21 août 2024
Penser librement, confinements, paix au sein des catastrophes, creuser, action et contemplation, nettoyer son colon, le taureau ennui, une cause possible de la maladie d’Alhzeimer, travail et abondance
Lecture de Penser librement d’Hannah Arendt cette nuit et matin, notamment l’essai sur Nathalie Sarraute et travail, l’oeuvre, l’action. Ce qui me ramène à la lecture très ancienne de Dostoievsky- notamment à partir d’un livre de René Girard ( peut-être critique dans un souterrain ) et bien sûr de Kafka, le Journal puis, sans enchaînement à 2019, à la pandémie de Covid. Le fait est que je commence vraiment à reprendre l’écriture quotidienne régulièrement à partir de ce moment-(octobre 2019 ?) Le résultat sera la publication de Propos sur la peinture, un ensemble de textes mis bout à bout rédigés sur peinture chamanique entre 2018 et 2019. Ouvrage mal fagoté, qu’il faudrait reprendre et améliorer ou bien complètement oublier. L’isolement social obligeant à « faire » absolument quelque chose de soi pour ne pas sombrer. Il y a aussi eu les vidéos sur la chaîne YouTube, plusieurs fois par semaine parfois. Une sorte de fébrilité, d’euphorie. Surtout lors du tout premier confinement. Dès le second, la lassitude, l’angoisse, notamment liée au fonctionnement de l’atelier, aux charges, me tombent dessus. Au troisième confinement, j’ai arrêté de publier des vidéos, me suis retiré des réseaux sociaux.
Je ne me souviens pas de ce que je lisais durant ces divers confinements. Il faudrait revenir dans les textes de 2019, rechercher les divers auteurs auxquels je fais référence, je ne me souviens pas d’avoir cité Arendt, pas plus que Sarraute. Peut-être que j’avais aussi écarté toute lecture à certains moments. Volonté farouche, renforcée, de penser par soi-même, et c’est aussi à partir de là que s’est le mieux exprimée ma capacité à douter. Douter de toute vérité sur quoi s’appuyer afin de conserver à ses propres yeux une illusion d’importance notamment.
La nuit, il m’arrive d’assister à des cataclysmes au cours desquels je suis emporté comme un fétu de paille. À ces instants, je n’offre pas vraiment de résistance, me laisse emporter et c’est presque un soulagement, une libération. La même importance qu’un brin d’herbe, l’éprouver physiquement, ou d’un cachalot, mammouth, fourmi, la même, comme c’est apaisant. Au centre de l’effroi, éprouver soudain cet apaisement est proche d’une grâce. Encore que je réinvente un peu en l’écrivant, il s’agit bien plus d’une sensation qu’on éprouve le matin au réveil. Celle de n’avoir pas plus ni moins d’importance que n’importe quelle créature ou chose. D’une certaine façon, découvrir ou sentir que l’on est tout à fait à sa place, qu’il ne peut y en avoir une autre, au sein même des catastrophes. La fatigue y est sûrement pour quelque chose. Avec celle-ci, l’examen de sa propre idée d’importance se relativise. On découvre qu’on n’est pas tenu de supporter ce poids, qu’on peut baisser la garde, atteindre une légèreté, comme une apesanteur. C’est une erreur cependant de penser qu’on peut résider longtemps dans cet état, de s’y réfugier, d’en faire une forteresse ou une sinécure. Rien ne dure que le changement d’état, le défilement des images, des pensées, des rêves ; l’infini tire son origine de ce changement. L’enfant le sait de manière naturelle, il ne sert pas la main quand on lui donne, il ne veut pas saisir, il n’en comprend pas l’utilité, la raison ; il n’exerce pas de pression, sa main glisse de l’autre main, d’une main à l’autre, sans réfléchir. Il en est de même du regard des nouveaux-nés et des animaux, à la fois candide et sage, il ne se fixe jamais bien longtemps dans un autre regard.
F. parle souvent de creusement. Écrire et creuser, creuser et écrire. De mon point de vue, souvent l’impression de ne pas creuser suffisamment, de rester trop à la surface, dans une superficialité. Il en ressort des sensations désagréables, liées à toute une partie de ma scolarité, avec les notations en rouge dans la marge. Le fameux « peut mieux faire ». Ou encore « élève moyen, ne travaille pas suffisamment, dissipé ». Possible qu’à un moment, fatigué d’entendre ce jugement, je me sois mis à creuser sans le savoir, et surtout à creuser ce que nul ne désire qu’on creuse. Tous ces ressorts ignorés, ceux qu’on ne veut surtout pas voir : l’avidité, la concupiscence, l’ambition, la vanité, le pouvoir, la vulnérabilité des espoirs, l’orgueil lié à la désillusion. Ce que j’en ai fait, un trou immense, mais je ne me suis pas jeté complètement dedans, suis resté sur le côté à contempler le remblai, hypnotisé, sidéré par la tâche effectuée.
La fatigue provient aussi de voir toute la capacité mal utilisée, ou qu’on n’utilise pas. La fatigue vient du fait de se heurter toujours au même mur, que l’on pourrait facilement confondre avec celui des Lamentations. Mais il me semble que j’ai dépassé le cap de me lamenter depuis un bon moment. Celui qui est derrière ce « je », il ne se lamente plus, ils liront cela et ils ne le comprendront pas bien sûr. Ils diront que la fatigue l’a terrassé, qu’il n’a pas su ou voulu remonter la pente, qu’il ne sait pas rebondir. Ils diront tout ce qu’ils disent dans ces cas-là bien sûr et qui les fonde. Et certainement je continue à creuser à ma façon sans trop les entendre, ils sont comme un bruit de fond nécessaire.
L’épuisement mène probablement à une forme de contemplation. Peut-être que toute vie active trouve sa finalité dans la contemplation. Ce qui n’est évidemment pas toujours le cas. On peut vivre une vie active et en mourir tout simplement, comme on peut exercer des travaux subalternes, seulement alimentaires, et se mépriser soi-même de n’avoir rien produit d’autre pour la communauté qui la modifie voire l’améliore. Et ainsi passer loin de l’étape contemplative. Ou fausser cette contemplation en l’entâchant de ressentiment, ne plus contempler qu’un désastre personnel. Ce qui n’est pas loin de la définition de l’ennui selon Alberto Moravia : une relation figée avec le monde sans comprendre que le monde est ici soi-même.
Dans l’autre sens il paraît impensable qu’on puisse vivre uniquement dans un état contemplatif. Ce serait contreproductif. Il semble intéressant de poser le concept de fatigue comme intermédiaire entre la vita activa et la vita contemplativa. La fatigue permet de gommer toute distinction de tâches, d’en réduire leur singularité, leur vilainie ou leur noblesse, peu à peu- et ce quelque soient leurs différences , leurs hiérarchies ou leurs formes- cette illusion qu’il peut y y avoir des activités plus nobles que d’autres, plus profitables, intéressantes etc. la fatigue le gomme. Par la fatigue du monde, du siècle on peut ainsi pénétrer dans une forme de dégoût proche de la contemplation, bien loin de l’ébaubissement. Le dégoût permet ce genre de considération au sens étymologique du terme. Voir le pot aux roses plus que l’ensemble des constellations. Et on peut parvenir à cette considération sans en être sidéré, tout dépend du degré de lassitude atteint, de ce qu’elle nous fait perdre d’égoïsme, d’égocentrisme, de vanité, d’illusion. Il faudrait encore de nombreux paragraphes pour tenter d’élucider- si tant est que ce soit à la fois possible sinon nécessaire, les diverses qualités de contemplation ; au même titre que les divers qualités de fatigue. Au final ce n’est que coup d’épée dans l’eau, ça ne sert pas à grand chose, c’est inutile, d’autres s’en sont probablement chargé et mieux que je ne peux le faire. La fatigue mène à la non préférence, à une forme de détachement qui n’est pas pour autant de l’indifférence véritable . La fatigue nous éjecte d’une fréquence, nous transporte vers une autre, rien d’exceptionnel vraiment de le savoir, c’est même parfaitement complètement inutile de disserter sur ce sujet, bien trop fatiguant.
Encore une hypothèse. La paresse du côlon qui n’en peut plus de conserver les détritus d’une vie de bâton de chaise. On croit qu’on est tout esprit, on se trompe, les intestins ont aussi leur coup de mou. Ce que l’on absorbe et digère mal reste coincé dans les parois, diverticules et diverticulites ; pas étonnant que la merde nous monte au ciboulot à ce train-là, la merde et la fatigue évidemment. Un peu de gingembre dans un verre d’eau bouillante, touiller, ajouter un peu de citron (jaune ou vert, c’est sans importance) et boire le matin avant le café. En quelques jours, si la fatigue ne disparaît pas avec ce traitement, regardez votre bulletin de naissance, calculez votre âge ; la magie a aussi ses limites, ses lassitudes.
2h54. le 21 août. Les petits reviennent aujourd’hui. S va les chercher au train de 14h à Lyon Pardieu. Ils restent une semaine. Le programme est déjà fait pour les occuper, qu’ils ne s’ennuient pas trop. Cette peur de S. qu’ils s’ennuient n’est pas la mienne. Au contraire il faut s’ennuyer surtout enfant, c’est mon avis, prendre dès le plus jeune âge ce taureau par les cornes et apprendre à sauter par-dessus, à s’en amuser.
Fatigue d’une certaine vision du travail, qui se présente souvent comme une forme de torture. Torture que l’on s’inglige à soi-même d’abord pour pouvoir subvenir à ses besoins essentiels. Il faut apprendre à gagner sa vie ainsi, si possible sans se singulariser du groupe, respecter autant qu’on le peut qu’on le supporte cet héritage constituer de mots d’ordre. Rentrer dans le rang, se faire discret, , que rien ne dépasse. Ne pas se faire remarquer. Rester modeste. Ce qui finit chez certaines natures à produire une rêverie négative. On fomente des projets que l’on reporte toujours à plus tard, quand ce sera le bon moment. Ensuite on reporte ce moment idéal en fin de carrière, quand on sera en retraite. Or souvent quand arrive cette fameuse retraite, on se rend compte de la véritable nature de ces rêves, ils ne sont présent qu’à l’état de ruines, d’une impossibilité ou impuissance mise à jour. On regrette de n’avoir pas été capable de plus, de s’être soumis à l’ordre des contingences sans rechigner autrement que classiquement, en ronchonnant mais en courbant l’échine ce faisant.
Bien sûr si l’on construit un foyer, une famille, il est aussi dans l’ordre des choses de s’en trouver plus ou moins satisfait. D’y puiser la raison principale d’un tel oubli de soi. Espérer s’en contenter. Tout dépend aussi de ce que l’on a investi comme quantité de frustrations, d’espérances dans la perpétuation de l’espèce. La déception ici encore nous en apprend sur ces espérances, comme autant de gants retournés de notre propre paresse, impossibilité, impuissance. Beaucoup de vieillards aigris, voilà ce que produit cette société qui promet monts et merveilles via des réclames, des mondes virtuels, des jeux vidéos ou olympiques. La fatigue se mue en récrimination, en colère, voire en haine. La haine de l’autre n’est rien d’autre que de la haine de soi que produit le fait de s’être laissé berner depuis la communale jusqu’à l’EHPAD. Si l’on veut trouver un remède à la maladie d’Alzheimer, peut-être qu’il faut commencer par saisir ce mouvement imposé par toute une société et dont la seule issue est de se réfugier dans l’oubli.
Constate que c’est un véritable roman-fleuve, sans doute ce flot provenant de l’euphorie d’avoir trouvé un sujet. Et ainsi je m’en prends à ce sujet comme un patron à son ouvrier, le pressant comme un citron. Honte à moi, une fois de plus. Et bien sûr fatigue en retour, une telle fatigue que je n’arrive pas à dormir. Pourtant, même si les trois quarts de ce qui s’écrit ne vaut pas grand chose au regard de la littérature- telle que je porte au nues, quelque chose me dit qu’il faut en passer par là, ne pas encore me réfugier derrière le prétexte que ce texte ne serait qu’un vulgaire brouillon sans intérêt, par exemple. Ce sont souvent des pensées récurrentes masquant de plus en plus mal désormais ce renoncement à obtenir confiance en soi. D’une certaine manière la confiance est déjà là- sinon je n’oserais rien publier sur ce blog. Et la confiance signifie surtout peu importe que ce soit bien ou mal, littéraire ou pas. La fatigue de se réfugier dans ce manque de confiance, dans ce sabotage permanent, est-elle là à l’origine ou est-elle un produit de ce mécanisme. Bien difficile de le discerner. Autant que de savoir qui en premier de la poule ou de l’oeuf. Ce que je creuse au bout du compte dans le texte d’aujourd’hui il me semble que c’ est aussi une idée toute faite de candeur, de naïveté- ces idées toutes faites qui, en général, font rebrousser chemin parce qu’elles ont tant l’air de clichés, de choses déjà vues et revues, du désagréable en fait.
Hannah Arendt dans son essai le travail, l’oeuvre, l’action établit un distinguo entre travail et oeuvre. Le travail appartenant au lien intrinsèque homme-nature, nécessaire biologiquement, et dont le cadre se borne à la répétition, à l’aspect éminemment cyclique. « Le travail produit des biens de consommation et travailler et consommer ne sont que les deux stades du cycle éternel de la vie biologique. Ces deux stades du processus vital se suivent si étroitement qu’ils constituent en somme un seul et même mouvement : à peine terminé, il faut le recommencer du début. Le travail, contrairement à toutes les autres activités humaines, est placé sous le signe de la nécessité, la « nécessité de subsister » dont parlait Locke, ou « l’éternelle nécessité imposée par la nature » dont parlait Marx. En conséquence, le but réel de la révolution chez Marx n’est pas simplement l’émancipation des classes travailleuses ou laborieuses, c’est l’émancipation de l’homme du travail. Car « le règne de la liberté commence seulement à partir du moment où cesse le travail dicté par la nécessité […] ( Karl Marx, Capital, III, fragment : « En matière de conclusion », traduit par M. Jacob, M. Subel, S. Voute, in Œuvres, t. II : Économie, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1968, p. 1487.)
Le fait de persister à écrire de si longs textes tient plus d’une forme d’euphorie lié à un imaginaire du travail plus qu’à un imaginaire de l’Oeuvre. L’abondance associée à cette idée de travail puise sa source directement dans l’abondance de la nature. La nature est généreuse par définition puisque qu’elle incarne le flot, le cours des choses dont on ne sait ni où il prend sa source ni où il s’achève. Le travail perçu de cette façon se rapproche d’un fleuve. Ce qui soudain vient se heurter à cette pensée est le mot « carrière », faire carrière. Il me paraît soudain saugrenu d’associer le mot carrière et le mot oeuvre. « L’œuvre de nos mains, distinguée du travail de notre corps, fabrique l’infinie variété de choses dont la somme totale constitue l’artifice humain, le monde dans lequel nous vivons. Ce ne sont pas des denrées destinées à la consommation, mais des objets dont l’usage ordinaire ne provoque pas la disparition. Ils donnent au monde la stabilité et la solidité sans lesquelles il ne serait pas assez fiable pour héberger cette créature instable et mortelle qu’est l’homme » écrit encore Arendt. Autrement dit, une paire de chaussures n’est pas une baguette de pain. Si je ne m’en sers pas, si je n’en fais pas usage, elle ne s’use pas. Le but se tient dans l’idée d’une durée. N’est-ce pas la même chose pour un texte, un livre, un tableau, une symphonie. De toute évidence la durée de l’oeuvre quelle qu’elle soit ne peut rivaliser avec l’infini, l’éternité. Mais une baguette de pain se fabrique pour être consommée le jour même, elle n’a pas même le temps d’entrer dans l’usage qu’elle n’existe déjà plus.
Pour continuer
Carnets | août 2024
31 août 2024
Toutes ces émotions m’ont creusé. Il le dit, il répète la phrase en boucle plusieurs fois, essaie d’en rire, mais ça ne passe pas. Le rire reste bloqué quelque part entre l’intention et la gorge. Comme si on pouvait s’imposer l’intention de rire ; alors, il en serait là encore, à tout vouloir contrôler, y compris ses rires. Il dit que les émotions l’ont creusé, et bien sûr, si vous le regardez, il vous convaincra : ce ne sera qu’un trou, une béance, et ce trou risque bien de vous aspirer totalement, sans rire. On dirait qu’il a une tête de donut. Est-ce qu’on a envie d’envoyer une beigne à un donut, même pour rire, même pour qu’il nous fiche la paix, même pour le jeu de mots ? Je n’en sais rien, c’est drôle cette question, je ne m’y attendais pas, je suis même surpris de constater que quelque chose, encore, peut se poser ce genre de question. Cela ressemble à de la distraction, n’est-ce pas, un petit loisir que l’on prend en douce, pas vu, pas pris ? Et quand il parle d’émotions qui l’ont creusé, de quoi parle-t-il vraiment ? On se le demande, vous n’êtes pas d’accord que c’est difficile à saisir ? Ce qu’on nomme les émotions, c’est toujours une façon de botter en touche, de répondre à côté, comme ces femmes qui demandent encore « À quoi penses-tu ? » alors qu’elles savent que les hommes ne répondent pas à ce genre de question. Et s’ils n’y répondent pas, ce n’est pas toujours en raison de l’intrusion que représente cette question, c’est tout simplement parce qu’ils ne le savent pas eux-mêmes. « Toutes ces émotions m’ont creusé », c’est ce que l’on dit quand on a faim ; ils disent ça dans les familles, après les mariages, les enterrements. Il faut vraiment un événement particulier pour voir à quel point une émotion est une dépense d’énergie, souvent en pure perte. Pour rien, on se met soudain à rire, à pleurer, à danser, à courir, ou encore à se vautrer sur un canapé, à s’écrouler sur un lit. Si ce n’était le fait qu’il faut remplir le ventre tout de suite après, toutes ces émotions ne serviraient à rien, comme vivre ne sert à rien au bout du compte si vous calculez bien, si vous n’omettez aucune virgule, si vous n’oubliez pas les retenues : la vie ne sert à rien, sauf à la vie elle-même. Et donc ces tablées sont aussi là pour s’en remettre, pour s’empiffrer, s’en foutre plein la lampe. Écoutez-les comme ils en parlent, il faut qu’ils usent même d’un certain mode pour en parler, ce laisser-aller à s’en faire péter la sous-ventrière, ils disent. Ils le répètent même plusieurs fois entre eux, comme pour se rassurer qu’ils sont tout à fait dans leur bon droit. « Toutes ces émotions nous ont creusés, il faut qu’on baffre pour se retaper, ne pas se laisser aller tout en se laissant aller. » Allez donc y comprendre quelque chose, surtout quand partout autour de vous, vous ne voyez que des donuts, des bouches grandes ouvertes à la façon de ces créatures marines abyssales, biofluorescentes, toujours affamées, et qu’on ne trouve que dans la pleine obscurité des fosses océaniques d’on ne sait quelle lucidité ou bêtise. À cette profondeur, j’y pensais tout en l’explorant régulièrement : tout ne se vaut-il pas ? Tout n’est-il pas identique vraiment ? Et n’est-ce pas de là que vient l’effroi quand on revient à la surface des mots, qu’on désire les nommer ? On peut se le demander. Et quand on n’arrive pas encore à poser des mots, on sent ce trou, ce donut qui nous aspire. Et ce serait puéril de ne penser à ce symbole uniquement comme américain, colonialiste, impérialiste. Ce serait ridicule, étriqué. Ça parle de tout autre chose, de bien plus affolant, des gens comme vous et moi, j’allais dire. Et pire encore, ça parle de moi, ça ne parle peut-être que de moi. Pas question de les faire douter du bien-fondé de leur appétit, ce ne serait pas loyal. Après tout, ils n’ont souvent que ça pour tenir. Perdre l’appétit serait pour eux le pire de tout. Ils le disent entre eux à mi-voix, elle ou lui ne va pas bien, il ou elle a perdu l’appétit, c’est l’un des premiers signes avant-coureurs d’une fin qui dame le pion à la faim. On n’éduque pas les gens sur la faim, pas vraiment, ou si peu. Au contraire, on leur demande de consommer autant qu’ils le peuvent, avec cette hypocrisie à hurler, quand on y pense, les jours de promotion pour soi-disant lutter contre la vie chère. Il faut les voir, et je me mets bien sûr dans le lot, je ne suis pas exempt, je fais bien partie de cette entourloupette magistrale, celle des caddies à remplir, des caisses enregistreuses, de la profusion apparente de marchandises qui déborde de partout. Et ce n’est pas tout. Regardez ces emballages, c’est incompréhensible. C’est stupéfiant. L’emballage plastique transparent des biscottes par exemple, indéchirable avec les mains, essayez donc les dents, c’est un risque, avec le temps on repère le tiroir où sont rangés les ciseaux, il faut des outils pour s’en sortir, surtout quand on prend de l’âge. Il a dit qu’il voulait perdre du poids, je me souviens très bien que c’était en plein milieu de l’été, ça ne s’oublie pas des choses pareilles, ce sont des choses qu’on dit surtout l’été je crois ; quand il s’agit d’aller à la plage, d’ôter sa chemise, son pantalon, de se mettre presque à nu au milieu des foules, juste pour se préparer à aller se baigner, à rentrer dans le bain. Pourtant, on ne peut pas dire que les regards se portent sur lui, on serait même tenté de penser que tout le monde s’en fout qu’il soit gras ou maigre, et surtout vieux, mal fichu, chauve, d’une vulnérabilité agaçante après avoir mené le monde où nous en sommes, à cette débâcle, à ce naufrage. Plus aucune tenue, le voyez-vous, mais regardez-le, c’est exactement ça que l’on éprouve à le voir se débarrasser de ses vêtements, à apercevoir ses bourrelets, son gras, son terrible laisser-aller de baby boomer. On est pris entre deux feux, l’hypnose, la sidération ou la fuite. Mais c’est encore lui qui pense à ces choses-là, autour de lui tout le monde s’en fout, tout le monde a bien autre chose à penser, et si possible à ne pas penser. Si lui est distrait par le moindre geste, force est de constater avec un peu d’honnêteté qu’il est vraiment le seul à être ainsi distrait. Peut-être que c’est la goutte qui fait déborder le vase, qui lui fait prendre conscience de sa tronche de donut, il est gros mais de vide, c’est évident désormais, comme son père, et son père avant lui, le vide autour des reins comme un rempart, et les femmes ne sont pas loin d’être leurs semblables, elles semblent composées d’un même vide, même s’il semble plus inoffensif, plus enveloppant, plus maternel, et que ce vide est un peu mieux réparti sur l’ensemble de la silhouette, qu’il rappelle des figures tutélaires de l’abondance, des moissons, des récoltes, d’une opulence fantasmée. On pourrait si facilement oublier tout ce vide dont ces pensées, ces émotions sont composées. Quand Marcel Proust décide de devenir ascète, ce n’est pas une lubie, c’est qu’il ne peut pas faire autrement. Peut-être qu’il en arrive là par fatigue, par dégoût, par toute une série de termes tellement spontanés, si faciles à poser sur ce mystère ; on pose toujours des mots pour évacuer quelque chose, pour tenter surtout de l’évacuer. Il n’y a qu’à entrer dans une bibliothèque, se rendre au rayon P, et constater à quel point et avec quelle quantité, beaucoup ont essayé d’expliquer ce mystère. Et voyez-vous comme c’est drôle, étrange surtout, drôle dans ce sens-là, que plus il y en a, moins on y comprend quelque chose, plus on s’y perd au final. Cette abondance, au final, est un signe de pauvreté crasse, exactement le même que l’abondance des supermarchés. Donc il y a des leçons à tirer de ces observations ; ce n’était pas l’intention de départ, mais ça arrive avec le fait d’examiner toutes ces choses, de leur prêter une attention accrue, de se distraire de tout le reste si l’on veut. C’est l’un des avantages de cette fatigue que de pouvoir se concentrer en un seul point en évacuant tout le reste. Avec toute la pression, toute la culpabilité, la honte qu’on en éprouve. Ensuite, tout est dans l’objet de cette concentration, entre dévoration et adoration, une navigation c’est certain, et la découverte de l’intérieur et de l’extérieur se confondant eux aussi dans un point le plus infime possible. C’est sans doute cette image d’un point qui diminue de plus en plus au fur et à mesure qu’on s’en approche qui fait perdre l’appétit, qui rend vaine la sensation de satiété, solution trop facile, on le sait désormais, pour stopper l’impression de vide, de faim, de désir, de concupiscence, toute cette violence inutile.|couper{180}
Carnets | août 2024
30 août 2024
Retour au gribouillis L’intelligence lui faisant défaut, ou exigeant de sa part un trop grand effort, ou les deux, il tourne à vide. Il lui faut une occupation, l’oisiveté étant la mère de tous les vices. Dessiner et écrire sont les premiers mots qui lui viennent quand il s’agit de s’occuper. Sauf qu’il ne sait pas vraiment comment s’y prendre. On lui a dit qu’il dessinait mal quand à l’écriture il vaudrait mieux que tu évites, tu n’y connais rien, et puis il faut une certaine maturité pour écrire, plus tard quand tu seras grand, peut-être, si tu ne changes pas d’avis d’ici là. Fâché par la situation, il a prit une feuille de papier et il gribouille, parce que le gribouillis c’est l’enfance de l’art se dit-il. Il est épuisé, il refuse tout en bloc, il ne veut plus rien entendre. Il gribouille. Ici est le lieu de l’origine, celui du dessin comme de l’écriture. Imaginaire de la lecture On l’a fait s’asseoir, assis-toi ici et ne bouge plus. Il a du mal, surtout au niveau des jambes. C’est nerveux. Calme-toi. Maintenant parle moi de ton envie de lire, parce que nous voyons bien qu’il y a un problème. Tu n’arrètes pas de dire que tu veux lire, mais tu passes ton temps à regarder des vidéos idiotes. Tu t’en rends compte j’espère. C’est comme si tu voulais gravir une montagne et que tu creusais un trou pour t’enfouir dedans, tu espères quoi trouver la mer au fond du trou , la Chine ? Tout ça est effectivement du chinois, ou de l’hébreu pour moi. La montagne et la mer ne sont que des mots, ils ne veulent rien dire que ce qu’on m’impose de vouloir en dire. Laissez-moi tranquille ! je préfère gribouiller. Au moins dans mon désordre la montagne et la mer ont un sens, et peu importe que ce soit le même que soleil et terre. Origine du refus Tu as le diable dans la peau. c’est ce qu’on ne cesse de lui dire de lui rappeler. Il est effrayé par cette remarque. Il s’enferme dans les toilettes. Ici sans doute peu de chance que le diable vienne le déranger. En même temps qu’il essaie de se rassurer il sent que son raisonnement n’est pas très solide, il doute, le diable peut-il lui tomber dessus ici aussi ? il n’en est plus du tout certain, l’insécurité envahit le monde entier. Puis il réfléchit encore plus loin, si le diable est partout, que veut dire la phrase tu as le diable dans la peau, qui signifie qu’il serait le seul à vivre cet inconvénient. Depuis il a décidé de tout refuser en bloc de ce que les adultes lui disent. Il n’en croit plus un seul mot. Pour occuper la place vide à l’intérieur de lui désormais, cette place que tous cherchent à remplir avec choses qui lui paraissent stupides ou inutiles, il prend une feuille de papier, un crayon et il gribouille. Suite logique Même dans ce lieu dit d’aisance tout est susceptible de mal tourner. On peut se retrouver constipé ou au contraire être victime de colliques, de diarhées. Mais malgré tout on y retourne, c’est une nécessité biologique. Donc ce sera un second chez lui en quelque sorte, en attendant que ça vienne, que le diable lui tombe réellement dessus ou que Dieu le sauve, il va dessiner et écrire comme ça lui chante et tant pis si ça ne veut rien dire, si ça ne représente rien, si ça ne ressemble à rien. Il s’enfuit dans la non représentation des choses volontairement peu à peu. Un trésor caché dans la merde Plus tard quelqu’un a dit que la merde était chaude, qu’elle était confortable, qu’on pouvait être une autruche et s’en sentir tout à fait bien. C’est ne pas tenir compte de la logique. On ne se met pas dans la merde par plaisir ou par goût. C’est qu’on ne peut pas faire autrement, c’est le seul endroit qu’il nous reste. On n’arrive pas à imaginer surtout un autre lieu que celui-là. Avec le temps ce n’est pas que l’on s’habitue à la douleur, pas plus qu’à l’odeur, mais comme on n’ a rien d’autre à faire qu’à explorer ce lieu, on y découvre forcément des choses. Peut-être que dans cet isolement on trouve une sorte d’issue aux grands problèmes de la société, peut-être qu’on parvient à envisager celle-ci sous un autre angle. Un lieu propre si l’on veut en apparence et qui peut même faire envie de s’y rendre, comme on se rend après une défaite, un combat sans espoir. Peut-être qu’une forme de compassion peut aussi advenir d’un tel constat. Ils sont dans la merde mais ils ne le savent pas.( Sans doute qu’il faut aussi dépasser la vanité de penser à ce genre d’imbécilité) . La société n’est pas une sinécure c’est la vérité mais c’est tout même un espace plus vaste qu’un cabinet de toilettes, de plus ça ne sent pas toujours mauvais, il ne faut pas tout voir en noir.|couper{180}
Carnets | août 2024
29 août 2024
Espace carré, temps circulaire. Un mur semble absent formé de rien de vide de nuit et d’air « Cette quatrième surface est en quelque sorte pratiquée dans l’air, elle permet aux paroles de se faire entendre, aux corps de se laisser regarder, on l’oublie par conséquent aisément, et là est sans doute l’illusion ou l’erreur. En effet, ce qu’on prend ainsi trop facilement pour l’ouverture d’une scène n’en est pas moins un panneau déformant, un invisible et impalpable voile opaque qui joue vers les trois autres côtés la fonction d’un miroir ou d’un réflecteur et vers l’extérieur (c’est-à-dire vers le spectateur possible mais par conséquent toujours repoussé, multiple) le rôle d’un révélateur négatif où les inscriptions produites simultanément sur les autres plans apparaissent là inversées, redressées, fixes. » Nombres P. Sollers. Parvenu là dans la pièce, il s’asseoit encore une fois à sa table ronde, il a prit soin auparavant d’ouvrir la fenêtre. Parvenu ici dans la chambre, il ouvre la fenêtre en grand puis s’asseoit à la table rectangulaire pour écrire sur un cahier d’écolier. Il referme soigneusement la porte de la chambre, se dirige vers le mur nord, ouvre la fenêtre qui donne sur un mur aveugle, puis il s’asseoit à sa table, ouvre son cahier d’écolier, la main qui tient le crayon en suspens. Il relève la tête, son regard se dirige vers la fenêtre. Au delà de celle-ci, au-dessus du mur aveugle, un rectangle de ciel bleu. « D’après un passage des Rites de Tsheou, le magistrat chargé de la surintendance de la divination avait dans ses attributions la surveillance des règles posées par les trois livres appelés Yi, ou des Changements. Le premier de ces trois livres était intitulé Lien shan, Chaîne des montagnes, c’est-à-dire succession ininterrompue de montagnes. Ce titre provenait de la classification adoptée des hexagrammes, dont le premier figurait « la montagne sur la montagne » ; le symbole adopté était les nuages émanant des montagnes. Le second était intitulé Kouei mang, Retour et Concèlement, parce qu’il n’était aucune question qui ne pût y être ramenée et que toutes s’y trouvaient cachées et contenues. Le dernier avait pour titre Tsheou [1] yi, Changements dans la révolution circulaire, ce qui exprimait que la doctrine du livre des changements s’étend à tout et embrasse toutes choses dans son orbe. Cette explication des titres de ces trois ouvrages est personnelle à son auteur et n’est appuyée sur aucun texte faisant autorité ; elle n’est plus admise par personne ; je la crois cependant plus près de la vérité que les autres, qui vont suivre. » Yi King P.- L.- F. PHILASTRE (1881) Alternance du récit et du commentaire. Trois pans à l’imparfait et un bloc au présent en italique, à la façon d’une note de bas de page directement incluse dans le fil du récit. Si on dispose de blocs supplémentaire autre que par convention quatre, on sort alors du carré, d’un espace à quatre dimensions – on sort de quelque chose de connu. En Chine les nombres ont plus un pouvoir descriptif servant à situer plus qu’à compter. D’ailleurs à l’origine quand on place des cailloux dans un sac dans la méthode dite terme à terme, on réalise moins un calcul qu’une situation. Il se trouve que dix moutons sont remplacés par des cailloux, l’affaire est dans le sac. Le chiffre cinq marque un passage chez les mayas, après l’inscription de points on parvient à une ligne d’horizon. Ensuite tout ce qui se situe au-dessus de l’horizon, six sept huit neuf traite d’une aventure génétique. C’est à dire d’une évolution, jusqu’à la décimale, le neuf étant l’ultime étape de la série- quelque chose se renouvelant. L’effort de faire des petits paquets de dix pour s’aventurer dans l’inconnu que représente l’innombrable. Et aussi ces carrés- calqués sur ceux de la page de ce cahier d’écolier- que l’on dessine, dont on renforce les contours, enfant , en ajoutant des diagonales et croix à l’intérieur. Dans un carré un flocon de neige. Sauf qu’on ne dépasse pas le huit- l’infini- ainsi. La méthodologie du carré barré est mieux adaptée pour parvenir à l’horizon d’un évènement ( cinq). Je compte sur mes dix doigts pour arriver à deux mains ( demain) mais difficile d’être carré, je tourne en rond. Cela vient-il du fait que je suis plus constitué de temps que d’espace ? La notion d’empan- la largeur de la main, la largeur de l’esprit, directement reliée aux nombres. Ce blocage vis à vis des mathématiques, des chiffres et des nombres, provient- c’est l’histoire qu’il s’inventa- d’un passage intempestif de l’arithmétique à l’algèbre. Mais peut-être que c’est faux, qu’au delà de cette invention, il cherche à réutiliser les chiffres comme le font les chinois, les anciennes civilisations. Non pour calculer des sommes, des profits, mais pour simultanément situer l’existence des choses et des êtres qui l’entourent et lui-même vis à vis de ces choses et de ces êtres. Pour tenter d’élucider la quadrature du cercle. Le cercle du temps inscrit dans le carré de l’espace et vice versa. Peut-être se disait-il : le hasard n’est qu’un synonyme de ce que représente les lois de la génétique. Dans le mot génétique, le génie, l’esprit, les eaux. Et cette réminiscence soudaine, à quel point les lois terrestres changent alors que la loi maritime ne change pas. L’idée que la mer est reposante en cela que les lois dans son espace restent immuables. Le fait que le profit s’empare du vocabulaire de l’eau. La banque dérivé de bank- berge, rive, canalise le flow, le flux, le contrôle. La délivrance d’une femme qui accouche et delivery la livraison d’un produit, le certificat de livraison et de naissance. Ainsi on passe d’une préoccupation de situer les choses dans le monde à leur comptabilité, à leur accumulation, à la propriété, au pouvoir. Et tout l’ésotérisme lié aux termes de droit et de comptabilité. Encore une fois les initiés et les ignorants. Les ignorants étant aussitôts exploités par les sachants. S’enfermer entre quatre murs pour écrire. La page blanche, un espace rectangulaire aussi, mais peut-être que celui qui écrit se confond avec l’un des côtés de ce rectangle, celui le plus proche du clavier, le côté bas de l’écran. Et cette image de F. qui dans une vidéo nous montre l’acquisition d’ un nouvel écran ( vertical ) supplémentaire. On peut donc imaginer qu’il y a bien un soucis de situation avant toute chose, avant toute réflexion. Le fait de ne pas réussir à s’installer- même temporairement- dans une situation crée une fatigue, une érosion, une usure. Avoir de la suite dans les idées, expression en relation avec ce mot de situation. Où est-ce que je me situe dans la suite de ces idées, dans le déploiement d’une seule de ces idées ? Si je n’arrive pas à le savoir, la fatigue me tombe dessus, une confusion s’installe, je baisse les bras d’avoir trop essayé de résoudre cette énigme sans disposer d’un savoir nécessaire à cette fin. C’est pour cette raison que le 1 est en début de série, le B A – BA. 1 engendre 2 qui ensemble engendrent le 3 etc. La mise à mort de la représentation doit se laisser représenter ; le refus du récit passe obligatoirement par le récit ( pileface.com) Encore une fois me voici perdu à la fin de cette séance d’écriture. Prise de conscience d’une surchage cognitive dans le texte qui est le reflet de celle présente dans ma caboche. Ce qui fait qu’au bout du compte suis crevé en imaginant la somme de travail encore à produire pour clarifier ces textes. En cela il ne s’agit que d’un gigantesque brouillon, un salmigondis. Cela n’apporte au monde qu’un peu plus de confusion dont il n’a pas besoin. Mais finalement si ce blogue, ce journal ne servent qu’à parvenir à cette prise de conscience ce ne serait pas si tragique. A ce moment là une source possible de la fatigue vient de cette surcharge déposée par l’écriture dans l’écriture. Peut-être qu’une période de calme, de silence est la suite logique de ce mouvement. Jusqu’à ce que l’écriture reprenne, débarrassée d’un trop plein, du fantasme de l’infini, proche d’une toute puissance, laissant place à un espoir de clarté.|couper{180}
