Se disperser n’est pas jouer. Mais quelle fatigue. Physique. Se traîner n’est pas vivre. Hier, S. s’apitoie et me dit : « Annulons Madrid. » Puis, tout de suite après : « Tant pis, on perdra les billets pour le musée. » Ce qui, forcément, me fait réagir : « Mais non, allons déjà en Avignon en juillet, on verra ensuite. » Ce n’est pas parce que moi, j’ai envie de rien qu’il faut en faire un programme. À certaines périodes, il faut aussi accepter que d’autres puissent avoir envie de quelque chose. Tout ça n’est pas égal. Je suis retourné chercher la mallette à 13 000 euros à la clinique du sommeil. J’ai patienté derrière la porte bleue et j’ai tout de suite vu le tableau. Un petit tableau qui cache, je le sais désormais — comme je le savais à ma première visite — un trou dans le mur. « Vous avez récupéré le tableau ? » je demande au toubib. « Non, j’en ai acheté un autre », me répond-il en me rendant ma carte Vitale. Puis, après un silence : « On ne demande pas de caution pour les mallettes, mais lisez attentivement le mode d’emploi. » Ce sur quoi : « Ça fera vingt-quatre euros. » Et toujours pas de sans-fil, il faut se souvenir du code. Cette fois, je m’en souviens du premier coup. Mais tout est en désordre. Dans ce texte, rien ne colle comme d’habitude. Ça ne prend pas. Peut-être même que ça rebute. Faudrait demander, mais on sait très bien comment ça finit quand on demande : l’un dit blanc, l’autre noir, un troisième dit gris. Et voilà. Et tout à coup, en déchargeant la Dacia Logan DCI, je vois le pneu à plat. C’est parti. Morceau de bravoure. Tu mimes la panique à la perfection. C’est la fatigue qui veut ça, et surtout l’envie de rien — et en priorité l’envie que ça crève quand t’as rien demandé. Mais peut-être que quelqu’un, tout au fond, le demande. Ça pourrait être plausible. Un qui ne dit rien. Il ne dit rien, mais à un moment ça suffit, et on se retrouve avec une crevaison. « Attends », que je dis, « tu ne vas pas le croire : j’ai une bombe anti-crevaison qui traîne dans le coffre depuis... je ne sais pas quand. 2020. » Mais on peut aussi appeler l’assurance, parce que je ne sais pas retirer cette roue de secours. Et où est passé le cric ? Tu le sais ? Moi, non. Et la fatigue qui tape en même temps que le soleil, déjà dès 10 h du matin. Nous irons au garage, et j’en passe. Puis payer les sous pour effectuer la réparation, afin de revenir au garage et valider le C.T. avant le 5 juillet, rappelle-toi. « Et vous comptez partir en Avignon avec ça, à quatre ? » — « Oui m’sieur. » On est dans le même état, à peu près tous : des zombies dans un véhicule fantôme. Il appuiera sur la pédale d’accélérateur à fond, on ouvrira les fenêtres en grand, et on passera de vieux CD en poussant le volume. En attendant, on est encore en juin. On n’a même pas franchi la moitié. Il faut que j’aille rendre la mallette. Ça ne m’a pas fait grand-chose, de dormir — le peu que j’ai dormi — avec du plastique dans le nez. C’est sans doute raté pour aujourd’hui. Une fois de plus. Tu t’es encore mis à parler de quelque chose alors que tu ne voulais parler de rien. Mais la prise de conscience arrive vite, presque instantanément. Dans le texte même, au moment où il te mène par le bout du nez. Puis se demander si tout doit être traduit systématiquement. En anglais notamment. Probablement que non. Car il faut bien plus qu’une IA pour traduire certaines parties de ce texte sans que ça ne devienne ridicule. Hier j’ai laissé « la position du soldat », alors que je voulais écrire « en chien de fusil ». Sauf que même si je peux y voir un vague rapport, le soldat recroquevillé dans un trou en attendant que ça passe, ce n’est pas tout à fait la même idée que chien de fusil. Donc ce texte demande une traduction plus « artisanale » si artisanale veut dire peine et temps pour un résultat juste. Pas de traduction aujourd’hui.