Enfin osé recopier tous les textes écrits durant l’atelier pour les coller dans le modèle offert par F. Cependant, les ai ajoutés à la suite de cet essai sur la fatigue. Au total, un bien long document de 310 pages, divisé en 49 chapitres. Qu’en faire maintenant ? Je ne vais certainement pas envoyer ça. Plusieurs idées me viennent pour utiliser cette matière. D’abord, j’ai pensé relire l’ensemble pour élaguer un peu les passages trop personnels, supprimer les redites, corriger à nouveau l’orthographe, la grammaire, la ponctuation, essayer au maximum de rester au présent de l’indicatif. À partir de là, créer un PDF et publier ce document sur Amazon tel quel, de façon à obtenir un ISBN. Je crois qu’ensuite, on peut modifier le manuscrit et le rééditer autant de fois qu’on le veut à condition de ne pas changer le titre, voire la couverture (à vérifier). Cela me fera un livre que je pourrai ensuite commander pour moi seul, et à partir de cet objet à portée de main, si je peux dire, le feuilleter autant que je le veux pour en extraire des passages – ce serait donc ça le vrai livre ensuite, quelque chose de réduit, d’épuré. Je me rends compte que les titres des chapitres ne fonctionnent pas du tout. Réfléchir à cette table des matières est un véritable travail, car cela demande de relire et relire encore jusqu’à trouver une cohérence, une logique interne des différents fragments qui m’échappe encore. Je ne peux m’appuyer pour l’instant que sur cette idée vague, la thématique de la fatigue. Laisser reposer peut aussi être une option. Laisser ce texte tel quel et passer à autre chose. Trouver un autre terme que la fatigue, qui, à force de me le ressasser, finit par tout envahir. Or, la rentrée arrive, il me faut revenir à la préparation des cours et des ateliers. La retraite n’étant pas encore validée, il faut toujours penser à l’argent, aux factures, etc.

L’art de me mettre tout seul des bâtons dans les roues, il faut creuser ça. Cela fait deux ans que je retarde le moment de prendre cette retraite, que je me trouve un tas de mauvaises raisons pour traîner, reporter, rater la rédaction notamment de ce fameux dossier. En fait, que peut-il bien y avoir après la retraite ? Pas grand-chose, me serine une voix intérieure. Les jeux sont faits, plus qu’à préparer la fin. Ce qui est grotesque, évidemment. Mais si grotesque cela soit, ça continue à se dire en tâche de fond : la retraite puis la mort, point final. Comme si je n’allais plus rien faire une fois que j’aurais mis le doigt dedans. L’engrenage, une image de moulin écrabouillant du grain ou des olives. Ne subsiste qu’une idée d’essence, cette affreuse notion de l’essentiel comme toujours. Un essentiel qui viendrait de la vie en absence de toute volonté de ma part.

J’écris mal, la concentration n’est déjà plus la même, sensation de fatigue accompagnée de négligence, et, en même temps, sans savoir si c’est bien ou mal, une absence de pudeur, de précaution.Un laisser aller ? -Peut-être une forme encore larvée de cette urgence qui n’a jamais cessée depuis mes tout premiers jours et contre quoi je ne dispose que de l’inertie et de cette étrange forme de paresse pour y résister.

Dans cinq jours, un cycle complet, 365 jours durant lesquels – chaque jour – un texte aura été publié sur ce site. Cinq jours, le temps de rédiger sans doute une conclusion et de pénétrer vraiment dans le travail. Il faut que j’arrive à mieux m’organiser, à trouver une place pour continuer le journal si j’estime encore en avoir besoin, et parallèlement m’enfoncer dans plus de discrétion, plus de silence pour vraiment écrire cet essai sur la fatigue, aller peut-être au bout du bout de cette fatigue qui me conduit déjà, je le sens, à un autre degré de solitude.

lecture de cet article sur Diacritik : Parfois, je veux juste toucher – Chroniques, 2024 (14)Lecture d’un article de G.B sur le site « diacritik » juste après avoir écrit ce texte. Ce qui me donne immédiatement envie de me rendre à la salle de bain et de me tirer la langue.

Dernier voyage à I. pour remettre la clef. Reconnaitre les visages, un effort, et plus encore de placer un nom dessus. Attéré par la vitesse à laquelle l’oubli progresse. Ou alors autre hypothèse il se passe tant de choses à la seconde dans ma caboche que pas la possibilité de conserver la mémoire, ou encore plus rien du tout ne m’intéresse vraiment, je ne retiens plus rien. Prisonnier en soi-même. Comme le génie de la lampe d’Aladin. Mon père était ainsi, refusant de voir les gens, il les jaugeait en moins de cinq secondes, puis leur tournait le dos. Il m’avait jaugé ainsi depuis belle lurette. Aujourd’hui ne peux rien faire d’autre que lui donner raison. Génie et génétique, ou encore selon l’expression habituelle là où il y a de la gène etc.

De plus en plus de mal en tous cas à faire semblant, à faire comme si tout était normal. A partir de ce constat deux solutions, tourner les talons dès que je sens l’agacement monter ou bien -si vraiment je ne peux faire autrement – montrer que je suis l’individu le plus ridicule que je connaisse pour qu’eux tournent les talons.