu pour être partagé.
Moment qui se referme.
Non par sagesse,
par instinct
Moment muré.
Moment sans suite.
Moment où le silence est seul possible.
Moment, enfin, de la seule lutte qui vaille :
une haine propre
une maladresse