Double Voyage – Vers un objet littéraire
notes d’avril 2025
Il s’agit d’une réécriture de textes de 2023, issus d’un atelier d’écriture au long cours. C’est un ensemble. Ce n’est pas encore, pas tout à fait, un "objet littéraire". Mais ce n’est plus seulement un exercice non plus.
La première question que je me suis posée après avoir rassemblé et réécrit ces fragments a été celle de l’intention du cycle. Qu’est-ce que j’ai réellement raconté ? Et pourquoi ? J’ai alors formulé cette phrase qui me semble en résumer l’élan :
« Ce que je vis n’est pas ce que je raconte — mais ce que je raconte me dit qui je suis. »
À partir de là, l’idée d’une structure sous-jacente, d’une trame discrète, s’est imposée. Ces motifs récurrents, presque souterrains, forment une base que je pourrais creuser davantage, pour faire passer ce matériau d’atelier du côté d’un livre. Voici ces lignes de force :
1. Figures paternelles et filiations fantômes
Pères disparus, absents, énigmatiques — Johannes Musti, Vania, ou encore le père nageant au loin. Autant de figures qui hantent, structurent ou désorientent le narrateur. Une lignée qui s’écrit à rebours, dans le manque ou l’hypothèse.
À creuser : interroger la filiation comme mythe personnel, et ce que l’écriture tente de réparer ou de réanimer.
2. Retour au lieu / Répétition du trajet
Montée du Cluzeau, stations d’autoroute, passages rituels — les lieux reviennent comme des refrains. Ce sont des balises temporelles, où mémoire et présent se télescopent.
À travailler : faire du lieu un personnage, ou au moins un révélateur.
3. Objets-souvenirs et indices matériels
La photographie en blouse, la Simca 1000, le béret rouge, les médailles, les carnets — autant d’objets à la fois ordinaires et magnétiques. Déclencheurs d’histoire, ou conservateurs de secrets.
À exploiter : construire un récit éclaté où chaque objet devient chapitre, seuil ou relique.
4. Boucle du départ avorté
On s’apprête à partir, mais quelque chose bloque. Le voyage ne cesse d’être différé, retourné, contourné. On tourne en rond, mais chaque boucle creuse plus profond.
À relancer : envisager une forme cyclique ou labyrinthique, où l’immobilité devient mouvement intérieur.
5. Mélancolie du temps flottant
Hiver, février, enfance, dimanche. Une temporalité suspendue, diffuse. Le récit s’écrit comme à l’intérieur d’un dimanche sans fin, entre ressouvenance et impossibilité d’agir.
À intégrer : travailler les silences, les blancs, le rythme lent — écrire dans le ralenti.
Peut-être qu’un livre naîtra de là. Ce n’est pas certain, mais c’est possible. Ces textes en portent déjà les linéaments. Ils cherchent leur forme, se languissent de leur nécessité.