Je ne raffole pas des descriptions littéraires. Et cela m’ennuie d’être ennuyé par si peu.
Mais il est vrai que sitôt que l’on commence à me décrire un personnage, un lieu, un bouquet de fleurs, et même une scène de cul, je baille désormais.
Le bâillement est une chose formidable dont on ne parle presque jamais de la bonne façon, c’est-à-dire pour en constater et en relever les vertus.
Plus je vais vers la fin, plus je fais attention à mes bâillements. Plus je m’y fie. Et qu’on ne vienne pas me dire que c’est un phénomène digestif, je vous en prie, pas d’enfantillage. D’ailleurs, même si ce n’était que cela, et puisque désormais l’intestin est considéré comme notre véritable cerveau, tout bâillement devrait appartenir à la sémantique du colon, à son vocabulaire, et à sa syntaxe.
Je trouve que flanquer des descriptions dans une histoire, c’est tricher et se moquer des lecteurs. C’est les prendre par la main en disant : viens voir par là, je vais t’en narrer une bonne que tu vas en rester bouche bée durant 300 pages, alors qu’en vrai, 50 auraient largement suffi pour énoncer cette somme de stupidités.
Sans compter évidemment ce désastre écologique dû à la description : toutes ces forêts dévorées par des bavardages débiles si souvent.
Je me demande si, quelque part, on ne pourrait pas parler de masturbation collective qui s’effectuerait ainsi en douce et à la barbe de l’Église via la littérature descriptive.
Il faut être deux pour danser le tango, bien sûr : l’auteur et sa lectrice, l’autrice et sa lectrice, les auteurs et leurs lecteurs.
Mais on a déjà la télévision pour cela, me semble-t-il. Je veux dire, pour sombrer dans l’onanisme en fin de journée en avalant des chips et des cacahuètes. Faut-il vraiment en rajouter ?